La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/03/2020 | FRANCE | N°18/08325

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 19 mars 2020, 18/08325


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 30B



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 MARS 2020



N° RG 18/08325 - N° Portalis DBV3-V-B7C-S2LJ



AFFAIRE :



SA SEMCADD





C/

SA AEDS











Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 05 Décembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 18/02619



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Vincent THEVENET Me François SOUCHON





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30B

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 MARS 2020

N° RG 18/08325 - N° Portalis DBV3-V-B7C-S2LJ

AFFAIRE :

SA SEMCADD

C/

SA AEDS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 05 Décembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 18/02619

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Vincent THEVENET Me François SOUCHON

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA SEMCADD

N° SIRET : 500 556 071

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : Me Vincent THEVENET de la SELARL THEVENET VINCENT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 608 - N° du dossier 2018/7

APPELANTE

****************

SA AEDS

N° SIRET : 453 087 603

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentant : Me François SOUCHON de la SCP SOUCHON CATTE LOUIS PLAINGUET, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000061 - N° du dossier 2150210

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Janvier 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte sous seing privé en date du 1er décembre 2014, la société Semcadd, société d'économie mixte de construction d'aménagement et de développement du [Localité 2] gestionnaire du parc industriel de la ville de [Localité 1], a donné à bail commercial à la société AEDS, avec effet au 1er juin 2015 et pour une durée de neuf années entières et consécutives, un ensemble immobilier constitué d'un local dénommé « D2a » d'une superficie de 546 m² localisé au 2ème étage du bâtiment D/E du parc d'entreprise La Radio situé [Adresse 2].

Le 28 août 2015, la société Semcadd a transmis à la société AEDS une offre de bail finalisée portant sur la location de locaux au rez-de-chaussée et au 1er étage du même bâtiment DE.

Par courrier du 16 septembre 2015, la société AEDS a avisé la société Semcadd de ce qu'elle mettait fin au projet et à l'implantation de sa société sur le site de La Radio.

Le 30 septembre 2015, la société Semcadd a renouvelé sa proposition d'un nouveau bail pour des locaux au rez-de-chaussée, ce qui n'a pas été accepté par l'assemblée générale extraordinaire de la société AEDS du 28 octobre 2015.

Après des échanges entre les parties demeurés infructueux, la société Semcadd a fait délivrer le 14 février 2017 à la société AEDS un commandement de payer la somme de 78 731,94 euros au titre du dépôt de garantie de 6 212,50 euros, et des loyers de juin 2015 au 1er trimestre 2017, visant la clause résolutoire insérée au bail.

La société Semcadd a ensuite fait assigner le 19 avril 2017 la société AEDS devant le tribunal de grande instance de Chartres en acquisition au 15 mars 2017 de la clause résolutoire incluse au bail et en paiement des loyers échus.

Par jugement du 7 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Chartres a:

- prononcé la résiliation du contrat de bail conclu le 1er décembre 2014 entre la société Semcadd, société d'économie mixte sous forme de société anonyme, et la société anonyme AEDS, à la date du 1er Décembre 2014 et ce aux torts exclusifs de la société Semcadd ;

- rejeté l'ensemble des demandes formées par la société Semcadd , société d'Economie Mixte sous forme de société anonyme ;.

- condamné la société Semcadd, société d'Economie Mixte sous forme de société anonyme, à payer à la société anonyme AEDS, la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté la demande d'indemnité formulée par la société Semcadd société d'Economie Mixte sous forme de société anonyme, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Semcadd société d'Economie Mixte sous forme de société anonyme, aux entiers dépens de l'instance ;

- autorisé conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, la SCP Souchon Catte Louis & Associés, avocat, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

- rejeté le surplus des prétentions.

Par jugement rectificatif du 5 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Chartres a :

- ordonné la rectification de l'erreur matérielle commise dans le jugement rendu le 7 Novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Chartres en ce qu'il est ajouté au dispositif de ce jugement la mention suivante: "DIT que la société Semcadd devra restituer la somme de 6212,50 euros HT à la société AEDS SA correspondant au dépôt de garantie et au besoin l'y condamne" ;

- rejeté le surplus des prétentions ;

- dit que la décision rectificative sera mentionnée sur la minute et sur les expéditions de la décision rectifiée ;

- laissé les dépens de la présente à la charge du Trésor Public.

