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18/05/2020 | FRANCE | N°17/04142

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 18 mai 2020, 17/04142


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 MAI 2020



N° RG 17/04142

N° Portalis DBV3-V-B7B-RYL4



AFFAIRE :



[F] [C]





C/



SAS FUJIFILM FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Juillet 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 14/02473



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Sandrine BEZARD



Me Nicolas SAUVAGE







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX HUIT MAI DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt sui...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 MAI 2020

N° RG 17/04142

N° Portalis DBV3-V-B7B-RYL4

AFFAIRE :

[F] [C]

C/

SAS FUJIFILM FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Juillet 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 14/02473

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Sandrine BEZARD

Me Nicolas SAUVAGE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT MAI DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 22 avril 2020 puis prorogé au 18 mai 2020, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame [F] [C]

née le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Sandrine BEZARD, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 394

APPELANTE

****************

SAS FUJIFILM FRANCE

N° SIRET : 412 838 526

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Nicolas SAUVAGE de la SELAS SEA AVOCATS, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2240

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 Février 2020, Madame Clotilde MAUGENDRE, présidente, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Madame Evelyne SIRE-MARIN, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

Par jugement du 24 juillet 2017, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section encadrement) a:

- dit que le licenciement de Mme [F] [C] repose sur une faute grave,

- débouté Mme [C] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la SAS Fujifilm France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- mis les dépens à la charge de Mme [C].

Par déclaration adressée au greffe le 2 août 2017, Mme [C] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 7 janvier 2020.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 6 janvier 2020, Mme [C] demande à la cour de :

- la recevoir en son appel,

- l'y déclarer bien fondée,

- infirmer la décision déférée,

et statuant à nouveau,

- dire sans cause réelle et sérieuse son licenciement notifié par la société Fujifilm selon lettre en date du 25 juillet 2014,

- condamner la société Fujifilm à lui verser :

. 6 956,25 euros brut à titre de rappel de salaire pendant la période de mise à pied, outre l'incidence congés payés à hauteur de 695,62 euros brut,

. 13 912,50 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre l'incidence congés payés à hauteur de 1 391,25 euros brut,

. 22 356,54 euros net à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 1 756,71 euros brut à titre de prorata de 13ème mois,

. 6 666,67 euros brut à titre de prime pour l'exercice 2014,

- dire que ces condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 7 août 2014 et ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamner en outre la société Fujifilm à lui verser les sommes suivantes :

. 221 620 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 35 000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct subi en raison de la rupture vexatoire du contrat de travail,

- condamner enfin la société Fujifilm à procéder à l'affichage de la décision à intervenir dans les locaux de l'entreprise, sur le tableau d'affichage destiné à l'information du personnel, dans le délai de quinze jours suivant la notification du jugement, sous astreinte, passé ce délai, de 150 euros par jour de retard,

en tout état de cause,

- condamner la société Fujifilm au paiement de la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Fujifilm aux entiers dépens.

La SAS Fujifilm France a constitué avocat mais n'a pas déposé de conclusions.

LA COUR,

Sur la procédure,

En application de l'article 954 du code de procédure civile stipule, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

La cour d'appel qui n'est pas saisie de conclusions par l'intimé doit, pour statuer sur l'appel, examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance.

Au fond,

La société Fujifilm France est une filiale du groupe Fujifilm. Elle est spécialisée dans la commercialisation et la maintenance de tous les produits se rapportant à l'imagerie médicale, principalement de la marque Fujifilm, utilisés en radiologie et en endoscopie.

Mme [C] a été engagée par la société Fuji Medical Systemes France, devenue Fujifilm France, en qualité d'assistante de direction, par contrat à durée indéterminée du 30 octobre 2000.

En dernier lieu, elle occupait un poste d'assistante de direction auprès du directeur générale M. [X] et de responsable administration commerciale et percevait une rémunération moyenne brute de 5 832,14 euros.

Par lettre du 11 juin 2014, remise en main propre contre récépissé, Mme [C] a été mise à pied à titre conservatoire et convoquée à un entretien préalable fixé au 23 juin 2014.

Par courrier du 11 juillet 2014, pour pouvoir entendre Mme [C] sur des faits nouveaux, la société Fujifilm France a convoqué Mme [C] à un nouvel entretien préalable fixé le 21 juillet 2014.

Mme [C] a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception du 25 juillet 2014 ainsi libellée :

' (...)

