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28/11/2019 | FRANCE | N°16/05621

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 28 novembre 2019, 16/05621


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 28 NOVEMBRE 2019



N° RG 16/05621 - N° Portalis DBV3-V-B7A-RFBZ



AFFAIRE :



EURL EUROPE & COMMUNICATION





C/

[V] [U]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Décembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : E

N° RG : F15:00524

>
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Victoire LEGRAND DE GRANVILLIERS ANDRE



Me Marie-Gaelle MAUZE







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La co...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 28 NOVEMBRE 2019

N° RG 16/05621 - N° Portalis DBV3-V-B7A-RFBZ

AFFAIRE :

EURL EUROPE & COMMUNICATION

C/

[V] [U]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Décembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : E

N° RG : F15:00524

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Victoire LEGRAND DE GRANVILLIERS ANDRE

Me Marie-Gaelle MAUZE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

EURL EUROPE & COMMUNICATION

N° SIRET : 409 804 416

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Victoire LEGRAND DE GRANVILLIERS ANDRE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0083

APPELANTE

****************

Monsieur [V] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Marie-Gaelle MAUZE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0769

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Octobre 2019, Monsieur Eric LEGRIS, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sophie RIVIERE

Le 15 mai 2007, M. [V] [U] était embauché par la société Europe et Communication en qualité de technicien en électricité par contrat à durée indéterminée.

Le contrat de travail était régi par la convention collective des cadres, techniciens et employés de la publicité française.

Il était nommé cadre par avenant du 2 juin 2010 avec un nouveau contrat reprenant son ancienneté. Cet avenant mentionnait également une mutation géographique dans le sud de la France. A ce titre, était attribué au salarié un logement de fonction.

Le salarié était cependant affecté sur des chantiers situés en Île-de-France.

Il décidait d'abandonner son logement de fonction et de déménager en Normandie.

Le 26 novembre 2013, M. [V] [U] était nommé en qualité de délégué syndical pour la société Europe et Communication.

Le salarié était placé en arrêt maladie du 17 mars 2014 au 23 octobre 2014.

Le 5 novembre 2014, la médecine du travail émettait un avis d'inaptitude.

Le 13 novembre 2014, l'employeur le convoquait à un entretien préalable en vue d'examiner les possibilités de reclassement. L'entretien devait avoir lieu le 20 novembre 2014 mais le salarié ne s'y présentait pas en raison, selon ce dernier, de son état de santé.

Le même jour, la médecine du travail précisait que le salarié n'était reclassable dans aucun des postes de l'entreprise.

Le 21 novembre 2014, la société convoquait le salarié à un entretien préalable à un licenciement. L'entretien avait lieu le 1er décembre 2014.

Le 4 décembre 2014, il lui notifiait son licenciement pour inaptitude professionnelle.

Le 7 avril 2014, M. [V] [U] saisissait le conseil de prud'hommes de Poissy à titre principal d'une demande en nullité de son licenciement, et à titre subsidiaire, en contestation du caractère réel et sérieux de son licenciement.

Vu le jugement du 6 décembre 2016 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes de Poissy qui a :

- condamné l'EURL Europe et Communication à verser à M. [V] [U] avec intérêts légaux à compter du 11 avril 2014, date de réception de la convocation pour le bureau de conciliation par la partie défenderesse, les sommes suivantes :

- 9 409,92 euros (neuf mille quatre cent neuf euros et quatre vingt douze centimes) à titre d'indemnité de préavis ;

- 940,99 euros (neuf cent quarante euros et quatre-vingt dix-neuf centimes) au titre de

congés payés afférents ;

- 90 euros (quatre-vingt dix euros) à titre de rappel de salaire pour retenue illégales ;

- rappelé que l'exécution est de droit à titre provisoire sur les créances visées à l'article R 1454-14 alinéa 2 du code du travail ;

- fixé la moyenne mensuelle des salaires en application des dispositions de l'article R 1454-28 du code du travail à la somme de 3 136,64 euros (trois mille cent trente six euros et soixante quatre centimes) bruts ;

