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30/01/2020 | FRANCE | N°16/04424

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 30 janvier 2020, 16/04424


COUR D'APPEL


DE


VERSAILLES








Code nac : 80A





6e chambre











ARRÊT N° 058





CONTRADICTOIRE





DU 30 JANVIER 2020





N° RG 16/04424





N° Portalis : DBV3-V-B7A-Q743











AFFAIRE :





X... SQ...





C/





SAS QUALICONSULT














Sur le contredi

t formé à l'encontre d'un Jugement rendu le 18 Juillet 2016 par le conseil de prud'hommes - Formation paritaire de Versailles


Section : Encadrement


N° RG : 14/00789











Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées le 31 Janvier 2020 à :


- Me Éric COHEN


- Me Jean-Jacques GLEIZE


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRÊT N° 058

CONTRADICTOIRE

DU 30 JANVIER 2020

N° RG 16/04424

N° Portalis : DBV3-V-B7A-Q743

AFFAIRE :

X... SQ...

C/

SAS QUALICONSULT

Sur le contredit formé à l'encontre d'un Jugement rendu le 18 Juillet 2016 par le conseil de prud'hommes - Formation paritaire de Versailles

Section : Encadrement

N° RG : 14/00789

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées le 31 Janvier 2020 à :

- Me Éric COHEN

- Me Jean-Jacques GLEIZE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRENTE JANVIER DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur X... SQ...

né le [...] au Caire (ÉGYPTE)

de nationalité Française

[...]

[...]

Représenté par Me Éric COHEN, constitué/plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1958

PARTIE DEMANDERESSE AU CONTREDIT

****************

La SAS QUALICONSULT

N° SIRET : 401 449 855

[...]

[...]

Représentée par Me Jean-Jacques GLEIZE, constitué/plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0693

PARTIE DÉFENDERESSE AU CONTREDIT

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue en audience publique le 10 Décembre 2019, devant la cour composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Marine MANELLO,

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Qualiconsult est une entreprise spécialiste du contrôle technique, du diagnostic immobilier, de l'inspection, de l'assistance et de la formation.

M. X... SQ..., ingénieur en construction civile, a conclu un contrat de prestation de servicesavec cette société prenant effet le 7 novembre 2002 aux termes duquel il devait réaliser des contrôles et des vérifications techniques relatives aux chantiers entrant dans sa spécialité en prenant les contacts nécessaires auprès des architectes et maîtres-d''uvre des clients de la société Qualiconsult ainsi qu'avec l'ensemble des entreprises intervenant sur les chantiers, outre exécuter en tant que de besoin les travaux administratifs et commerciaux connexes.

Par lettre du 1er janvier 2014, M. SQ... a refusé un projet d'avenant au contrat remis par lasociété le 22 décembre 2013. Le 13 février 2014, la société Qualiconsult a rompu les relations contractuelles.

Le 4 août 2014, M. SQ... a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles aux fins de voir requalifier le contrat de prestation de services en contrat de travail. Il a demandé en dernier lieu de voir condamner la société Qualiconsult à lui régler les sommes suivantes :

' 250 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

' 40 278 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 133 929 euros à titre de dommages et intérêts en raison des heures supplémentaires accomplies,

' 62 500 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

' 37 500 euros à titre d'indemnité de congés payés sur trois années,

' 37 497,60 euros en paiement de la prime de 13ème mois,

' 6 250 euros en paiement de la prime de vacances,

' 21 875 euros en paiement de la prime de participation,

' 31 250 euros à titre d'indemnité de la prime d'intéressement (trois années),

' 5 535,50 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de remise de tickets restaurant,

' 9 108 euros à titre d'indemnités kilométriques,

' 846 euros en remboursement de frais téléphoniques,

' 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visites médicales,

' 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour clause de concurrence insérée dans son contrat de travail,

' 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de bénéfice des dispositifs de plan pour les seniors,

' 4 200 euros au titre de l'article 700 du code de de procédure civile.

