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14/11/2019 | FRANCE | N°19/05033

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 14 novembre 2019, 19/05033


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 50Z



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 NOVEMBRE 2019



N° RG 19/05033



N° Portalis DBV3-V-B7D-TKHQ



AFFAIRE :



[Z] [U]

...



C/

SARL ESPACE HOUVILLE ULM

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° Chambre : 01

N° RG : 19/00920


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Expéditions

Copies

délivrées le :



à :



Me Franck LAFON



Me Sabine LAMIRAND



Me Julien GIBIER de la SCP GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN



Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES











RÉPUBLIQUE FRANÇ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50Z

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 NOVEMBRE 2019

N° RG 19/05033

N° Portalis DBV3-V-B7D-TKHQ

AFFAIRE :

[Z] [U]

...

C/

SARL ESPACE HOUVILLE ULM

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° Chambre : 01

N° RG : 19/00920

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Franck LAFON

Me Sabine LAMIRAND

Me Julien GIBIER de la SCP GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

1) Monsieur [Z] [U]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

2) Madame [R] [W] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20190302

Représentant : SELARL DUTERME MOITIE ROLLAND, Avocat Plaidant du Barreau CHALONS CHAMPAGNE

APPELANTS

****************

1/ SARL ESPACE HOUVILLE ULM

N° SIRET : 488 068 214

Chemin de Coltainville

[Adresse 3]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Sabine LAMIRAND, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.455

Représentant : Me Frédéric CRUCHAUDET de la SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000049

INTIMEE

2/ SCI PANAGRI

N° SIRET : 381 471 515

[Adresse 4]

[Adresse 3]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Julien GIBIER de la SCP GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, Postulant et Plaidant avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000021 - N° du dossier 190958

INTIMEE

3/ SA SAFER DU CENTRE ([Adresse 5])

RCS n° 596 820 480

[Adresse 6]

[Adresse 7]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1962239

Représentant : Me BAYLAC - ENVERGURE, Plaidant, Avocat à TOURS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Octobre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOISSELET, Président chargé du rapport et Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

--------

La société Panagri est propriétaire d'un ensemble immobilier à Houville la Branche (28), à usage de plateforme pour l'activité d'aéronefs, donné à bail commercial à la société Espace Houville ULM qui y exploite une base pour ULM. Selon procès-verbal d'assemblée générale des associés du 1er mars 2018, elle a décidé de vendre cet ensemble immobilier.

Par courrier du 6 août 2018, la société Espace Houville ULM lui a indiqué ne pas souhaiter acquérir.

Par acte du 11 septembre 2018, la SCI Panagri a conclu une promesse unilatérale de vente avec M et Mme [U] en qualité de bénéficiaires substitués à la SAFER du Centre, au prix de 400 000 euros.

La SAFER du Centre a notifié le 12 décembre 2018 cette promesse de vente à la société Espace Houville ULM, en lui indiquant qu'elle bénéficiait d'un droit de préférence.

Par courrier du 8 janvier 2019, la société Espace Houville ULM a finalement indiqué qu'elle se portait acquéreur aux prix et conditions fixés dans la promesse.

Le 26 avril 2019, la société Espace Houville ULM a assigné à jour fixe devant le tribunal de grande instance de Chartres M et Mme [U], la SAFER du Centre ainsi que la société Panagri afin que soit constatée la vente à son profit.

Par jugement du 18 juin 2019, le tribunal de grande instance de Chartres a :

- rejeté la demande de nullité de l'assignation présentée par M et Mme [U],

- rejeté la demande de renvoi de l'affaire au juge de la mise en état faite par la SAFER du Centre,

- dit que la société Espace Houville ULM a qualité pour agir dans la présente instance,

- dit que la société Espace Houville ULM dispose d'un droit de préférence en application de l'article 145-[Cadastre 1]-1 du code de commerce, au titre des biens décrits dans la promesse de vente du 11 septembre 2018,

- dit que la société Espace Houville ULM a accepté le 8 janvier 2019 l'offre d'acquisition formulée par la SAFER du Centre, dans les conditions de prix et de charges de la promesse de vente du 11 septembre 2018,

- dit que la promesse de vente conclue le 11 septembre 2018 au profit de M. et Mme [U] est caduque,