Fin mars 2014, la protestation d'un client sur un bon de commande nous a conduit à initier une enquête interne qui a abouti à la découverte de fraudes suffisamment graves pour entraîner votre mise à pied conservatoire ainsi que celle de votre responsable hiérarchique, Monsieur [X], et d'un de vos collègues, Monsieur [B].

Par lettre du 11 juin 2014, vous avez été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif disciplinaire prévu le 23 juin 2014. Lors de cet entretien, auquel vous étiez assistée par Monsieur [M] [U], représentant du personnel, nous vous avons présenté les griefs retenus à votre encontre, griefs que vous avez contestés.

Pendant votre mise à pied conservatoire, nous avons pu, pour la première fois depuis des années, accéder librement à votre bureau et à celui de Monsieur [X].

Les dizaines de documents que nous avons alors exhumés ont mis à jour une organisation frauduleuse de grande envergure qui a nécessité plusieurs semaines d'enquête interne de la part de la direction financière de la société et a entraîné votre convocation, par lettre du 11 juillet 2014, à un second entretien préalable prévu le 21 juillet 2014 pour vous exposer les faits nouveaux que vous avez choisi de ne pas entendre.

La mise à pied conservatoire prononcée à votre encontre et à l'encontre de vos deux collègues a par ailleurs permis à de nombreux salariés, de venir spontanément révéler à la direction certains de vos faits frauduleux. Elle a, en outre, incité de nombreux clients à formuler des réclamations.

Cette enquête déjà très avancée se poursuivra fin août - début septembre pour mesurer l'ampleur des conséquences de vos manquements pour la société.

Cependant, au vu de la nature des faits qui vous sont reprochés et de leurs conséquences connues à ce jour, nous sommes d'ores et déjà contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave.

Ces faits sont les suivants :

1. Vous avez résisté, depuis l'acquisition de notre société par le groupe Fuji, à l'utilisation du module devis du logiciel SAP en maintenant, à dessein, des procédures archaïques de traitement des prises de commande. Le logiciel déployé vise à tracer les commandes clients depuis le bon de commande jusqu'à l'encaissement des factures. C'est d'autant plus inquiétant que l'attribution et le suivi des accès SAP pour chaque salarié figure dans votre définition de poste, ce qui devait immanquablement retenir votre attention quant à l'utilité essentielle de cet ERP dans nos process de contrôle.

Ce refus délibéré de faire respecter et de respecter vous-même l'utilisation de SAP a permis un traitement opaque et frauduleux de ventes de matériels qui a profité à certains clients complices et à certains salariés de la société.

2. Vous avez participé avec Monsieur [X] et Monsieur [B] à la falsification de bons de commandes surévalués.

Ces falsifications permettaient à Monsieur [B] d'atteindre ses objectifs personnels, lui ouvrant ainsi droit à une rémunération indue et à Monsieur [X] d'atteindre artificiellement ses objectifs sur la division « Modalité ».

Votre participation à ces falsifications consistait à communiquer mensuellement un tableau récapitulatif des commandes obtenues par chaque commercial. L'absence d'utilisation de SAP et d'informatisation de l'intégralité du traitement de la commande vous permettait en effet de comptabiliser tous les bons de commandes sans les confronter aux factures ultérieurement émises.

Aucun contrôle de cohérence ne pouvait d'ailleurs être effectué par la direction financière à laquelle vous vous gardiez bien de fournir les bases de calcul permettant d'aboutir au tableau précité. Et comme vous dissimuliez dans votre bureau ou celui de M. [X] de nombreux bons de commandes jamais saisis dans SAP, vous étiez quasi libre de mentionner les chiffres imaginaires sur ce tableau servant aux calculs des rémunérations variables.

Comme évoqué ci-dessus, de nombreux clients ayant appris par le marché la mesure conservatoire prise à votre égard et à rencontre de Monsieur [X] et de Monsieur [B], ont formé des réclamations pour obtenir des avoirs sur des factures litigieuses basées sur ces bons de commandes falsifiés.

3. Vous avez cherché à dissimuler ces falsifications en omettant volontairement de renvoyer à plusieurs clients l'un des trois exemplaires du bon qui lui était destiné. En effet, et à notre plus grande stupéfaction, nous avons découvert lors de nos recherches, en ouvrant vos propres armoires, que certains bons de commande signés par les clients, s'y trouvaient empilés depuis des mois. Certains comportaient encore leurs 3 feuillets d'origine auto-carbonés, aucun n'ayant donc été renvoyé aux clients avec la signature matérialisant l'accord de la société. Or, le bon de commande accepté par l'entreprise est le seul acte juridique permettant d'engager le client à ce qu'il achète le matériel concerné. Certains ne comportaient même pas la signature de la Direction que ce fut celle de M. [X] ou la vôtre.

