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13/11/2019 | FRANCE | N°15/02997

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 13 novembre 2019, 15/02997


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



17e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 13 NOVEMBRE 2019



N° RG 15/02997 - N° Portalis DBV3-V-B67-P5PX



AFFAIRE :



LA REPUBLIQUE FEDERALE D'ALLEMAGNE représentée par son Ambassade à [Localité 5]





C/



[N] [R]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Juillet 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de

NANTERRE

N° Section : AD

N° RG : 07/02613



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Pascal GASTEBOIS



Me Thomas GODEY







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE TREIZE NOVEMBRE DEU...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

17e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 13 NOVEMBRE 2019

N° RG 15/02997 - N° Portalis DBV3-V-B67-P5PX

AFFAIRE :

LA REPUBLIQUE FEDERALE D'ALLEMAGNE représentée par son Ambassade à [Localité 5]

C/

[N] [R]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Juillet 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Section : AD

N° RG : 07/02613

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Pascal GASTEBOIS

Me Thomas GODEY

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TREIZE NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

LA REPUBLIQUE FEDERALE D'ALLEMAGNE représentée par son Ambassade à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Non comparante et représentée par Me Michel WOLFER, Me Raphaël ROULEAUX et Me Bernhard KNELLEX de l'ASSOCIATION HERTSLET WOLFER & HEINTZ, plaidants, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : R188 et Me Pascal GASTEBOIS, Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R188

APPELANTE

****************

Monsieur [N] [R]

né le [Date naissance 2] 1964

[Adresse 3]

[Localité 4]

Comparant et assisté de Me Thomas GODEY, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0305

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 Septembre 2019, Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Madame Evelyne SIRE-MARIN, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Madame Nathalie MULOT

Par jugement du 29 juillet 2011, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section activités diverses), statuant en sa formation de départage, a :

- dit qu'en application notamment des dispositions de la Convention de Rome (article 3§1 et 6§ 1) et de l'article L. 1221-3 du code du travail français le contrat de travail du 15 mars 1999 signé entre la République Fédérale d'Allemagne et M. [N] [R] est inopposable à ce dernier,

- dit que le contrat de travail du 14 mars 2000 lui est en revanche opposable et qu'en application de ce contrat, les relations entre les parties étaient régies par le droit des conventions collectives tel qu'issu de la convention collective du 29 mars 1973,

- dit cependant que les dispositions de la convention collective du 30 novembre 2001 se sont substituées aux précédentes,

- dit que le droit français est applicable au contrat de travail en ce qui concerne les conditions de travail mais aussi en ce qui concerne la participation du salarié aux institutions représentatives du personnel,

- constaté que la désignation de M. [R] par l'Union départementale des syndicats CGT Force Ouvrière de [Localité 5] le 20 décembre 2001, en qualité de délégué syndical, n'a pas été contestée judiciairement et a constaté par suite sa validité,

- dit que M. [R] est ainsi en droit de s'en prévaloir dans l'exercice de cette fonction, sous réserve des dispositions de la convention de Vienne du 18 avril 1961,

- constaté l'application de la prescription quinquennale aux demandes de rappel de salaire pouvant être invoquées à partir du 20 septembre 2000,

en conséquence,

- condamné l'Etat allemand, représenté par le Ministère des affaires étrangères, lui-même représenté en France par M. l'ambassadeur de l'Etat allemand, à payer à M. [N] [R] la somme de 25 475,89 euros bruts à titre de rappel d'accessoires de salaire (heures supplémentaires et congés payés afférents ainsi que repos compensateurs), avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2005,

- débouté M. [R] de sa demande relative aux JRTT,

- constaté que M. [R] n'a pas été en mesure d'exercer ses fonctions désignatives et électives de représentant du personnel normalement,

en conséquence,

- condamné l'Etat allemand, représenté par le Ministère des affaires étrangères, lui-même représenté en France par M. l'ambassadeur de l'Etat allemand à payer à M. [R] les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2005 :

. 865,35 euros à titre de rappel de salaire en exécution de la mission de conseiller du salarié,

. 86,53 euros à titre de congés payés afférents,

. 12 060,38 euros à titre de rappel de salaire en exécution de la mission de délégué syndical,

. 1 206,03 euros à titre de congés payés afférents,

. 743,41 euros à titre de rappel de salaire en exécution de la mission de conseiller prud'homme,

. 74,34 euros à titre de congés payés afférents,

- débouté M. [R] ses demandes sur le fondement du délit d'entrave à l'exercice du droit syndical et de l'exercice de la fonction de conseiller prud'homme,

- condamné l'employeur sur le fondement de la discrimination syndicale à payer à M. [R] la somme de 1 euro avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamné l'Etat allemand, représenté par le Ministère des affaires étrangères, lui-même représenté en France par M. l'ambassadeur de l'Etat allemand à payer à M. [R] la somme de 2 500 euros au titre du préjudice subi en raison du non respect de la vie privée, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- dit que la République Fédérale d'Allemagne devra transmettre à M. [R] dans le délai d'un mois suivant la signification de la décision un bulletin de salaire récapitulatif,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- ordonné l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile, à concurrence de la moitié,

- rappelé que la condamnation de l'employeur au paiement des sommes visées par les articles R.1454-14 et R.1454-15 du code du travail est exécutoire de plein droit dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire dans les conditions prévues par l'article R.1454-28,

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 3 070,23 euros,

- condamné la RFA aux dépens et à payer à M. [R] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration adressée au greffe le 22 mai 2012, la République Fédérale d'Allemagne représentée par son Ambassade à [Localité 5] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de radiation a été prononcée le 15 octobre 2014 pour défaut de diligences des parties et l'affaire a été réinscrite au rôle le 26 juin 2015.

A l'audience du 3 février 2017, les parties ont demandé la fixation d'un calendrier de procédure et l'Ambassade de la RFA l'examen de l'affaire en audience collégiale.

L'affaire a été renvoyée au 11 avril 2018, puis à la demande des parties qui n'étaient pas en état au 27 mars 2019.

A l'audience du 27 mars 2019, un nouveau calendrier a été fixé et l'affaire renvoyée au 26 septembre 2019.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, la République Fédérale d'Allemagne, représentée par son Ambassade à [Localité 5], demande à la cour de :

I. Sur le rejet de certaines pièces versées aux débats par M. [R],

vu les articles 9 du code de procédure civile et 6§1 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales,

vu le principe de loyauté dans l'administration de la preuve,

vu la jurisprudence de la cour de cassation,

- écarter des débats les pièces n°56, 61 et 62 versées aux débats par M. [R] en annexes à ses conclusions du 28 septembre 2018,

II. A titre principal : l'application de la loi allemande au contrat de travail M. [R],

vu les articles 3 et 6 de la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles du 19 juin 1980,

vu la jurisprudence de la cour de cassation,

- dire et juger que le contrat de travail initial du 15 mars 1999 est valable et opposable à M. [R]

- dire et juger que M. [R] a expressément accepté l'application à son contrat de travail de la convention collective allemande du 28 septembre 1973 régissant les conditions de travail des ouvriers locaux de nationalité allemande travaillant auprès des représentations de la RFA à l'étranger (TV-Arb-Ausland), remise en vigueur par l'article 2§2 de la convention collective des employés à l'étranger du 30 novembre 2001 (TV-AN-Ausland),

- dire et juger que, ce faisant, M. [R] a sans ambiguïté choisi que son contrat soit régi par la loi allemande,

- dire et juger que le contrat de travail de M. [R] est dès lors soumis à la loi allemande,

-dire et juger qu'aucune norme impérative de droit français ne permet d'écarter l'application de la loi allemande,

- dire et juger que M. [R] n'invoque ni a fortiori ne rapporte la preuve dont la charge lui incombe du contenu du droit allemand,

en conséquence,

- infirmer le jugement rendu le 29 juillet 2011 par le conseil de prud'hommes de Nanterre en ce qu'il a :

. estimé que le contrat de travail initial la liant à M. [R] en date du 15 mars 1999 était inopposable à M. [R],

. retenu l'application du droit français au contrat de travail de M. [R] et prononcé des condamnations à son encontre, à savoir :

. 25 475,89 euros bruts à titre d'heures supplémentaires, congés payés afférents et repos compensateurs,

. 951,88 euros bruts à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents en exécution de la mission de conseiller du salarié,

. 13 266,41 euros bruts à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents en exécution de la mission de délégué syndical,

. 817,75 euros bruts à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents en exécution de la mission de conseiller prud'homme,

. 1 euro au titre de la discrimination syndicale,

. 2 500 euros à titre du non-respect de la vie privée,

- débouter M. [R] de l'ensemble de ses demandes,

- ordonner à M. [R] de lui rembourser la somme de 31 365,60 euros versée au titre de l'exécution provisoire dont le jugement entrepris était assorti,

III. A titre subsidiaire, et si, par extraordinaire, la cour décidait de retenir l'application de la loi française,

vu l'ancien article 143-14 du code du travail et 2277 du code civil dans sa version applicable au 21 septembre 2005,

- dire et juger que les demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires portant sur la période antérieure au 22 septembre 2000 sont prescrites,

- dire et juger que les demandes de rappel de salaire au titre du repos compensateur portant sur la période antérieure au 1er juin 2000 sont prescrites,

en conséquence,

- confirmer le jugement rendu le 29 juillet 2011 par le conseil de prud'hommes de Nanterre en ce qu'il a considéré que les demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires sont soumises à la prescription quinquennale et infirmer ce même jugement en jugeant que les demandes portant sur la période antérieure au 22 septembre 2000 sont prescrites,

