La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2019 | FRANCE | N°18/05426

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 19 décembre 2019, 18/05426


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 4IA



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 DECEMBRE 2019



N° RG 18/05426 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SR22



AFFAIRE :



Association ACTION AIR







C/

Société ELCO HOLLAND BV

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Juin 2018 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° R

G : 2015F01023



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Martine DUPUIS

Me Oriane DONTOT









RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX NEUF DECEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Ver...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 4IA

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 DECEMBRE 2019

N° RG 18/05426 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SR22

AFFAIRE :

Association ACTION AIR

C/

Société ELCO HOLLAND BV

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Juin 2018 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2015F01023

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS

Me Oriane DONTOT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF DECEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Association ACTION AIR

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1860142

Représentant : Me Emmanuel DRAI de la SELEURL DRAI AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0418 -

APPELANTE

****************

Société ELCO HOLLAND BV

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 20180947

Représentant : Me Thierry MONTERAN et Marine SIMONNET de la SCP UGGC AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0261 -

Société ELCO LTD

[Adresse 6]

[Localité 5]

ISRAEL

Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 20180947

Représentant : Me Thierry MONTERAN et Marine SIMONNET de la SCP UGGC AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0261 -

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Octobre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Thérèse ANDRIEU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSE DU LITIGE

La société de droit néerlandais Elco Holland Bv, filiale de la société de droit israélien Elco Ltd, contrôlait la société par actions simplifiée de droit français Ace qui détenait elle-même la société de droit allemand Airwell Deutschland Gmbh et trois filiales françaises, formant le groupe Airwell, qui fournissait des systèmes de climatisation destinés au secteur résidentiel (branche RAC) et au secteur commercial (branche CAC).

En 2012, la société Elco Holland, souhaitant se séparer de l'activité CAC du groupe Airwell s'est rapprochée des sociétés de droit allemand Berlinerluft et Dubag Deutsche UnternehmensBeteiligungen Ag (ci-après, la société Dubag).

La société Elco Holland a cédé les actions de la société ACE le 11 juin 2013 à la société Dubag qui revendait l'ensemble le 29 du même mois à la société de droit allemand AW Industries,

Le 1er avril 2014, les sociétés Ace, Airwell Industrie France, Wesper Industrie France et Airwell France du groupe Airwell ont été placées en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Versailles.

Un plan de cession des actifs a été homologué le 15 juillet 2014 et cent quatre vingt cinq salariés sur les cinq cents ont été licenciés.

Estimant les sociétés Elco Holland responsables de leur licenciement, cent quarante neuf salariés des sociétés Ace, Airwell Industrie France, Wesper Industrie France et Airwell France

ont constitué l'association Action Air ayant pour objet 'la représentation, l'assistance et la défense des salariés des sociétés Airwell France, Airwell Industrie France, Wesper Industrie France et ACE telles que constituées à l'intérieur du groupe Airwell et encore présents au 31 mars 2014".

Par acte d'huissier du 25 novembre 2015, l'association Action Air a assigné les sociétés Elco Ltd et Elco Holland devant le tribunal de commerce de Versailles aux fins de les voir condamner à verser à chacun la somme de 13600 € soit la somme de 2 046 400 € à titre de dommages et intérêts pour légèreté blâmable.

Par jugement du 7 décembre 2016, le tribunal de Versailles s'est déclaré compétent.

Par arrêt avant dire-droit du 4 juillet 2017, la cour d'appel de Versailles a interrogé les parties sur l'application de la compétence spéciale à l'action de l'association des salariés au vu du règlement européen et du Conseil n° 1215/2012.

Par arrêt du 28 novembre 2017, la cour d'appel de Versailles a dit que le tribunal de Versailles était incompétent pour connaître du litige et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir

Par actes d'huissier du 30 septembre 2015, Maître [L] [S], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Ace et de ses filiales, a assigné les sociétés Elco Holland, Elco Ltd et

par acte d'huissier du 29 octobre 2015 a assigné la société Dubag devant le tribunal de commerce de Versailles en paiement de dommages et intérêts pour insuffisance d'actif dont elles seraient directement responsables.

La jonction des procédures a été ordonnée.