- prononcé la vente, par la société Panagri au profit de la société Espace Houville ULM, acquéreur substitué, en présence de la SAFER du Centre, de l'ensemble immobilier au prix de vente de 400 000 euros,

- dit que le jugement sera publié au fichier du service de la publicité foncière de Chartres,

- débouté la société Espace Houville ULM de ses demandes de remboursement des loyers versés depuis le 10 janvier 2019,

- condamné la SAFER du Centre à rembourser à M et Mme [U] la somme de 40 000 euros au titre de l'indemnité d'immobilisation,

- débouté M. et Mme [U] de leurs demandes reconventionnelles plus amples,

- condamné in solidum la SCI Panagri et la SAFER du Centre à payer à la société Espace Houville ULM la somme de 3 000 euros et à M. et Mme [U] la somme de 3 000 euros au titre au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la SCI Panagri et la SAFER du Centre aux dépens de l'instance,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par acte du 10 juillet 2019, M et Mme [U] ont interjeté appel et ont été autorisés à assigner à jour fixe devant la cour.

Ils prient la cour, par dernières écritures du 25 septembre 2019, de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- juger mal fondée la société Espace Houville ULM en ses demandes.

- l'en débouter,

- constater que la vente est parfaite à leur profit aux conditions de prix et de charges prévues dans la promesse de vente du 11 septembre 2018,

- dire que l'arrêt sera publié au service de la publicité foncière,

- condamner la société Espace Houville ULM à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SAFER du Centre à leur payer celle de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, et celle de 21 000 euros au titre de leur perte de loyer de janvier à juillet 2019, sauf à parfaire,

plus subsidiairement,

- juger que la SAFER du Centre a engagé sa responsabilité contractuelle,

- ordonner la restitution à leur profit de la somme de 40 000 euros par eux versée à titre d'indemnité d'immobilisation,

- condamner la SAFER du Centre à leur payer la somme de [Cadastre 2] 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à l'échec de la vente à leur profit, et celle de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

en tout état de cause,

- débouter la société Espace Houville ULM de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamner toute partie succombante aux dépens.

Par dernières écritures du 25 septembre 2019, la société Espace Houville ULM prie la cour de :

- débouter M et Mme [U] et la SAFER du Centre de leurs demandes,

- confirmer le jugement sauf en ce qu'il a dit qu'il convenait d'ajouter au prix de vente de 400 000 euros « les charges accessoires dues à la SAFER du Centre d'un montant de 28 800 euros », et l'infirmer de ce chef,

- débouter la société Panagri de ses demandes,

- condamner la société Panagri à lui rembourser le dépôt de garantie de 2 500 euros indûment conservé au titre du bail qui a pris fin le 18 juin 2019,

- condamner la société Panagri à lui rembourser les 12/30 du loyer de juin 2019 indûment conservés au titre du bail qui a pris fin le 18 juin 2019 soit la somme de 1 440 euros,

- condamner in solidum M et Mme [U], la société Panagri et la SAFER du Centre aux dépens,

- condamner in solidum M et Mme [U], la société Panagri et la SAFER du Centre à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières écritures du 05 septembre 2019, la société Panagri prie la cour de :

- lui donner acte qu'elle s'en rapporte sur le bien fondé de l'appel interjeté par M et Mme [U] en ce qui concerne le bénéficiaire effectif de la promesse de vente du 11 septembre 2018,

- infirmer le jugement du 18 juin 2018 en ce qu'il a été jugé que la société Espace Houville ULM n'était pas tenue au paiement des loyers à la société Panagri au-delà du jour du jugement,

- juger que la société Espace Houville ULM sera tenue au paiement des loyers à la société Panagri jusqu'au 13 août 2019, date du paiement effectif, si la société Espace Houville ULM se voit confirmée comme bénéficiaire effective de la promesse de vente du 11 septembre 2018,

- juger que la société Espace Houville ULM sera tenue au paiement des loyers à la société Panagri jusqu'au paiement intégral du prix de vente par M et Mme [U] si ces derniers se voient désignés bénéficiaires effectifs de la promesse de vente du 11 septembre 2018,

- infirmer en application de l'article 5 du code de procédure civile, le jugement sur sa condamnation à verser à M et Mme [U] la somme de 3000 euros au titre des frais non répétibles et aux dépens, faute par ces derniers d'avoir présenté une telle demande,