- infirmer le jugement rendu le 29 juillet 2011 par le conseil de prud'hommes de Nanterre en ce qu'il a :

. considéré que les demandes de rappel de salaire au titre du repos compensateur portant sur la période antérieure au 1er juin 2000 ne sont pas prescrites,

. l'a condamnée à payer à M. [R] la somme de 25 475,89 euros au titre de rappel d'accessoires de salaires (heures supplémentaires, congés payés afférents et repos compensateur),

statuant à nouveau,

- limiter les sommes à payer à M. [R] par elle aux sommes de :

. 8 138,12 euros bruts au titre des heures supplémentaires,

. 14 796,75 euros au titre du repos compensateur,

- dire et juger que M. [R] ne peut présenter cumulativement une demande en paiement d'heures supplémentaires majorées et en jours de récupération,

vu les dispositions des Conventions de Vienne des 24 avril 1963 et 29 mars 1971,

vu la jurisprudence de la cour de cassation,

- dire et juger que les dispositions du code du travail français relatives à la représentation des syndicats (articles L.2143-13 et L.2143-17 du code du travail) et celles relatives au conseiller du salarié (articles L.1232-8 et 1232-9 du code du travail) et à la fonction de conseiller prud'homme invoquées par M. [R] sont inapplicables en l'espèce en raison du principe de la souveraineté des Etats,

- dire et juger que M. [R] ne rapporte pas la preuve d'une entrave à l'exercice des missions de conseiller du salarié, de délégué syndical et de conseil prud'homal et qu'il ne peut prétendre à aucun rappel de salaire à ce titre,

- dire et juger que M. [R] ne rapporte la preuve ni d'une discrimination syndicale ni d'une atteinte à la vie privée,

en conséquence,

- confirmer le jugement rendu le 29 juillet 2011 par le conseil de prud'hommes de Nanterre en ce qu'il a considéré que la demande en paiement de jours de récupération formulée par M. [R] était infondée,

- confirmer ledit jugement en ce qu'il a considéré qu'aucun délit d'entrave n'était constitué,

- infirmer ledit jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à M. [R] les sommes suivantes :

. 865,35 euros bruts, outre les congés payés à titre de rappel de salaire pour la mission de conseiller du salarié,

. 12 060,38 euros bruts, outre les congés payés à titre de rappel de salaire pour la mission de délégué syndical,

. 743,41 euros bruts, outre les congés payés à titre de rappel de salaire pour la mission de conseiller prud'homal,

. 1 euro à titre de dommages et intérêts pour prétendue discrimination syndicale,

. 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour prétendue atteinte à la vie privée,

en conséquence,

- débouter M. [R] de l'intégralité de ses demandes,

IV. A titre infiniment subsidiaire en ce qui concerne la demande de rappel de salaire de M. [R] au titre des heures de délégation du délégué syndical,

vu l'ancien article L. 412-20 du code du travail,

- dire et juger qu'elle compte moins de 150 salariés,

en conséquence,

- dire et juger que M. [R] ne pouvait bénéficier que de 10 heures de délégation par mois au titre de son mandat de délégué syndical,

- dire et juger que sa demande au titre de rappel de salaire ne saurait excéder la somme de 7 994,88 euros,

V. Sur sa demande reconventionnelle,

- dire et juger que M. [R] a bénéficié d'une augmentation de salaire en avril 2000 et a perçu des rappels de salaire en juillet 2000 et ce, conformément à l'application de la loi allemande, rétroactivement appliquée à la date de son embauche,

en conséquence, et si la cour devait par impossible faire application de la loi française,

- ordonner le remboursement par M. [R] de la somme de 12 197,77 euros bruts perçue par lui au titre du rappel de salaire versé en juillet 2000 en vertu de la loi allemande et de la somme de 122 141,57 euros bruts perçue par lui au titre de l'augmentation de salaire dont il a bénéficié en application de la loi allemande (109 943,80 + 12 197,77),

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

- ordonner également le remboursement par M. [R] du salaire indûment perçu entre le 20 mai 2011 et le jour du prononcé de l'arrêt à intervenir,

VI. Sur la demande additionnelle de M. [R] en rappel de salaire du fait de l'absence d'attribution d'un logement de fonction,

à titre principal,

- débouter M. [R] de sa demande au motif qu'il ne rapporte pas la preuve dont la charge lui incombe du contenu du droit allemand applicable à son contrat,

à titre subsidiaire,

vu l'article L. 3245-1 du code du travail applicable au jour où M. [R] a formé sa demande, à savoir le 23 juin 2015,

- dire et juger que M. [R] était informé dès l'année 2006 ou au plus tard en 2008 de la mise à disposition par l'Ambassade de la RFA de logements de fonction à certains de ses salariés,

- dire et juger que la demande de M. [R] en rappel de salaire à ce titre formée par ses conclusions du 23 juin 2015 est prescrite en application de l'article L.3245-1 du code du travail susvisé,

à titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger que seules les demandes de M. [R] couvrant la période allant du 23 juin 2012 au 23 juin 2015 ne seraient pas prescrites,

- dire et juger qu'en toute hypothèse, la demande de M. [R] est mal fondée en fait et en droit,

- dire et juger que seule une somme d'un montant symbolique pourrait au plus lui être allouée de ce chef,

en conséquence,

- débouter M. [R] de sa demande additionnelle,

VII. Sur la demande additionnelle de monsieur [R] de rappel de salaire en raison d'une prétendue discrimination salariale,

à titre principal,

- débouter M. [R] de sa demande au motif qu'il ne rapporte pas la preuve dont la charge lui incombe du contenu du droit allemand applicable à son contrat,

à titre subsidiaire,

- dire et juger que M. [R] ne rapporte pas la preuve de la discrimination salariale qu'il invoque,

- dire et juger qu'au contraire, elle établit que M. [R] a bénéficié d'une rémunération supérieure à celle de ses collègues chauffeurs,

- dire et juger que la demande de M. [R] est dès lors mal fondée,

en conséquence,

- débouter M. [R] de sa demande additionnelle,

VII. En toute hypothèse, sur le licenciement de M. [R],

sur les demandes- principales- de nullité et de réintégration ( et de paiement des salaires)

à titre principal,

- dire et juger que M. [R] ne justifie pas du bien fondé de cette demande au regard du droit allemand applicable au litige,

- dire et juger que cette demande repose en outre uniquement sur une critique du second motif de licenciement de M. [R],

- dire et juger que tant en droit allemand- à titre principal- qu'en droit français - à titre subsidiaire- ce second motif de licenciement ne viole pas son droit d'agir en justice,

- dire et juger que le premier motif suffit tant en droit allemand- à titre principal- qu'en droit français - à titre subsidiaire- à justifier le licenciement de M. [R],

en conséquence,

- débouter M. [R] de sa demande de nullité du licenciement et de réintégration sous astreinte ( et de paiement des salaires afférents),

à titre subsidiaire,

- dire et juger que l'immunité de juridiction et le principe de souveraineté font obstacle à toute réintégration,

en conséquence,

- débouter M. [R] de sa demande de réintégration sous astreinte ( et les salaires afférents),

sur les demandes- subsidiaires- afférentes à un supposé licenciement sans cause réelle et sérieuse,

à titre principal,

- dire et juger que les faits reprochés sont :

. à titre principal- en droit allemand- constitutifs d'un ' motif grave'

. à titre subsidiaire- en droit français- d'une faute grave,

en conséquence,

- débouter M. [R] de toutes ses demandes,

à titre subsidiaire,

- dire et juger que M. [R] ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'il invoqué,

en conséquence,

- limiter une éventuelle condamnation de la RFA sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail à la somme minimum du barème correspondant à l'équivalent de 3 mois de salaire brut soit 11 502,06 euros,

IX- En toute hypothèse,

- rejeter toute demande d'astreinte,

- condamner M. [R] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [R] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, M. [N] [R] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu en départage par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 29 juillet 2011 en ce qu'il a :

. dit, en application notamment des dispositions de la convention de Rome (articles 3§1 et 6§1) et de l'article L.1221-3 du code du travail français, que le contrat de travail en date du 15 mars 1999, signé entre la République Fédérale d'Allemagne et lui, lui était inopposable,

. dit que le contrat de travail en date du 14 mars 2000 lui est opposable et qu'en application de ce contrat, les relations entre les parties étaient régies par le droit des conventions collectives tel qu'issu de la convention collective du 29 mars 1973 et en ce qu'il a dit que les dispositions de la convention collective du 30 novembre 2001 se sont substituées aux précédentes,

. dit, par suite, que le droit français était applicable au contrat de travail en ce qui concerne les conditions de travail et la participation du salarié aux institutions représentatives du personnel,

. constaté que sa désignation par l'Union départementale des syndicats CGT Force ouvrière de Paris le 20 décembre 2001, en qualité de délégué syndical, n'a pas été contestée judiciairement et en ce qu'il a par suite constaté sa validité,

. dit qu'il était en droit de s'en prévaloir dans l'exercice de cette fonction sous réserve des dispositions de la convention de Vienne du 18 avril 1961,

. constaté qu'il n'a pas été en mesure d'exercer ses fonctions désignatives et électives de représentant du personnel normalement,

en conséquence,

. condamné l'Etat allemand, représenté par le Ministère des affaires étrangères, lui-même représenté par M. L'Ambassadeur de l'Etat allemand, à lui payer les sommes suivantes :

. 865,35 euros, outre les congés payés à hauteur de 86,53 euros à titre de rappel de salaire en exécution de la mission de conseiller du salarié,

. 12 060,38 euros, outre les congés payés à hauteur de 1 206,03 euros à titre de rappel de salaire en exécution de la mission de délégué syndical,

