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29/01/2020 | FRANCE | N°17/02403

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 29 janvier 2020, 17/02403


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 29 JANVIER 2020



N° RG 17/02403 - N° Portalis DBV3-V-B7B-RQ4V



AFFAIRE :



[M] [D], 1er appelant





C/

SASU COLAS RAIL, 2ème appelant









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mars 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de SAINT GERMAIN EN LAYE

Section : I

° RG : F 15/00526



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



SELARL A.K.A



SELARL LMC PARTENAIRES







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT,

La cour...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 JANVIER 2020

N° RG 17/02403 - N° Portalis DBV3-V-B7B-RQ4V

AFFAIRE :

[M] [D], 1er appelant

C/

SASU COLAS RAIL, 2ème appelant

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mars 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de SAINT GERMAIN EN LAYE

Section : I

N° RG : F 15/00526

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

SELARL A.K.A

SELARL LMC PARTENAIRES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [M] [D], 1er appelant

né le [Date naissance 1] 1959 à

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentant : Me [T] [S] de la SELARL A.K.A, Constitué/Plaidant, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 320, substitué par Me Claudia VENEZIA, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 320

****************

SASU COLAS RAIL, 2ème appelant

N° SIRET : 632 049 128

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentant : Me Gildas LE FRIEC de la SELARL LMC PARTENAIRES, Constitué/Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 425

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Décembre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BOUBAS, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Luc LEBLANC, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Marie-Laure BOUBAS, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Colas Rail a pour activité la pose, le renouvellement et l'entretien des voies, la construction de tramway, l'électrification de réseaux, la signalisation des voies, le transport ferroviaire et la fourniture de composants pour la construction des voies.

Aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée, Monsieur [M] [D] a été engagé par la société Colas Rail en qualité d'agent de man'uvre à compter du 17 novembre 2006.

Les relations de travail étaient soumises à la convention collective nationale des travaux publics.

Le 4 avril 2013, Monsieur [M] [D] a fait l'objet d'une déclaration d'aptitude limitée.

Le 10 avril 2014, la CPAM a reconnu le caractère professionnel de la maladie.

A la suite de plusieurs arrêts maladie, liés à une maladie professionnelle, le médecin du travail a conclu après la seconde visite médicale de reprise du 30 octobre 2014 à l'inaptitude de Monsieur [M] [D] aux man'uvres d'agent au sol, au port de charges lourdes, à l'accroupissement répété, aux man'uvres d'attelage et aux man'uvres des installations sécuritaires et a précisé qu'un poste de type administratif conviendrait, si nécessaire avec un complément de formation.

A compter de cette date et jusqu'au 18 janvier 2015, il a assuré des fonctions administratives de classement de documentation sécuritaire obligatoire, que la société indique avoir été temporaire.

Le 6 janvier 2015, la société Colas Rail a transmis à Monsieur [M] [D] une fiche de renseignement propre à faciliter son reclassement, lui demandant de préciser ses souhaits.

A compter du 19 janvier 2015, il a fait l'objet d'une dispense d'activité rémunérée.

Il bénéficie de la RQTH depuis le 3 mars 2015.

Les délégués du personnel ont été consultés sur la procédure de reclassement engagée lors d'une réunion du 27 mars 2015.

Par courrier en date du 4 août 2015, Monsieur [M] [D] a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement.

Monsieur [M] [D] a été licencié pour inaptitude professionnelle médicalement constatée et impossibilité de reclassement, par courrier du 13 novembre 2015.

Au moment de la rupture du contrat de travail, la rémunération mensuelle brute de Monsieur [M] [D] s'élevait à la somme de 2.110 euros selon l'employeur et la société employait habituellement plus de onze salariés.

Il a contesté son licenciement devant le Conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye, saisi le 1er décembre 2015.

Par jugement du 28 mars 2017, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, prétentions et moyens soutenus devant eux, les premiers juges ont :

- dit que le licenciement de Monsieur [M] [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- condamné la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] les sommes suivantes :

25.320 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- débouté les parties de leurs autres demandes.

- ordonné à la société Colas Rail de remettre à Monsieur [M] [D] les bulletins de salaires, le certificat et l'attestation nécessaire à Pôle emploi, rectifiés.

- condamné la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

- rappelé qu'en vertu de l'article 1153-1 du code civile les intérêts légaux sont dus à compter du jour du prononcé du jugement.