Le 10 décembre 2018, la société Semcadd a interjeté appel des deux jugements.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 11 décembre 2019, la société Semcadd, intervenant volontairement en lieu et place de la Communauté d'Agglomération du Pays de [Localité 1], communauté d'agglomération demande à la cour de :

- infirmer en toutes leurs dispositions les jugements rendus par le tribunal de grande

instance de Chartres les 7 novembre 2018 et 5 décembre 2018 et par conséquent :

- déclarer les demandes de la société Semcadd recevables et bien fondées,

Statuant à nouveau :

- Constater l'acquisition au 15 mars 2017 de la clause résolutoire prise au bail commercial du 1er décembre 2014 conclu entre la société Semcadd en qualité de bailleur et la société AEDS en qualité de preneur audit bail ;

- Condamner la société AEDS à lui verser la somme de 78 731,94 € au titre des factures de loyers échues pour les trimestres du 1er juin 2015 au 31 mars 2017 et du dépôt de garantie,

- Acter de ce que la Semcadd conservera le dépôt de garantie ainsi versé en application des stipulations de l'article 3.7 des conditions générales du bail,

- Condamner la société AEDS à lui verser la somme de 7 873,19 euros au titre de la clause pénale prévue à l'article 3.6 des conditions générales du bail du 1er décembre 2014 avec intérêts au taux légal en application de l'article 1231-7 du code civil et capitalisation à compter du 15 mars 2018 pour la première capitalisation et au 15 mars des années suivantes pour les capitalisations suivantes,

- Condamner la société AEDS à lui verser la somme de 108 705,96 euros au 31 décembre 2019 et à parfaire jusqu'à complet paiement, à raison de réparation du préjudice d'immobilisation des locaux et des loyers non perçus pour la période allant du 2 e trimestre 2017 au 31 décembre 2019 et restant à parfaire jusqu'à l'arrêt à intervenir à raison de 9 882,36 € par trimestre, et ce avec intérêts au taux légal en application de l'article 1 231-7 du code civil et capitalisation à compter du 15 mars 2018 pour la première capitalisation et au 15 mars des années suivantes pour les capitalisations suivantes,

- Condamner la société AEDS à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et mauvaise foi,

- Condamner la société AEDS à lui verser la somme de 10000 euros au titre de l'application de l'article 3.10 du bail du 1er décembre 2014,

- Condamner la société AEDS à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société AEDS aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 20 mai 2019, la société AEDS prie la cour de :

- la dire et juger recevable en ses demandes,

- confirmer en toutes ses dispositions les jugements rendus par le tribunal de grande instance de Chartres les 7 novembre et 5 décembre 2018,

- débouter la société Semcadd de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En tout état de cause:

- condamner la société Semcadd à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Semcadd à tous les dépens, qui seront recouvrés par la SCP Souchon-Catte- Louis- Plainguet représentée par Me Souchon en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux conclusions des parties conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 janvier 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour relève que si la Communauté d'Agglomération du Pays de [Localité 1], communauté d'agglomération en qualité d'autorité concédante est intervenue aux lieu et place de la société Semcadd, concessionnaire par conclusions notifiées le 13 novembre 2019, les dernières conclusions du 11 décembre 2019 qui seules la saisissent en application de l'article 954 du code de procédure civile sont faites par la société Semcadd, intervenant volontaire aux lieu et place de la Communauté d'Agglomération du Pays de [Localité 1], communauté d'agglomération.

Ainsi malgré un changement du nom du bailleur en cours de procédure, il s'avère au vu du protocole de résiliation transactionnelle de la concession d'aménagement du parc d'entreprises La Radio intervenue le 6 février 2019 entre les parties et des dispositions de l'acte notarié du 28 octobre 2019 par lesquelles la société Semcadd reste tenue de ses obligations antérieures que la société Semcadd, bailleresse initiale est toujours appelante dans la présente procédure, sans qu'il appartienne dès lors à la cour de lui donner acte de son intervention volontaire, étant déjà partie au jugement entrepris déféré à la cour et étant celle qui a interjeté appel des décisions.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et l'exception d'inexécution :

La société Semcadd soutient avoir rempli son obligation de délivrance des lieux loués, faisant valoir que ce sont seulement les nouveaux besoins immobiliers de la société AEDS qui sont à l'origine de sa demande de mettre un terme au bail du 1er décembre 2014, que la question de la résistance des planchers n'était qu'un prétexte pour négocier la prise à bail de locaux en sus de ceux déjà loués.