. 743,41 euros, outre les congés payés à hauteur de 74,34 euros à titre de rappel de salaire en exécution de la mission de conseiller prud'homme,

le tout avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2005,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

. jugé qu'il a été victime de discrimination syndicale,

. jugé qu'il a subi un préjudice du fait du non-respect de sa vie privée et de la législation française sur la durée quotidienne du travail,

. condamné la République fédérale d'Allemagne aux dépens et à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement rendu en départage par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 29 juillet 2011 sur ses autres dispositions,

en conséquence,

- condamner vu les articles L. 3121-1 et L. 3121-2 du code du travail condamner l'Etat allemand à lui payer les sommes suivantes :

. 4 424,10 euros à titre d'heures supplémentaires 2000,

. 442,41 euros à titre de congés payés y afférents,

. 2 887,70 euros à titre de repos compensateur 2000,

. 288,77 euros à titre de congés payés y afférents,

. 4 693,13 euros à titre d'heures supplémentaires 2001,

. 469,31 euros à titre de congés payés y afférents,

. 1 819,36 euros à titre de repos compensateur 2001,

. 181,93 euros à titre de congés payés y afférents,

. 5 114,17 euros à titre d'heures supplémentaires 2002,

. 511,41 euros à titre de congés payés y afférents,

. 3 948,80 euros à titre de repos compensateur 2002,

. 394,88 euros à titre de congés payés y afférents,

. 11 206,76 euros à titre d'heures supplémentaires 2003,

. 1 120,67 euros à titre de congés payés y afférents,

. 10 322,82 euros à titre de repos compensateur 2003,

. 1 032,28 euros à titre de congés payés y afférents,

. 1 995,80 euros à titre d'heures supplémentaires 2004,

. 199,58 euros à titre de congés payés y afférents,

. 102,85 euros à titre de repos compensateur 2004,

. 10,28 euros à titre de congés payés y afférents,

. 9 043,42 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant aux majorations des heures supplémentaires effectuées de 2005 à 2013 qui auraient dues lui être versées,

. 904,34 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

vu les articles L. 2143-13 et L. 2143-17 du code du travail,

-confirmer qu'il a bien été victime d'une entrave dans l'exercice de son activité syndicale,

en conséquence,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour entrave à l'exercice de son activité syndicale,

vu l'article L. 2141-5 du code du travail,

- constater qu'il a été victime d'une discrimination syndicale,

en conséquence,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,

vu les articles L. 1442-2 et 1443-3 du code du travail,

- constater qu'il a été victime d'une entrave dans l'exercice de son mandat de conseiller prud'homal,

en conséquence,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour entrave à son mandat de conseiller prud'homal,

vu l'article 9 du code civil,

- confirmer que la République Fédérale d'Allemagne n'a pas respecté sa vie privée et a violé la législation française relative à la durée quotidienne de travail,

en conséquence,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui verser la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à sa vie familiale et à sa santé,

En outre,

- constater qu'il a été victime d'une inégalité de traitement en l'absence d'attribution d'un logement de fonction contrairement à ses collègues,

en conséquence,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui verser la somme de 426 240 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant à l'absence de fourniture d'un logement de fonction,

- constater qu'il a été victime d'une inégalité de traitement en raison du versement d'une rémunération de base inférieure à celle de ses collègues,

en conséquence,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui verser la somme de 22 356 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant à l'inégalité de traitement subie, augmentés des congés payés afférents soit 2 235 euros,

- ordonner la production des bulletins de salaries rectifiés au vu des condamnations à intervenir sous astreinte de 150 euros par jours de retard,

- prononcer la capitalisation des intérêts échus (article 1154 du code civil) depuis sa saisine du conseil de prud'hommes,

- débouter la République Fédérale d'Allemagne de sa demande reconventionnelle comme étant irrecevable et infondée,

sur le licenciement,

à titre principal, sur le licenciement nul dont il a été victime,

- dire et juger nul son licenciement, prononcé en violation d'une liberté fondamentale,

par conséquent,

- ordonner, d'une part, sa réintégration à compter du prononcé de la décision à intervenir, et ce sous réserve à défaut de réintégration dans ses précédentes fonctions et aux conditions identiques, du paiement d'une astreinte de 300 euros par jour de retard,

- condamner, d'autre part la République Fédérale d'Allemagne au versement des salaires perdus entre son licenciement et sa réintégration :

. 2 256 euros bruts pour le mois d'octobre 2018 (du 11 au 30 octobre),

. 30 672 euros bruts (3 834,02 x 8 mois) de novembre 2018 à mars 2019 inclus,

. soit un total à fin juin 2019 s'élevant à 33 228 euros bruts,

à titre subsidiaire, sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse dont il a été l'objet (sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail),

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui payer les sommes suivantes :

. 11 502,06 euros bruts (3 834,02 x 3) à titre d'indemnité compensatrice de préavis pour une durée de 3 mois,

. 1 150,20 euros bruts à titre de congés payés sur préavis,

. 21 605 euros nets à titre d'indemnité légale de licenciement,

. soit 9 585 euros pour les 10 premières années (0,25 x 10 x 3 834,02),

. soit 12 020 euros pour les 9,5 années suivantes (0,33 x 9,5 x 3 834,02),

. 57 510 euros à titre de dommages et intérêts (15 mois), sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, étant âgé de 54 ans et ayant été licencié après une carrière exempte de toute critique, alors qu'il est chargé d'une famille nombreuses (5 enfants),

en tout état de cause,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la République Fédérale d'Allemagne aux dépens.

LA COUR,

M. [R] a été engagé par la République Fédérale d'Allemagne, en qualité de chauffeur, attaché à son Ambassade de [Localité 5], par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 mars 1999.

Le 15 mars 1999, il a signé le contrat de travail rédigé en langue allemande. Le même jour la version française du contrat de travail lui a été remise ainsi que la version française des conditions générales d'emploi. Ce contrat ne comportait aucune mention relative à la loi qui lui était applicable.

Le 17 décembre 1999, M. [R] a signé la note que lui avait soumise l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne (ci-après dénommée l'Ambassade de la RFA) ainsi libellée :

' Monsieur,

Ayant pris connaissance de la proposition du Ministère Fédéral des Affaires Etrangères d'un nouveau contrat de travail basé sur la convention collective du Droit allemand ( TV AngAusland et TV Arb Ausland du 28/09/1973 ; règlement des conditions de travail du personnel local allemand), il m'a été demandé de me prononcer formellement sur ce changement (réf. 103.16.11OSP)

En considération, je soussigné M. [R] [N] accepte cette offre en accord de principe, sous réserve de mon accord concernant le nouveau contrat de travail que je n'ai toujours pas reçu n'ayant à ce jour à ma disposition que le ' Pro Forma ' de mon nouveau salaire. '

Le 7 mars 2000, M. [R] a signé la version française et le 14 mars 2000 la version allemande d'un document intitulé ' Contrat portant modification du contrat de travail existant ' .

Ce contrat prévoit :

'

1. Les dispositions du TV AngAusland/TV ArbAusland (convention collective des employés travaillant à l'étranger/ convention collective des ouvriers travaillant à l'étranger) s'appliquent aux relations de travail entre Madame/ Monsieur (nom) et la République Fédérale d'Allemagne à partir du 1/3/1998, compte tenu du délai de forclusion. Madame/ Monsieur (nom) a choisi l'application de ces dispositions après en avoir émis expressément le souhait, en connaissance des dispositions du TV AngAusland/TV ArbAusland. Les différences entre les dispositions du droit local jusqu'ici applicables et le droit allemand des conventions collectives sont connues. Après avoir considéré tous les avantages et inconvénients Madame/ Monsieur s'est prononcée en faveur de l'application durable des stipulations des conventions collectives allemandes qu'elle/il juge dans l'ensemble plus favorable.

(...)

2. A l'expiration de la période allant jusqu'au 28/2/1998, le contrat de travail de droit local jusqu'ici en vigueur devient un contrat de travail se fondant sur le droit allemand des conventions collectives. Les dispositions contractuelles jusqu'ici en vigueur sont caduques dans leur ensemble et individuellement. Le poste restera basé à [Localité 5]. '

Par courrier du 20 décembre 2001, l'Union Départementale des syndicats CGT Force Ouvrière de [Localité 5] a désigné M. [R] en qualité de délégué syndical à l'Ambassade d'Allemagne.

Par arrêté préfectoral du 17 novembre 2003, M. [R] a obtenu la qualité de conseiller du salarié, fonction dans laquelle il a été renouvelé pour 3 ans par arrêté du 17 novembre 2006.

Elu conseiller suppléant lors des élections prud'homales du 11 décembre 2002, le 11 mai 2007, M. [R] a prêté le serment de conseiller au conseil de prud'hommes de Paris et a exercé cette fonction judiciaire à partir de cette date.

Par courrier du 15 mai 2007, la cour d'appel de Paris en a informé l'Ambassade d'Allemagne.

Du 3 mai 2006 au 16 décembre 2016 a été élu représentant du personnel local de l'Ambassade d'Allemagne en qualité de suppléant.

Le 11 juin 2004, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris afin de solliciter le paiement d'heures supplémentaires et de ses heures de délégation.

La nullité de la procédure ayant été constatée, il a de nouveau saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 21 septembre 2005. En application de l'article 47 du code de procédure civile, l'affaire a été renvoyée devant le conseil de prud'hommes de Nanterre.

Par courrier du 18 septembre 2018, remis en main propre le jour même, M. [R] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 25 septembre 2018.

Il a été licencié par lettre du 9 octobre 2018, ainsi libellée :

' (...)

