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06/02/2020 | FRANCE | N°18/04791

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 06 février 2020, 18/04791


COUR D'APPEL


DE


VERSAILLES


Code nac : 89B





5e Chambre

















ARRET N°





RÉPUTÉ


CONTRADICTOIRE





DU 06 FÉVRIER 2020





N° RG 18/04791


N° Portalis DBV3-V-B7C-SZAC





AFFAIRE :





SAS ASTOTEL








C/


Q... Z...





CPAM DES HAUTS DE SEINE





Société ALLIANS IARD

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Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 23 Octobre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Nanterre


N° RG : 18-00166/N








Copies exécutoires délivrées à :





la SAS CABINET JELTY PICHAVANT





la SELARL LEVY ET ALVES DA COSTA





CPAM DES HAUTS DE SEINE





Société ALLIANS IARD





Copies cert...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89B

5e Chambre

ARRET N°

RÉPUTÉ

CONTRADICTOIRE

DU 06 FÉVRIER 2020

N° RG 18/04791

N° Portalis DBV3-V-B7C-SZAC

AFFAIRE :

SAS ASTOTEL

C/

Q... Z...

CPAM DES HAUTS DE SEINE

Société ALLIANS IARD

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 23 Octobre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Nanterre

N° RG : 18-00166/N

Copies exécutoires délivrées à :

la SAS CABINET JELTY PICHAVANT

la SELARL LEVY ET ALVES DA COSTA

CPAM DES HAUTS DE SEINE

Société ALLIANS IARD

Copies certifiées conformes délivrées à :

SAS ASTOTEL

Q... Z...,

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX FÉVRIER DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS ASTOTEL

[...]

[...]

représentée par Me Agnès JELTY de la SAS CABINET JELTY PICHAVANT, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 60 - N° du dossier 18106

APPELANTE

****************

Monsieur Q... Z...

[...]

[...]

comparant en personne, assisté de Me David ALVES DA COSTA de la SELARL LEVY ET ALVES DA COSTA, avocat au barreau de ROUEN

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES HAUTS DE SEINE

[...]

[...]

représentée par Mme S... U... (Inspecteur Contentieux) en vertu d'un pouvoir général

INTIMES

****************

Société ALLIANS IARD

[...]

[...]

non comparante

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Décembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Caroline BON, Vice président placée chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,

Madame Caroline BON, Vice président placée,

en présence de Mme Isolina DA SILVA, faisant fonction de greffier ;

Le 19mai2016, la société Astotel SAS (ci-après, la Société) a souscrit une déclaration d'accident du travail survenu la veille à 11heures30 à M. Q... Ben Miled, salarié depuis le 1erseptembre1980 et occupant au dernier état de la relation de travail le poste de responsable petit déjeuner, dans les termes suivants :

'Activité de la victime lors de l'accident : Mr J... travaillait dans l'office petit déjeuner,

Nature de l'accident : Mr J... s'est fait mal au dos en portant une caisse de jus d'orange. M.J... a ensuite continué son travail jusqu'à la fin du service;

Objet dont le contact a blessé la victime : aucun,

Siège des lésions : dos,

Nature des lésions : lombalgie, forte tension'.

L'accident ainsi décrit par la victime était connu de l'employeur le 19mai2016 à 14heures30.

Aucun témoin ni première personne avisée n'était mentionné.

Cette déclaration était accompagnée d'un certificat médical initial établi le 19mai2016 par le docteur M... G... qui constatait une 'lombalgie post traumatique récidivante et invalidante' et prescrivait un arrêt de travail jusqu'au 7juin2016.

L'état de santé de M. H... était déclaré consolidé à la date du 7juin2016, avec séquelles indemnisables à hauteur de 3 % selon décision de la CPAM du 5janvier2017. L'assuré a contesté ce taux d'incapacité permanente partielle (ci-après, IPP) en saisissant le tribunal du contentieux de l'incapacité de Paris qui, par jugement en date du 12décembre2017, a déclaré son recours recevable en la forme, infirmé la décision de la Caisse et dit qu'à la date du 7juin2016, les séquelles présentées par M. H... n'ont pas été correctement évaluées et justifient l'attribution d'un taux d'IPP de 12 % dont 5 % de coefficient professionnel.

Le 4octobre2016, la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (ci-après, la CPAM ou la Caisse) a notifié aux parties sa décision de prise en charge de l'accident du 18mai2016 au titre de la législation sur les risques professionnels.

L'assuré a déclaré un nouvel accident du travail le 7mars2017, à l'origine de lésions au niveau du dos (dos bloqué après avoir soulevé des cartons pour les ranger dans la réserve au sous-sol), que la CPAM a refusé de prendre en charge au titre de la législation professionnelle au motif que la lésion invoquée sur le certificat médical initial n'était pas imputable au sinistre.