4. Vous avez également dissimulé la falsification des bons de commandes en faisant donner instruction d'émettre des avoirs au profit de clients à hauteur de centaines de milliers d'euros lorsque la facture émise sur la base des bons de commandes falsifiés ne correspondait pas à la réalité de la commande du client, et pour tenter d'éteindre les protestations de ces derniers, dissimulation qui a longtemps fonctionné jusqu'à ce cas révélé fin mars 2014. Tout ceci démontre un épouvantable mépris des règles élémentaires de probité que l'on était en droit d'attendre de vous, eu égard à vos fonctions éminentes au sein de la Direction commerciale de FMSF.

5. Enfin, vous avez manqué délibérément à votre obligation de loyauté à l'égard de FMSF à plusieurs reprises, notamment en assistant un des directeurs de zones à rédiger un courrier contre FMSF par lequel il contestait un avertissement que je lui avais personnellement notifié. Également, en dissimulant pendant des années les irrégularités que vous ne pouviez pas ne pas avoir remarquées, sans jamais informer la Direction générale, depuis 3 ans que je la dirige ni mes prédécesseurs à ce poste. A cet égard, il est navrant qu'ayant eu tous les bons de commandes en main, à un moment ou à un autre, à raison d'environ 6 à 8 par semaine, vous ne vous soyez pas alarmée du sort des matériels d'occasion qui ne réapparaissaient jamais chez FMSF, ni n'étaient revendus par notre société à des réseaux de brokers. C'est pourquoi, nous n'écartons pas la possibilité que la suite de l'investigation -encore en cours sur ce point - mette à jour un trafic de matériels d'occasion dont vous auriez directement ou indirectement profité.

La gravité des agissements mentionnés ci-dessus, la déloyauté persistante qu'ils matérialisent et l'importance du préjudice causé à la société tant en terme financier qu'en terme d'image, ne peuvent vous échapper. Aussi, vous comprendrez que nous ne puissions tolérer un tel comportement plus longtemps.

Dans ce contexte, il nous est impossible de poursuivre toute collaboration avec vous. Nous vous notifions votre licenciement pour faute grave.

(...) '

Par requête enregistrée le 4 août 2014, Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de contester son licenciement et obtenir paiement de diverses sommes.

Sur la rupture :

Mme [C] expose que pendant près de 14 ans elle a exécuté son contrat de travail sans aucune difficulté.

Elle explique qu'à l'automne 2013 la direction a demandé à M. [X], directeur général de la société, de mettre en place au sein de l'entreprise un plan de réorganisation assorti d'un plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant la suppression de 52 postes sur un effectif de 263 salariés, que le 1er juin 2014 tous les projets étaient finalisés et que la nouvelle organisation devait être mise en place à compter du 1er septembre 2014, date de la notification des licenciements.

Elle ajoute que son poste ne figurant pas dans la nouvelle organisation elle devait être licenciée dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi mais que, brutalement, sans le moindre motif, le contrat de travail de M. [X], directeur général, et le sien ont été rompus.

Mme [C] conteste fermement l'ensemble des griefs figurant dans la lettre de licenciement et se prévaut de l'irrégularité de la procédure de licenciement.

L'article L. 1332-2 du code du travail, sans sa version applicable à l'espèce, prévoit qu'une sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien.

Le délai d'un mois imparti à l'employeur pour notifier la sanction est impératif.

En l'espèce, la salariée a été convoquée à deux entretiens préalables fixés les 23 juin et 21 juillet 2014 et le licenciement a été notifié le 25 juillet 2014, plus d'un mois après le premier entretien mais moins d'un mois après le second.

Le jugement, pour décider que la procédure était régulière, a retenu que la poursuite de l'enquête

avait permis la découverte de nouveaux faits qui devaient être présentés à la salariée dans le cadre d'un nouvel entretien préalable, lequel avait eu lieu dans le délai d'un mois après le premier entretien.

Pour ce faire, il a précisé que l'enquête avait révélé au moins sept autres fraudes en plus de celles évoquées lors du premier entretien.

