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23/01/2020 | FRANCE | N°18/04230

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 23 janvier 2020, 18/04230


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53B



16e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 JANVIER 2020



N° RG 18/04230 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SOLW



AFFAIRE :



[B] [R]



C/



[L] [W] [X]



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Mai 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 2

N° RG : 16/08257



Expéditions exécutoires

Expéditions

Co

pies

délivrées le : 23.01.2020

à :



Me Oriane DONTOT de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53B

16e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 JANVIER 2020

N° RG 18/04230 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SOLW

AFFAIRE :

[B] [R]

C/

[L] [W] [X]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Mai 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 2

N° RG : 16/08257

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 23.01.2020

à :

Me Oriane DONTOT de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [B] [R]

né le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 5]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 20180608 - Représentant : Me Jean-louis SCHERMANN de la SELARL SELARL SCHERMANN MASSELIN ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R142

APPELANT

****************

Madame [L] [W] [X]

née le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 4] ([Localité 2])

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1859953 - Représentant : Me Pierre CYCMAN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0141

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Décembre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia GRASSO, Président chargé du rapport et Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Patricia GRASSO, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé daté du 2 septembre 1991, [N] [R] a reconnu devoir à Mme [L] [X] une somme de 430 000 euros au titre d'un prêt qu'elle lui avait fait le même jour.

[N] [R] est décédé le 30 septembre 2014, laissant comme unique héritier son frère, M. [B] [R]. Le notaire chargé de la succession a clôturé ses opérations le 13 mars 2015.

Le 13 mai 2015, l'avocat de Mme [X] a adressé un courrier de mise en demeure à M. [B] [R] aux fins de restitution de la somme prêtée.

Par courrier du 22 mai 2015, Maître [S], notaire, a indiqué à M. [B] [R] que la requête de Mme [X] ne pouvait être portée au passif de la succession du défunt 'en application des dispositions de prescription du code civil.

Suivant exploit d'huissier en date du 17 août 2016, Mme [L] [X] a assigné M. [B] [R] devant le tribunal de grande instance de Versailles en paiement de la somme de 94 150,33 euros outre 10 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 mai 2018, le tribunal de grande instance de Versailles a :

rejeté le moyen tiré de la prescription de l'action,

condamné M.[B] [R] à payer à Mme [L] [X] la somme de 94 150,33 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 17 août 2016,

débouté Mme [L] [X] de sa demande au titre de la résistance abusive,

condamné M. [B] [R] aux dépens.

condamné M. [B] [R] à payer à Mme [L] [X] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

ordonné l'exécution provisoire.

M. [B] [R] a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 15 juin 2018.

Par conclusions n 2 signifiées le 4 mars 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, M. [B] [R] demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris,

débouter Mme [L] [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions tendant à sa condamnation au paiement de la somme réclamée au titre d'une reconnaissance de dette établie le 2 septembre 1991 par son frère,

A titre subsidiaire,

déclarer Mme [X] irrecevable en tout cas fondée en sa demande d'indexation et en sa demande subsidiaire sur le fondement de la répétition de l'indû,

limiter à 65 553,08 euros le montant de la réclamation de Mme [X] et la débouter de sa demande de dommages et intérêts,

condamner Mme [X] à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

la condamner aux dépens et à payer la somme de 9 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions n 2 signifiées le 28 mars 2019, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions des parties, Mme [L] [X] demande à la cour de :

confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a jugé que l'action n'était pas prescrite,

le confirmer en particulier, en ce qu'il a condamné M. [B] [R] à lui payer la somme de 94.150,33 euros, avec intérêts de droit à compter de l'assignation et celle de 3.000 euros  sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire et pour le cas où, par extraordinaire, la cour d'appel infirmerait le jugement entrepris, en ce qu'il a relevé l'absence de prescription, 

condamner M. [B] [R] , en sa qualité d'unique héritier de [N] [R], , à lui payer la somme de  94.150,33 euros , avec intérêts de droit à compter de l'assignation introductive d'instance, sur le fondement de la répétition de l'indu, 

En toute hypothèse,

condamner M. [B] [R] au paiement de la somme supplémentaire de 10.000 euros   sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme venant s'ajouter à celle à elle accordée en première instance, ainsi qu'aux entiers dépens.

La clôture a été prononcée le 5 novembre 2019.   

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. [B] [R] soutient que pour qu'une mise en demeure fasse courir le délai de prescription encore faut-il qu'elle soit établie avant que l'action en paiement soit elle-même prescrite ; qu'en l'espèce, le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement fondée sur une reconnaissance de dette est le jour de la signature de l'acte qui correspond au jour où la somme a été remise ; qu'aucune mise en demeure n'ayant été adressée entre le 2 septembre 1991 et le 19 juin 2013, le délai initialement fixé au 2 septembre 2021 s'étant trouvé réduit par application de la loi du 17 juin 2008 et de l'article 2224 du code civil, l'action en paiement est prescrite ; qu'aucun élément ne vient conforter la thèse de Mme [X] selon laquelle sa créance deviendrait exigible au décès de [N] [R].

Mme [L] [X] réplique que le point de départ de la prescription de 5 ans a commencé à courir le 13 mai 2015, date de la mise en demeure adressée à M. [B] [R], de sorte que le 17 août 2016, date de l'assignation, l'action n'était pas prescrite ; qu'en tout état de cause, il avait été convenu avec [N] [R], en raison de leur vie commune, que le remboursement du prêt s'opérerait au décès de ce dernier ce qui confirmé par les attestations qu'elle verse aux débats ; que le point de départ de la prescription doit donc être fixé au 30 septembre 2014 et qu'à cet égard également son action n'est pas prescrite. 