Par conclusions remises à l'audience du 9 février 2018, l'association Action Air est intervenue volontairement à l' instance

Par jugement du 29 juin 2018, le tribunal de commerce de Versailles a :

- Dit l'association Action Air irrecevable en ses demandes formées à l'encontre de la société de droit israélien Elco Ltd ;

- Dit l'association Action Air irrecevable en ses demandes formées à l'encontre de la société de droit hollandais Elco Holland Bv ;

- S'est déclaré incompétent pour traiter des demandes formées par l'association Action Air à l'encontre de la société de droit allemand Dubag Deutsche Unternehmensbeteiligungen Ag ;

- Renvoyé l'association Action Air à mieux se pourvoir ;

- Débouté Maître [S] ès-qualités de liquidateur des sociétés Ace, Airwell France, Airwell Industrie France, Wesper Industrie France de l'ensemble de ses demandes ;

- Débouté la société de droit israélien Elco Ltd, la société de droit hollandais Elco Holland Bv et la société de droit allemand Dubag Deutsche Unternehmensbeteiligungcn Ag de l'ensemble de leurs demandes reconventionnelles formées à l'encontre de Maître [S] ès-qualités de liquidateur des sociétés Ace, Airwell France, Airwell Industrie France, Wesper Industrie ;

- Débouté la société de droit israélien Elco Ltd, la société de droit hollandais Elco Holland Bv de leur demande reconventionnelle dirigée contre Maître [L] [S] à titre personnel,

- Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 26 juillet 2018, l'association Action Air a interjeté appel du jugement à l'égard de la société Gram Sogn Holding venant aux droits de la société Dubag et a saisi la cour d'un appel compétence par assignation à jour fixe enrôlé sous le n° 18/05425.

L'association Action Air par dernières conclusions notifiées le 18 octobre 2018 a demandé à la cour pour l'essentiel d'infirmer le jugement du chef de la disjonction et de la compétence et statuant à nouveau de juger que la juridiction compétente pour entendre sa demande d'intervention volontaire était le tribunal de commerce de Versailles.

Par dernières conclusions notifiées le 16 octobre 2018 , la société Gram Sogn Holding venant aux droits de la société Dubag a demandé à la cour de statuer sur la validité de la déclaration d'appel et de la déclarer nulle en l'absence de désignation des salariés représentés, de confirmer le jugement à titre subsidiaire sur la compétence.

Par arrêt du 27 novembre 2018, la cour d'appel de Versailles a :

-infirmé le jugement du tribunal de commerce de Versailles en ce qu'il a disjoint l'instance principale de l'intervention volontaire et en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour traiter des demandes formées par l'association Action Air,

et statuant à nouveau,

-dit que la société Gram Sogn Holding venant aux droits de la société Dubag n'avait pas la possibilité de décliner la compétence territoriale du tribunal de commerce de Versailles à l'encontre du seul intervenant volontaire,

-rejeté toutes autres demandes,

-renvoyé en conséquence les parties à poursuivre l'instance devant le tribunal de commerce de Versailles,

-condamné la société Gram Sogn Holding à verser la somme de 3000 € à l'association Action Air sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 26 juillet 2018, l'association Action Air a interjeté appel du même jugement du 29 juin 2018 à l'égard des sociétés Elco Holland BV et Elco Holland LTD sous le n° 18-05426.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 24 avril 2019, l'association Action Air demande à la cour de :

- Débouter les sociétés Elco Ltd et Elco Holland BV de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

- Juger que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles le 28 novembre 2017 n'était pas revêtu de l'autorité de la force de la chose jugée dans l'instance distincte soumise au tribunal de commerce de Versailles et ayant fait l'objet du jugement du 29 juin 2018 ;

- Juger que la disjonction opérée par le tribunal de commerce de Versailles viole les dispositions de l'article 367 du code de procédure civile ;

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Versailles le 29 juin 2018 ;

Et statuant à nouveau,

- Juger recevable l'intervention volontaire de l'association Action Air ;

- Juger que l'association Action Air a intérêt et qualité à agir ;

- Juger que les agissements d'Elco Ltd et d'Elco Holland BV caractérisent une légèreté blâmable constitutive d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil ;