Après déclaration d'inaptitude par la médecine du travail, l'assuré était licencié le 30juin2017 pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Ce licenciement a fait l'objet d'une contestation et l'affaire est actuellement pendante devant la cour.

Le 26janvier2018, M. H... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts-de-Seine (ci-après, le TASS) aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Par jugement en date du 23octobre2018, le TASS a :

- dit que la Société a commis une faute inexcusable à l'origine de l'accident du travail dont a été victime M. H... le 18mai2016 ;

- dit que l'indemnité en capital due à M. H... au titre de l'incapacité permanente partielle doit être majorée à son montant maximum dans les limites fixées à l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale ;

avant dire droit sur les préjudices indemnisables,

- ordonné une expertise médicale de M. H... et désigné pour y procéder le docteur L... V... ;

- fixé à 800euros la consignation dont la CPAM devra faire l'avance au titre des frais d'expertise, sans préjudice pour elle de solliciter ultérieurement qu'ils soient laissés à la charge définitive de toute autre partie ;

- alloué à M. H... une provision de 1000 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices ;

- dit que la CPAM devra faire l'avance de cette indemnité provisionnelle ainsi que l'indemnité en capital à taux majoré ;

- accueilli la CPAM en son action récursoire contre la Société ;

- condamné la Société à rembourser à la CPAM toute somme dont elle fera l'avance en réparation des préjudices subis par M. H... ainsi que de la somme qui lui sera réglée au titre de la majoration de l'indemnité en capital en application de l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale ;

- rejeté toute autre demande des parties ;

- ordonné l'exécution provisoire du chef de jugement relatif à l'expertise médicale ;

- condamné la Société à verser à M. H... la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- renvoyé l'affaire à l'audience du 19février2019.

Interrogées à l'audience, les parties ont indiqué que l'expertise avait eu lieu le 25juillet2019 et que l'affaire avait été renvoyée devant les premiers juges à l'audience du 8janvier2020.

La Société a interjeté appel de cette décision le 19novembre2018 et les parties ont été convoquées à l'audience de la cour du 2décembre2019.

La Société, reprenant oralement ses écritures, demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- dire et juger que M. H... ne rapporte pas la preuve d'avoir subi un accident survenu le 18mai2016 au sein de l'hôtel ;

subsidiairement,

- dire et juger qu'elle n'a commis aucune faute ;

- statuer au caractère non professionnel de la maladie (sic) de M. H... et, en conséquence,

- débouter M. H... de sa demande de majoration de l'indemnité prévue aux articles L.452-2 et suivants à son maximum ;

- débouter M. H... de sa demande d'expertise judiciaire ;

- débouter M. H... de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'audience, M. H... réitère ses conclusions au terme desquelles il sollicite de la cour qu'elle :

- confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a dit que l'indemnité qui lui était due au titre de l'IPP doit être majorée à son montant maximum dans les limites fixées à l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale ;

statuant à nouveau,

- fixer à son maximum la majoration de la rente accident du travail ;

- condamner la Société à lui payer la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Quant à la Caisse, elle demande de:

- infirmer la décision entreprise ;

statuant à nouveau,

- constater que la preuve d'une faute inexcusable de la Société n'est pas rapportée par M.H... ;

- débouter M. H... de sa demande de reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur.

L'assureur Allianz IARD, bien que régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception signée le 18novembre2019, n'était ni présent ni représenté.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Sur le caractère professionnel de l'accident

La Société conteste le caractère professionnel de l'accident déclaré par M. H... en l'absence d'élément objectif pour corroborer ses affirmations. Elle souligne l'absence de témoin et le fait que le salarié a continué son travail le jour même sans que ses collègues ne remarquent ses difficultés. Elle remarque que les lésions n'ont été médicalement constatées que le lendemain.

M. H... revendique le bénéfice de la présomption d'imputabilité au travail de son accident survenu le 18mai2016. Il affirme en avoir informé son employeur le jour même, celui-ci lui ayant demandé de rentrer chez lui pour consulter un médecin, qu'il n'a vu que le lendemain. Il explique avoir déjà été victime de plusieurs accidents du travail, raison pour laquelle le médecin du travail lui délivrait depuis plusieurs années des avis d'aptitude avec réserves. Son employeur n'a émis aucune réserves lors de la déclaration de l'accident du travail. Selon l'intimé, l'employeur n'apporte pas la preuve qu'il existe une cause totalement étrangère au travail.

La Caisse ne développe aucune argumentation sur ce point.

