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26/11/2019 | FRANCE | N°17/06986

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 2e section, 26 novembre 2019, 17/06986


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51A



1re chambre 2e section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 26 NOVEMBRE 2019



N° RG 17/06986 - N°

Portalis

DBV3-V-B7B-R23H



AFFAIRE :



SA VILOGIA





C/

[Y] [R]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Septembre 2017 par le Tribunal d'Instance de VANVES

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11-16-827>


Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 26/11/19

à :





Me Stéphane

CHOUTEAU



Me Edith COGNY







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51A

1re chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 NOVEMBRE 2019

N° RG 17/06986 - N°

Portalis

DBV3-V-B7B-R23H

AFFAIRE :

SA VILOGIA

C/

[Y] [R]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Septembre 2017 par le Tribunal d'Instance de VANVES

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11-16-827

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 26/11/19

à :

Me Stéphane

CHOUTEAU

Me Edith COGNY

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA VILOGIA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 003494 - Représentant : Me Rachel HARZIC de l'AARPI CHOURAQUI - HARZIC - Cabinet d'Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0058

APPELANTE

****************

Madame [Y] [R]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Monsieur [F] [R]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

INTIMES ayant pour Représentant : Me Edith COGNY de la SCP BERTHAULT - COGNY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 17 - N° du dossier 13574

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Juin 2019, Madame Isabelle BROGLY, présidente, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Isabelle BROGLY, Président,

Madame Dominique DUPERRIER, Président,

Madame Lucile GRASSET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Catherine SPECHT

EXPOSE DU LITIGE

La S.A. Vilogia a donné à bail à M. [F] [R] et Mme [Y] [R] un logement situé à [Adresse 2].

Par acte d'huissier de justice du 22 novembre 2016, faisant valoir que les loyers sont impayés, la société Vilogia a fait assigner M. et Mme [R], à comparaître devant le tribunal d'instance de Vanves aux fins de :

- voir prononcer la résiliation du bail pour non respect des obligations contractuelles,

- voir ordonner l'expulsion de M. et Mme [R] ainsi que celle de tous occupants de leur chef avec l'assistance de la force publique si besoin est,

- se voir autoriser à séquestrer les objets et mobiliers trouvés dans les lieux lors de l'expulsion dans tel garde-meubles de son choix aux frais, risques et périls de la partie expulsée,

- voir condamner solidairement M. et Mme [R] à lui payer la somme de 56 633,99 euros à valoir sur la dette locative échue au mois de février 2016 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer en date du 29 janvier 2016,

- voir condamner solidairement M. et Mme [R] à lui payer une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer et des charges contractuels et soumise aux mêmes variations jusqu'à la libération effective des lieux,

- voir condamner solidairement M. et Mme [R] à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- voir condamner solidairement M. et Mme [R] à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- voir ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- voir condamner solidairement M. et Mme [R] aux dépens, qui comprendront le coût de la sommation de payer.

Par jugement contradictoire en date du 07 septembre 2017, le tribunal d'instance de Vanves a :

- débouté la société Vilogia de l'ensemble de ses demandes,

- ordonné à la société Vilogia de procéder à la modification du compte locatif de M. et Mme [R] depuis l'application du premier surloyer, au mois de janvier 2015 jusqu'à ce jour et de communiquer à M. et Mme [R] les quittances de loyers modifiés depuis le mois de janvier 2015 à ce jour,

- débouté M. et Mme [R] de leur demande d'astreinte,

- débouté M. et Mme [R] de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné la société Vilogia à payer à M. et Mme [R] une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Vilogia aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 13 juin 2019, la société Vilogia demande à la cour de :

- déclarer M. et Mme [R] irrecevables en leur demande tendant à voir déclarer irrecevables ses demandes aux motifs qu'elle n'aurait pas procédé à la notification à la CCAPEX et à la Préfecture, dès lors que cette demande est nouvelle en cause d'appel et en tout état de cause tardive puisque non mentionnée dans leurs premières conclusions d'intimés,

- dire et juger, en tout état de cause, que cette demande est radicalement mal fondée puisqu'elle dit avoir parfaitement respecté les prescriptions de l'article 24-II de la loi du 6 juillet 1989 en :

* informant la CCAPEX le 29 janvier 2016, soit plus de 2 mois avant l'assignation du 22 novembre 2016,