Durant cet entretien, Messieurs [Z] [D] et [SB] [U] vous ont exposé les raisons qui nous amenaient à envisager votre licenciement et vous avez pu présenter vos observations.

A cette occasion, vous avez reconnu, sans aucune réserve, la réalité des faits qui vous étaient reprochés.

Vous avez simplement tenté d'en atténuer la gravité.

De plus, vous nous avez spontanément remis certains documents les 26 et 27 septembre.

Malgré les explications que vous nous avez fournies, nous avons pris la décision de vous licencier pour les motifs suivants :

Premièrement, nous vous reprochons d'avoir porté un signe du parti nazi au sein de notre Ambassade à [Localité 5].

Le 10 septembre 2018, la République Fédérale d'Allemagne a été informée que vous avez porté, au revers de votre veste, de façon parfaitement visible un insigne du parti nazi portant une croix gammée ; les faits ont eu lieu à l'intérieur des locaux de l'Ambassade d'Allemagne à [Localité 5], et en présence de collègues.

Cette information a été portée à la connaissance de la République Fédérale d'Allemagne par un email du 10 septembre 2018 (envoyé à plusieurs adresses emails de fonctionnaires allemands en poste en France dont Son Excellence Monsieur l'Ambassadeur d'Allemagne [VA] [DI] ) auquel était jointe une photo établissant les faits.

Cet email était assorti d'un commentaire dénigrant le personnel de l'Ambassade.

Ainsi, non seulement vous avez exhibé cet insigne, mais vous avez également accepté d'être photographié avec cet insigne au sein de l'Ambassade, permettant ainsi la diffusion d'une photographie sur laquelle votre personne et les locaux de notre Ambassade sont identifiables.

Ces faits sont d'une particulière gravité pour les motifs suivants :

Le port d'un insigne nazi est strictement interdit et réprimé par la loi, tant en France qu'en Allemagne.

Le fait pour un salarié de porter un tel insigne sur son lieu de travail - qui plus est en présence de ses collègues- est donc une violation non seulement de la loi qui en interdit le port, mais également des obligations les plus essentielles qui découlent du contrat de travail.

Cette violation est d'autant plus grave qu'en votre qualité de chauffeur vous accompagnez les représentants de notre Etat en France et que vous êtes, de ce fait, personnellement associé à une mission de représentation ; laquelle vous oblige à une particulière exemplarité.

De plus, pour des raisons historiques évidentes, la République Fédérale d'Allemagne est particulièrement soucieuse de bannir toute manifestation de cette nature, ce que vous savez parfaitement.

Vous ne pouviez donc pas ignorer l'extrême gravité des faits qui constituent une provocation inacceptable et une manifestation de rejet des valeurs les plus fondamentales de la République Fédérale d'Allemagne.

Vous avez ainsi délibérément trahi la confiance de l'Etat qui vous emploie.

Fidèle à cette intention, vous avez agi en présence de collègues et vous vous êtes fait photographier avec cet insigne.

Ce faisant, vous ne pouviez pas ignorer que la diffusion d'une telle photographie serait possible et qu'elle pourrait, le cas échéant, être de nature à nuire à l'image de la République Fédérale d'Allemagne, à son personnel et à ses services.

De fait, ainsi que la présente lettre l'a déjà indiqué, cette photographie a récemment été diffusée par un email du 10 septembre 2018 pour tenter de dénigrer nos services et de dégrader leur image, ce qui constitue un trouble particulièrement grave dans lequel vous portez une responsabilité évidente.

Ce premier motif justifie à lui seul votre licenciement.

Deuxièmement, nous vous reprochons d'avoir soustrait à la République Fédérale d'Allemagne et à certains de ses fonctionnaires et employés des documents auxquels vous n'aviez pas accès dans le cadre de vos missions de chauffeur.

Dans le cadre du litige qui vous oppose à la république Fédérale d'Allemagne devant le conseil de prud'hommes de Nanterre, vous avez récemment directement communiqué à notre avocat des copies des documents suivants :

. les bulletins de salaires d'employés de la représentation permanente (bulletins de salaire de Madame [S] et de 4 autres employés),

. les copies des titres de séjour spéciaux délivrés par le Quai d'Orsay à plusieurs fonctionnaires allemands en poste à [Localité 5] ( copies des cartes de son Excellence [CX] [MI] [W], de son Excellence [SB] [UO] et des Mesdames [L] [H], [P] [O], [X] [BK], et [K] [UO]).

Ces documents sont la propriété de la république Fédérale d'Allemagne et n'ont aucune raison de se trouver en notre possession : vous n'y avez pas accès dans l'exercice normal de vos missions de chauffeur.

Ces documents comportent, par ailleurs, des informations personnelles et confidentielles et sont, pour ce qui concerne les titres de séjour spéciaux délivrés par le Quai d'Orsay, des documents évidemment sensibles puisqu'ils ouvrent des droits particuliers à leurs détenteurs, notamment en leur qualité de diplomates.

Dans ces conditions, en vous procurant de tels documents- et en en faisant des copies- vous avez participé à leur soustraction frauduleuse.

Vous avez également violé de façon caractérisée la confidentialité qui s'attache à ces documents.

Ce faisant, vous avez manqué à vos obligations les plus essentielles et notamment à votre obligation de bonne foi dans l'exécution de votre contrat de travail.

Vous avez également nui aux intérêts des fonctionnaires de la République Fédérale d'Allemagne et à ses employés en détournant, à votre profit, des documents et informations personnelles et confidentielles.

Ce second motif justifie également à lui seul votre licenciement.

Ces 2 motifs sont d'une particulière gravité et caractérisent une intention de nuire à la République Fédérale d'Allemagne et à son personnel.

Ils nous conduisent à rompre immédiatement votre contrat de travail dont la poursuite s'avère impossible. Votre contrat de travail prend donc fin à la réception de la présente lettre.

(...) '

Sur le rejet des pièces n°56, n°61 et n°62 communiquées par M. [R] :

L'Ambassade de la RFA sollicite le rejet des pièces n°56 consultation de Maître [A] [ZT] du 19 juillet 2001, n°61 bulletins de salaires de 4 collègues de M. [R] et n°62 contrat de travail de Mme [F] [V] née [S], chauffeur, au motif que le salarié les a obtenues de manière illicite.

M. [R] ne donne aucune explication sur la manière dont il est entré en possession de ces documents.

Un salarié, lorsque cela est strictement nécessaire à l'exercice des droits de sa défense dans le litige l'opposant à son employeur, peut produire en justice des documents dont il a eu connaissance à l'occasion de ses fonctions.

La pièce n°56 est l'avis donné par Maître [A] [ZT] par courrier du 19 juillet 2001 sur la mise en demeure envisagée à l'égard de M. [R] et sur la situation d'un autre salarié.

Cette consultation est par nature confidentielle et M. [R] ne peut l'avoir eue en main à l'occasion de l'exercice de ses fonctions de chauffeur.

Il en est de même des bulletins de paie de quatre collègues (pièce n°61). Cependant dès lors que l'Ambassade de la RFA en tire argument dans ses développements sur l'inégalité de traitement ils doivent être considérés comme acquis au débat.

S'agissant du contrat de travail de Mme [F] [V] née [S], chauffeur, celle-ci atteste (pièce n°62) avoir fourni une copie de son contrat de travail ainsi qu'une de ses fiches de paie à M. [R] uniquement pour avoir un avis en raison de ses fonctions de représentant du personnel mais qu'en aucun cas elle ne lui a permis de s'en servir à des fins juridiques ou personnelles.

Dès lors que la pièce n°56 n'a pas été obtenue par M. [R] à l'occasion de ses fonctions et qu'il a fait un usage détourné de la pièce n°62, il convient de constater qu'elles ont été obtenues par un moyen illicite.

En conséquence, les pièces n°56 et 62 seront écartées des débats.

Sur le droit applicable à la relation contractuelle :

La période d'emploi M. [R] a été régie du 15 mars 1999 au 7 mars 2000 par le contrat signé le 15 mars 1999 puis, à partir du 7 mars 2000 jusqu' à son licenciement par les contrats signés les 7 et 14 mars 2000.

M. [R] soutient que le contrat rédigé en langue allemande signé le 15 mars 1999 lui est inopposable.

Aussi, il fait valoir qu'au début de la relation contractuelle l'Ambassade de la RFA lui a appliqué la loi française en ce qui concerne la majoration des heures supplémentaires et que ce n'est qu'après l'adoption des lois Aubry sur les 35 heures qu'elle a souhaité appliquer le droit du travail allemand. Il affirme qu'en application de l'article 6§2 de la convention de Rome dès lors qu'il exerçait sa fonction sur le territoire français il était soumis à la loi française.

Il affirme que pour cette première période, il n'a pas accepté l'application du droit allemand

Pour la seconde période, il explique que l'Ambassade de la RFA lui a accordé une augmentation de salaire afin de se mettre en conformité avec la jurisprudence issue de l'arrêt de la Cour de Justice de l'Union Européenne du 30 avril 1996 et que cette augmentation est donc indépendante de l'application ou non du droit allemand.

En premier lieu, il soutient que les avenants conclus en mars 2000 sont nuls comme ayant un objet illicite puisqu'ils organisent une application rétroactive, au 28 février 1998, du droit des conventions collectives allemandes.

Ensuite, il affirme que les avenants ne lui sont pas opposables d'une part car il n'a jamais opéré de comparaison entre les deux systèmes juridiques avant d'opter pour le droit allemand, d'autre part car les avenants ne portent aucune mention relative aux éléments essentiels du contrat de travail de sorte qu'il ignorait la portée de son engagement.