Il a également demandé la condamnation de l'employeur à régulariser, au mois le mois, sa situation auprès des organismes sociaux (Urssaf, la retraite de base, la retraite complémentaire ainsi que le régime de prévoyance) sous astreinte de 250 euros par jour de retard et par régime, ainsi que la remise de bulletins de paie et du certificat de travail conformes sous astreinte de 250 euros par jour de retard.

Par jugement du 18 juillet 2016, le conseil de prud'hommes de Versailles s'est déclaré incompétent pour connaître du litige au profit du tribunal de commerce de Versailles.

M. SQ... a formé un contredit de compétence par déclaration du 29 juillet 2016.

Une mesure de médiation a été ordonnée par ordonnance du 31 mars 2017. Cette mesure n'a pas abouti et les parties ont été rappelées en dernier lieu à l'audience du 10 décembre2019.

Par conclusions reçues par voie électronique le 11 novembre 2019 et visées à l'audience du 10décembre 2019, M. SQ... demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son contredit de compétence,

- dire et juger qu'il était soumis à un lien de subordination juridique permanente avec la société Qualiconsult de sorte que l'ensemble des règles du droit du travail et de la sécurité sociale devait s'appliquer à lui, en conséquence,

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes,

Statuant à nouveau,

- dire et juger que le contrat de prestation de services doit être requalifié en contrat de travail, de sorte que la cour est matériellement compétente,

- dire et juger que le contrat de travail est soumis à la convention collective Syntec,

- dire et juger que la lettre du 13 juillet 2014 s'analyse en une lettre de licenciement,

- dire et juger nul ou, à tout le moins, sans cause réelle et sérieuse, son licenciement,

- dire et juger que la société Qualiconsult a intentionnellement mis en place un montage juridique afin de dissimuler son statut de salarié,

- en conséquence, condamner la société Qualiconsult à lui régler les sommes suivantes :

' 250 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

' 40 278 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 37 50 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

' 37 500 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur trois années,

' 3 750 euros en paiement de la prime de vacances,

' 15 624 euros en paiement de la prime de participation,

' 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande également de voir ordonner à la société Qualiconsult de lui remettre l'ensemble des bulletins de paie au titre de la période de travail, un certificat de travail et une attestation destinée à Pole emploi, sous astreinte de 300 euros par jour de retard et de manquement constaté, 15 jours après notification de l'arrêt à intervenir, et voir ordonner la transmission de l'arrêt de la cour à intervenir àPôle emploi.

Par conclusions notifiées le 5 décembre 2019 par voie électronique et visées à l'audience du 10décembre 2019, la société Qualiconsult demande :

1) d'écarter des débats :

- les nombreuses pièces de M. SQ..., numérotées 11 bis et 32 bis, non visées et non décrites au bordereau de pièces annexé aux conclusions,

- les nombreuses pièces de M. SQ..., numérotées 4, identifiées comme "exemples de correspondances adressées à M. SQ... (Qualiconsult) ou émises par M. SQ... pour Qualiconsult",

- les nombreuses pièces de M. SQ..., numérotées 12, identifiées en "divers documents démontrant l'invitation au stage, la liste des nouveaux documents de l'intranet, une note interne, etc. adressés à M. SQ...",

2) en termes d'irrecevabilités :

En premier lieu :

Vu les articles 80 et suivants du code de procédure civile, en leur version antérieure applicable au présent litige,

Vu le récépissé de la déclaration de contredit formé le 29 juillet 2016 par le conseil de M.SQ... et établi par le secrétariat greffe du conseil de prud'hommes de Versailles,

- dire et juger que la déclaration de contredit ainsi formée n'a pas été accompagnée dans le délai de quinzaine ayant suivi le prononcé de son jugement le 18 juillet 2016 par le conseil de prud'hommes de Versailles, de la motivation requise, comme le confirme l'attestation du greffe de ce dernier faisant foi et restée non contestée par le demandeur,

En conséquence, et en application de l'article 82 ancien du code de procédure civile,