* dénonçant son assignation le 23 novembre 2016 à la CCAPEX et à la Préfecture soit plus de 2 mois avant l'audience,

- dire et juger que le régime locatif social entre de plein droit en vigueur lorsque des logements occupés sont rachetés par un organisme HLM (sans qu'il soit nécessaire de faire signer un nouveau bail aux locataires en place au moment du rachat),

- dire et juger que M. et Mme [R] ont manqué à leurs obligations contractuelles en arrêtant de s'acquitter de leurs loyers et charges et en refusant de payer le supplément de loyer de solidarité auquel ils sont assujettis,

- dire et juger que locataire est tenu de répondre dans un délai d'un mois à la demande d'enquête annuelle effectuée par l'organisme d'HLM en vue de déterminer s'il est redevable du supplément de loyer de solidarité,

- dire et juger qu'à défaut de réponse du locataire, l'organisme d'HLM liquide provisoirement le supplément de loyer de solidarité en appliquant le coefficient maximal de dépassement du plafond de ressources fixé par décret et perçoit en outre une indemnité pour frais de dossier plafonnée à 25 euros,

en conséquence :

- infirmer le jugement rendu le 07 septembre 2017 par le tribunal d'instance de Vanves en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée à procéder à la modification du compte locatif de M. et Mme [R] depuis l'application du premier surloyer, au mois de janvier 2015 jusqu'à ce jour et de communiquer à M. et Mme [R] les quittances de loyer modifiées depuis le mois de janvier 2015 à ce jour, ainsi qu' à payer à M. et Mme [R] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

- confirmer le jugement rendu le 07 septembre 2017 par le tribunal d'instance de Vanves en ce qu'il a débouté M. et Mme [R] de leur demande d'astreinte et d'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive,

et statuant à nouveau,

- prononcer la résiliation judiciaire du bail,

- prononcer l'expulsion de M. et Mme [R] des lieux qu'ils occupent sis [Adresse 2], ainsi que de tous occupants de leur chef, immédiatement, sans délai et avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier en cas de besoin,

- condamner solidairement M. et Mme [R] à lui payer la somme de 160 764,90 euros (mois de juin 2019 inclus) majorée des intérêts légaux à compter du commandement de payer en date du 29 janvier 2016,

- fixer l'indemnité d'occupation due par M. et Mme [R] à une somme égale au loyer mensuel, charges comprises (soit la somme de 2 797,40 euros), et ce jusqu'au départ effectif des locataires et restitution des clés,

- condamner solidairement M. et Mme [R] au paiement de cette indemnité d'occupation jusqu'au départ effectif des lieux des locataires et de tous occupants de leur chef,

- débouter M. et Mme [R] de l'ensemble de leur demandes reconventionnelles notamment en ce qu'ils sollicitent sa condamnation à modifier sous astreinte leur décompte locatif,

- débouter M. et Mme [R] de l'ensemble de leur demande reconventionnelles notamment en ce qu'ils sollicitent sa condamnation à leur verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts et 5 000 euros d'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. et Mme [R] à lui payer la somme de 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner solidairement M. et Mme [R] à lui payer la somme de 10 000,00 euros sur fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. et Mme [R] aux entiers dépens qui comprendront notamment les frais de la sommation de payer,

- ordonner l'exécution provisoire.

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 12 juin 2019, M. et Mme [R] demandent à la cour de :

in limine litis :

- dire et juger irrecevable l'ensemble de demandes de la société Vilogia, en raison du défaut de respect de saisine de la CCAPEX (article 24-11 de la loi du 6 juillet 1989),

au fond :

- dire et juger la société Vilogia mal fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, en conséquence :

- débouter la société Vilogia de ses demandes et confirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Vanves le 07 septembre 2017 en ce qu'il a :

* débouté la société Vilogia de l'ensemble de ses demandes,

* ordonné à la société Vilogia de procéder à la modification de leur compte locatif depuis l'application du premier surloyer, au mois de janvier 2015 jusqu'à ce jour, et de leur communiquer les quittances de loyer modifiées depuis le mois de janvier 2015 à ce jour,

* condamné la société Vilogia à leur payer une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société Vilogia aux dépens,

et statuant à nouveau,

- ordonner la modification de leur compte locatif depuis l'application du premier surloyer au mois de janvier 2015 jusqu'à ce jour, sauf à parfaire, et condamner la société Vilogia à leur communiquer des quittances modifiées depuis le mois de janvier 2015 à ce jour, sauf à parfaire, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, dans l'hypothèse où la société Vilogia ne justifierait pas s'être acquittée de ces deux obligations, dans le mois de la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Vilogia à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner la société Vilogia à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Vilogia en l'ensemble des dépens d'appel.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 18 juin 2019.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour renvoie à leurs écritures.