- Juger que cette faute est directement responsable de l'ouverture du redressement judiciaire ouvert le 1er avril 2014 à l'encontre des sociétés Ace, Airwell France, Airwell Industrie France et Wesper Industrie France composant l'activité « professionnelle » du groupe Airwell et du licenciement de leurs cent quatre vingt-cinq salariés ;

- Condamner solidairement Elco Ltd et Elco Holland BV au paiement de la somme de 50.624 euros par salarié requérant en dédommagement du préjudice financier et moral subi ;

- Condamner solidairement les sociétés Elco Ltd, Elco Holland BV au paiement de la somme de 100.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Martine Dupuis conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 26 août 2019, les sociétés Elco Holland et Elco Ltd prient la cour de :

A titre principal :

- Juger que l'association Action Air est irrecevable en ses demandes à l'encontre des sociétés Elco Holland Bv et Elco Ltd compte tenu de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 novembre 2017 ;

- Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Versailles du 29 juin 2018 en ce qu'il a déclaré l'association Action Air irrecevable en ses demandes à l'encontre des sociétés Elco Holland BV et Elco Ltd ;

A titre subsidiaire :

- Dire et juger que l'association Action Air est irrecevable en ses demandes à l'encontre des sociétés Elco Holland BV et Elco Ltd en l'absence de qualité et d'intérêt à agir ;

- Déclarer irrecevable l'association Action Air en ses demandes à l'encontre des sociétés Elco Holland BV et Elco Ltd ;

A titre plus subsidiaire :

- Dire que l'association Action Air n'établit pas que la société Elco Ltd aurait commis une faute engageant sa responsabilité au sens de l'article 1382 du code civil ;

- Débouter l'association Action Air de ses demandes à l'encontre des sociétés Elco Holland Bv et Elco Ltd ;

A titre encore plus subsidiaire :

- Dire que l'association Action Air ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité entre la faute reprochée et le préjudice dont il est sollicité réparation;

- Débouter l'association Action Air de ses demandes à l'encontre des sociétés Elco Holland Bv et Elco Ltd ;

A titre infiniment subsidiaire :

- Dire et juger que l'association Action Air ne rapporte pas la preuve d'un préjudice indemnisable ;

- Débouter l'association Action Air de ses demandes à l'encontre des sociétés Elco Holland Bv et Elco Ltd ;

En tout état de cause :

- Débouter l'association Action Air de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner l'association Action Air à payer à la société Elco Holland Bv et la société Elco Ltd la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- La condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué par l'AARPI JRF Avocats, représentée par Maître Oriane Dontot, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2019.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'irrecevabilité de la demande de l'association Action Air pour autorité de la chose jugée

L'association Action Air fait valoir qu'elle n'est pas irrecevable à agir dans la mesure où les conditions requises exigées pour qu'il y ait autorité de la chose jugée tirée de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 27 novembre 2017 ne sont pas réunies.

A l'appui de sa demande, elle fait valoir que :

-l'effet relatif de la chose jugée des arrêts d'appel interdisait au tribunal de déclarer son intervention volontaire irrecevable au visa de l'arrêt du 28 novembre 2017; elle estime que son

intervention s'insère dans une instance différente de celle ayant donné lieu à l'arrêt du 28 novembre 2017 dans la mesure où la société Dubag est présente à l'instance, où la responsabilité conjointe des sociétés Dubag et Elco est examinée alors que seule devant la cour était examinée la responsabilité des sociétés Elco, les sociétés Elco ayant accepté la compétence du tribunal de commerce de Versailles pour des faits identiques.

-qu'il existe une connexité entre les demandes dirigées à l'égard des sociétés Elco Holland ,Elco LTD et Dubag dans la présente instance qui n'existait pas devant la cour ayant rendu l'arrêt du 28 novembre 2017 , que la nature de l'action intentée n'est pas la même, la cour d'appel dans son arrêt ayant dit que l'action de l'association Action Air ne revêtait pas un caractére extracontractuel alors-que la cour de cassation dans un arrêt du 28 juin 2018 a confirmé le caractère extra-contractuel de l'action intentée par des salariés contre des actionnaires au visa de la théorie de la 'négligence blâmable'.

