La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2019 | FRANCE | N°18/04979

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 19 décembre 2019, 18/04979


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 58B



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 DECEMBRE 2019



N° RG 18/04979 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SQQE



AFFAIRE :



SA HELVETIA ASSURANCES

...



C/

SA ALLIANZ IARD

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 27 Juin 2018 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2016F01684r>


Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Chantal DE CARFORT

Me Valérie LEGAL,







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX NEUF DECEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versaille...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58B

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 DECEMBRE 2019

N° RG 18/04979 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SQQE

AFFAIRE :

SA HELVETIA ASSURANCES

...

C/

SA ALLIANZ IARD

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 27 Juin 2018 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2016F01684

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Chantal DE CARFORT

Me Valérie LEGAL,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF DECEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA HELVETIA ASSURANCES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Chantal DE CARFORT de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 334 - N° du dossier 14718 - Représentant : Me Henri JEANNIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0480

SA COOPERATIVE ARTISANALE DE TRANSPORT 'SCAT'

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentant : Me Chantal DE CARFORT de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 334 - N° du dossier 14718 - Représentant : Me Henri JEANNIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0480

APPELANTES

****************

SA ALLIANZ IARD

N° SIRET : 542 11 0 2 91

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentant : Me Valérie LEGAL, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 274 - N° du dossier 180067 - Représentant : Me Caroline COURBRON TCHOULEV, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0827

SARL AS ENERGY anciennement AAS CARBURANTS

N° SIRET : 444 02 5 5 899

[Adresse 5]

[Adresse 6]

78700 CONFLANS-SAINTE-HONORINE

Représentant : Me Valérie LEGAL, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 274 - N° du dossier 180067 - Représentant : Me Caroline COURBRON TCHOULEV, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0827

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Octobre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Thérèse ANDRIEU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSE DU LITIGE

La société AS Energy, anciennement dénommée AAS Carburants, exerce une activité de distribution de carburants, d'avitaillement fluvial et maritime en produits pétroliers. Elle est couverte par une assurance auprès de la société Allianz Iard (ci après, la société Allianz).

La société Coopérative Artisanale de Transport (ci-après, Scat) exploite des péniches et des pousseurs sur le bassin de la Seine. Ses unités sont couvertes par une police d'assurance fluviale de la société Helvetia Assurances (ci-après, la société Helvetia).

La SCAT exploite pour le compte de la société Calcia un automoteur dénommé « Millenium » qui se fournit uniquement auprès de la barge « Sargasse » de la société Aas Carburants.

Le 24 janvier 2014, le « Millenium » était arrêté pour un entretien technique sur le moteur. Une anomalie était détectée concernant la pression du gasoil et il était alors découvert que la cause était liée à la présence d'eau dans les cuves du carburant du bateau. La Scat vidangeait l'intégralité des cuves et rachetait du gasoil pour une somme totale de 26.655,24 euros.

Elle estimait avoir subi des pertes d'exploitation évaluées à 21.500 euros en raison de dix-neuf jours d'immobilisation du bateau.

La société Helvetia indemnisait la Scat à hauteur de 43.455,24 euros après déduction d'une franchise à hauteur de 1500 € pour avaries et de 7625 € pour les pertes d'exploitation.

Estimant le préjudice causé par la société Aas Carburants, les sociétés Helvetia et Scat tentaient d'obtenir un règlement amiable auprès d'elle et de son assureur concernant la réparation du préjudice subi.

Par acte extrajudiciaire du 30 août 2016, les sociétés Helvetia et Scat assignaient les sociétés Aas Carburants et Allianz devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de les voir condamner à leur payer respectivement les sommes en principal de 43.455,24 euros et 9.125 euros en réparation du préjudice subi.

Par jugement du 27 juin 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- Débouté la société Aas Carburants et la société Allianz Iard de leur demande de déclarer irrecevables les demandes de la société Helvetia Assurances et la société Coopérative Artisanale de Transport, pour défaut de qualité à agir par absence de subrogation ;

- Limité l'intérêt à agir de la société Coopérative Artisanale de Transport à la somme de 6.036,19 euros ;

- Débouté la société Helvetia Assurances et la société Coopérative Artisanale de Transport de toutes leurs demandes pour cause de prescription ;

- Condamné solidairement la société Helvetia Assurances et la société Coopérative Artisanale de Transport à payer la somme de 2 000 euros à la société Aas Carburants et la société Allianz Iard au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné solidairement la société Helvetia Assurances et la société Coopérative Artisanale de Transport aux entiers dépens ;

- Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.