- condamné l'EURL Europe et Communication à verser à M. [V] [U] avec intérêts légaux à compter du prononcé du présent jugement la somme de 18 819,84 euros (dix huit mille huit cent dix neuf euros et quatre vingt quatre centimes) à titre d'indemnité pour nullité du licenciement ;

- condamné l'EURL Europe et Communication à verser à M. [V] [U] la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné à l'EURL Europe et Communication de remettre à M. [V] [U] le bulletin de paie conforme au présent jugement ;

- débouté M. [V] [U] du surplus de ses demandes ;

- condamné l'EURL Europe et Communication aux dépens y compris ceux afférents aux actes et procédure d'exécution éventuels.

Vu la notification de ce jugement le 8 décembre 2016.

Vu l'appel interjeté par l'EURL Europe et Communication le 14 décembre 2016.

Vu les conclusions de l'appelante, l'EURL Europe et Communication, notifiées le 13 septembre 2019 et soutenues à l'audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé ; il est demandé à la cour d'appel de :

A titre préliminaire :

- prononcer le sursis à statuer,

Sur le fond :

A titre principal :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Poissy le 6 décembre 2016 qui a : 

- jugé nul le licenciement de M. [V] [U] et qui a en conséquence, condamné la société Europe et Communication au paiement des sommes suivantes :

- 9 409,92 euros à titre d'indemnité de préavis ;

- 940,99 euros au titre de congés payés afférents ;

- 90 euros à titre de rappel de salaire pour retenue illégales ;

-18 919,84 euros pour licenciement nul ;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour confirmerait le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du licenciement, et vu le motif lié à l'inaptitude totale du salarié :

- infirmer le jugement en ce que le conseil a fait droit à la demande au titre du préavis à hauteur de la somme de 9 409,92 euros et au titre des congés afférents d'un montant de 940,92 euros ;

- dire et juger qu'il n' y a lieu à paiement d'un préavis et à congés sur préavis ;

- confirmer le jugement dans ses autres dispositions à l'exception de la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter M. [V] [U] de l'ensemble de ses demandes ;

A titre reconventionnel :

- condamner M. [V] [U] à payer à la société Europe et Communication la somme de 14 000,00 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamner M. [V] [U] au paiement de la somme de 2 500,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [V] [U] en tous les dépens de première instance et d'appel.

Vu les écritures de l'intimé, M. [V] [U], notifiées le 13 septembre 2019 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé ; il est demandé à la cour d'appel de :

A titre liminaire,

- rejeter la demande de sursis et statuer et entendre l'affaire à la date de plaidoirie fixée au 21 octobre 2019,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement nul et condamné l'employeur à verser les sommes de 9 409,92 euros au titre de l'indemnité de préavis, 940,99 euros au titre des congés payés afférents au préavis et 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant et statuant à nouveau :

A titre principal,

- condamner la société Europe et Communication aux sommes suivantes :

- 37 638,68 euros au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur,

- 3 136.64 euros au titre des dommages et intérêts pour délit d'entrave,

- 37 638,68 euros au titre de l'indemnité pour licenciement nul,

A titre subsidiaire,

- constater l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de M. [V] [U]

En conséquence :

- condamner la société Europe et Communication aux sommes suivantes :

- 37 638,68 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause,

- condamner la société Europe et Communication aux sommes suivantes :

- 3 136.64 euros au titre des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 6 273,28 euros au titre des dommages et intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat,

- 14 616 euros au titre des astreintes effectuées et non rémunérées,

- 823,50 euros au titre du remboursement des amendes,

- 2 357,90 euros au titre du reliquat de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 3 136.64 euros au titre des dommages et intérêts pour l'absence de bénéfice des heures du DIF,

- ordonner la remise des bulletins de salaire conforme depuis le mois de juin 2010 sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, la cour se réservant expressément le droit de liquider cette astreinte,

- condamner la société Europe et Communication à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 code de procédure civile,

- débouter l'employeur de ses demandes reconventionnelles,

- condamner la société aux entiers dépens.