- infirmer le jugement sur sa condamnation à verser à la société Espace Houville ULM la somme de 3000 euros au titre des frais irrrépétibles et aux dépens,

- infirmer le jugement sur le rejet de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens,

- statuant à nouveau de ce chef, condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 6000 euros en application des dispositions de l'article 700 de code de procédure civile en première instance et en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières écritures du 02 septembre 2019, la SAFER du Centre prie la cour de :

- juger la société Espace Houville ULM irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité pour agir,

- constater que la société Espace Houville ULM n'est pas titulaire du droit de préemption prévu par l'article L145-[Cadastre 1]-1 du code de commerce,

- débouter la société Espace Houville ULM de toutes ses demandes,

- débouter M et Mme [U] de toutes leurs demandes contre la SAFER du Centre,

- à défaut,

- condamner la société Espace Houville ULM à la garantir de toute condamnation,

- condamner la société Espace Houville ULM à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

SUR QUOI, LA COUR

Le tribunal a jugé, après avoir rapproché les descriptions des locaux figurant d'une part dans le bail et d'autre part dans la promesse de vente que les exceptions au droit de préférence du preneur commercial telles que prévues par l'article L.145-[Cadastre 1]-1 du code de commerce n'étaient pas applicables en l'espèce, et a donc jugé bien fondée la société Espace Houville ULM à se prévaloir d'un droit de préemption. Il a en conséquence jugé caduque la promesse de vente au profit de M. et Mme [U] et précisé que les loyers seraient dûs par la société Espace Houville ULM jusqu'à la date du jugement valant vente.

M. et Mme [U] exposent que l'article L.145-[Cadastre 1]-1 du code de commerce a été appliqué de manière erronée, puisqu'il n'y a pas d'identité entre les biens loués et les biens vendus, en raison du fait que les combles de la salle dite des pilotes étaient exclus du bail, ainsi qu'une portion de terrain. Or le texte précité exclut le droit de préférence en cas de cession globale de la totalité d'un immeuble abritant un ou des locaux commerciaux et des locaux destinés à un autre usage. Dès lors que le droit de préférence n'est pas applicable, sa notification est sans objet et ne saurait constituer une offre de contracter valable. Ils observent que la promesse prévoit expressément qu'en raison de l'acceptation par le bénéficiaire substitué de la promesse faite par le promettant, il s'est formé entre eux un contrat dans les termes de l'article 1124 du code civil, et que la condition suspensive d'obtention d'un prêt est réalisée en ce qui les concerne. Ils ajoutent enfin qu'une promesse de vente n'est pas caduque par le seul fait du dépassement du délai de réitération, puisque la date d'expiration de ce délai n'est pas extinctive mais seulement le point de départ de la période à partir de laquelle une partie peut obliger l'autre à s'exécuter.

La société Espace Houville ULM rappelle qu'elle n'a initialement indiqué ne pas être acquéreur qu'en raison du prix alors proposé de 590 000 euros. Elle fait valoir que toutes les parties à l'acte avaient conscience de l'existence du droit de préemption à son profit et ne peuvent dès lors le contester. Elle considère qu'il y a identité entre le bien loué et le bien vendu. Elle observe enfin que la promesse expirait le 21 décembre 2018, et qu'elle est donc caduque à l'égard de M. et Mme [U]. Elle ajoute que la promesse est nulle, comme n'ayant pas été précédée de la purge de son droit de préemption, et ne saurait donc être opposée à son acceptation régulière de l'offre d'acquisition qui lui a été notifiée.

La SAFER du Centre expose que la cession globale d'un immeuble abritant des locaux commerciaux est exclue du droit de préemption du preneur, et que, lorsque le droit de préemption est purgé par erreur, l'acceptation du preneur ne saurait former la vente. Elle considère que l'échec de la vente ne lui est pas imputable, et conteste devoir quelques dommages et intérêts que ce soit.

La société Panagri se déclare indifférente à la question du droit d'acquérir le bien mais observe que ses loyers ne sont plus payés depuis janvier 2019, alors qu'ils doivent l'être jusqu'au paiement intégral du prix de vente par l'acquéreur quel qu'il soit.