Par déclaration du 13 juillet 2018, les sociétés Helvetia et SCAT ont interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 25 juin 2019, les sociétés Helvetia et Scat ont demandé à la cour de :

- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- Dire et déclarer l'action de la Scat et de la compagnie Helvetia recevable et bien fondée,

En conséquence,

- Condamner in solidum la société As Energy et la compagnie Allianz Iard à payer à la société Helvetia Assurances :

la somme de 43.455, 24 euros, outre intérêts légaux à compter du 30 août 2016 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil

la somme de 8.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner in solidum la société As Energy (ex- Aas Carburants) et la compagnie Allianz Iard à payer à la Scat :

la somme de 9.125 euros, outre intérêts légaux à compter du 30 août 2016 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil

la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner les intimées aux entiers dépens.

Subsidiairement,

- Infirmer le jugement entrepris,

Et statuant à nouveau,

- Dire et déclarer l'action de la société Scat et de la compagnie Helvetia recevable et bien fondée,

En conséquence :

- Condamner in solidum la société As Energy (ex- Aas Carburants) et la compagnie Allianz Iard à payer à la société Helvetia Assurances :

la somme de 43.455, 24 euros, outre intérêts légaux à compter du 30 août 2016 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil.

la somme de 7.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner in solidum la société As Energy et la compagnie Allianz Iard à payer à la Scat

la somme de 9.125 euros, outre intérêts légaux à compter du 30 août 2016 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil ;

la somme de 1 .000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner les défenderesses aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par Maître de Carfort, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 18 septembre 2019, les sociétés Allianz Iard et As Energy ont demandé à la cour de :

- Prendre acte de ce que les sociétés As Energy et Helvetia Assurances forment par les présentes conclusions un appel incident,

- Réformer le jugement en ce que la société Helvetia Assurances a été jugée subrogée dans les droits de la société SCAT,

Et, statuant à nouveau sur ce point :

- Dire que la société Helvetia Assurances ne bénéficie ni d'une subrogation légale ni d'une subrogation conventionnelle,

- En conséquence, déclarer irrecevables les demandes de la société Helvetia Assurances, pour défaut de qualité et d'intérêt à agir,

- Confirmer le jugement en ce que les demandes de la société Scat ont été limitées à la somme de 6.036,19 euros,

- Confirmer le jugement, par substitution de motifs, en ce que les demandes des sociétés Helvetia Assurances et SCAT ont été déclarées irrecevables pour cause de prescription sur le fondement de l'article 1648 du code civil,

- Dire et juger que les sociétés Helvetia Assurances et Scat ne sont pas fondées à invoquer le bénéfice de la prescription quinquennale,

- Dire et juger que les sociétés Helvetia Assurances et Scat ne sont pas fondées à exercer une action au titre des articles 1245 et suivants du code civil (anc. 1386-1),

- Dire et juger que la seule action dont disposaient les sociétés Helvetia Assurances et Scat était l'action prévue par les articles 1641 et suivants du code civil,

En conséquence,

- Déclarer irrecevables les demandes des sociétés Helvetia Assurances et Scat, pour cause de prescription,

Subsidiairement, dans l'hypothèse où, par impossible, les demandes seraient jugées recevables :

- Débouter les sociétés Helvetia Assurances et SCAT de l'ensemble de leurs demandes, pour absence de fondement,

Plus subsidiairement,

- Débouter les sociétés Helvetia Assurances et SCAT de l'ensemble de leurs demandes, pour défaut de justification du quantum.

En tout état de cause,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a été alloué aux sociétés As Energy et Allianz Iard la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Y ajoutant,

- Condamner solidairement les sociétés Scat et Helvetia Assurances à payer la somme de 5.000 euros aux sociétés As Energy et Allianz Iard.

- Condamner solidairement les sociétés Scat et Helvetia Assurances à supporter les entiers dépens de la présente procédure.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 septembre 2019.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'irrecevabilité à agir de la société Helvetia pour défaut de qualité à agir

Les sociétés AS Energy et Allianz Iard concluent à l'infirmation du jugement qui a déclaré recevable à agir la société Helvetia qui serait subrogée dans les droits de la Scat.

