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24/10/2019 | FRANCE | N°18/03860

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 24 octobre 2019, 18/03860


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 58F



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 24 OCTOBRE 2019



N° RG 18/03860

N° Portalis DBV3-V-B7C-SNNJ



AFFAIRE :



[J] [B]



C/



SA AXA FRANCE IARD





Décision déférée à la cour : Jugement rendule 17 Mai 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 2

N° RG : 15/10407



Expéditions exécutoires

Exp

éditions

Copies

délivrées le :





à :





Me Nicolas RANDRIAMARO de la SELARL RD ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU N...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58F

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 OCTOBRE 2019

N° RG 18/03860

N° Portalis DBV3-V-B7C-SNNJ

AFFAIRE :

[J] [B]

C/

SA AXA FRANCE IARD

Décision déférée à la cour : Jugement rendule 17 Mai 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 2

N° RG : 15/10407

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Nicolas RANDRIAMARO de la SELARL RD ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE OCTOBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [J] [B]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 3] (75)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Nicolas RANDRIAMARO de la SELARL RD ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 339 - N° du dossier VP15219 -

Représentant : Me Franck LOPEZ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0934

APPELANT

****************

SA AXA FRANCE IARD

N° SIRET : 722 057 460

[Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 018142

Représentant : Me Gildas ROSTAIN du PARTNERSHIPS CLYDE & CO LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0429

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Septembre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOISSELET, Président chargé du rapport et Madame Caroline DERNIAUX, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

En avril 2013, M. [B], dirigeant de la société Reinerie Finance SAS (Reinerie Finance), de la SCI Reinerie Immobilier (Reinerie Immobilier) et de la société Negma, a souscrit, au nom de ces sociétés, deux polices d'assurance «'Responsabilité des dirigeants'» auprès de la société Axa France Iard (Axa) avec prise d'effet au 02 juillet 2013. Elles ont été résiliées avec effet au 1er juillet 2015.

M. [B] a été révoqué de son mandat social de président de la société Reinerie Finance le 12 novembre 2013, a démissionné le 15 novembre 2013 de son mandat de président directeur général au sein de Negma et a été révoqué de son mandat de gérant de la société Reinerie Immobilier le 25 novembre 2013. En mars 2014, les nouveaux dirigeants des sociétés Negma et Reinerie Finance ont engagé diverses actions judiciaires civiles et pénales contre M. [B] tendant à rechercher sa responsabilité pour fautes de gestion commises lorsqu'il était dirigeant de ces sociétés.

Le 25 janvier 2015, M. [B] a sollicité la prise en charge et le remboursement des frais de défense engagés en exécution des polices «'Responsabilité des dirigeants'».

Par courrier du 18 mars 2015, Axa a refusé de mettre en 'uvre cette garantie.

Par exploit d'huissier en date du 09 décembre 2015, M. [B] a assigné Axa devant le tribunal de grande instance de Versailles à cette fin.

Par jugement du 07 mai 2018, le tribunal de grande instance de Versailles a :

- dit que la preuve de l'existence d'une police d'assurance souscrite par la société Negma n'est pas rapportée,

- déclaré nulle la police d'assurance souscrite le 02 juillet 2013 par la société Reinerie Finance,

- déclaré nulle la police d'assurance souscrite le 02 juillet 2013 par la SCI  Reinerie Immobilier,

- dit qu' Axa n'a pas à prendre en charge les frais de défense engagés par M. [B] au titre de ces contrats,

- débouté M. [B] de ses demandes,

- condamné M. [B] aux dépens, et à payer à Axa la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs plus amples demandes.

Par acte du 17 mai 2018, M. [B] a interjeté appel et prie la cour, par dernières écritures du 03 septembre 2019, de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

à titre principal :

- condamner Axa à lui verser la somme de 542 066,73 euros selon la situation arrêtée au 4 septembre 2018, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2015 pour la somme de 449 018 euros, date de la mise en demeure et capitalisation annuelle, et à compter du 26 août 2018 pour la somme complémentaire de 93 048,73 euros en application des dispositions de l'article 1154 du code civil, au titre de la police souscrite par Reinerie Finance,

à titre subsidiaire :

- condamner Axa à lui verser la somme de 536 066,73 euros selon la situation arrêtée au 4 septembre 2018, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2015 pour la somme de 443 018,00 euros, date de la mise en demeure et capitalisation annuelle, et à compter du 26 août 2018 pour la somme complémentaire de 93 048,73 euros en application des dispositions de l'article 1154 du code civil au titre de la police souscrite par Reinerie Finance,

- condamner Axa à lui verser la somme de 6 000 euros selon la situation arrêtée au 4 septembre 2018, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2015, date de mise en demeure et capitalisation annuelle en application des dispositions de de l'article 1154 du code civil au titre de la police souscrite par Reinerie Immobilier,

- condamner Axa à lui verser la somme de 34 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens de première instance, avec recouvrement direct.