A titre subsidiaire, il fait remarquer que les avenants litigieux renvoient à l'application des conventions collectives du 28 septembre1973 et 30 novembre 2001 régissant les conditions de travail des employés des ambassades à l'étranger et non à l'application du droit allemand, conventions qui ne traitent pas de la durée du travail.

Il ajoute que la convention collective du 28 septembre1973, depuis sa remise en cause à effet au 31 mars 2000, est exclusivement applicable aux salariés de nationalité allemande et que la convention collective du 30 novembre 2001 renvoie au droit français.

Il précise que l'Etat allemand avait parfaitement conscience de ne pas respecter la loi française applicable au contrat de travail de ses salariés comme le démontre le fait qu'il ait signé 8 transactions avec des salariés en réparation du préjudice qu'ils prétendent avoir subi du fait de la non-application du droit français et de ce qu'ils ont travaillé 39 heures au lieu de 35 heures.

L'Ambassade de la RFA expose que la représentation des intérêts de la République Fédérale d'Allemagne en France est assurée par différentes catégories de personnel : du personnel ayant le statut diplomatique, du personnel détaché de l'Allemagne auprès de l'Ambassade et du personnel local.

Elle ajoute que parmi le personnel local il existe deux catégories, le personnel soumis à la législation française (62 personnes) et le personnel ayant opté, de son plein gré, pour sa soumission à la convention collective allemande régissant les conditions de travail des travailleurs locaux travaillant auprès des représentants de la République Fédérale d'Allemagne à l'étranger ( 19 personnes).

Elle affirme que, même signé dans sa version allemande, le contrat de travail du 15 mars 1999 est opposable à M. [R] et qu'en tout état de cause il a été valablement remplacé par le contrat signé les 7 et 14 mars 2000.

Elle soutient qu'en signant ces derniers contrats M. [R] a sans ambiguïté accepté que la relation contractuelle soit régie par le droit allemand.

Elle explique qu'à la suite de l'arrêt de la CJCE du 30 avril 1996 qui a décidé que l'interdiction de la discrimination en raison de la nationalité s'applique à un ressortissant d'un état membre qui vit dans un pays tiers de manière permanente, qui est employé dans un autre Etat membre dans son ambassade dans ce pays tiers et dont le contrat de travail a été conclu sur place et y est exécuté de manière permanente et de l'arrêt de la Cour de cassation allemande qui s'en est suivi elle a offert à l'ensemble de ses salariés locaux la possibilité d'opter pour le droit allemand et l'application des conventions collectives correspondantes.

Elle précise que M. [R] a accepté cette offre car elle allait lui apporter une réévaluation conséquente de son salaire en application de la convention collective du 28 septembre 1973 régissant ' Les conditions de travail des ouvriers locaux de nationalité allemande travaillant auprès des représentations de la République Fédérale d'Allemagne ' qui lui était désormais applicable.

Elle ajoute que les derniers contrats ne contenaient aucune disposition illicite, que M. [R] avait donné un accord de principe dès le 17 décembre 1999 à l'application du droit allemand à son contrat, qu'il avait connaissance du contenu de la convention collective allemande et que le nouveau contrat en comportait les éléments essentiels.

Elle soutient que, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, la convention collective du 30 novembre 2001 n'a pas exclu M. [R] du bénéfice de la convention collective du 28 septembre 1973 expressément visées dans le contrat signé les 7 et 14 mars 2000.

Enfin, elle fait valoir que les dispositions de la législation française relatives à la durée hebdomadaire de 35 heures ne sont pas des dispositions impératives au sens de l'article 6§1 de la convention de Rome qui pourraient écarter les dispositions allemandes au motif qu'elles seraient moins favorables.

Sur le contrat de travail rédigé en allemand signé le 15 mars 1999

L'article L. 1221-3 du code du travail prévoit que le contrat de travail est rédigé en français.

Cependant, la sanction du non-respect de cette exigence n'est pas la nullité ou l'inopposabilité du contrat mais la faculté donnée au salarié d'exiger de l'employeur la délivrance d'un contrat conforme aux exigences du texte.

En l'espèce, il n'est pas discuté que M. [R] a signé seulement la version rédigée en allemand du contrat de travail mais que la version française lui a été remise en même temps.

M. [R] ne peut donc tirer aucune conséquence du fait qu'il n'a signé que l'exemplaire rédigé en allemand.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit inopposable le contrat de travail signé le 15 mars 1999.

Sur le contrat de travail signé les 7 et 14 mars 2000

La convention de Rome en son article 3§1 prévoit ' Le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Ce choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat . '

Contrairement à ce que soutient M. [R] la rétroactivité d'une modification d'une disposition contractuelle n'est pas, par nature, contraire à l'ordre public.

Il ne peut donc prétendre à la nullité de l'avenant du 7 et 14 mars 2000 au seul motif qu'il a prévu que le droit allemand des conventions collectives s'appliquerait à compter du 1er mars1998.

Le contrat de travail signé le 7 et 14 mars 2000 fait suite au formulaire du 17 décembre 1999 par lequel M. [R] a donné son accord de principe à la proposition d'un nouveau contrat de travail basé sur la convention collective du droit allemand du 28 septembre 1973, sous réserve de son accord concernant le nouveau contrat de travail toujours pas reçu.

Le contrat signé les 7 et 14 mars 2000 prévoit expressément que les dispositions du TV Ang-Ausland /TV ArbAusland convention collective des ouvriers travaillant à l'étranger s'applique à compter du 1er mars 1998. Il précise que les différences entre les dispositions du droit local jusqu'ici applicable et le droit allemand des conventions collectives sont connues et qu'après avoir considéré tous les avantages et inconvénients M. [R] s'est prononcé en faveur des dispositions du droit allemand qu'il estime dans l'ensemble plus favorable.

M. [R] fait remarquer que dans aucune des versions il n'a porté sa signature après la mention énonçant qu'il a reçu copie du présent contrat et d'une traduction en français d'un exemplaire du TV Ang-Ausland /TV ArbAusland.

Cependant, sur la version allemande un des agents de l'ambassade a certifié de la remise au salarié des documents litigieux.

La remise sera donc considérée comme établie.

M. [R] se prévaut aussi de ce que le contrat litigieux se borne à prévoir l'application de la convention collective allemande et à stipuler que les dispositions contractuelles jusqu'ici en vigueur sont caduques dans leur ensemble et individuellement, mais ne comporte aucune clause sur les éléments essentiels d'un contrat de travail : qualification, rémunération, temps de travail.

Dès lors que M. [R] a disposé de plus de deux mois, du 17 décembre 1999 au 7 mars 2000 pour s'informer et réfléchir au contenu de son futur contrat de travail, il est mal fondé à soutenir qu'il était insuffisamment informé.

En revanche, c'est à juste titre qu'il soutient n'avoir accepté que l'application du TV AngAusalnd/TV ArbAusland convention collective du 28 septembre 1973  régissant les conditions de travail des ouvriers locaux de nationalité allemande travaillant auprès des représentations de la République Fédérale d'Allemagne à l'étranger et non l'intégralité du droit du travail allemand.

Mais il fait une mauvaise interprétation de la convention collective du 30 novembre 2001 régissant les conditions de travail des employés locaux travaillant auprès des représentations de la république Fédérale d'Allemagne à l'étranger en prétendant qu'elle exclut l'application de la convention collective du 28 septembre 1973 aux salariés locaux puisqu'au contraire elle s'applique aux employés qui ne tombent pas sous le coup d'une des conventions qu'elle remet en vigueur en son article 2, lequel article vise expressément la convention du 28 septembre 1973.

La convention TV AngAusalnd/TV ArbAusland ne comporte aucune disposition relative à la durée du travail.

Faute d'avoir opté pour l'application de l'intégralité du droit du travail allemand, M. [R] est donc fondé à se prévaloir des règles du droit français régissant la durée du travail.

La rémunération de M. [R] ayant été fixée, d'après l'Ambassade de la RFA, selon les règles issues de la convention collective allemande qui elle est applicable, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'Ambassade de la RFA de sa demande de remboursement de l'augmentation de salaire accordé à M. [R] en juillet 2000.

Sur les heures supplémentaires :

M. [R] soutient que l'Ambassade de la RFA était soumise aux lois Aubry relatives aux 35 heures et qu'il est fondé à obtenir le paiement au taux majoré des heures qu'il a effectuées au-delà de la 35ème heure.

Il sollicite une demande de rappel de salaire pour l'intégralité des années 2000 à 2004. Il affirme avoir travaillé 169 heures par mois de janvier à mars 2000, puis 167 heures par mois.

L'Ambassade de la RFA réplique que les demandes concernant la période antérieure au 22 septembre 2005 sont prescrites.

Elle ajoute que les heures de travail effectuées par M. [R] ont été traitées selon la législation allemande et donc au taux normal pour les heures réalisées entre 35 et 38,5 heures par semaine et que toutes les heures réalisées au-delà de 38,5 heures ont fait l'objet d'une récupération à 100% ou ont été rémunérées.

Elle discute les pièces versées au débat par M. [R] en affirmant que les fiches de temps ne permettent pas d'établir le nombre d'heures supplémentaires réalisées et que, en sa qualité de chauffeur, le salarié ne restait pas à sa disposition de sa première prestation de la journée à la dernière mais disposait de temps libre.

Sur la prescription

Par requête du 16 septembre 2005 expédiée le 20 septembre 2005, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris de diverses demandes.

Il ne se prévaut pas d'une interruption du délai de prescription qui résulterait de sa saisine précédente du 11 juin 2004 qui a fait l'objet d'une décision qu'aucune partie ne communique.