***

Sur le droit de préemption de la société Espace Houville ULM :

L'article L.145-[Cadastre 1]-1 du code de commerce prévoit en son alinéa 6 que le droit de préemption n'est pas applicable à la cession globale d'un immeuble comprenant des locaux commerciaux. Il résulte des travaux préparatoires de la loi du 18 juin 2014 dite loi Pinel que l'expression plurielle 'des locaux commerciaux' ne peut s'interpréter comme exigeant qu'il y ait plusieurs locaux commerciaux, ce texte ayant pour objet précisément de permettre la cession globale d'un immeuble partiellement loué et d'exclure, en un tel cas, le droit de préemption du preneur commercial. Ainsi, pour que ce texte soit applicable, il suffit que l'immeuble vendu ne soit que partiellement donné à bail commercial, peu important qu'il y ait un seul local commercial loué ou plusieurs.

Ainsi que l'a justement constaté le tribunal, la seule différence dans la description du biens, réside dans le fait que les combles situés au dessus de la salle d'accueil ne sont pas mentionnés dans le bail, qui indique au contraire dans la description des lieux loués le seul rez-de chaussée de la salle d'accueil, et qui réserve la faculté pour le bailleur d'y accéder en faisant édifier un escalier, la surface nécessaire à cette opération lui étant également réservée. Ces précisions révèlent dans la commune intention des parties, une volonté certaine d'exclure les combles de la location.

Au contraire, dans la promesse de vente, les combles sont mentionnés comme inclus dans la vente. Les références cadastrales et de contenance étant identiques dans les deux actes, rien ne démontre qu'une partie du terrain n'était pas louée.

L'assiette du bail et celle de la vente ne sont donc pas identiques. Il s'agit ainsi bel et bien d'une cession globale d'un bien partiellement loué, la loi ne faisant aucune distinction selon l'importance respective des parties louées et affectées à un autre usage.

Il est à cet égard indifférent que la promesse de vente précise que le bien est vendu loué, et que la purge d'éventuels droits de préemption soit érigée en condition suspensive, d'ailleurs en termes très généraux, en sorte qu'il est impossible d'en déduire que les parties aient toutes deux considéré que la société Espace Houville ULM en ait été titulaire.

La société Espace Houville ULM ne bénéficiait dès lors pas d'un droit de préemption, et c'est à tort que lui a été faite l'offre d'acquérir le bien après signature de la promesse de vente. Son acceptation de cette offre est privée de toute efficacité pour former une vente, et le jugement sera dès lors infirmé en ce qu'il a été jugé que la vente était parfaite à son profit.

Sur la demande de M. et Mme [U] tendant à voir juger la vente parfaite à leur profit :

Il résulte des pièces que le notaire pressenti par la venderesse a, en présence de la contestation élevée par la société Espace Houville ULM refusé de passer l'acte authentique en faveur de l'un ou de l'autre des acquéreurs, dans l'attente que la difficulté soit tranchée par le tribunal. La vente n'a donc pas été réitérée dans le délai prévu pour un motif se rattachant au promettant. Or ce dernier s'étant d'ores et déjà engagé irrévocablement à vendre, la promesse prévoit que le bénéficiaire peut poursuivre l'exécution de la vente si l'acte n'est pas passé dans le délai. L'expiration du délai prévu pour la signature de l'acte authentique ne peut donc en un tel cas priver les bénéficiaires de la promesse du droit d'obtenir l'exécution de l'engagement du promettant et la signature de la vente, en sorte que c'est à tort que la société Espace Houville ULM fait valoir que la promesse serait caduque à l'égard de M. et Mme [U] par suite du dépassement de son délai de validité. Ces derniers justifient d'ailleurs avoir obtenu leur prêt le 5 décembre 2018.

Dès lors, M. et Mme [U] ayant clairement manifesté leur volonté d'acquérir aux conditions de la promesse de vente, la vente doit être déclarée parfaite à ces conditions à leur profit. Pour des raisons pratiques, cependant, la SCI Panagri et M. et Mme [U] seront invités à régulariser la vente par acte authentique devant notaire.