- dire et juger irrecevable M. SQ... en son contredit, en ce que ce dernier n'a été formé que de manière non motivée dans le délai de quinzaine et confirmer le jugement dont contredit,

En second lieu :

Vu les articles 2219, 2224 du code civil, L. 1471 1 du code du travail, les lois des 17 juin 2008 et 14 juin 2013 et les dispositions transitoires qu'elles édictent, vu l'article 122 du code de procédure civile,

- dire et juger que dès le 28 octobre 2002, M. SQ... qui annonce agir au regard d'un contrat souscrit par ses soins à cette date, a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit à agir ; qu'en tout état de cause, M. SQ... qui a mis en 'uvre et aexécuté des relations contractuelles continues avec la société Qualiconsult à compter du 7novembre 2002 a, à cette date, connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'agir à ce titre ; qu'aucun fait n'a interrompu cette prescription avant son accomplissement, et qu'il n'a saisi le conseil de prud'hommes de son action que le 4 août 2014,

En conséquence ,

- dire et juger comme étant prescrite depuis le 19 juin 2013, l'action de M. SQ...,

- juger M. SQ... irrecevable en son action, et en son contredit qui poursuit ladite action,

- débouter M. SQ... de l'intégralité de ses demandes, confirmer le jugement dont contredit, et inviter M. SQ... à se mieux pourvoir devant le tribunal de commerce de Versailles,

3) A titre subsidiaire :

Vu l'article 954, 3e alinéa du code de procédure civile et les articles 1101 et suivants anciens du code civil,

Vu le dispositif des conclusions de M. SQ... aux termes duquel il sollicite que le contrat de prestation de services doit être requalifié en contrat de travail, de sorte que la cour est matériellement compétente,

Vu la pièce n°2 du demandeur dénommé contrat de prestation de services signé par M. SQ..., et visé par cette demande,

Vu les conclusions du demandeur en tant qu'il reconnaît que "il est vrai qu'à l'époque, le contenu de ce document n'était pas opposable à Qualiconsult",

- dire et juger qu'un contrat inexistant en ce que n'obligeant personne, et en outre apprécié par le demandeur comme inopposable à la société ainsi qu'à lui même ne saurait être requalifié en contrat de travail,

- débouter le demandeur de sa demande de requalification du "contrat de prestation de service", - rejeter le contredit formé par M. SQ... et confirmer le jugement,

4) A titre très subsidiaire :

Vu l'article L. 8221 6 du code du travail, en ses I et II,

- dire et juger liminairement que la pièce n°2 du demandeur dénommée "contrat de prestation de service signé par M. SQ..."en ce que n'obligeant personne, et en outre apprécié par le demandeur comme inopposable à la société Qualiconsult et ainsi qu'à lui même, est privée d'intérêt et d'effet et qu'elle ne peut établir en tant que telles les conditions d'exercice des relations contractuelles ayant lié les parties,

- dire et juger que M. SQ..., inscrit en professionnel indépendant et libéral depuis le le 1er février 1982 en qualité d'ingénieur conseil, n'établit pas que les relations contractuelles qui furent les siennes à ce titre avec l'un de ses clients, la société Qualiconsult ont été exécutées dans des conditions qui l'auraient soumis à un lien de subordination juridique permanente avec cette dernière, et qu'il n'a pas renversé la présomption légale de "ne pas être lié à la société Qualiconsult par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité ayant donné lieu à son immatriculation ou inscription",

- dire et juger en outre que M. SQ... n'a pas établi l'existence d'un contrat de travail l'ayant lié à la société Qualiconsult à l'occasion de l'exercice de ses prestations dans le cadre de son activité en sa profession libérale d'ingénieur conseil,

- dire et juger matériellement incompétente la juridiction prud'homale pour avoir à statuer sur l'action et les demandes de M. SQ...,

- rejeter le contredit et débouter M. SQ... de l'intégralité de ses demandes,

- confirmer le jugement dont contredit, et renvoyer M. SQ... à se mieux pourvoir devant le tribunal de commerce de Versailles,