La date d'envoi au conseil de prud'hommes de la lettre recommandée le saisissant fixe la date d'introduction de l'instance et par conséquent la date d'interruption de la prescription.

En application du délai de prescription quinquennale applicable aux créances salariales pour les procédures introduites le 20 septembre 2005, M. [R] est recevable à solliciter le paiement de rappel de salaire à partir du 20 septembre 2000. Le salaire étant exigible à la fin du mois, sa demande est recevable à compter du mois de septembre 2000 compris.

Sur le rappel de salaire de 2000 à 2004

M. [R] soumet à la cour un calcul sur lequel figure chaque semaine un dépassement de durée de travail de 3,5 heures (de la 36ème à la 38,5 ème heure) et certaines semaines un dépassement horaire supplémentaire pouvant être de 10 heures certaines semaines.

Si les 3,5 premières heures correspondent aux heures contractuelles et ne peuvent donc être discutées les autres sont soumises aux règles de l'article L. 3171-4 du code du travail au terme duquel en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, mais il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

M. [R] produit ses bulletins de paie et pour toute la période litigieuse, les fiches de temps par période de 4 semaines sur lesquelles figurent le nom du chauffeur, chaque jour l'heure de départ et l'heure de retour, le nombre d'heures supplémentaires journalier et le total de la semaine.

Il produit également (pièce n°48) un extrait de carnet de bord des mois de juin, juillet et décembre 2000, et mars 2001 sur lequel figure certains trajets avec son émargement.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'Ambassade de la RFA de produire ses propres éléments.

L'Ambassade de la RFA, qui ne discute pas la sincérité des fiches de temps produites par M. [R], communique quelques exemples d'horaires de journées de travail de M. [R] qui montrent qu'il disposait de périodes qui, selon elle, ne peuvent être assimilées à du temps de travail effectif.

Cependant, sur ces fiches de temps les heures supplémentaires sont bien calculées sur la base de la durée séparant l'heure de départ de l'heure d'arrivée ce qui démontre qu'il était acquis que M. [R] restait à la disposition permanente de son employeur.

Faute pour l'employeur de communiquer des éléments contraires sur le temps de travail réalisé par M. [R], la durée avancée par M. [R], correspondant aux fiches de temps, sera retenue.

A titre subsidiaire, l'Ambassade de la RFA soumet à la cour son propre décompte (pièce n° 35) effectué sur la base du temps de travail retenu par M. [R] sur lequel figurent le nombre total d'heures réalisées au-delà de 35 heures par semaine, le nombre d'heures supplémentaires déjà payées soit 3,5 heures par semaine, le nombre d'heures de repos acquises et prises par M. [R] en compensation des heures réalisées au-delà de 38,5 heures par semaine, les majorations à 25 et 50 % au-delà de 35 heures et le repos compensateur légal.

Elle produit aussi un décompte (pièce n°36) dont elle déduit que M. [R] a bénéficié de 56 heures de récupération injustifiées.

Outre que la pièce n°36, un tableau en allemand au contenu particulièrement obscur, n'est pas de nature à démontrer que M. [R] a bénéficié de 56 heures de récupérations injustifiées, il doit être constaté que le calcul présenté par l'Ambassade de la RFA est erroné puisqu'il ne prend en compte que les majorations auxquelles ouvrent droit les heures supplémentaires alors que certaines heures au-delà de 38,5 heures n'ont pas du tout été payées.

Par ailleurs, l'Ambassade de la RFA est mal fondée à soutenir que les heures supplémentaires au-delà de 38,5 heures étaient compensées par des récupérations alors qu'à partir du mois du mois d'avril 2000, en dépit du contenu des fiches de temps, aucune heure supplémentaire ne figure plus sur les bulletins de paie.

Infirmant le jugement il sera donc fait droit aux demandes d'heures supplémentaires, de congés payés afférents, de repos compensateur et de congés payés afférents, sauf, en raison de la prescription, à réduire pour l'année 2000 le montant accordé à la somme de 2 924,48 euros au titre des heures supplémentaires outre les congés payés afférents et à la somme de 1 707,98 euros à titre de repos compensateur outre les congés payés afférents.

Sur les majorations d'heures supplémentaires de 2005 à 2013

M. [R] est bien fondé à demander le paiement de la majoration des heures réalisées de la 36ème heure à 38h50.

Son calcul prenant en compte l'évolution de son taux salarial contrairement à celui proposé par l'Ambassade de la RFA, il sera adopté.

Ajoutant au jugement, il sera donc fait droit à la demande de M. [R] de ce chef.

Sur l'opposabilité des mandats de M. [R] :

M. [R] sollicite le paiement de rappel de salaire au titre des heures de délégation qu'il a effectuées en qualité de délégué syndical, conseiller du salarié et conseiller prud'hommes.

La Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 organise des privilèges et immunités au profit de la mission diplomatique elle-même et des membres de la mission afin de préserver la souveraineté de l'Etat accréditant.

L'exercice du mandat de délégué syndical implique qu'il puisse se déplacer librement dans les locaux de la mission, y prendre les contacts nécessaires à l'accomplissement de sa mission, bénéficier du temps nécessaire à ses fonctions rémunérés comme du temps de travail, qu'il a droit à la communication de certains documents et ne peut être licencié qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail.

Le conseiller du salarié et le conseiller prud'hommes même s'ils exercent leur mandat à l'extérieur de l'ambassade bénéficient aussi du statut de salarié protégé et ne peuvent être licenciés qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail, émanation de l'Etat accréditaire.

En outre, l'exercice de ces mandats implique que le salarié impose à son employeur des périodes d'absence rémunérées comme du temps de travail.

Dès lors que l'Ambassade de la RFA avait en son sein, en application du droit allemand, organisé la représentation de son personnel par voie d'élection, M. [R] ayant d'ailleurs assuré cette fonction de représentant du personnel local de droit allemand en qualité de représentant adjoint et suppléant en mai 2006 et 1er suppléant en novembre 2008 et novembre 2010, le salarié est mal fondé à se prévaloir de ce que l'inopposabilité de ses mandats serait contraire à la liberté syndicale.

Au vu de ces éléments, c'est à juste titre que l'Ambassade de la RFA soutient que le principe de souveraineté des Etats fait obstacle à ce qu'il soit fait application au sein de la représentation officielle d'un Etat étranger des règles du code du travail français relatives à la représentation du personnel et à celle des syndicats et à l'exercice de mandat donnant droit au statut de salarié protégé et conduisant ainsi à imposer à l'ambassade des absences rémunérées et à soumettre le licenciement à une autorisation délivrée par une administration de l'Etat accréditaire.

Ainsi, peu important que l'Ambassade de la RFA n'ait pas contesté la désignation de M. [R] en qualité de délégué syndical devant le tribunal d'instance compétent, les mandats de délégué syndical, conseiller du salarié et conseiller prud'hommes de M. [R] ne sont pas opposables à l'Ambassade de la RFA.

M. [R] ayant fondé ses demandes au titre de la discrimination syndicale sur le non-respect par l'Ambassade de la RFA de ses mandats de délégué syndical, conseiller du salarié et conseiller prud'homal, il convient, infirmant le jugement, de le débouter de ses demandes de ce chef.

Sur l'atteinte à la santé et à la vie familiale :

M. [R] soutient que l'organisation du temps de travail des chauffeurs français de l'ambassade n'a pas respecté les maxima imposés par le droit français qui prévoit une durée hebdomadaire ne pouvant pas excéder 48 heures, un repos quotidien d'une durée minimale de 11 heures consécutives et une durée quotidienne de travail effectif ne pouvant excéder 10 heures.

Il précise qu'il a dû assurer des missions exceptionnelles en soirée sans en être informé dans un délai raisonnable et alors qu'il avait commencé à travailler à 8h15 le matin.

Il ajoute qu'en raison d'arrêt de travail de ses collègues la situation s'est aggravée à partir de 2003, qu'il ne pouvait parfois pas regagner son domicile le soir et que sa santé en a souffert.

L'Ambassade de la RFA se borne à soutenir que les fiches de temps ne mentionnent que le début et la fin de la prestation de travail et que l'avis du médecin du travail est vague.

Les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail relatives à la répartition de la charge de la preuve des heures de travail effectuées entre l'employeur et le salarié ne sont pas applicables à la preuve du respect des seuils et plafonds prévus tant par le droit de l'Union Européenne que par le droit interne, qui incombe à l'employeur.

L'Ambassade de la RFA ne donne aucun élément permettant d'établir que M. [R] au cours de la journée n'était pas à sa disposition permanente.

La lecture des fiches de temps montre qu'à plusieurs reprises il a dépassé les plafonds légaux. Par exemple, le 7 juillet 2001 il a travaillé de 8h à 1h, le 30 octobre 2001 de 8h à 20 h, le 29 janvier 202 de 7h30 à 20h30, le 23 juillet 2003 de 7h45 à 19h.

M. [C], également chauffeur, atteste que M. [R] a été très souvent retenu en dernière minute pour des besoins de service le soir, les week-ends et les jours fériés.

Le 6 septembre 2004, le médecin du travail a écrit à l'Ambassade de la RFA en l'informant avoir vu M. [R] à deux reprises les 30 juin et juillet 2004, visites au cours desquelles M. [R] lui a exposé ses problèmes de santé pour lesquels un bilan spécialisé était en cours et dont les résultats étaient tout à fait satisfaisants. Le médecin du travail faisait état de troubles rythmés par le surmenage et concluait à l'aptitude au poste dans la mesure où les horaires de travail sont respectés.

La fiche médicale du 22 octobre 2004 concluait à une aptitude avec respect des horaires.