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile.

Monsieur [M] [D] a relevé appel du jugement le 5 mai 2017. Le 10 mai 2017, la société Colas Rail a également interjeté appel.

Par ordonnance du 22 juin 2017, les procédures inscrites au répertoire général sous les n° 17/02464 et 17/02403 sont jointes dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et seront suivies sous le n° 17/02403.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 30 octobre 2019, Monsieur [M] [D] demande à la cour d'appel d'infirmer cette décision et, statuant à nouveau, de :

- recevoir Monsieur [M] [D] en ses demandes, fins et conclusions ;

L'y déclarant bien fondé :

A titre principal, de :

- infirmer le jugement en date du 28 mars 2017 en l'ensemble de ses dispositions ;

Statuant de nouveau, de :

- dire que Monsieur [M] [D] a fait l'objet de man'uvres discriminatoires tant à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, qu'au moment du licenciement ;

- prononcer la nullité du licenciement de Monsieur [M] [D] suivant courrier du 13 novembre 2015 ;

- condamner la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 50.640 euros au titre du licenciement discriminatoire ;

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;

Y ajoutant, de :

- condamner la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail ;

A titre subsidiaire, de :

- confirmer ledit jugement en ce qu'il a dit le licenciement de Monsieur [M] [D] privé de cause réelle et sérieuse ;

- l'infirmer en ce qu'il a alloué à Monsieur [M] [D], la somme de 25.320 euros ;

Statuant de nouveau, de :

- condamner la société Colas rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 50.640 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant :

- condamner la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail ;

En tout état de cause, de :

Ajoutant au jugement dont appel :

- condamner la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 3.049, 48 euros au titre des « indemnités de licenciement » lui restant dues ;

- condamner la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 422 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité de préavis ;

- condamner la société Colas Rail à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 3.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Colas Rail aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL AKA, prise en la personne de Maître [T] [S].

En réplique, aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 4 novembre 2019, la société Colas Rail demande à la cour de :

- dire et juger la société Colas Rail recevable en son appel et bien fondée en ses demandes ;

- dire et juger que la société Colas Rail ne s'est rendue coupable d'aucune discrimination, d'aucune exécution déloyale du contrat de travail ;

- dire et juger que la société Colas Rail a respecté l'intégralité de ses obligations en matière de reclassement ;

- dire et juger le licenciement de Monsieur [M] [D] bien fondé sur son inaptitude et l'impossibilité de reclassement ;

- infirmer en conséquence le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que la société Colas Rail aurait manqué à son obligation légale de reclassement ;

- débouter Monsieur [M] [D] de l'intégralité de ses demandes ;

- confirmer subsidiairement le montant de l'indemnité allouée à Monsieur [M] [D] ;

- condamner en toute hypothèse Monsieur [M] [D] à verser à la société Colas Rail la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Monsieur [M] [D] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 novembre 2019. L'affaire a été plaidée le 6 décembre 2019 et mise en délibéré au 29 janvier 2020.

MOTIFS :

Les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne donneront pas lieu à mention dans le dispositif.

Sur la discrimination:

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Selon l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses mesures d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations :

- constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation sexuelle ou de son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable,

- constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés,

- la discrimination inclut tout agissement lié à l'un des motifs précités et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l'espèce, Monsieur [D] invoque avoir été victime d'une discrimination en raison de son état de santé mais également de son appartenance syndicale, tant au niveau de l'exécution du contrat de travail que de la procédure de licenciement.

Pour étayer ses affirmations, Monsieur [D] produit notamment:

-des attestations peu lisibles en raison de la mauvaise qualité d'impression qui font état d'appréciations subjectives quant au déroulé de carrière de Monsieur [D], et qui précisent qu'il a occupé des fonctions administratives du 29 octobre 2014 au 19 janvier 2015 liées au classement et à la distribution de fiches sécurité,

-un récapitulatif des promotions des différents collègues de Monsieur [D] établi par le salarié lui-même, sans aucun document objectif à l'appui,

-ses demandes de formation et celles dont il a bénéficié.

En l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au sens des textes ci-dessus n'est pas démontrée. Les demandes relatives à la discrimination et à la nullité du licenciement doivent par conséquent être rejetées. Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail:

L'article L.1222-1 du code du travail dispose: « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi ».