5) A titre infiniment subsidiaire :

Si la cour devait faire droit au contredit de compétence,

Vu l'article 86 ancien et applicable du code de procédure civile et vu la limite de la saisine de la cour opérée par le demandeur,

- ne pas évoquer et ainsi renvoyer au conseil de prud'hommes de Versailles la connaissance de l'ensemble des demandes de condamnations sollicitées par M. SQ...,

- en tout état de cause, débouter M. SQ..., mal fondé et n'en justifiant pas, de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de la société Qualiconsult,

Si par extraordinaire, la cour devait faire droit à partie des demandes,

Vu l'annexe II à la convention collective, dite Syntec, intitulée "classification des ingénieurs et cadres" et l'avenant 43 du 21 mai 2013 y annexé,

- dire et juger que le contrat de travail du demandeur correspond à la position 2.3 de cette classification conventionnelle, coefficient 150, et fixer le salaire de référence mensuel à la somme de 3 031,50 euros,

- dire et juger que les facturations émises par le demandeur sur la société Qualiconsult ne correspondent ni à un salaire ni à un quelconque revenu et bénéfice en net ; et que M. SQ... ne fait état d'un résultat net de son cabinet que de 3 262,33 euros pour l'année 2013,

- juger le quantum des condamnations qui interviendraient, au regard du salaire de référence, très subsidiairement au regard du résultat du cabinet de M. SQ...,

- dire et juger que la détermination de l'indemnisation qui résulterait de la requalification par la cour de la rupture des relations contractuelles en licenciement dénué de cause réelle et sérieuse doit être fixée dans les limites du barème légal en vigueur à la date du prononcé de l'arrêt à intervenir,

En tout état de cause,

- voir condamner M. SQ... au paiement d'une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de son droit d'ester en justice ainsi qu'au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'incident de pièces

La société Qualiconsult demande de voir écarter des débats les pièces numérotées 11 bis et 32 bis encequ'elles ne seraient pas visées et décrites dans le bordereau de pièces annexé aux conclusions, en ce que les pièces n° 4 ne sont pas identifiées précisément non plus que les pièces numéro 12.

Il convient cependant d'observer que les pièces communiquées par M. SQ... ne comprennent pas de pièce 11 bis, que les pièces 32 bis sont visées dans le bordereau de communication de pièces joint aux conclusions déposées à l'audience du 10 décembre 2019, que si ces pièces ainsi numérotées sont composées de divers courriers, ces derniers sont de même sorte.

De même, les correspondances produites en pièce 4 sont de même sorte, le seul objet de leur communication étant non d'examiner en détail leur contenu mais de mettre en valeur le fait que, à en tête de la société Qualiconsult, elles sont signées par M. SQ....

Enfin, la pièce 12 telle que visée dans le bordereau de communication de pièces et telle que communiquée aux débats est constituée de notes internes également de même sorte, dont l'unique objet est de démontrer que l'appelant en a été destinataire.

Ces éléments conduiront à rejeter l'incident de pièces.

Sur l'irrecevabilité et la délimitation de la saisine de la cour

En vertu de l'article 80 alinéa 1 du code de procédure civile dans sa version applicable au litige, lorsque le juge se prononce sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision ne peut être attaquée que par la voie du contredit, quand bien même le juge aurait tranché la question de fond dont dépend la compétence.

L'article 82 du code de procédure civile dans sa version applicable au litige énonce que le contredit doit, à peine d'irrecevabilité, être motivé et remis au secrétariat de la juridiction qui a rendu la décision dans les quinze jours de celle-ci tandis que l'article 83 vise que le secrétaire de la juridiction qui a rendu la décision notifie sans délai à la partie adverse une copie du contredit, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et en informe également son représentant si elle en a un. Il transmet simultanément au greffier en chef de la cour le dossier de l'affaire avec le contredit et une copie du jugement.

En l'espèce, la société Qualiconsult fait grief à M. SQ... de ne pas avoir respecté la teneur de ces textes.