Ces éléments établissent que le non-respect de la durée de travail a causé à M. [R] un préjudice en terme de vie familiale et d'état de santé.

Le premier juge a fait une juste appréciation du préjudice en allouant à M. [R] à ce titre la somme de 1 500 euros.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur l'inégalité de traitement :

M. [R] expose qu'au moins trois de ses collègues occupant comme lui le poste de chauffeur étaient logés gracieusement par l'Ambassade au moins jusqu'en avril 2014, dans un immeuble lui appartenant au [Adresse 6].

Il soutient que cette différence de traitement lui a causé un préjudice important puisqu'il a dû assumer un loyer.

Il affirme qu'en outre il percevait une rémunération de base inférieure à celle de ses collègues.

A titre liminaire, l'Ambassade de la RFA soutient que la demande de M. [R] au titre du logement de fonction formée pour la première fois dans ses conclusions du 23 juin 2015 est tardive et prescrite au moins partiellement.

Ensuite, elle se prévaut de ce que M. [R] n'apporte pas la preuve du contenu du droit allemand applicable à ses demandes.

Elle affirme que trois chauffeurs bénéficiaient de logement de fonction pour des raisons parfaitement objectives.

Elle ajoute que M. [R] ne percevait pas un salaire inférieur à celui de ses collègues.

Sur le droit applicable

Il a été précédemment jugé que M. [R] n'était soumis qu'aux dispositions de la convention collective TV Arb Ausland du 28 septembre 1973 et non l'intégralité du droit allemand du travail.

Cette convention collective comporte notamment des dispositions relatives au salaire mais ne fait pas obstacle à la demande d'application du principe d'égalité de traitement formulée par M. [R].

Sur la prescription

La saisine de la juridiction prud'homale emporte interruption de la prescription pour l'ensemble des actions nées du même contrat de travail.

La saisine de M. [R] datant du 20 septembre 2004, elle est soumise à la prescription quinquennale en ce qui concerne les demandes salariales.

Sa demande portant sur la période du 15 mars 1999 au 30 avril 2014 est donc prescrite seulement pour la période du 15 mars 1999 au 19 septembre 1999.

Sur l'attribution du logement de fonction

Le principe de l'égalité de traitement impose à l'employeur d'assurer une égalité de rémunération entre tous les salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.

Il appartient d'abord au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une différence de traitement ; il appartient ensuite à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence et dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

Il est établi que trois chauffeurs de l'ambassade sur les neuf qu'elle emploie ont bénéficié d'un logement de fonction et que cette possibilité n'a pas même été proposée à M. [R].

Ce fait laisse supposer l'existence d'une inégalité de traitement. Il appartient donc à l'Ambassade de la RFA de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence et dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

S'agissant de M. [IM], il est établi que son épouse exerçait les fonctions de concierge de l'immeuble [Adresse 6]. Son logement dans cet immeuble est donc justifié par des raisons objetives.

L'Ambassade de la RFA démontre que M. [Y] [J] et M. [VL] avaient postulé pour un emploi de chauffeur en mettant en exergue leur qualité d'ancien militaire et leur grande expérience de protection des personnes. (pièce n°42)

Elle démontre ainsi suffisamment qu'ils n'étaient pas affectés aux mêmes missions que M. [R] et que leur logement à proximité de l'ambassade était justifié par des raisons objectives.

L'Ambassade de la RFA apportant la preuve qui lui incombe, il convient, ajoutant au jugement, de débouter M. [R] de sa demande au titre de l'inégalité de traitement en terme d'attribution de logement de fonction.

Sur la rémunération

M. [R] soutient que sa rémunération de base est inférieure à celle de ses collègues chauffeur.

Il prétend qu'il perçoit une rémunération de base de 2 673 euros pour 39 heures alors que la rémunération moyenne de sa catégorie pour une durée de travail équivalente est de 3 294 euros. Il ajoute que l'Ambassade de la RFA compare sa situation à des salariés qui ne travaillent que 35 heures.

La pièce n°59, document en allemand nonintégralement traduit, n'est pas un bulletin de paie mais un document informatif du mois de novembre 2016 sur lequel figure une rémunération minimum de 2 673,03 euros.

Selon son bulletin de paie, M. [R] a perçu en novembre 2016 pour 169 heures un salaire de base de 3 751,02 euros, soit un taux salarial de 22,1954 euros.

Toujours selon ses bulletins de salaire, en 2018 il a perçu pour 169 heures un salaire de base de 3 834, 02 euros, soit un taux salarial de 23,3473 euros.

Il résulte de leurs bulletins de paie du mois de mars 2018 que pour 151,67 heures, M. [T] avait un salaire de base de 2 729 euros, soit un taux salarial de 17, 9930 euros et de 314, 88 euros pour 14 heures supplémentaires, M. [RE] [J] un salaire de base de 2 804 euros, soit un taux salarial de 18,4875 euros et de 225,32 euros pour 9,75 heures supplémentaires, M. [E] [M] un salaire de base de 3 101, euros, soit un taux salarial de 20,4457 euros et de 250,46 euros pour 9,5 heures supplémentaires et M. [Y] [J] un salaire de base de 3194 euros, soit un taux salarial de 21,0589 euros et de 250,07 euros pour 9,5 heures supplémentaires.

En intégrant les heures supplémentaires, M. [T] a un taux salarial de 18,37 euros, M. [RE] [J] un taux salarial de 18,76 euros, M. [M] un taux salarial de 20,79 euros et M. [Y] [J] un taux salarial de 21,50 euros.

Finalement, M. [R] qui perçoit le taux salarial le plus élevé ne présente pas d'élément laissant supposer l'existence d'une inégalité de traitement.

Il convient, ajoutant au jugement, de le débouter de sa demande de ce chef.

Sur le licenciement :

M. [R] fait valoir que son licenciement n'a suivi que de quelques jours la fin de la période de protection dont il bénéficiait en qualité de conseiller prud'homal.

Il affirme que les pièces dont la production est reprochée par l'Ambassade de la RFA, quelques bulletins de paie et des titres de séjour, sont en lien direct avec les demandes qu'il formule au titre du respect du principe ' A travail égal salaire égal ' et qu'en lui faisant grief d'avoir communiqué ces pièces dans le cadre de l'instance prud'homale l'Ambassade de la RFA a violé la liberté fondamentale d'ester en justice, violation qui est sanctionnée par la nullité du licenciement.

A titre subsidiaire, il soutient que l'Ambassade de la RFA ne démontre pas en quoi la production de bulletins de paie et de 6 titres de séjour même spéciaux empêchent la poursuite de la relation de travail avec un chauffeur embauché depuis 20 ans et n'ayant aucun passé disciplinaire.

S'agissant de la photographie, il souligne que le contexte de la diffusion par mail, en septembre 2018, de cette photo non datée est particulièrement flou. Il précise que si le port d'un insigne nazi est interdit dans la sphère publique, la prise de cette photo relève de sa vie privée, qu'il n'en a jamais été en possession et qu'il regrette bien évidemment qu'elle ait pu être prise.

Il affirme qu'il n'a violé aucune obligation contractuelle.

L'Ambassade de la RFA rétorque qu'à la fin du mois d'août 2018, M. [R] a fait déposer à ses conseils un pli contenant les pièces qu'il comptait verser aux débats dans le cadre de l'instance pendant devant le conseil de prud'hommes de Nanterre une audience étant prévue le 2 octobre 2018 et qu'elle a ainsi découvert que certaines pièces avaient été frauduleusement soustraites à l'Ambassade et à son personnel.

Elle ajoute que le 10 septembre 2018, un certain [G] [B] a adressé à plusieurs diplomates allemands un email auquel une photo était attachée en pièce jointe, photo qui représentait M. [R] souriant et arborant au revers de sa veste une croix gammée. Elle affirme avoir fait toutes les recherches possibles pour identifier l'auteur de cet envoi, sans succès.

Sur la photo de M. [R]

L'Ambassade de la RFA produit (pièce n°61) un mail de [G] [B] du 10 septembre 2018 ayant pour objet ' les chauffeurs de l'ambassade allemande' portant le message suivant ' félicitations, les chauffeurs de l'ambassade allemande à paris ! Salutation [G] [B] ' et ayant en pièce jointe ' [R]Chauffeur '. La photo était celle de M. [R], de face, souriant, portant au revers de sa veste un insigne nazi bien visible.

Ce mail était adressé à l'ambassadeur de la République Fédérale d'Allemagne en France et aux bureaux consulaires de la la République Fédérale d'Allemagne en France ( [Localité 5], [Localité 9], [Localité 8], [Localité 10], [Localité 11]).

L'Ambassade de la RFA établit avoir, par mail du 14 septembre 2018, demandé à l'expéditeur son identité et avoir saisi un expert informatique qui, le 21 septembre 2018, a conclu que l'analyse du mail ne permet pas d'identifier son auteur ni même son adresse informatique et que la seule possibilité serait de solliciter une réquisition judiciaire de Google.

L'Ambassade de la RFA s'est alors rapprochée de la société Google et a présenté une requête au président du Tribunal de Grande Instance de Paris qui, par ordonnance du 15 novembre 2018, a autorisé et au besoin enjoint à la société Google LLC de communiquer, dans les 15 jours suivant la réception de l'ordonnance, à la République Fédérale d'Allemagne le nom et les coordonnées de l'expéditeur du mail envoyé le 10 septembre 2018 depuis l'adresse [Courriel 7] et dont l'adresse IP est 74.125.82.65 ainsi que la ou les différentes adresses IP de connexion sur la plage horaire de l'émission du 10 septembre 2018.