Le défaut de subrogation légale

L'article L 121-12 du code des assurances prévoit que, pour être subrogé légalement, l'assureur doit rapporter la preuve du paiement d'une indemnité d'assurance et que ce paiement a été effectué en application des garanties souscrites.

Les sociétés AS Energy et Allianz qui ne contestent plus en appel la preuve du paiement relèvent que celui-ci doit être réalisé en application des garanties souscrites ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Elles considèrent que l'article B 1.3 des conditions générales du contrat d'assurances prévoit l'exclusion spécifique des 'dépenses résultant du remplacement ou de la réparation des pièces affectées d'un vice caché'. Elles font valoir que la présence d'eau dans le carburant constitue un vice caché, que dès lors la somme de 46544,05 € a été réglée par geste commercial insusceptible de générer une subrogation légale.

Elles font état à titre subsidiaire de ce que la somme de 46544,05 € n'était pas due au terme du contrat au regard des conditions particulières, que seule la somme de 1490 € en application de la police sur celle de 26655,24 € versée au titre du préjudice matériel était due.

En réplique, la société Helvetia fait valoir que la vidange complète des cuves caractérise une avarie aux 'dépendances du moteur' conformément à l'article 1 des conditions particulières de la police et que les sommes versées devaient l'être au risque autrement de devoir engager des frais supplémentaires dus pour le remplacement du moteur qui aurait été endommagé.

****

L'article 1 des conditions particulières de la police d'assurance prévoit que sont garantis les dommages et pertes suite à perte totale / délaissement ou avaries particulières corps moteurs et dépendances, équipements spéciaux, mobiliers.

L'article B 1.5 des conditions générales dispose que sont exclues de la garantie les dépenses résultant du remplacement ou de la réparation des pièces affectées d'un vice caché.

En l'espèce, ce n'est pas une pièce du moteur qui aurait été éventuellement affectée d'un vice caché mais c'est le carburant qui risquait d'endommager le moteur.

Dès lors, la preuve est rapportée de ce que le règlement a été effectué en vertu des dispositions de l'article 1 des conditions particulières de la police, la pollution du carburant étant une avarie qui a nécessité une vidange complète.

Les sociétés AS Energy et Allianz contestent le montant des sommes versées et soutiennent que seule la somme de 1490 € serait due sur celle réglée d'un montant de 26655,24 € au vu des postes de préjudice énoncés à l'article B.1.1 des conditions générales et de la clause 1 des conditions particulières, la société Helvetia qui a versé des sommes supérieures ayant voulu faire un geste commercial.

En réplique, la société Helvetia fait valoir que l'intégralité des dépenses prises en charge relèvent des conditions générales prévues à l'article B1.2.

Il ressort du chapitre des conditions générales consacré à l'étendue de la garantie que :

Dans la limite d'un capital supplémentaire équivalent à la valeur d'assurance du bateau sont également couverts au titre de la présente garantie notamment .... les dépenses raisonnablement exposées en vue de préserver le bateau d'un événement garanti ou d'en limiter les conséquences.

C'est donc à juste titre que la société Helvetia fait valoir avoir exposé de façon raisonnable des dépenses pour éviter les dommages matériels qui auraient été consécutifs aux 'bris de pièces de moteur' garantis à l'article 7 des mêmes conditions générales.

Les dépenses ont été nécessaires pour une reprise de la navigation s'agissant de l'analyse du carburant, la vidange des cuves, la destruction du carburant pollué, son remplacement ce qui a permis de limiter les conséquences qui auraient pu être plus graves.

Le règlement du préjudice par la société Helvetia relève de l'application de l'article B1.2.

En conséquence, les conditions de la subrogation légale sont remplies sans qu'il soit nécessaire dès lors d'analyser l'existence d'une subrogation conventionnelle.

La société Helvetia qui est subrogée dans les droits de son assuré a qualité à agir.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré la société Helvetia recevable à agir.

Sur la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité à agir de la société SCAT pour partie des sommes allouées

La société ES Energy et la société Allianz concluent à la confirmation du jugement qui limite les demandes de la Scat à la somme de 6036,19 €, l'ayant jugée irrecevable pour le surplus de ses demandes.

Elles ne contestent pas en appel la qualité et l'intérêt à agir de la Scat mais se limitent à indiquer que la société Scat a reçu la somme de 46544,05 € et non celle de 43455,24 € , que dès lors, elle a conservé à sa charge non pas la somme de 9125 € mais celle de 6036 €.