Il est justifié au dossier que le jugement du conseil de prud'hommes de Versailles en date du 18 juillet 2016 a été notifié par le greffe à M. SQ..., représenté alors par Me Nataf, avocat, et à la société Qualiconsult, représentée par Me Gleize, avocat, le 21 juillet 2016

Il est également justifié que M. SQ... par la voie de son conseil a formé un contredit le29juillet 2016 à l'encontre de ce jugement, le greffe visant dans la notification du contredit, reçue par la société Qualiconsult le 4 août 2016 et par Me Gleize le 8 septembre 2016 que celui-ci était motivé par "37 pièces annexées".

La déclaration de contredit du 29 juillet 2016 est en effet accompagnée de conclusions de M. SQ... de 17 pages dont les pages 9 à 17 explicitent les moyens soulevés au soutien de ce contredit, ces conclusions étant accompagnées d'un bordereau de pièces au nombre de 37.

Ces éléments doivent conduire à rejeter l'irrecevabilité soulevée, la cour observant en tout état de cause que lors de l'audience d'incident du 24 mars 2017 l'intimé, comme il l'est noté au plumitif, avait alors déclaré renoncé à son incident.

S'agissant de sa saisine, et ainsi que le relève la société Qualiconsult, la cour n'est saisie ici que du contredit formé à l'encontre du jugement du 18 juillet 2016, M. SQ... ayant en effet inscrit son action au regard des seules dispositions de l'article 86 du code de procédure civile alors applicable.

Sur la prescription

La société Qualiconsult fait valoir que M. SQ... a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles le 4 août 2014 pour voir requalifier un contrat de prestation de services en date du 28 octobre 2002. Il déduit de ces éléments que l'action de M. SQ..., qui porte sur la requalification d'une relation contractuelle continue, existant depuis le 7 novembre 2002, est prescrite.

L'action de M. SQ... porte cependant ici sur une relation contractuelle qui a été rompue le13février 2014.

Son action tend à une requalification de cette relation sans qu'il puisse donc lui être opposé une prescription tirée de sa connaissance de droits dont il demande au contraire la constitution.

La fin de non recevoir sera donc rejetée.

Sur la relation de travail

Aux termes de l'article L. 1411-1 du code du travail, « le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient » et « juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti ».

Le contrat de travail se définit par l'engagement d'une personne à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre moyennant rémunération, le lien de subordination juridique ainsi exigé se caractérisant par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Par ailleurs, ainsi qu'en dispose l'article L. 8221-6 paragraphe I du code du travail dans sa version applicable au litige, « sont présumés ne pas être liés avec le donneur d'ordre par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation ou inscription » notamment « les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales » et « les dirigeants des personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés et leurs salariés ».

Aux termes du paragraphe II de ce texte, « l'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d'ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci ».

Afin de renverser la présomption de non salariat tirée de son statut d'ingénieur-conseil immatriculé sous le numéro Siret 34763911400029, M. SQ... fait ici valoir que, dans le cadre d'une relation de subordination, la société Qualiconsult lui a confié la responsabilité de plusieurs ouvrages, dont il devait vérifier chacun des stades de la réalisation, qu'une fois cette vérification faite, il veillait à la transmission des rapports au maître d'ouvrage ou à l'entrepreneur principal tandis qu'à la fin des opérations, la société Qualiconsult signait ou certifiait, sur la base de son travail, le rapport final délivré au maître d'ouvrage.

Il mentionne qu'il réalisait aussi des tâches d'activité commerciales pour le compte de la société Qualiconsult, qu'il exerçait les fonctions d'ingénieur-conseil au sein de l'agence grands travauxavecd'autres collègues, tel M. K..., qui effectuaient le même travail que lui sur d'autres ouvrages.

Il relève que les termes du contrat du 28 octobre 2002 sont parfaitement opposables à la société Qualiconsult alors que celle-ci s'y réfère dans diverses correspondances, que ces termes mettent en évidence une volonté de la société de le soumettre à un lien de subordination juridique ce, en prévoyant une clause de mobilité, en visant son respect des instructions et du règlement intérieur, en réservant à la direction la définition de ses attributions, en incluant une obligation d'exclusivité et en définissant l'organisation son temps de travail.