Monsieur [D] sollicite une indemnisation à hauteur de 20.000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail. Il fonde sa demande sur les pièces produites au soutien de sa demande formée au titre de la discrimination.

La société conclut au débouté.

Force est de constater que Monsieur [D] sur lequel repose la charge de la preuve de l'exécution déloyale invoquée, échoue à démontrer un quelconque comportement fautif de son employeur. Les éléments produits sont très subjectifs notamment quant aux attestations de ses collègues dont certains sont en conflit avec la société COLAS RAIL. Monsieur [D] sera débouté de ce chef de demande qu'il a exposé pour la première fois en cause d'appel.

Sur le bien-fondé du licenciement:

Aux termes de l'article L1235-1 du Code du travail, le juge a pour mission d'apprécier la régularité de la procédure de licenciement et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige ; la cause du licenciement doit être objective et reposer sur des faits matériellement vérifiables ; les faits doivent être établis et constituer la véritable cause de licenciement ; enfin, les faits invoqués doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement. Il appartient au juge du fond, qui n'est pas lié par la qualification donnée au licenciement, de vérifier la réalité des faits invoqués et reprochés au salarié et de les qualifier puis de décider s'ils constituent une cause réelle et sérieuse au sens de l'article L1232-1 du Code du travail à la date du licenciement, l'employeur devant fournir au juge les éléments permettant à celui-ci de constater les caractères réel et sérieux du licenciement.

En l'espèce, Monsieur [D] a été déclaré inapte pour maladie professionnelle et a été licencié pour impossibilité de reclassement dans les termes suivants:

« (') Nous vous informons que nous sommes malheureusement contraints de vous notifier par la présente lettre votre licenciement pour le motif suivant :

Inaptitude physique constatée par le Médecin du Travail et impossibilité de reclassement.

Il s'avère en effet que nous sommes dans l'impossibilité de pourvoir à votre reclassement car il n'y a pas dans le Groupe d'emploi disponible susceptible de vous intéresser ou que vous soyez en mesure d'occuper, compte tenu de votre état de santé et des conclusions du Médecin du Travail.

Nous vous précisons par ailleurs que votre contrat de travail prend fin à la date d'envoi de cette lettre soit le 13 novembre 2015.

De ce fait, vous n'effectuerez pas de préavis mais vous percevrez une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité légale de préavis, ainsi que l'indemnité spéciale de licenciement à laquelle vous pouvez prétendre compte tenu de votre ancienneté arrêtée à la date d'envoi de ce courrier. Nous vous ferons parvenir dans les meilleurs délais votre solde de tout compte, votre certificat de travail et votre attestation Pôle Emploi ».

Aux termes de l'article L.1226-10 du code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin de travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise ; l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

Les possibilités de reclassement doivent être recherchées au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

C'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquitté de son obligation de reclassement, laquelle est de moyens, et de rapporter la preuve de l'impossibilité de reclassement qu'il allègue.

Pour justifier du respect de son obligation de reclassement, la société produit les lettres qu'elle a adressé aux autres sociétés du groupe afin de reclasser Monsieur [D] ainsi que les réponses négatives de ces dernières; elle produit également les contrats de travail des salariés visés par Monsieur [D] comme ayant obtenu des postes qu'il aurait pu occuper dans le cadre du reclassement, leurs curriculum vitae, la fiche de poste Opérateur de commandement lequel nécessite un « profil transport, logistique » et une « bonne maîtrise des outils informatiques » que Monsieur [D] n'a pas, le journal d'entrée et de sortie du personnel, la feuille de renseignements remplie par Monsieur [D] lequel a précisé être intéressé par le poste d'Opérateur de saisie traitement de texte et de Géomètre-Topographe, ainsi que les convocations des délégués du personnel et le compte-rendu de réunion s'agissant du reclassement de Monsieur [D].

S'agissant des fonctions que Monsieur [D] a exercées du 29 octobre 2014 au 19 janvier 2015, relatif à du classement de documentation de sécurité relative à des FLASH et FLH, pour lequel l'intéressé a bénéficié d'une délégation et pour lesquels plusieurs de ses collègues attestent de la réalité de cette mission, il ne résulte pas des pièces produites qu'il s'agissait d'un poste référencé mais plutôt d'une mission ponctuelle.