MOTIFS DE LA DÉCISION.

Sur l'exception d'irrecevabilité des demandes de la société Vilogia soulevée par M et Mme [R].

M. et Mme [R] soulèvent l'irrecevabilité de la demande de résiliation du bail formée par la société Vilogia, motif pris qu'elle n'a pas satisfait aux exigences prescrites par l'article 24-11 de la loi du 6 juillet 1989, en dénonçant, dans le délai imparti par le texte, l'assignation aux fins de résiliation à la CCAPEX.

La société Vilogia sollicite le rejet de l'exception d'irrecevabilité de ses demandes soulevées par M. et Mme [R] en appel en ce qu'elle est nouvelle en cause d'appel, au sens de l'article 564 du code de procédure civile.

Sur ce,

L'article 564 du code de procédure civile dispose que : 'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'

Or, la demande des époux [R] tendant à voir déclarer les demandes de la société Vilogia irrecevables, en ce qu'elle n'a pas saisi la CCAPEX, ni notifié l'assignation aux fins de résiliation au préfet dans les délais légaux, n'a pour but que de faire écarter les prétentions adverses, à savoir la demande de résiliation du bail et de ses conséquences.

Dès lors, la demande de M. et Mme [R] est recevable devant la cour.

Sur

Les époux [R] sollicitent le rejet des demandes de constat de résiliation du bail et d'expulsion de la société Vilogia en ce que cette dernière n'a pas respecté le délais de deux mois de saisine de la CCAPEX avant d'assigner aux fins de constater la résiliation du bail.

La société Vilogia affirme avoir saisi la CCAPEX le 29 janvier 2016 alors que l'assignation date du 22 novembre 2016.

Sur ce,

Le premier alinéa de l'article 24-II de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que : ' A compter du 1er janvier 2015, les bailleurs, personnes morales autres qu'une société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus, ne peuvent faire délivrer, sous peine d'irrecevabilité de la demande, une assignation aux fins de constat de résiliation du bail avant l'expiration d'un délai de deux mois suivant la saisine de la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives.'

La société Vilogia ne fournit aucune pièce établissant que la saisine de la CCAPEX a été effectuée le 29 janvier 2016, la date figurant sur le formulaire de saisine ne constituant pas un élément de preuve suffisant.

La dénonciation à la CCAPEX n'est intervenue que le 23 septembre 2016 d'après les éléments fournis par la société bailleresse, soit moins de deux mois avant la délivrance de l'assignation au fond aux époux [R] le 22 novembre 2016.

Dès lors, les demandes tendant à voir prononcer la résiliation du bail et l'expulsion de M. et Mme [R] par la société Vilogia sont irrecevables.

Sur l'appel de la société Vilogia

- Sur les dispositions applicables.

La société Vilogia fait grief au premier jugement d'avoir fait application de l'article L.353-7 du code de la construction et de l'habitation pour la débouter de ses demandes à l'encontre des époux [R], alors même que les logements appartenant à un organisme HLM obéissent à un régime dérogatoire.

Sur ce,

Les dispositions des articles L.353-14 et suivants et L.441-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, dans leur version applicable au litige, sont d'ordre public et s'appliquent au logement occupé par les époux [R], même s'il ne leur a pas été proposé la signature d'un nouveau bail au moment ou la société Vilogia a acquis le bien.

- Sur le montant du loyer applicable.