Il vise que sa rémunération était en réalité annuelle, globale et forfaitaire, divisée par 217 jours sansajustement en fonction de l'importance du projet ou de sa difficulté, ses frais professionnels lui étant remboursés sur la base de bordereaux remplis par ses soins.

Il rappelle les moyens matériels (messagerie, carte de visite, badges au nom de la société) dont le faisait bénéficier la société Qualiconsult, le bureau qu'il occupait au sein de l'agence.

Il fait valoir qu'il était destinataire de l'ensemble des notes internes de la société Qualiconsult, qu'il établissait des rapports sans délai qui lui étaient parfois demandés sous la forme d'une mise en demeure, qu'il bénéficiait de formations dispensées à la demande de la société Qualiconsult et d'un accès à l'intranet de celle-ci.

Il fait également état de la validation de ses congés par la hiérarchie et de la diffusion de son curriculum vitae auprès des clients de la société Qualiconsult.

Il retient que celle-ci n'apporte aucun élément pertinent pour contester le lien de subordination juridique.

La société Qualiconsult énonce que le contredit de M. SQ... est fondé sur la requalification d'un contrat inexistant, qu'en tout état de cause, les pièces produites par l'intéressé, particulièrement indigentes, ne permettent pas de relever un lien de subordination à son égard.

Elle retient que M. SQ... avait une entreprise libérale obéissant à l'enseigne MC Structure, depuis 1982, en tant qu'ingénieur-conseil, que de 2002 à 2014 son cabinet est demeuré en charge de la réalisation de prestations pour d'autres clients que la société Qualiconsult, l'amenant à être employeur d'intérimaires, à cotiser à la Cipav depuis 1982, à connaître notamment d'un litige au sujet d'un règlement de factures en 1999 devant la cour d'appel de Toulouse concernant des factures émisesen 1999.

Elle énonce que M. SQ... disposait d'une expertise reconnue en calcul de structure complexe, qu'elle a fait appel à lui en fonction de cette expertise particulière.

Sur ce, la cour observe ici que si les contrats de prestation de service produits aux débats par M. SQ... ne sont pas signés de la société Qualiconsult, celle-ci se réfère explicitement au contrat du28octobre 2002 dans certaines de ses correspondances dont notamment la lettre de rupture du13février 2014.

L'existence du contrat du 28 octobre 2002 sera dès lors retenue.

Il convient cependant de relever que si ce dernier vise que l'intéressé s'engage à respecter les instructions qui lui seront données par la société, en particulier son règlement intérieur, ce contrat retient en priorité le respect par l'intéressé des règles de sa profession et des procédures techniques ou administratives afférentes aux expertises qu'il menait.

Ce contrat vise dans le même temps que l'intéressé, en tant que travailleur indépendant, doit s'affilier au régime général de l'Urssaf. Son article 6 stipule que M. SQ... dispose dans l'organisation de ses missions de la plus grande liberté et peut passer à l'extérieur de l'entreprise une part significative de son temps. Il est visé sa perception d'honoraires payés sur présentation de factures le 5 du mois suivant.

Les termes de ce contrat, par ces éléments se rapportant à un mode d'exercice indépendant de travail, ne permettent donc pas à eux seuls d'établir l'existence d'une relation salariée.

Etant rappelé que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité, la cour s'attachera ici aux éléments de fait se déduisant des pièces communiquées.

Or, à cet égard, et ainsi que le relève la société Qualiconsult, il se déduit des mentions portées sur le relevé de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (Cipav) du 27 juillet 2015 que M. SQ... a cotisé 133 trimestres à cette caisse de 1982 jusqu'en 2015 tandis que tant son curriculum vitae que son profil Linkedin vise sa présidence de la société MC Structure, bureau d'études structure béton armé, charpente métallique ou bois, depuis janvier 1982 jusqu'à aujourd'hui.