Sur la prescription 

 

La reconnaissance de dette souscrite par [N] [R] est ainsi rédigée :

'Je soussigné, [N] [R], demeurant à [Adresse 2], reconnaît devoir à Mademoiselle [X] [L], [W], demeurant à [Adresse 3] la somme de 430 000 francs, pour un prêt qu'elle m'a fait ce jour.

Fait à Paris, le 2 septembre 1991.

Bon pour la somme de 430 000 francs'.

En vertu de l'article 2233 du code civil, 'la prescription ne court pas à l'égard d'une créance à terme, jusqu'à ce que le terme soit arrivé'. Il n'a, en l'espèce, été stipulé aucun terme pour la restitution des fonds prêtés. 

Mme [X] qui explique qu'elle partageait la vie de [N] [R], fait état d'un accord entre les parties au terme duquel, le remboursement de la somme prêtée s'opérerait au décès de [N] [R] ou après la revente du bien immobilier pour l'achat duquel le prêt avait été contracté.

Cependant outre le fait que M. [B] [R] conteste les déclarations de Mme [X] tenant tant à la vie commune de [N] [R] et Mme [L] [X] qu'à l'accord invoqué par cette dernière, les attestations versées aux débats sont insuffisamment probantes et ne permettent pas d'établir avec certitude que la volonté du défunt était que cette dette soit remboursée à son décès.

La reconnaissance de dette litigieuse ne comportant pas de terme pour la restitution des fonds, le point de départ du délai de prescription fixé à cinq ans pour obtenir le remboursement de la dette, est celui de la date d'envoi de la mise en demeure adressée à l'emprunteur par le prêteur. En l'espèce, le conseil de Mme [X] a envoyé à M. [B] [R] une mise en demeure de payer la somme de 430 000 francs soit 95 000 euros le 13 mai 2015 de sorte que le délai de prescription a commencé à courir à cette date.

L'action en paiement introduite par Mme [X] le 17 aoùt 2016 n'est donc pas prescrite. 

Sur la reconnaissance de dette et le quantum de la créance

M. [B] [R] relève que Mme [X] ne produit pas l'original de la reconnaissance de dette ; qu'elle n'est pas dans ces conditions recevable à agir. Il ajoute que le quantum de la créance est de 65 553,08 euros et non de 94 150,33 euros ; que la demande d'indexation est nouvelle et partant irrecevable ; qu'il en est de même de sa demande fondée sur la répétition de l'indû.

Sur le quantum de la somme réclamée , Mme [X] objecte qu'une somme de 430 000 francs en 1991,correspond, selon l'INSEE, à 94 150,33 euros en 2016 et qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle puisque ce montant correspond à sa demande en première instance ; qu'enfin, celle subsidiaire fondée sur la répétition de l'indû n'est pas nouvelle au visa de l'article 565 du code de procédure civile.  

La reconnaissance de dette souscrite par [N] [R] est parfaitement lisible et régulière au vu des dispositions de l'article 1326 ancien du code civil et l'appelant ne développe aucun grief à l'encontre de cet acte. Mme [X] est donc recevable à s'en prévaloir.

En ce qui concerne le quantum de la demande en paiement, M. [B] [R] prétend que Mme [X] formerait une demande d'indexation nouvelle et partant irrecevable en sollicitant le paiement de la somme de 94 150,33 euros alors que la contre valeur de 430 000 euros correspond à 65 553,08 euros. Toutefois, il importe de constater que dans son assignation introductive d'instance Mme [X] réclame le paiement de la somme de 94 150,33 euros ; qu'il ne s'agit donc pas d'une demande nouvelle ; que le moyen d'irrecevabilité tiré de l'application de l'article 564 du code de procédure civile doit être rejeté.

L'article 1895 du code civil dispose : 'L'obligation qui résulte d'un prêt d'argent n'est toujours que de la somme numérique énoncée au contrat'. Il s'ensuit qu'en l'absence d'une stipulation d'intérêts ou d'une clause d'indexation, Mme [X] n'est pas fondée à actualiser le montant de sa demande pour tenir compte de l'érosion monétaire.

Il convient en conséquence de condamner M. [B] [R] à verser à Mme [X] la somme de 65 553,08 euros avec intérêts au taux légal comme demandé par Mme [X] à compter du 17 août 2016.

Sur les dommages et intérêts

L'appelant sollicite le paiement d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts motif pris que Mme [X] n'aurait pas craint de le présenter comme malhonnête à l'égard des tiers voire de ses proches.

Les faits reprochés par M. [B] [R] à Mme [X] sont insuffisamment caractérisés pour les retenir comme fautifs ; qu'en l'absence de faute et de préjudice démontré, il y a lieu de rejeter la demande de M. [B] [R].

PAR CES MOTIFS, LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de la prescription de l'action en paiement introduite par Mme [L] [X] ;

L'INFIRME sur le surplus ;

Statuant à nouveau,

DECLARE l'action en paiement introduite par Mme [L] [R] recevable ;

CONDAMNE .M [B] [R] à payer à Mme [L] [X] la somme de 65553,08 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 août 2016 ;

DEBOUTE M.[B] [R] de sa demande de dommages et intérêts ;

DIT n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [B] [R] aux dépens.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Patricia GRASSO, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 18/04230
Date de la décision : 23/01/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 16, arrêt n°18/04230 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-23;18.04230 ?
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