Elle ajoute que la société AEDS a signé le bail en toute connaissance des locaux loués, que la question des transtockeurs que la société locataire voulait installer n'a été initiée qu'après la conclusion du bail, qu'il n'est pas démontré que leur utilisation est nécessaire à son activité. Elle indique avoir essayé de satisfaire aux obligations du locataire après la conclusion bail uniquement dans un but commercial.

Elle conteste de ce fait l'exception d'inexécution soulevée par la société AEDS et s'estime fondée, au regard du non paiement des loyers depuis la date de la conclusion du bail de solliciter, au vu de la délivrance du commandement de payer, à demander l'acquisition de la clause résolutoire au 15 mars 2017.

En réplique, la société AEDS revendique la confirmation du jugement entrepris, faisant valoir que la bailleresse s'est affranchie de ses obligations nées de la loi du 18 juin 2014 et qu'elle a été dans l'incapacité de satisfaire à son obligation de délivrance conforme des locaux loués à son activité commerciale.

Estimant que la société Semcadd lui a loué des locaux inadaptés, la société AEDS soutient que l'exception d'inexécution soulevée est fondée. Elle ajoute que les travaux n'étant pas faits au 1er juin 2015, elle ne pouvait pas s'y installer, que d'ailleurs elle n'a pas eu les clés des locaux pour lesquels aucun état des lieux d'entrée n'a été établi. Elle fait valoir que la résiliation du bail doit être prononcée aux torts de la bailleresse, qui n'a pas respecté ses obligations.

****

L'article L.145-41 du code de commerce dispose que 'toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit à peine de nullité mentionner ce délai».

Faute d'avoir réglé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti à compter de sa délivrance et prévu au bail, le locataire ne peut remettre l'acquisition de la clause résolutoire sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer, l'existence de cette mauvaise foi devant s'apprécier lors de la délivrance de l'acte ou à une période contemporaine à celle-ci .

Le bail du 1er décembre 2014 indique sous l'intitulé clause résolutoire, qu'à défaut de paiement d'un seul terme de loyer, du montant des accessoires et du coût du commandement à son échéance ou d'une seule des conditions du bail et un mois après un simple commandement de payer, le bail sera résilié de plein droit si bon semble au bailleur.

S'il n'est pas contesté par la société AEDS qu'elle n'a pas réglé dans les délais impartis les causes du commandement de payer délivré le 14 février 2017, elle fait valoir que la bailleresse n'a pas respecté son obligation de délivrance de la chose louée et soulève en conséquence l'exception d'inexécution pour s'opposer à la demande d'acquisition de la clause résolutoire et solliciter la résiliation du bail commercial aux torts de la société Semcadd.

Aux termes de l'article 1719 du code civil, le bailleur est tenu de délivrer au preneur la chose louée.

En application de cet article, la délivrance doit porter sur la chose louée telle que celle-ci a été définie au bail et le preneur doit pouvoir exploiter le commerce prévu au bail. Ainsi l'obligation de délivrance qui pèse sur le bailleur lui impose de livrer des biens conformes à l'usage auquel ils sont destinés.

En l'occurrence, le bail conclu le 1er décembre 2014 entre la société Semcadd et la société AEDS porte sur un local D2a d'une superficie de 546 m²- comportant une superficie atelier de 494 m² et 56 m² de bureaux- localisée au 2ème étage du batiment D/E du parc d'entreprises La Radio, situé en zone franche urbaine à [Localité 1], étant précisé que «' un état des lieux sera effectué le jour de la prise de possession et de la remise des clés des locaux ci-dessus référencés. La Semcadd s'engage à réaliser les constructions selon les règles de l'art et en respectant le planning de livraison défini à l'article 2.1». Cet article intitulé «'durée'» indique que «' la date d'effet du présent bail est fixée au plus tard au 1er juin 2015 pour une durée de neuf ans et fera l'objet d'un avenant».