L'Ambassade de la RFA établit avoir tenté de faire exécuter cette décision mais s'être heurtée à la demande de Google soit d'informer l'utilisateur de la demande soit d'être autorisée par ordonnance judiciaire à ne pas l'informer.

A ce jour, l'Ambassade de la RFA ne justifie pas avoir répondu à cette demande ou solliciter une nouvelle ordonnance.

En l'état, il peut être retenu qu'elle a accompli les démarches nécessaires pour connaître l'identité de l'expéditeur, identité qui demeure inconnue.

Au demeurant, aucun reproche n'est formé à l'encontre de M. [R] s'agissant de l'expédition de ce mail. Il lui est reproché de s'être fait prendre en photo, dans l'enceinte de l'ambassade, porteur de l'insigne nazi.

M. [R] oppose à l'Ambassade de la RFA la prescription de ce fait. Le délai de prescription de l'article L. 1332-4 court à compter du jour où l'employeur a eu connaissance du fait sanctionné.

En l'espèce, M. [HP] chef de service atteste, comme plusieurs collègues, n'avoir jamais eu connaissance des faits. M. [VL], chauffeur, présent lors de la prise de la photo atteste lui avoir espéré que ces faits ne seraient jamais connus.

Aucun élément n'accrédite la thèse de M. [R] selon laquelle l'Ambassade aurait assuré la diffusion de la photo.

La diffusion par une personne non identifiée d'un mail auquel est jointe une photo, ne peut être assimilée à un témoignage anonyme impuissant à lui seul à fonder une décision de justice.

Finalement, l'Ambassade de la RFA établit n'avoir eu connaissance de l'existence de cette photo que le 10 septembre 2018. Ce fait n'est donc pas prescrit.

Maître [I], huissier de justice, le 15 septembre 2018 a dressé un procès-verbal de constat (pièce n°89) qui permet de situer le lieu de prise de cette photo dans les locaux de l'ambassade au deuxième étage dans le bureau de droite en regardant en direction du bureau de gauche ouvrant sur la cour de l'hôtel particulier.

M. [VL], chauffeur, a attesté le 10 décembre 2018 :

' Par la présente attestation je souhaite fournir les explications suivantes relatives à l'incident concernant M. [R] et le port de l'insigne nazi au sein de l'ambassade. La photo que M. [U] me présente et que je joins à la présente attestation a bien été prise dans les locaux de l'ambassade.

Je ne me souviens pas du jour où cette photo a été prise et je me reconnais caché derrière M. [R] on aperçoit le haut de ma tête.

L'insigne nazi que porte M. [R] se trouvait dans un sac d'insignes militaires que j'avais apporté avec moi au sein de l'ambassade. Je ne me souviens pas qui a pris cette photo.

En aucun cas je n'ai demandé à M. [R] de porter un tel insigne ou de se faire photographier avec. Je regrette que cette photo ait été diffusée je pensais que cet incident ne sortirait jamais. '

Il est donc établi que la photo a été prise dans les locaux de l'ambassade, en présence d'au moins trois personnes, M. [VL] dont on voit le haut du crâne, la personne dont on voit le bras et celle qui a pris la photo.

Cette constatation contredit la version donnée par M. [R] à l'audience du 26 septembre 2019 au cours de laquelle il a prétendu que la photo avait été prise par M. [VL] dans un bungalow à l'extérieur des locaux de l'ambassade.

La posture de M. [R] sur la photo, qui manifestement prend la pose, exclut aussi la suite de sa version orale qui consiste à dire que la photo a été prise par surprise.

Finalement, il est établi qu'à une date indéterminée M. [R] s'est laissé prendre en photo dans les locaux de l'ambassade, souriant et porteur au revers de sa veste d'un insigne nazi.

Ce fait s'est déroulé dans un lieu ouvert au public.

M. [R] est donc mal fondé à se prévaloir de ce que cet acte relève de sa vie privée.

Compte tenu de la charge symbolique que représente le port de l'insigne nazi, de façon générale, et plus encore au sein de la représentation de la République Fédérale d'Allemagne, M. [R], salarié de l'Ambassade de la RFA, en se faisant photographier au sein des locaux de l'ambassade, souriant et porteur au revers de sa veste d'un insigne nazi a manqué à son obligation de loyauté.

Sur la soustraction de documents auxquels M. [R] n'avait pas accès en sa qualité de chauffeur

M. [R] ne discute pas la date de communication au conseil de l'Ambassade de la RFA des pièces litigieuses.

Dans la lettre de licenciement, l'Ambassade de la RFA ne fait pas grief à M. [R] d'avoir saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre mais se borne à expliquer dans quelles circonstances elle a découvert l'appropriation par le salarié des documents litigieux.

M. [R] est donc mal fondé à soutenir que l'Ambassade de la RFA a violé une liberté fondamentale en sanctionnant sa saisine du conseil de prud'hommes.

Ajoutant au jugement, il convient donc de le débouter de sa demande de nullité et de réintégration subséquente.

Un salarié ne peut s'approprier des documents appartenant à l'employeur dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions que s'ils sont strictement nécessaires à l'exercice des droits de sa défense dans le litige les opposant ce qu'il lui appartient de démontrer.

Il est manifeste que ses fonctions de chauffeur ne lui donnaient pas accès à ces documents.

M. [R] se prévaut des bonnes relations qu'il avait avec ses collègues et l'administration de l'ambassade pour expliquer la possession des documents litigieux.

Cependant, M. [J] et M. [M] attestent ne pas avoir remis de bulletin de salaire à M. [R] et Mme [S] déclare qu'elle en avait remis à M. [R] uniquement pour avoir un conseil.

Aussi, M. [W], ambassadeur auprès de l'UNESCO, atteste qu'il ignore de quelle occasion M. [R] a profité pour faire la photocopie de son passeport et qu'il ne peut que supposer qu'il l'a faite à l'occasion d'un transport de documents de la délégation permanente de l'Allemagne auprès de l'UNESCO.

Il est ainsi établi que M. [R] a soustrait les documents litigieux, certains particulièrement sensibles comme les copies des passeports spéciaux, à l'Ambassade de la RFA.

Les deux faits reprochés sont donc établis. Par leur nature, ils sont constitutifs d'un manquement à l'obligation de loyauté d'une gravité telle qu'ils rendaient impossible, malgré l'ancienneté du salarié, la poursuite du contrat de travail.

Il convient donc de dire le licenciement fondé sur une faute grave et de débouter M. [R] de l'ensemble de ses demandes subséquentes.

Sur la remise des documents :

Sans qu'il soit besoin d'assortir cette mesure d'une astreinte il convient d'ordonner à l'Ambassade de la RFA de remettre à M. [R] des bulletins de salaire conformes au présent arrêt.

Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est inéquitable de laisser à la charge de M. [R] les frais par lui exposés non compris dans les dépens à hauteur de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement,

Ecarte des débats les pièces n°56 et n°62 communiquées par M. [R],

Infirme partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande tendant à voir dire inopposable à M. [R] le contrat de travail du 15 mars 1999,

Dit que les mandats de délégué syndical, conseiller du salarié et conseiller prud'hommes de M. [R] ne sont pas opposables à l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne,

Déboute M. [R] de ses demandes au titre de rappel de salaire pour ses missions de délégué syndical, conseiller du salarié et conseiller prud'homal,

Déboute M. [R] de sa demande au titre de la discrimination syndicale,

Condamne l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne à payer à M. [R] les sommes suivantes au titre de rappel de salaire :

. 2 924,48 euros à titre d'heures supplémentaires 2000,

. 292,44 euros à titre de congés payés y afférents,

. 1 707,98 euros à titre de repos compensateur 2000,

. 170,79 euros à titre de congés payés y afférents,

. 4 693,13 euros à titre d'heures supplémentaires 2001,

. 469,31 euros à titre de congés payés y afférents,

. 1 819,36 euros à titre de repos compensateur 2001,

. 181,93 euros à titre de congés payés y afférents,

. 5 114,17 euros à titre d'heures supplémentaires 2002,

. 511,41 euros à titre de congés payés y afférents,

. 3 948,80 euros à titre de repos compensateur 2002,

. 394,88 euros à titre de congés payés y afférents,

. 11 206,76 euros à titre d'heures supplémentaires 2003,

. 1 120,67 euros à titre de congés payés y afférents,

. 10 322,82 euros à titre de repos compensateur 2003,

. 1 032,28 euros à titre de congés payés y afférents,

. 1 995,80 euros à titre d'heures supplémentaires 2004,

. 199,58 euros à titre de congés payés y afférents,

. 102,85 euros à titre de repos compensateur 2004,

. 10,28 euros à titre de congés payés y afférents,

. 9 043,42 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant aux majorations des heures supplémentaires effectuées de 2005 à 2013 qui auraient dues lui être versées,

. 904,34 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes pour les sommes afférentes à la période antérieure à cette date et à compter de leur échéance pour les sommes afférentes aux périodes postérieures,

Dit que les intérêts échus des capitaux porteront eux- mêmes intérêts au taux légal dès lors qu'ils seront dus pour une année entière,

Ordonne à l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne de remettre à M. [R] des bulletins de salaire conformes au présent arrêt,

Confirme pour le surplus le jugement,

Ajoutant au jugement,

Déboute M. [R] de ses demandes relatives à l'inégalité de traitement,

Déboute M. [R] de ses demandes relatives à son licenciement,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Condamne l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne à payer à M. [R] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

Condamne l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne aux dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, présidente et Madame Marine MANELLO, greffière.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 15/02997
Date de la décision : 13/11/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°15/02997 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-13;15.02997 ?
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