Il ressort de la quittance de sinistre que la franchise s'élève à 9125 € et le montant net versé à 43455,24 €.

La société Helvetia explique que si le montant total versé est de 46544,05 €, c'est parce qu'à la somme de 43455,24 € qui indemnise les avaries particulières et les pertes d'exploitation s'ajoute la somme de 3088,81 € pour le remboursement des frais d'expertise avancés par la Scat.

Au regard de la quittance de sinistre précitée et d'un 'dispache' du 4 juillet 2014 établi par le service d'indemnisation pour le 'millenium' qui fait apparaître dans le décompte de la somme due, les frais d'expertise pour un montant de 3088,81 €, la Scat est recevable à solliciter le paiement de la somme de 9125 € qui reste à sa charge, la somme de 46544,05 € étant justifiée dans la totalité de son montant contrairement à ce que soutiennent les sociétés intimées.

Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription

Les sociétés Scat et Helvetia concluent à l'infirmation du jugement qui les a déclarées prescrites dans leur action.

Elles soutiennent que la présence d'eau dans un carburant, si elle est autorisée et ne constitue pas un vice, ne doit pas dépasser pour autant certaines quantités, qu'en l'espèce le carburant n'était pas conforme aux spécifications du produit. Elles estiment que la société AAS Carburants n'a pas fourni un produit à la Scat qui avaient la qualité attendue .

Elles considèrent que leur action fondée sur la délivrance par la société AAS Carburants d'un produit non conforme n'est pas prescrite dans la mesure où l'action a été introduite dans un délai de moins de cinq ans à compter de la découverte de la non conformité.

Elles concluent à l'infirmation du jugement.

Les sociétés AS Energy et Allianz iard concluent à la confirmation du jugement qui a déclaré l'action prescrite. Elles font valoir que l'action engagée par les sociétés Scat et Helvetia est une action en garantie des vices cachés ; le prétendu défaut invoqué du carburant, si tant est qu'il puisse être établi, revêt toutes les caractéristiques d'un vice caché. Elles considèrent qu'un fondement de responsabilité plus générale au cas d'espèce ne peut trouver application. Enfin, elles relèvent que c'est en vain que les sociétés appelantes tentent d'invoquer la responsabilité pour produits défectueux.

Elles rappellent qu'en application de l'article 1648 du code civil, l'action doit être introduite dans un délai de deux ans à compter de la découverte de la pollution du carburant le 24 janvier 2014, que l'action ayant été introduite par acte d'huissier du 29 août 2016 soit plus de deux ans après la découverte du vice, elle est prescrite.

****

Pour déterminer si l'action est prescrite, il convient de définir la nature de l'action engagée, les parties étant en désaccord sur ce point.

Il convient de rappeler que la non conformité de la chose aux spécifications convenues par les parties est une inexécution de l'obligation de délivrance. En revanche, la non-conformité de la chose à sa destination normale ressortit de la garantie des vices cachés;

L'article 1641 du code civil dispose que 'le vendeur est tenu de la garantie des vices cachés

de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus'.

L'article 1648 du code civil édicte que 'l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice'.

Les analyses confiées à Intertek révèlent une quantité d'eau de 470 mg/kg dans le gasoil alors que le seuil de tolérance est de 200 mg/kg.

La présence d'eau dans le carburant est donc incontestable ce que reconnaît le cabinet Equad mandaté plusieurs mois après pour donner son avis.

La présence d'eau dans le carburant dans une quantité supérieure à celle requise et révélée lors de l'intervention technique pour l'entretien du moteur le 24 janvier 2014 caractérise un vice caché, le défaut de conformité du carburant à sa destination normale constituant le vice prévu par les articles 1641 et suivants du code civil et non une non-conformité.

Contrairement à ce que soutiennent les sociétés Scat et Helvetia, la présence d'eau dans le gasoil n'est donc pas un manquement à l'obligation de délivrance mais caractérise bien un vice caché.

L'action en garantie des vices cachés engagée par les sociétés Scat et Helvetia est donc prescrite, l'assignation introduite le 29 août 2016 l'ayant été plus de deux ans à compter de la découverte du vice soit le 24 janvier 2014.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a accueilli la fin de non recevoir tirée de la prescription et déclaré en conséquence les sociétés Scat et Helvetia irrecevables à agir en garantie des vices cachés.