Ces éléments ne permettent donc pas de retenir, ainsi qu'il l'énonce qu'il était tenu d'une exclusivité de service à l'égard de la société Qualiconsult.

Par ailleurs, si les pièces produites justifient qu'il travaillait dans une agence Qualiconsult avec un certain nombre de moyens de travail mis à sa disposition par cette société (téléphone, accès internet et intranet, badges, cartes de visite), ces éléments se limitent à caractériser l'existence d'un service organisé dans lequel s'inscrivait son activité professionnelle sans que la démonstration ne soit faite de ce qu'il aurait été tenu à des horaires d'agence, à des réunions collectives de travail sous une autorité hiérarchique ni à une validation de son travail par une telle autorité.

La cour observe que la fiche individuelle portant la mention de congés payés produite aux débats pour une période de référence s'étendant du 1er juin 2004 au 31 mai 2005 vise "l'accord"de l'intéressé et du directeur sans qu'une telle fiche ne puisse venir justifier de ce que M. SQ... devait solliciter l'autorisation d'une hiérarchie pour prendre ses congés.

La note interne n° 09 013 du 14 mai 2009 ne soumet pas non plus à autorisation la prise de congés de M. SQ..., l'information qui est demandée à cet égard par un directeur d'agence et un directeur régional n'étant que la traduction d'un souci de coordination interne.

Aucun élément ne vient justifier de ce que les stages de formation dont il est fait mention dans les notes internes communiquées aient été rendus obligatoires s'agissant de l'intéressé.

Les factures produites (pièces 22 à 26) justifient très précisément de la facturation de ses travaux opérée par M. SQ..., poste par poste d'expertise, pour des montants distincts, les revenus déclarés dans les pièces fiscales ne permettant de relever la perception par année de sommes d'un montant régulier.

Aux termes du contrat de prestation de services, l'intéressé était amené à exécuter en tant que de besoin les travaux administratifs et commerciaux connexes à ses missions d'expertise. Le compte-rendu dessoldes à facturer par la société, les courriers signés par lui dans le cadre des correspondances aveclesclients à en tête de la société Qualiconsult ne sont que la traduction de cette fonction, la cour observant par ailleurs que ces courriers sont quelquefois cosignés par M. D..., directeur adjoint opérationnel IdF.

L'exécution du contrat de prestation de services impliquait par ailleurs qu'il restitue à la société Qualiconsult le contenu de ses contrôles techniques. A cet égard, la mise en demeure qu'il communique, en date du 18 octobre 2007, justifie de rapports contractuels entre un prestataire etundonneur d'ordres.

Il se déduit de ces éléments que M. SQ... échoue à renverser la présomption de non salariat visée à l'article L. 8221-6 susvisé, ce qui conduira à le débouter du contredit.

L'abus du droit d'ester en justice n'étant pas ici établi, la demande de dommages et intérêts formulée de ce chef par la société Qualiconsult sera rejetée.

Il sera statué sur les dépens et frais irrépétibles dans les termes du dispositif.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

REJETTE la demande de la société Qualiconsult visant à voir écarter des pièces des débats ;

DÉBOUTE la société Qualiconsult de ses fins de non recevoir ;

REJETTE le contredit ;

En conséquence,

CONFIRME le jugement rendu le 18 juillet 2016 par le conseil de prud'hommes de Versailles en ce qu'il a retenu l'incompétence matérielle de ce dernier au profit du tribunal de commerce de Versailles ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE la société Qualiconsult de sa demande de dommages et intérêts ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. X... SQ... à payer à la société Qualiconsult la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE M. X... SQ... de sa demande de ce chef ;

CONDAMNE M. X... SQ... aux dépens de première instance et d'appel ;

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant étépréalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 ducodedeprocédure civile, et signé par Madame Isabelle VENDRYES, Président, et par MonsieurNicolas CAMBOLAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistratsignataire.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 16/04424
Date de la décision : 30/01/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 06, arrêt n°16/04424 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-30;16.04424 ?
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