M. et Mme [R] font valoir que, depuis l'entrée en vigueur de la loi ELAN n°2018-1021 du 23 novembre 2018, le bailleur social ne peut réviser le loyer des locataires ayant refusé de signer un nouveau bail en application de l'article L.353-7 du code de la construction et de l'habitation. Ils se fondent sur une recommandation de la direction générale de l'urbanisme, de l'habitation et de la construction de 2014 et un avis du ministère du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité du 10 février 2015 pour soutenir que, dans la mesure ou la convention du 6 juin 2014 conclue entre la société Vilogia et l'Etat, prévoit un loyer maximum dérogatoire pour les locataires de droit commun dont le bien a été racheté par la société de HLM Vilogia, il ne peut leur être appliqué dans le même temps un supplément de loyer de solidarité. Ils estiment également qu'un supplément de loyer de solidarité ne pouvait leur être appliqué en ce que qu'il n'est pas prévu par la convention signée le 6 juin 2014 par l'Etat et la société Vilogia, soulignant qu'ils ne se sont pas vu attribuer un logement social au sens de l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation, de telle manière que l'article L. 441-3 du même code relatif au supplément de solidarité ne s'applique pas à leur cas. Ils ajoutent qu'en tout état de cause, la société Vilogia n'a pas respecté les dispositions de l'article L.353-16 du code de la construction et de l'habitation en ne mettant à leur disposition la convention APL qu'à partir du 24 avril 2018, de sorte qu'elle ne saurait leur réclamer de supplément de loyer antérieur à cette date.

Sur ce,

L'article L.353-7 du code de la construction et de l'habitation dispose que :

'Lorsqu'à la date d'entrée en vigueur de la convention, le logement concerné est l'objet d'un bail en cours de validité [...], le propriétaire doit proposer au locataire ou à l'occupant un bail conforme aux stipulations de la convention et entrant en vigueur après l'exécution des travaux prévus par celle-ci ou en l'absence de travaux prévus par la convention, à la date de l'acceptation du bail par le locataire ou l'occupant.

Le locataire dispose d'un délai de six mois pour accepter le bail. S'il refuse [...], il n'est rien changé aux stipulations du bail en cours. Dans ce cas, le locataire n'a pas droit à l'aide personnalisée au logement et le propriétaire peut demander une révision de ses engagements conventionnels ou le report de leurs effets jusqu'à l'expiration du bail.'

L'article L. 353-14 du même code dispose que : ' Par dérogation aux dispositions de la section I du présent chapitre, les dispositions de la présente section sont applicables aux logements conventionnés appartenant aux organismes d'habitation à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2, aux logements apportés aux sociétés civiles immobilières régies par les articles L. 443-6-2 et suivants, ainsi qu'à ceux appartenant aux collectivités locales et gérés par lesdits organismes'.

L'article L. 353-16 du code de la construction et de l'habitation ajoute que ' Une copie de la convention doit être tenue en permanence à la disposition des locataires des immeubles mentionnés à l'article L. 353-14.

À compter de la date d'entrée en vigueur de la convention [...], le bailleur peut, dans la limite du maximum prévu par la convention, fixer un nouveau loyer qui est applicable dès sa notification aux titulaires de baux en cours ou aux bénéficiaires du droit au maintien dans les lieux sans qu'il soit nécessaire de leur donner congé.

L'article L. 353-17 de ce code dispose que : ' Par dérogation à l'article L. 353-3, les conventions concernant les logements mentionnés à l'article L. 353-14 prennent effet à leur date de signature [...]'.

Le supplément de loyer de solidarité est prévu par l'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation qui dispose que : ' Les organises d'habitations à loyer modéré perçoivent des locataires des logements visés à l'article L. 441-1, le paiement d'un supplément de loyer de solidarité en sus du loyer principal et des charges locatives, dès lors qu'au cours du bail, les ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d'au moins 20 % les plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution de ces logements.

L'article L.441-1 du même code dispose que : ' Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-2-9 détermine les conditions dans lesquelles les logements construits, améliorés ou acquis et améliorés avec le concours financier de l'Etat ou ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement et appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré ou gérés par ceux-ci sont attribués par ces organismes.'.

L'article L.441-9 dispose que : 'L'organisme d'habitations à loyer modéré demande annuellement à chaque locataire communication des avis d'imposition ou de non-imposition à l'impôt sur le revenu et des renseignements concernant l'ensemble des personnes vivant au foyer permettant de calculer l'importance du dépassement éventuel du plafond de ressources et de déterminer si le locataire est redevable du supplément de loyer. Le locataire est tenu de répondre à cette demande dans un délai d'un mois.

À défaut et après mise en demeure restée infructueuse pendant quinze jours, l'organisme d'habitations à loyer modéré liquide provisoirement le supplément de loyer. Pour cette liquidation, il est fait application d'un coefficient de dépassement du plafond de ressources égal à la valeur maximale prévue.'