Au titre des conditions particulières du bail, il est mentionné sous l'article 1.2 «' destination-usage» que « le preneur pourra exercer dans le local des activités d'achat et de revente, négoce de pièces d'étanchéité à usage aéronautique en caoutchouc, composites, plastiques et drivés, de tous joins et produits se rapportant à l'étanchéité et de matériel se rapportant à la production de ces pièces.Toutes opérations et fournitures de solutions globales relatives à la vente de produits de commodités: pièces d'étanchéité, roulement, vis, ressorts. Et toutes pièces liées à l'activité de clients aéronautiques. Etudes et mise en 'uvre de solutions liées à la logistique, sous-traitance, formation aux études et assistance aux bureaux d'études, audit et formation à l'exclusion de toute autre utilisation. Le local faisant l'objet du présent bail sera affecté à l'usage exclusif de la société AEDS pour les activités autorisées ci-dessus».

La société Semcadd, bailleresse, était tenue par les termes du contrat conclu avec la société AEDS de lui délivrer un local lui permettant d'exploiter son activité de fabrication de pièces pour l'aéronautique, laquelle activité impliquant nécessairement l'utilisation de dispositifs ( transtockeurs) automatisés ou non permettant de ranger des palettes ou des colis dans un rack ( meuble de rangement).

Dès le mois de janvier 2015, la société AEDS posait à la bailleresse la question de la charge au sol pour les locaux et de l'usage d'un transtockeur, qu'en réponse la société Semcadd ( M.[S]) lui indiquait le 27 janvier 2015 que «concernant la charge au sol elle est de 500 kg par m² mais nous avons la possibilité de renforcer la dalle avec une portance allant à une tonne pour accueillir votre transtockeur», lui donnait les dimensions du monte charge dans l'atelier, et lui adressait le plan de son futur atelier.

Par courriel du 30 janvier 2015 à la société AEDS, M.[S] indiquait revenir vers elle pour l'aménagement de ses futurs locaux, précisant «il est très important que votre architecte rencontre notre bureau d'études qui est en charge de la réhabilitation globale du bâtiment. En effet, sur certains sujets essentiels comme l'installation de vos deux transtockeurs qui nécessitent une importante charge au sol, il faut impérativement que votre archi se coordonne avec notre bureau d'études pour qu'ils puissent positionner au bon endroit les deux éléments».

M.[U] de la société AEDS lui répond le 9 février 2015 : «je vous transfère jeudi le plan d'implantation de nos deux transtockeurs avec les contraintes au sol générées. Par contre, je suis quand même inquiet de la faible résistance annoncée pour le sol. En effet, nous avons à manutentionner journellement des palettes de 500 kg ( 800x1200) avec un microgerbeur qui lui-même pèse environ 700 kg et il s'agit de charge dynamique. Tout cela est-il compatible avec les caractéristiques du local'».

Il s'ensuit de ces échanges intervenus peu après la conclusion du bail, que s'est tout de suite posée aux parties la question de la résistance du sol des locaux loués (500 kg/m²) en raison de la nécessité pour la société AEDS d'utiliser pour son activité des transtockeurs et un microgerbeur, laquelle faisait donc bien partie des obligations inhérentes à la bailleresse.

Alors que la société Semcadd était sollicitée sur ces points et essayait de donner des réponses satisfaisantes à son locataire, elle ne peut pas utilement dire maintenant que la question de l'installation des transtockeurs ne concernait pas ce local loué au 2ème étage et que le premier juge a opéré une confusion avec les locaux du rez-de-chaussée, alors qu'en janvier 2015 ceux-ci ne faisaient pas alors l'objet d'un projet de location avec la société AEDS.

Ce n'est en effet que plus tard, à compter du courriel de M.[S] du 17 février 2015 qui a été adressé à M.[U] que la société Semcadd a envoyé un plan de l'atelier «'que nous vous proposons au rez-de-chaussée du bâtiment DE», et que des échanges s'en sont suivis entre les parties pour aboutir à la proposition en date du 28 août 2015 de M.[S] aux fins de «location nouvelle d'une superficie d'atelier de 2 485 m² au rez de chaussée, et des bureaux de 309,59 m au 1er étage», ce qui aurait conduit à la conclusion d'un avenant au bail déjà signé.

La société Semcadd n'apporte en outre aucun élément probant pour soutenir que la résistance des planchers était en fait un prétexte trouvé par la société AEDS pour négocier des locaux plus grands, d'autant qu'elle a elle-même essayé de répondre à sa demande, l'estimant dès lors fondée.