Vu l'ordonnance de clôture du 16 septembre 2019.

SUR CE,

Sur la demande de sursis à statuer

La société Europe et Communication demande à titre liminaire de voir prononcer un sursis à statuer, dans l'attente de l'issue d'une procédure pénale ;

En application de l'article 4 du code de procédure pénale, la mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil ;

La société Europe et Communication conteste à cet égard la désignation de M. [U] en qualité de délégué syndical en évoquant des informations révélées à M. [E] par Mme [G] et indique que M. [E] a déposé une main-courante le 27 août 2019 à la gendarmerie de [Localité 1] puis une plainte le 11 septembre 2019 à la gendarmerie d'[Adresse 2] pour « usurpation de qualité », qu'elle produit aux débats ;

Comme le fait justement observer l'intimé en réplique, seuls les propos de M. [E] sont rapportés, sans que ne soit produite d'attestation de Mme [G] ni que la date de l'information alléguée ne soit indiquée et seul le tribunal d'instance est compétent pour juger de la régularité de la désignation en qualité de délégué syndical ;

Au surplus, le dépôt de main courante et de plainte interviennent près de 5 années après la rupture du contrat de travail et la désignation de M. [U] en qualité de délégué syndical était déjà contestée par l'employeur en première instance devant le conseil de prud'hommes ;

Compte tenu de ces éléments, la cour estime qu'il n'est pas justifié de surseoir à statuer et rejette donc la demande formée à ce titre ;

Sur la rupture du contrat de travail :

M. [U] soutient à titre principal que son licenciement est nul ; il invoque à ce titre un premier motif tenant à l'absence d'autorisation préalable de l'inspecteur du travail s'appliquant au salarié dit protégé ;

La société Europe et Communication réplique sur ce point que la désignation de M. [U] en qualité de délégué syndical est inexistante, nulle et de nul effet pour avoir été effectuée en fraude ;

Elle fait valoir à ce titre que celui-ci a été désigné par la CFDT, dont elle conteste par ailleurs qu'elle soit un syndicat représentatif au sein de l'entreprise, alors qu'il n'avait pas la qualité de délégué du personnel bien que dans les entreprises de moins de cinquante salariés seul un délégué du personnel puisse être désigné délégué syndical pour la durée du mandat ; elle estime que l'acte a été passé en fraude avec pour seul objectif pour le salarié d'obtenir une protection à des fins purement personnelles ;

Elle produit un courrier daté du 6 décembre 2011 qu'elle avait adressé à l'inspection du travail dans lequel elle indiquait qu'aucune organisation syndicale n'avait présenté de candidat aux élections de délégué du personnel du 23 novembre 2011 et qu'aucun candidat salarié ne s'était porté candidat pour être délégué du personnel et disait adresser un procès-verbal de carence ;

M. [U] fait valoir en réplique que le salarié désigné délégué syndical acquiert la qualité de salarié protégé à compter du jour où l'employeur réceptionne la lettre du syndicat, se réfère aux dispositions de l'article L.2143-8 du code du travail et indique que seul le tribunal d'instance peut annuler la désignation en qualité de délégué syndical ;

Aux termes de l'article L.2143-8 du code du travail, alinéa 1 et 2, « les contestations relatives aux conditions de désignation des délégués syndicaux légaux ou conventionnels sont de la seule compétence du juge judiciaire. Le recours n'est recevable que s'il est introduit dans les quinze jours suivant l'accomplissement des formalités prévues au premier alinéa de l'article L. 2143-7

Passé ce délai, la désignation est purgée de tout vice sans que l'employeur puisse soutenir ultérieurement une irrégularité pour priver le délégué désigné du bénéfice des dispositions du présent chapitre. » ;

En l'espèce, il est constant que la société Europe et Communication comptait moins de 50 salariés ;