M. et Mme [R] ne peuvent valablement soutenir que les articles L. 353-14 et suivants du code de la construction et de l'habitation ne constituent pas un régime dérogatoire au régime général des logements conventionnés et affirmer également que l'article L. 353-14 ne s'applique pas à tous les logements appartenant aux organismes d'habitation à loyer modéré, mais seulement à ceux déjà conventionnés avant l'acquisition par l'organisme d'habitation à loyer modéré.

En effet, l'article L. 353-14 du code de la construction et de l'habitation dispose que les articles L. 353-15 à L. 353-22 sont applicables aux logements conventionnés par dérogation aux articles L. 353-2 à L. 353-13 sans faire de distinction entre ces différents articles. En outre, il n'opère pas non plus de distinction en fonction du moment de l'acquisition du logement.

Là où la loi ne distingue pas, il n'y a pas lieu de distinguer. Dès lors, les articles L. 353-14 et suivants permettent de déroger à l'article L. 353-7, de sorte que la cour constate que le logement des époux [R] est conventionné au sens de l'article L. 353-14, qui s'y applique.

Les époux [R] soutiennent également que leur logement ne leur a pas été attribué par un organisme d'habitations à loyer modéré. Cependant, force est de constater qu'ils vivent dans un logement acquis avec le concours financier de l'Etat et que, sous réserve de remplir les conditions de ressources prévues par le code de la construction et de l'habitation, ils peuvent bénéficier de tous les avantages liés aux logements sociaux et des aides personnalisées au logement.

Dès lors, même en l'absence d'attribution par un organisme d'habitations à loyers modérés, l'ensemble des dispositions du code de la construction et de l'habitation relatif aux logements sociaux s'applique à eux, indépendamment des dispositions de l'ancien bail.

L'article L.441-3 du code de la construction et de l'habitation ne fait pas de distinction quant à la nature du bail des locataires du logement pour appliquer le supplément de loyer de solidarité. Dès lors, là où la loi ne distingue pas, il n'y a pas lieu de distinguer.

De plus, les locataires affirment que la convention conclue entre la société HLM Vilogia et l'Etat ne peut s'appliquer à leur logement, en ce que l'intimée ne justifie pas avoir tenu à leur disposition la convention en accord avec l'article L. 353-16 du code de la construction et de l'habitation.

Cependant, la mise à la disposition du locataire, prévue par l'article L. 353-16 du code de la construction et de l'habitation, d'une copie de la convention conclue entre l'Etat et le bailleur ne constitue pas une condition préalable à son exécution. En outre, la loi n'assortit d'aucune sanction le défaut de mise à disposition de la convention.

Dès lors, l'article L. 353-16 du code de la construction et de l'habitation s'applique au logement

de M. et Mme [R], malgré l'absence de mise à disposition de la convention par la société Vilogia.

Les époux [R] se fondent également sur les dispositions du code de la construction et de l'habitation modifiée par la loi ELAN n°2018-1021 du 23 novembre 2018, sur une recommandation de la direction générale de l'urbanisme, de l'habitation et de la construction et un avis du ministère du logement pour démontrer qu'ils ne sauraient être condamnés au paiement d'un supplément de loyer de solidarité.

Cependant, la loi ELAN ne comprend aucune disposition transitoire permettant son application rétroactive, dès lors, elle ne saurait s'appliquer à M. et Mme [R] avant son entrée en vigueur. En outre, l'avis de la direction générale de l'urbanisme indique que, lorsqu'ils paient un loyer maximum dérogatoire, les locataires ne sont pas tenus en sus, au paiement d'un supplément de loyer de solidarité. Or, il ressort de la convention de 2014 signée entre l'Etat et la société Vilogia que ce loyer maximum dérogatoire n'est pas précisé. M. et Mme [R] ne peuvent donc utilement demander à être exonérés du supplément de loyer qui leur est réclamé et ce, dans la mesure où il ne leur a jamais été réclamé de loyer maximum dérogatoire. A cet égard, la cour relève que cet avis, ainsi que celui du ministère du logement ne sont que des avis non contraignants et ne peuvent servir de fondement efficace d'exonération de supplément de loyer de solidarité.

Par ailleurs, il ressort des pièces que la société Vilogia a fait le nécessaire pour que les époux [R] communiquent leurs ressources et les assujettir au supplément de loyer adéquat mais ces derniers n'ont jamais répondu aux sollicitations. Force est donc de constater que c'est à juste titre que la société Vilogia applique les dispositions du code de la construction et de l'habitation en assujettissant provisoirement M. et Mme [R] au supplément de loyer de solidarité maximum.