Le compte-rendu de l'entretien préalable du 23 juin 2014, signé du délégué syndical qui a assisté Mme [C], ne relate que des griefs vagues et la présentation par la direction de différentes copies de documents censés mettre en évidence des falsifications.

Les pièces de l'employeur produites en première instance, que la salariée communique devant la cour, synthèse des entretiens des 12 et 16 mai 2014, synthèse de l'audit mené au siège à [Localité 6] du 16 au 18 juin 2014, deux attestations de salariés ne mentionnant pas de dates de découverte des faits, rapport d'audit du Cabinet Ernst & Young du 16 octobre 2014, contrats de maintenance ne mettent pas en évidence la découverte de faits nouveaux entre le 23 juin et le 21 juillet 2014.

Ainsi, faute d'avoir été notifié dans le délai d'un mois après le premier entretien préalable, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Mme [C] qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable à l'espèce, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement.

Au regard de son âge au moment du licenciement, 63 ans, de son ancienneté d'environ 14 ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de ce qu'elle établit que le poste de responsable administrative et commerciale a été supprimé et qu'elle a donc été privée du bénéfice du plan de sauvegarde de l'emploi qui prévoyait à 14 ans d'ancienneté une indemnité globale de licenciement de 22,5 mois, comprenant l'indemnité conventionnelle de licenciement, et de la possibilité d'un congé de reclassement de 12 mois, mais prenant en compte qu'elle était en mesure de faire valoir ses droits à la retraite et a perçu à partir du 1er septembre 2014 une retraite de 2 654,65 euros , il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi, la somme de 150 000 euros.

La société Fujifilm France sera également condamnée à verser à la salariée un rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire, une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents dont elle a été indûment privée et qui ont été correctement calculés.

Elle sera aussi condamnée à payer à la salariée le prorata du 13 ème mois sur la période de préavis et de la prime annuelle qui lui était versée chaque année au mois de décembre, ainsi qu'elle en justifie.

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Sur les dommages et intérêts pour rupture vexatoire :

Mme [C] soutient que les termes de la lettre de licenciement sont indignes et injurieux, qu'elle a été mise à pied et sortie de l'entreprise quasi ' manu militari ', mise ainsi dans l'impossibilité de dire au revoir à ses collaborateurs et qu'elle a été convoquée au pôle financier de la police judiciaire.

Elle affirme que son état de santé a été affecté et produit un certificat médical du 26 juin 2014 du docteur [Y] qui atteste l'avoir reçue le 16 juin 2014 et avoir constaté qu'elle présentait un état de sidération et d'angoisse lié à la situation professionnelle qu'elle venait de vivre.

Les accusations dont Mme [C] a fait l'objet, qui n'ont pas donné lieu à des poursuites pénales, et le caractère brutal de son éviction après 14 ans de relation contractuelle ont causé à la salariée un préjudice distinct de celui résultant de la rupture du contrat de travail qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 5 000 euros.

Sur l'affichage de la décision dans les locaux de l'entreprise :

Il n'y pas lieu de faire droit à la demande d'affichage formulée par Mme [C], qui n'en précise d'ailleurs pas le fondement juridique.

Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est inéquitable de laisser à la charge de Mme [C] les frais par elle exposés non compris dans les dépens à hauteur de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS:

Statuant publiquement et contradictoirement,

en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Fujifilm France à payer à Mme [F] [C] les sommes suivantes :

. 150 000 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 5 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour rupture vexatoire,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

. 6 956,25 euros brut à titre de rappel de salaire pendant la période de mise à pied, outre l'incidence congés payés à hauteur de 695,62 euros brut,

. 13 912,50 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre l'incidence congés payés à hauteur de 1 391,25 euros brut,

. 22 356,54 euros net à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 1 756,71 euros brut à titre de prorata de 13ème mois,

. 6 666,67 euros brut à titre de prime pour l'exercice 2014,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation,

DIT que les intérêts échus des capitaux porteront eux- mêmes intérêts au taux légal dès lors qu'ils seront dus pour une année entière à compter de la demande qui en a été faite,

ORDONNE d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société Fujifilm France à payer à Mme [C] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

DÉBOUTE la société Fujifilm France de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Fujifilm France aux entiers dépens.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Clotilde Maugendre, présidente et par Madame Dorothée Marcinek, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

                                                                                                             

La greffière La présidente

Dorothée Marcinek, Clotilde Maugendre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 17/04142
Date de la décision : 18/05/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°17/04142 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-18;17.04142 ?
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