M. [U] justifie avoir été désigné le 26 novembre 2013 en qualité de délégué syndical CFTC pour la société Europe et Communication et que celle-ci en a été informée par la CFTC selon lettre recommandée avec accusé de réception le 28 novembre 2013, date de la signature de l'accusé de réception ;

Il n'est pas justifié en revanche d'une contestation par l'employeur de cette désignation devant la juridiction compétente avant la saisine de la juridiction prud'homale par M. [U] ;

La société Europe et Communication procède essentiellement par voie d'affirmations lorsqu'elle indique que l'acte de désignation comme délégué syndical a été passé avec pour seul objectif pour le salarié d'obtenir une protection à des fins purement personnelles et les seules attestations de deux salariés qu'elle produit, indiquant ne pas avoir souvenir ou été informés de cette qualité syndicale, sont insuffisantes à ce titre ;

Il est d'ailleurs observé que le licenciement du salarié n'est intervenu que plus d'un an après sa désignation en qualité de délégué syndical ;

Il s'ensuit que l'employeur, informé officiellement de la désignation de M. [U] en qualité de délégué syndical, n' a pas saisi la juridiction compétente dans les délais prescrits et qu'elle ne démontre pas la fraude qu'elle allègue ; au surplus, les faits auxquels elle se réfère à ce titre étaient connus d'elle avant cette désignation ;

Compte tenu de ces éléments, cette désignation n'est ni inexistante ni nulle et de nul effet ;

Dans ces conditions, M. [U] est fondé à revendiquer l'application des règles protectrices s'appliquant dans le cas du licenciement d'un salarié dit protégé ;

Dès lors, faute pour la société Europe et Communication d'avoir sollicité l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner le second grief invoqué au titre d'un harcèlement moral, il sera fait droit à la demande de M. [U] de voir prononcer la nullité de son licenciement ;

Le jugement sera donc confirmé de ce chef ;

Sur les conséquences financières

M. [U] sollicite tout d'abord une indemnité au titre de la violation de son statut protecteur ;

Pour s'y opposer la société Europe et Communication indique à nouveau que la désignation du salarié en qualité de délégué syndical était inopérante et basée sur une fraude ;

Il résulte des motifs susvisés que ces moyens ont déjà été écartés ;

M. [U], qui ne sollicite pas sa réintégration, est fondé à demander, en raison de la méconnaissance du statut protecteur, une indemnité correspondant à une somme représentant la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'à la fin de la période de protection, soit en l'espèce 12 mois de salaire correspondant à la période de protection légale ;

Il sera donc fait droit à sa demande de voir condamner la société Europe et Communication à lui verser la somme de 37 638,68 euros au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur ; le jugement sera infirmé de ce chef ;

Faute de justifier d'un préjudice distinct au titre du délit d'entrave, qu'il relie à nouveau au défaut d'autorisation de l'inspection du travail au regard du licenciement, M. [U] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts formée à ce titre ;

Le salarié dont le licenciement est nul, et qui ne demande pas sa réintégration, a droit, en toute hypothèse, en plus de l'indemnisation pour violation du statut protecteur et des indemnités de rupture, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire, quels que soient son ancienneté et l'effectif de l'entreprise ;

Au vu des éléments d'appréciation dont dispose la cour, en ce compris de l'âge, de l'ancienneté du salarié et des circonstances de son éviction, étant rappelé que le licenciement a été initié pour inaptitude et observé que M. [U] justifie avoir été indemnisé par Pôle emploi à compter du 13 janvier 2015 et avoir interrogé au mois de janvier 2018 l'Assurance retraite sur ses droits au regard d'une retraite anticipée, les premiers juges ont fait une exacte appréciation de la situation en lui allouant la somme de 18 819,84 euros à titre d'indemnité pour nullité du licenciement ;

le jugement sera donc confirmé de ce chef ;

Lorsque le licenciement est nul, le salarié a droit à l'indemnité compensatrice de préavis, peu important le motif de la rupture ;