Sur ce,

L'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose que

Est considéré comme accident, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

Ce texte édicte une présomption d'imputabilité au travail d'un accident survenu au temps et au lieu du travail, sauf à démontrer qu'il résulte d'une cause totalement étrangère au travail.

Pour que la présomption d'accident du travail trouve à s'appliquer, il convient cependant que l'assuré démontre la matérialité d'un fait soudain survenu au temps et au lieu du travail.

Les déclarations de la victime ne suffisent pas à elles seules à établir le caractère professionnel de l'accident.

En cas de contestation de l'employeur, il lui appartient de rapporter la preuve que l'accident avait une cause entièrement étrangère au travail.

Les juges apprécient souverainement la matérialité des faits.

En l'espèce, M. H... se plaint d'avoir été victime d'un accident de travail le 18mai2016.

Même si la Société n'avait pas émis de réserves au moment de la déclaration de cet accident, il convient de rappeler qu'elle a parfaitement la possibilité de contester la décision de prise en charge dans le cadre de l'instance engagée en vue de la reconnaissance de son éventuelle faute inexcusable.

Les déclarations des parties sur le déroulement de la journée du 18mai2016 sont contradictoires. En effet, M. H... indique qu'il s'est tout de suite plaint auprès de son employeur qui l'aurait renvoyé chez lui pour consulter un médecin. A l'inverse, la Société dit n'avoir été avisée du prétendu accident que le lendemain, 19mai2016.

La cour se réfère donc aux éléments objectifs tels qu'ils ressortent des pièces produites aux débats. Tant le bulletin de salaire de M. H... du mois de mai 2016 que l'attestation de salaire mentionnent le 18mai2016 comme dernier jour travaillé puis un arrêt de travail du 19 au 31maisuivant.

Par contre, M. H... ne verse aucun élément permettant de corroborer ses affirmations quant aux circonstances de l'accident allégué. Aucun témoin n'était présent et aucune attestation de collègue n'est produite pour confirmer les déclarations du salarié.

Il n'a consulté le médecin que le lendemain et celui-ci a constaté une 'lombalgie post traumatique récidivante et invalidante'. Or, cette constatation médicale apparaît en contradiction avec la notion d'accident du travail qui s'analyse comme un événement brutal et soudain. Une lésion récidivante, telle que décrite par le médecin, pourrait davantage correspondre à une pathologie d'évolution progressive.

Ceci interroge sur l'existence d'un état pathologique antérieur, d'autant plus que M. H... indique lui-même dans ses écritures qu'il a été victime de plusieurs accidents du travail par le passé, raison pour laquelle la médecine du travail a émis des avis d'aptitude avec réserves concernant le port de charges lourdes. Cet état antérieur est aussi illustré par la production par le salarié de divers documents médicaux qui évoquent des lombalgies depuis plusieurs années.

Le cour relève encore que la Caisse a, faute de lien de causalité, refusé de prendre en charge l'accident du travail déclaré par M. Ben Miled postérieurement à l'accident du travail objet du litige alors que ledit accident était survenu dix mois plus tard dans les mêmes circonstances que celui allégué le 18mai2016. Il n'est pas démontré que M. Ben Miled aurait contesté cette décision.

Ainsi, outre ses propres déclarations, M. Ben Miled n'apporte aucun élément permettant d'établir la matérialité du fait accidentel invoqué qui n'est donc pas démontrée.

En conséquence, il convient de déclarer inopposable à la Société la décision de la CPAM du 4octobre2016 de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident du 18mai2016 déclaré par M. Ben Miled.

Le jugement est infirmé en ce sens.

La cour rappelle toutefois que les rapports Caisse/employeur sont indépendants des rapports Caisse/salarié.

Les autres demandes formulées par les parties, au titre de la faute inexcusable et de ses conséquences, sont donc rejetées.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. Ben Miled, qui succombe à l'instance, est condamné aux dépens d'appel et débouté de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire ;

Infirme le jugement rendu le 23octobre2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts-de-Seine (n°18-00166/N) en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare inopposable à la société Astotel SAS la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine du 4octobre2016 de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident du 18mai2016 déclaré par M. Q...Ben Miled ;

Rappelle que les rapports entre la caisse primaire d'assurance maladie et l'employeur sont indépendants des rapports entre la caisse primaire d'assurance maladie et le salarié ;

Déboute les parties de toute autre demande, plus ample ou contraire ;

Laisse les frais d'expertise à la charge du Trésor Public ;

Condamne M. Q...Z... aux dépens d'appel ;

Déboute M. Q...Ben Miled de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Florence Purtas, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 18/04791
Date de la décision : 06/02/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°18/04791 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-06;18.04791 ?
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