S'agissant des contestations de Monsieur [D], il convient de relever que les salariés auxquels il fait référence ([R], [S] et [Q]), ont des diplômes supérieurs aux siens et des compétences que le salarié n'a pas, qu'ils ne se trouvent pas dans la même situation que lui.

S'agissant de l'obligation de reclassement, il est constant que l'employeur n'a pas à assurer une formation qualifiante ou initiale dont le salarié ne dispose pas; tel est le cas en l'espèce, la société ne disposant pas de poste compatible avec les restrictions posées par le médecin du travail et relevant des compétences de Monsieur [D].

Force est de constater que la société a satisfait à son obligation de reclassement; le licenciement de Monsieur [D] repose sur une cause réelle et sérieuse; le jugement attaqué sera infirmé sur ce point. Monsieur [D] sera en conséquence débouté de sa demande en contestation de licenciement ainsi que des demandes salariales et indemnitaires subséquentes.

Sur le rappel sur indemnité de licenciement et de préavis:

Aux termes de l'article L.1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail dans les cas prévus par l'article L.1226-12 alinéa 2 du même code, ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité de licenciement prévue par l'article L.1234-9 ; toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

Le calcul des indemnités prévues aux articles L.1226-14 et L.1226-15 du code du travail doit se faire en fonction de la rémunération brute dont le salarié aurait bénéficié.

Monsieur [D] sollicite l'application des dispositions de l'article L1226-14 du Code du travail selon lequel doit être versé au salarié licencié pour inaptitude, « une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 » ; ainsi que les dispositions de l'article L.1226-14 qui fixe l'indemnité spéciale de licenciement au double de l'indemnité légale figurant à l'article L.1234-9 du même Code, sauf dispositions conventionnelles plus favorables.

Faute de telles dispositions conventionnelles, et en se basant sur un salaire de 2.110,00 euros, il sollicite un rappel sur indemnité de licenciement à hauteur de 3.049,48 euros ainsi que la somme de 422 euros au titre de congés payés afférents à l'indemnité de préavis.

La société conclut au débouté et fait valoir que son ancien salarié a été rempli de ses droits en ce qu'il a perçu la somme de 8.766,52 euros au titre de l'indemnité de licenciement.

Force est de constater au regard des pièces produites mais également du calcul opéré par Monsieur [D] dont il convient d'adopter les modalités, que l'indemnité de licenciement qu'il est en droit de percevoir doit être fixée à : 2 110/5 x 9 ans d'ancienneté (17 novembre 2006 au 13 novembre 2015) x 2 = 7.596,00 euros.

Il est manifeste que la société n'a pas versé la totalité de la somme qui devait revenir à Monsieur [D] au titre du préavis, en application de l'article l'article L.1234-5 du code du travail.

Monsieur [D] devait percevoir à ce titre la somme de 4.220 euros.

Eu égard aux sommes perçues au titre du solde de tout compte, il doit percevoir un reliquat de 3.049,48 euros.

La société COLAS RAIL sera condamnée à lui verser cette somme.

L'indemnité compensatrice prévue par l'article L.1226-14 du code du travail n'a pas la nature d'une indemnité compensatrice de préavis. Elle ne donne donc pas lieu à congés payés afférents. Monsieur [D] sera en conséquence débouté de sa demande formulée de ce chef.

Sur les demandes accessoires:

S'agissant des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile, il convient de confirmer le jugement ce qu'il a statué sur ces deux points, et de prévoir que la charge des dépens de 1ère instance et d'appel sera assumée par la société COLAS RAIL.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit que le licenciement prononcé à l'égard de Monsieur [M] [D] par la société COLAS RAIL était dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'il a condamné la société à lui verser des dommages-intérêts à ce titre et a calculé l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article 1234-5 du code du travail comme il l'a fait,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que le licenciement prononcé à l'égard de Monsieur [M] [D] par la société COLAS RAIL repose sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute en conséquence Monsieur [M] [D] des demandes indemnitaires et salariales subséquentes,

Condamne la société COLAS RAIL à verser à Monsieur [M] [D] la somme de 3.049,48 euros à titre de rappel sur indemnité de préavis,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société COLAS RAIL aux dépens de première instance et d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Luc LEBLANC, président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 17/02403
Date de la décision : 29/01/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°17/02403 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-29;17.02403 ?
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