Sur les demandes au titre des loyers :

Le jugement étant infirmé, le bail a vocation à se poursuivre entre M. et Mme [U] et la société Espace Houville ULM, qui reste donc redevable des loyers à l'égard de la société Panagri jusqu'à la réitération de la vente au profit de M. et Mme [U].

Ses demandes au titre de la restitution du dépôt de garantie et d'un prorata de loyers, qui ne se concevaient que dans le cadre d'une résiliation du bail en raison d'un transfert de propriété à son profit ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les demandes de dommages et intérêts de M. et Mme [U] :

La cause essentielle du retard avec lequel M. et Mme [U] concluent leur vente et percevront les loyers n'est pas la notification erronée du droit de préemption à la société Espace Houville ULM, qui n'empêchait pas en elle-même la vente, mais le refus du notaire de passer l'acte dans cette circonstance. M. et Mme [U] seront dès lors déboutés de leur demande au titre de la perte des loyers sur une période de 7 mois dirigée contre la SAFER du Centre. Ils n'établissent pas d'autre préjudice, et seront déboutés du surplus de leur demande indemnitaire.

Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

La société Espace Houville ULM, qui succombe en toutes ses demandes, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Elle contribuera aux frais irrépétibles exposés par M. et Mme [U] unis d'intérêts à hauteur de 3000 euros, par la SCI Panagri à hauteur de 2 000 euros.

Le surplus des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejeté.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions déférées, et statuant à nouveau,

Déboute la société Espace Houville ULM de toutes ses demandes,

Dit que la vente est parfaite entre M. [Z] [U], né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1] et son épouse Mme [R] [W], née le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 1] d'une part, et la SCI Panagri d'autre part, ayant pour objet le bien sis à Houville la branche (Eure et Loir) 28700 Chemin de Coltainville, à usage de « plateforme pour l'activité d'aéronefs » composé de :

une salle d'accueil de 76 m2 environ située au rez-de-chaussée avec WC et douche, lavabo, et juste au-dessus de la salle d'accueil des pilotes comble.

un hangar de 1200 m2 pour le stockage d'ULM (80m X 15m)

un hangar de 450 m2 pour le stockage ULM (30 m X 15 m)

un terrain à usage de taxi-way et de piste Terrain et cour,

une réserve incendie (réalisée en 2015 suivant les recommandations du service départemental d'incendie et de secours d'Eure et Loir)

figurant au cadastre :

ZN [Cadastre 3] [Adresse 8] 00 ha 81a 10 ca

ZN [Cadastre 4] [Adresse 8] 00 ha 00a 34ca

ZN [Cadastre 5] [Adresse 8] 00ha 17a 32 ca

ZN [Cadastre 6] [Adresse 8] 02 ha 94a 48 ca

ZN [Cadastre 7] [Adresse 8] 00 ha 14a 16 ca

Total Surface : 04ha 07a 40 ca

et devant figurer au cadastre après division de la manière suivante selon document d'arpentage :

ZN [Cadastre 3] [Adresse 8] 00ha 81a 10ca

ZN [Cadastre 4] [Adresse 8] 00ha 00a 34ca

ZN [Cadastre 1] [Adresse 8] 00ha 17a 32ca

ZN [Cadastre 8] [Adresse 8] 02ha 94a 48ca

ZN [Cadastre 2] [Adresse 8] 00ha 14a 16ca

Total surface : 04ha 07a 40 ca

dans les conditions prévues par la promesse unilatérale de vente signée le 11 septembre 2018 avec le concours de la SAFER du Centre,

Invite les parties à la vente à régulariser cette vente devant le notaire de leur choix dans un délai de trois mois, à défaut de quoi le présent arrêt tiendra lieu d'acte de vente,

Dit que le présent arrêt devra être publié au service de la publicité foncière,

Dit que la société Espace Houville ULM doit les loyers à la SCI Panagri jusqu'à paiement du prix de vente par M. et Mme [U],

Condamne la société Espace Houville ULM aux dépens de première instance et d'appel, avec recouvrement direct,

La condamne en outre à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile les sommes de 3 000 euros à M. [Z] [U] et son épouse Mme [R] [W], unis d'intérêts, et celle de 2 000 euros à la SCI Panagri,

Rejette toute demande plus ample.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 19/05033
Date de la décision : 14/11/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°19/05033 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-14;19.05033 ?
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