Sur la responsabilité pour produits défectueux à titre subsidiaire

Les sociétés Scat et Helvetia invoquent à titre subsidiaire la responsabilité pour produits défectueux suivant les articles 1386-1 et suivants du code civil dans leur version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 applicable à l'espèce.

L'article 1386-1 ancien du code civil dispose que 'le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime'.

Les sociétés Helvetia et Scat font valoir que les premiers juges qui ont rejeté l'action sur ce fondement doivent être infirmés en ce qu'ils ne lui ont pas reconnu la qualité de fabricant de fioul mais n'ont retenu que celle de revendeur.

Elles estiment que le producteur ne pouvant être identifié, il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'article 1245-6 du code civil et de retenir la responsabilité de la société AAS Carburants qui se trouve responsable de la sécurité du produit.

Les sociétés AS Energy et Allianz Iard font valoir que les sociétés appelantes cherchent à ce que la responsabilité pour produits défectueux soit retenue pour éviter la prescription. Elles relèvent toutefois que les conditions de la mise en jeu de cette responsabilité ne sont pas réunies notamment parce qu'aucun risque affectant la sécurité du produit n'est rapporté.

****

L'article 1386-1 ancien du code civil dispose que 'le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime'.

L'article 1386-6 du code civil dans sa version applicable au litige édicte qu' 'est producteur ; lorsqu'il agit à titre professionnel, le fabricant d'un produit fini, le producteur d'une matière première, le fabricant d'une partie composante.

Est assimilée à un producteur pour l'application du présent titre toute personne agissant à titre professionnel :

-qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif,

-qui importe un produit dans la communauté européenne en vue d'une vente , d'une location, avec ou sans promesse de vente, ou de toute autre forme de distribution.

Ne sont pas considérées comme producteurs, au sens du présent titre, les personnes dont la responsabilité peut être recherchée sur le fondement des articles 1792 à 1792-6 et 1646-1.

L'article 1386-7 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 énonce que ' si le producteur ne peut être identifié, le vendeur, le loueur , à l'exception du crédit-bailleur ou du loueur assimilable au crédit bailleur , ou tout autre fournisseur professionnel, est responsable du défaut de sécurité du produit, dans les mêmes conditions que le producteur à moins qu'il ne désigne son propre fournisseur ou le producteur, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la demande de la victime lui a été notifiée'.

Les sociétés Scat et Helvetia ne contestent pas en appel la qualité à agir de la société AS Energy mais l'absence de preuve de l'existence d'un risque affectant la sécurité du produit. Elles estiment que le vice du carburant pouvait entraîner un encrassement des filtres et une panne mécanique mais en aucun cas un risque affectant la sécurité du Millenium.

Les sociétés AS Energy et Allianz Iard considèrent que si un moteur de bateau tourne avec un carburant 'mouillé' il peut être endommagé définitivement et que le bateau est susceptible de perdre toute manoeuvrabilité et d'être la cause d'un accident grave en pleine navigation.

La cour constate que les sociétés AS Energy et Allianz ne font qu'alléguer d'un risque de mise en jeu de la sécurité du Millenium alors qu'il leur appartient tout d'abord pour que soit retenue la responsabilité du fait des produits défectueux de rapporter la preuve d'un dommage qui résulte de l'atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même ce qu'elles ne font pas et ce en application de l'article 1386-2 du code civil.

En conséquence, les conditions de la responsabilité pour produits défectueux n'étant pas réunies, le jugement qui l'a écartée est confirmé.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris est confirmé en ce qui concerne les dépens de première instance et les frais irrépétibles.

Les sociétés Helvetia et Scat qui succombent sont condamnées aux dépens d'appel.

Elles sont condamnées à verser aux sociétés Alianz Iard et AS Energy la somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme partiellement le jugement rendu le 27 juin 2018 par le tribunal de commerce de Nanterre en ce qu'elle a limité la société coopérative artisanale de transport à agir à hauteur de la somme de 6036,19 €,

Statuant à nouveau

Déclare recevable la société coopérative artisanale de transport à agir,

Confirme le jugement en ses autres dispositions,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne les sociétés Helvetia Assurances et Coopérative artisanale de transport aux dépens d'appel,

Condamne les sociétés Coopérative artisanale de transport et Helvetia à verser aux sociétés AAS Energy et Allianz Iard la somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 18/04979
Date de la décision : 19/12/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 12, arrêt n°18/04979 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-19;18.04979 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award