Il appartenait bien à la bailleresse de faire en sorte que les planchers des locaux loués au 2ème étage puissent supporter les charges des matériels utilisés par la société AEDS pour exercer son activité, telle que définie dans la destination du bail, d'autant qu'aux termes de l'article 5.3.1 des conditions générales du bail du 1er décembre 2014, le preneur ne pouvait pas faire supporter aux planchers une charge supérieure à leur résistance sous peine d'être tenu pour responsable des désordres ou accidents qui en seraient la conséquence.

La société Semcadd fait également valoir que dans le bail «le preneur a déclaré avoir parfaite connaissance des lieux pour les avoir visités».

Pour autant, cette clause au demeurant générale ne peut concerner en tout état de cause la structure même de la chose louée et n'exonère pas la société Semcadd de son obligation de délivrance. Or il résulte des développements précédents qu'était en cause la résistance des planchers donc la structure même du local, que de ce fait les locaux loués étaient impropres à la destination indiquée dans le bail, en ne permettant pas à la société AEDS d'exercer son activité, sans que la société Semcadd n'apporte pas la preuve du contraire.

Alors que le bail signé par les parties le 1er décembre 2014 mentionnait comme prise d'effet le 1er juin 2015, la société Semcadd ne justifie pas qu'à cette date elle était en mesure de délivrer à la société AEDS un local au 2ème étage conforme et une jouissance effective des locaux loués, ne produisant à cet effet en outre aucune pièce attestant de la remise des clés des lieux à la société AEDS ou de l'établissement d'un état des lieux d'entrée.

D'ailleurs à cette date elle était surtout en train d'essayer de louer à la société AEDS de nouveaux locaux au rez de chaussée - dont il s'avérait cependant par mail de M.[S] du 17 juillet 2015 que les nouveaux locaux ne seraient prêts qu'en janvier 2016- et elle a adressé le 28 août 2015 une nouvelle proposition pour ces locaux au rez de chaussée.

C'est dans ce contexte que le 16 septembre 2015, M.[U], président de la société AEDS, a écrit à M.[M] de la société Semcadd, pour lui faire part, au vu des difficultés rencontrées notamment dans le chiffrage des travaux, mettre fin au projet d'implantation de la société AEDS sur le site de la Radio. Le 17 septembre 2015, la société Semcadd s'étonnait de cette position, et indiquait que «'le dossier technique de votre projet et le projet de bail sont prêts'».

Cet échange de courriers porte sur le projet et la mise en 'uvre d'un nouveau bail entre les parties, ce qui montre que la société Semcadd reconnaît ainsi implicitement ne pas avoir délivré les locaux du 2ème étage objets du bail du 1er décembre 2014 à la société AEDS, ne sollicitant d'ailleurs à cette date nullement les loyers de ce bail mais disant seulement vouloir trouver un accord financier au regard du bail susvisé et des frais d'étude pour les frais d'aménagement de la société AEDS.

Il s'ensuit de ces développements que la société Semcadd n'a pas rempli son obligation de délivrance des locaux du 2ème étage, objets du bail du 1er décembre 2014, que dès lors face aux manquements de la bailleresse la société AEDS, qui n'a jamais pu entrer dans les lieux et en disposer, est fondée à soulever l'exception d'inexécution pour s'opposer à l'acquisition de la clause résolutoire pour non paiement des loyers.

C'est dès lors à bon droit que le premier juge a débouté la société Semcadd de sa demande d'acquisition de la clause résolutoire, et a prononcé la résiliation du bail au 1er décembre 2014 aux torts de la bailleresse, la société Semcadd, et a rejeté les demandes en paiement de la société Semcadd, qui ne sont pas justifiées.

Le jugement du 7 novembre 2018 sera confirmé en toutes ses dispositions, ainsi que le jugement rectificatif du 5 décembre 2018, lequel a condamné la société Semcadd à restituer le dépôt de garantie de 6212,50 euros à la société AEDS.

Sur les autres demandes :

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application.

En cause d'appel, il y a lieu de condamner la société Semcadd à verser à la société AEDS la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d'appel seront à la charge de la société Semcadd.

PAR CES MOTIFS LA COUR

Statuant par arrêt contradictoire

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Chartres et le jugement rectificatif en date du 5 décembre 2018,

Y ajoutant,

Condamne la société Semcadd à payer à la société AEDS la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Rejette les autres demandes des parties,

Condamne la société Semcadd aux dépens d'appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 18/08325
Date de la décision : 19/03/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 12, arrêt n°18/08325 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-03-19;18.08325 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award