Le jugement sera par suite confirmé en ce qu'il a a alloué à M. [U] la somme de 9 409,92 euros à titre d'indemnité de préavis, outre la somme de 940,99 euros au titre des congés payés afférents ;

Le salarié dont le licenciement est nul et qui ne réclame pas sa réintégration peut prétendre à l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement dès lors qu'il remplit les conditions exigées pour l'obtenir ;

M. [U] a déjà perçu la somme de 5 811,73 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

Il sollicite un complément d'indemnité de licenciement en invoquant la prise en compte d'un avantage en nature logement dans l'assiette servant de base au calcul ;

Toutefois, comme le rappelle la société Europe et Communication, M. [U] a fait le choix de quitter son logement de fonction courant décembre 2012 ;

Au surplus, ainsi que l'ont souligné les premiers juges, M. [U] était tenu de s'occuper de l'entretien des espaces verts de la propriété en contrepartie de la location ;

Le rejet de ses demandes de reliquat d'indemnité de licenciement et de remise sous astreinte de bulletins de salaires rectifiés au regard de l'avantage en nature invoqué sera donc confirmé ;

Sur les autres demandes

M. [U], qui rappelle avoir été en arrêt maladie à compter du 17 mars 2014, sollicite également des dommages et intérêts au titre d'une exécution déloyale du contrat de travail, en invoquant la mauvaise foi de son employeur qui ne faisait pas le nécessaire pour que les indemnités journalières lui soient versées par la sécurité sociale ;

La société Europe et Communication fait valoir en réplique que ces versements supposaient la remise par le salarié des attestations de sécurité sociale ;

A ce titre, dans son ordonnance de référé du 17 octobre 2014, le conseil de prud'homme a pris acte à la fois de la remise par M. [U] de documents d'indemnités journalières de la Sécurité sociale et de règlements de compléments de salaire par la société Europe et Communication ; la régularisation du salaire est intervenue ;

M. [U] ne démontre pas avoir subi de préjudice consécutif à une exécution déloyale du contrat de travail ; le rejet de la demande formée à ce titre sera donc confirmé ;

Il sollicite par ailleurs la somme de 6 273,28 euros à titre des dommages et intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat ;

Cependant, outre que ces documents sont quérables et non portables, M. [U] ne justifie pas avoir subi de préjudice à ce titre, de sorte que le rejet de la demande formée à ce titre sera également confirmé ;

M. [U] forme une demande de paiement au titre d'astreintes effectuées et non rémunérées ;

Il se réfère à son contrat de travail prévoyant l'acceptation d'astreintes le week-end ;

La société Europe et Communication relève que M. [U] n'avait jamais, avant la présente instance et alors même qu'il avait saisi à trois reprises la formation des référés du conseil de prud'hommes, émis la moindre prétention à ce titre et ajoute qu'il n'apporte pas d'éléments probants quant à des astreintes effectives, comme par exemple des bons d'intervention, selon le formulaire versé aux débats, ou des compte-rendu d'astreintes ;

M. [U], qui s'était vu parallèlement attribuer un logement de fonction, produit uniquement 5 photocopies de feuillets correspondant à des calendriers des années 2010 à 2014 dans lesquels sont entourés des samedi et dimanche et dénués de toute autre mention ;

Compte tenu de ces seuls éléments, sa demande de paiement au titre d'astreintes sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef ;

M. [U] sollicite ensuite la somme totale de 823,50 euros au titre du remboursement des amendes ;

Il justifie des montants retenus au titre de diverses contraventions sur ses bulletins de salaire, entre le mois de décembre 2009 et le mois de mars 2014 ;

La société Europe et Communication soulève la prescription de ce chef de demande ;

La retenue sur salaire pour le remboursement de contraventions afférentes à un véhicule professionnel mis au service du salarié est illégal ;

Lorsque la prescription a commencé à courir antérieurement à la loi du 14 juin 2013, les nouveaux délais de prescription s'appliquent à compter de cette date sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; seules les créances de rappel de salaire antérieures de cinq ans à la date de saisine de la juridiction prud'homale interrompant la prescription sont prescrites ;