-que le jugement entrepris par son dispositif porte atteinte au principe d'une bonne administration de la justice ayant reconnu pour certains chefs dont il était saisi sa compétence et s'étant jugé incompétent pour d'autres chefs de demandes. Elle demande à la cour de prononcer l'infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la disjonction d'instance.

Les sociétés Elco Holland BV et Elco LTD concluent à la confirmation du jugement qui a déclaré irrecevable l'association Action Air pour autorité de la chose jugée tirée de l'arrêt devenu définitif de la cour d'appel de Versailles rendu le 28 novembre 2017. Elles font valoir que l'Association Action Air a fait le choix plutôt que de saisir les juridictions désignées par la cour d'appel de Versailles pour connaître de sa demande à leur égard, de régulariser des conclusions d'intervention volontaire dans la procédure introduite par Me [S] es qualités et de solliciter de nouveau leur condamnation sur le même fondement à leur verser des dommages et intérêts pour légèreté blâmable et ce alors que la décision rendue le 28 novembre 2017 est définitive.

****

L'article 122 du code de procédure civile dispose que 'constitue une fin de non recevoir qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, de défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

L'article 1355 du code civil prévoit que 'l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit faite entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité'.

La cour constate que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 27 novembre 2017 dont il n'est pas contesté qu'il n'a pas fait l'objet de pourvoi et est devenu définitif a statué sur le contredit interjeté par les sociétés Elco Holland BV et Elco Holding LTD d'un jugement du tribunal de commerce du 7 décembre 2016 dans lequel elles avaient été assignées par l'association Action Air.

Le tribunal de commerce de Versailles s'était déclaré compétent pour connaître du litige.

La cour d'appel de Versailles a infirmé le jugement, déclaré le tribunal de Versailles incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Il convient d'examiner si les trois conditions pour que l'autorité de la chose jugée soit retenue sont réunies.

L'identité de demande et de cause

Dans l'instance initiée par l'association Action Air à l'encontre des sociétés Elco ayant donné lieu à l'arrêt du 28 novembre 2017 de la cour d'appel de Versailles, celle-ci fondait son action sur une responsabilité en application des dispositions de l'article 1382 ancien du code civil reprochant aux sociétés Elco leur légèreté blâmable à l'origine du préjudice subi par les salariés et demandant leur condamnation à verser la somme de 13600 € pour chacun de ses membres du fait de leur licenciement qui les a privés de leurs indemnités conventionnelles ainsi que du préjudice moral qui en est résulté.

Dans la présente instance, l'association Action Air dans ses dernières conclusions d'intervention volontaire demande 'de juger que les agissements des sociétés Elco Holland BV, et Elco Ltd caractérisent une légèreté blâmable constitutive d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil, juger que cette faute est directement responsable de l'ouverture du redressement judiciaire ouvert le 1er avril 2014 des sociétés Airwell France, Airwell industrie France composant l'activité 'professionnelle ' du groupe Airwell et du licenciement de leurs 185 salariés, condamner solidairement les sociétés Elco Holland et Elco Holding au paiement de la somme de 50624 € par salarié requérant un dédommagement du préjudice financier et moral subi.

Force est de constater que la demande et la cause dans les deux instances sont identiques, que la différence dans le montant de la somme sollicitée pour chaque salarié est sans incidence ne s'agissant que d'un quantum.

L'identité des parties :

Les parties s'agissant de l'association Action Air et les sociétés Elco sont identiques tant dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 28 novembre 2017 que dans la présente instance.

Pour tenter de contourner la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée , l'association Action Air fait valoir que son intervention volontaire s'insère dans une instance différente de celle ayant donné lieu à l'arrêt du 28 novembre 2017 dans la mesure où la société Dubag est présente à l'instance et où la responsabilité conjointe des sociétés Dubag et Elco est examinée alors que seule devant la cour était examinée la responsabilité des sociétés Elco, les sociétés ayant accepté la compétence du tribunal de commerce de Versailles pour des faits identiques.

L'association Action Air ne peut tirer argument du fait que la société Dubag est attraite dans la présente instance pour remettre l'autorité de la chose jugée en cause quant à l'identité des parties, l'intervention de la société Dubag dans la présente instance assignée par Maître [S] n'étant pas de nature à avoir une incidence concernant l'identité des parties d'autant que l'association Action Air ne s'oppose qu'aux sociétés Elco Holland et Elco BV ne dirigeant aucune demande de fond à l'égard de la société Dubag

Il ressort de ce qui précède que les demandes sont identiques et formées entre les mêmes parties dans les deux procédures.