Cependant, la Loi ELAN est d'application immédiate. Elle a modifié l'article L.441-3 du code de la construction et de l'habitation en ajoutant l'alinéa suivant : ' Le présent article n'est pas applicable aux locataires ayant refusé de conclure un nouveau bail en application de l'article L.353-7". La société Vilogia n'apporte pas la preuve qu'elle a proposé un nouveau bail aux locataires et respecté les dispositions de l'article L.353-7 du code de la construction et de l'habitation.

En outre, les dispositions de l'article L.441-4 modifiées par l'ordonnance n°2019-454 du 15 mai 2019 selon lesquelles 'Pour les locataires qui, au moment de la conclusion d'un bail conforme aux stipulations de la convention en application de l'article L. 353-7, avaient des ressources supérieures aux plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution de leur logement, le montant du supplément de loyer de solidarité est plafonné lorsque, cumulé avec le montant du loyer principal, il excède, par mètre carré de surface habitable, un plafond fixé par décret qui tient compte des loyers moyens constatés dans la zone géographique concernée.' ne saurait s'appliquer à M. et Mme [R] puisqu'ils n'ont jamais signé de bail. Le plafonnement du supplément de loyer de solidarité effectué par la société Vilogia est donc conforme aux dispositions du code de la construction et de l'habitation.

En conséquence, la société Vilogia n'a la possibilité de réclamer le paiement d'un supplément de loyer de solidarité aux époux [R] que jusqu'au 25 novembre 2018. D'après les pièces fournies par le bailleur, notamment le relevé de compte et le détail des modalités de calcul du supplément de loyer de solidarité, M. et Mme [R] étaient redevables de la somme de 143.089,86 euros au mois de novembre 2018.

Le montant de cette dette est essentiellement dû à l'absence de réponse des locataires à l'enquête sur le supplément de loyer de solidarité. La S.A. Les résidences a en effet procédé à la liquidation provisoire du supplément de loyer en appliquant le coefficient de dépassement de ressources fixé à 14,90 par l'article R. 441-26 du CCH, soit un surloyer de 2124, 14 euros par mois, à compter de janvier 2015.

Il convient de rappeler aux locataires que, s'ils fournissent les éléments nécessaires pour le calcul du supplément de loyer de solidarité, le bailleur effectuera un nouveau décompte de la dette locative, et leur reversera le trop perçu éventuel, dans la limite du délai de prescription de 3 ans.

Ainsi, faute d'avoir communiqué les justificatifs de leurs ressources, ainsi qu'il leur a été demandé, les époux [R] doivent être condamnés, tel que prévu par le code de la construction et de l'habitation, à verser à la société Vilogia la somme de 143.089,86 euros.

Sur les demandes de dommages et intérêts.

La société Vilogia demande que les époux [R] soient condamnés à lui payer la somme de 5.000 de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice distinct du retard de paiement causé par leurs carences dans le paiement des loyers.

M. et Mme [R] sollicitent pour leur part, la condamnation de la société Vilogia au paiement de la somme de 10.000 euros pour procédure abusive.

Sur ce,

D'une part, la société Vilogia ne démontre pas avoir subi un préjudice distinct des retards de paiement et, d'autre part, la procédure contre M. et Mme [R] ne saurait être qualifiée d'abusive en ce que les demandes de la société bailleresse sont fondées en droit.

Les demandes de dommages et intérêts respectives des parties sont donc rejetées.

Sur les mesures accessoires

En équité, il n'y a pas de lieu de faire droit aux demandes de la société Vilogia au titre des frais de procédure par elle exposés en cause d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [R], partie perdante, sont condamnés aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déclare la société Vilogia irrecevable en ses demandes tendant à voir prononcer la résiliation du bail et l'expulsion de M. et Mme [R],

Condamne M et Mme [R] à verser à la société Vilogia, la somme de 143.089,86 € à titre de supplément de loyer,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Rejette la demande de la société Vilogia au titre des frais de procédure par elle exposés en cause d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. et Mme [R] aux dépens d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle BROGLY, Président et par Mme SPECHT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 17/06986
Date de la décision : 26/11/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 1B, arrêt n°17/06986 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-26;17.06986 ?
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