M. [U] ayant saisi le conseil de prud'hommes de Poissy le 7 avril 2014, sa demande de rappel des montants retenus au titre de diverses contraventions sur ses bulletins de salaire entre le mois de décembre 2009 et le mois de mars 2014 n'est pas prescrite ;

La retenue sur salaire pour le remboursement de contraventions afférentes à un véhicule professionnel mis au service du salarié étant illégale, il sera fait droit à sa demande à hauteur de la somme de 823,50 euros ; le jugement sera infirmé en son quantum de ce chef ;

M. [U] sollicite encore une indemnité de 3 136.64 euros au titre d'une absence de bénéfice des heures du DIF ;

Comme l'ont justement retenu les premiers juges, le certificat de travail de M. [U] du 11 février 2015 mentionnait expressément que ses droits individuels à la formation portées à son compte représentaient un solde de 120 heures pour un montant de 1 098 euros, le compte CPF a remplacé le DIF le 1er janvier 2015 permet au salarié de consulter le site de la caisse des dépôts et consignations pour connaître le montant de ses droits (DIF et CPF), et M. [U] ne justifie pas de l'existence ni du montant du préjudice qu'il allègue ;

Le rejet de la demande formée à ce titre sera donc confirmé ;

La société Europe et Communication demande à titre reconventionnel la condamnation de M. [U] à lui payer la somme totale de 14 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Elle fait d'abord valoir à ce titre que M. [U] n'a jamais remis les clefs de son logement de fonction et qu'il n'a pu être remis à la disposition d'un autre salarié que fin août 2013, lui occasionnant un préjudice de 3 200 euros ;

Toutefois, comme le fait valoir M. [U] et qu'il ressort des échanges produits, la société Europe et Communication avait été informée dès décembre 2012 qu'il avait quitté le sud de la France et que le logement était vaquant dès cette date ;

La société indique ensuite que le salarié a été défaillant dans son obligation d'entretenir le jardin dépendant de son logement de fonction ;

Elle ne produit à ce titre que deux factures d'une société de jardinage en date de mars et août 2013, largement postérieures à l'information du départ du logement de fonction par le salarié ;

Elle affirme ensuite que M. [U] s'est rendu coupable de vols, notamment d'un système de climatisation et de petit matériel mis à disposition dans le cadre de son travail ;

Elle produit uniquement un constat d'huissier en date du 22 novembre 2014 ;

Comme le relève l'intimé, qui conteste tout vol, ce constat d'huissier ne fait pas ressortir qu'il s'agissait de matériel de l'entreprise ; en outre dans son procès-verbal de plainte du 16 décembre 2017, M. [E] indiquait qu'aucun papier n'a été signé lors de la restitution du véhicule de société ;

Il s'ensuit que la société Europe et Communication ne rapporte pas la preuve, dans le cadre de la présente instance, des fautes qu'elle reproche ainsi à M. [U] ;

Dans ces conditions, elle sera déboutée de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de la société Europe et Communication ;

La demande formée par M. [U] au titre des frais irrépétibles en cause d'appel sera accueillie, à hauteur de 1 500 euros ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Rejette la demande de sursis à statuer,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté M. [V] [U] de sa demande d'indemnité pour violation du statut protecteur et en ce qui concerne le montant alloué au titre du remboursement des amendes,

Statuant de nouveau des dispositions infirmées et y a joutant,

Condamne l'EURL Europe et Communication à payer à M. [V] [U] les sommes suivantes :

- 37 638,68 euros au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur,

- 823,50 euros au titre du remboursement des amendes,

- 1 500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles de procédure en cause d'appel,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Condamne l'EURL Europe et Communication aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par M. Eric LEGRIS, conseiller, et Mme Sophie RIVIERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 16/05621
Date de la décision : 28/11/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°16/05621 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-28;16.05621 ?
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