Pour tenter d'écarter la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, l'association Action Air fait valoir que la nature de l'action intentée n'est pas la même, la cour d'appel dans son arrêt ayant dit que l'action de l'association Action Air ne revêtait pas un caractère extra-contractuel alors-que la cour de cassation dans un arrêt du 28 juin 2018 a confirmé le caractère extra-contractuel de l'action intentée par des salariés contre des actionnaires au visa de la théorie de la 'négligence blâmable'.

L'association Action Air ne peut exciper d'une jurisprudence de la cour de cassation postérieure à l'arrêt du 28 novembre 2017 sur la qualification de l'action des salariés pour légèreté blâmable à l'égard des employeurs pour invoquer 'l'effet relatif des décisions de justice'.

La seule voie qui lui était réservée pour critiquer l'arrêt da la cour d'appel de Versailles était le pourvoi en cassation. Elle ne peut par la suite alors qu'elle n'a pas engagé de pourvoi et que la décision est devenue définitive la remettre en cause par le biais d'une intervention volontaire dans une instance initiée par une autre partie et considérer que dès lors elle n'a qu'un caractère relatif qui ne s'imposerait donc pas.

Elle invoque par-ailleurs l'existence d'une connexité entre les demandes dirigées à l'égard des sociétés Elco et Dubag dans la présente instance qui n'existait pas devant la cour ayant rendu l'arrêt du 28 novembre 2017.

Elle s'appuie sur l'ordonnance du 28 octobre 2016 rendue par le tribunal de commerce qui a ordonné la jonction des procédures pour invoquer cette connexité, ordonnance qui n'est pas au demeurant versée au débat.

En tout état de cause, il ressort du jugement rendu le 29 juin 2018 par le tribunal de commerce de Versailles qu'une ordonnance de jonction a été rendue entre les instances introduites par actes d'huissier du 30 septembre 2015 par Maître [L] [S], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Ace et de ses filiales à l'égard des sociétés Elco Holland, Elco Ltd et

celle introduite par acte d'huissier du 29 octobre 2015 à l'égard de la société Dubag devant le tribunal de commerce de Versailles.

Le moyen de l'association Action Air selon lequel il y aurait une connexité qui se traduirait par la jonction des procédures et qui n'aurait pas été présente dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 novembre 2017 est inopérant , la jonction des procédures relevant seulement d'un souci de bonne administration de la justice d'une part, et d'autre part l'association Action Air n'expliquant pas en quoi cette connexité alléguée viendrait remettre en cause de l'autorité de la chose jugée qui lui est opposée.

Enfin, elle considère que par son dispositif, le jugement entrepris porte atteinte au principe d'une bonne administration de la justice ayant reconnu pour certains chefs dont il était saisi sa compétence et s'étant jugé incompétent pour d'autres chefs de demandes.

La cour relève que le principe d'une bonne administration de la justice qui s'appuie sur la critique du dispositif du jugement du tribunal de commerce de Versailles du 29 juin 2018 n'est pas de nature à remettre en cause une décision de justice définitive revêtue de l'autorité de la chose jugée.

En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont déclaré l'association Action Air irrecevable en ses demandes à l'égard des sociétés Elco accueillant la fin de non recevoir pour autorité de la chose jugée tirée de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 novembre 2017.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré l'association Action Air irrecevable en ses demandes.

L'association Action Air est condamnée aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct.

Elle est condamnée à verser la somme de 5000 € aux sociétés Elco Holland BV et Elco LTD en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme dans les limites de l'appel le jugement rendu le 29 juin 2018 par le tribunal de commerce de Versailles qui a déclaré l'association Action Air irrecevable en ses demandes formées à l'égard de la société Elco LTD et de la société Elco Holland BV,

Condamne l'association Action Air aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct,

Condamne l'association Action Air à verser aux sociétés Elco Holland et Elco LTD la somme de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 18/05426
Date de la décision : 19/12/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 12, arrêt n°18/05426 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-19;18.05426 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award