Par dernières écritures du 05 septembre 2019, Axa prie la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter M. [B] de ses demandes,

si le jugement devait être infirmé,

- prononcer la nullité de la police souscrite le 2 juillet 2013 par la société Reinerie Finance avec toutes conséquences de droit,

- prononcer la nullité de la police souscrite le 2 juillet 2013 par la SCI Reinerie Immobilier avec toutes conséquences de droit.

- juger qu'Axa est bien fondé à refuser sa garantie au titre des exclusions de la police souscrite par Reinerie Finance, et de celles au titre des exclusions de la police souscrite par la SCI Reinerie Immobilier,

- débouter M. [B] de ses demandes,

sur les frais de défense :

- juger qu'Axa est bien fondé à refuser sa garantie au titre de la police souscrite par Reinerie Finance, et au titre de la police souscrite par la SCI Reinerie Immobilier,

- débouter M. [B] de ses demandes,

- ordonner à M. [B] de mettre en place une garantie bancaire à première demande d'un montant de 2 600 000 euros et d'une duré de dix ans renouvelable,

- débouter M. [B] de ses demandes,

- condamner M. [B] à lui payer la somme de 35 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu' aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2019.

SUR QUOI, LA COUR :

Le tribunal a rejeté l'argumentation d'Axa sur l'absence d'aléa au motif que, même si M. [B] avait connaissance de débats autour de ses pratiques professionnelles, contestées avant avril 2013, le dommage n'était ni certain ni déterminable. En revanche il a retenu que M. [B] avait effectué de fausses déclarations intentionnelles sur la situation des sociétés Reinerie Finance et Reinerie Immobilier, en répondant oui à la question contenue dans les questionnaires qu'il a remplis et signés le 15 avril 2013, libellée en ces termes 'les situations financières de la société proposante et de chacune de ses filiales sont positives (résultat d'exploitation, résultat net et capitaux propres positifs) sur leurs deux derniers exercices' alors que tel n'était pas le cas. En effet, le résultat de Reinerie Finance était négatif en 2012, et en 2011. En ce qui concerne Reinerie Immobilier, le tribunal a relevé que la pièce 88 visée par Axa ne figurait pas au dossier remis au tribunal, et que M. [B] reconnaissait en partie que les comptes étaient négatifs.

Cette situation a nécessairement modifié l'appréciation du risque par l'assureur.

Il a en outre considéré que la preuve de l'existence d'une police souscrite par la société Negma n'était pas rapportée.

M. [B] précise que sa réclamation ne concerne que la garantie des 'frais de défense du dirigeant'. Il conteste toute fausse déclaration et expose que la situation de ses sociétés était très largement positive, si l'on tient compte des engagements hors bilans contenus dans les annexes de ces derniers, et qui contribuent, au même titre que les bilans proprement dits, à donner une image fidèle de la situation financière des sociétés. Il observe qu'alors que les annexes font parties intégrante des comptes d'une société, il n'était pas précisé au questionnaire, qu'il y avait lieu de s'attacher au bilan exclusivement à l'exception de ses annexes, et que l'ambiguïté de la question a pour seul but de ménager à Axa la faculté de ne jamais garantir. Il observe que des précisions sur les lignes du bilan à prendre en compte étaient indispensables, alors surtout que sont demandés, lors du renouvellement du contrat, les comptes consolidés, et les bilans de chacune des sociétés composant le groupe, avec leurs annexes.

Il fait valoir que sa mauvaise foi n'est pas démontrée, puisque la comptabilité de ses sociétés est conforme aux exigences légales, et que l'assureur, pleinement informé de la situation de son groupe lors du renouvellement des contrats, a accepté tacitement l'évolution du risque, puisqu'il a continué à appeler des cotisations en 2014, et a ainsi perdu la faculté de se prévaloir d'une aggravation du risque.

Enfin, il fait valoir que les faits délictueux dénoncés par les nouveaux dirigeants du groupe Negma sont loin d'être établis, et que n'est donc démontrée aucune faute dolosive ou intentionnelle de sa part, laquelle, s'agissant de la garantie 'frais de défense' est en outre indifférente pour apprécier le risque garanti.

Axa, après avoir rappelé le contexte conflictuel de la souscription des polices, expose que celle concernant Reinerie Immobilier est nulle en raison de la fausse déclaration affectant la forme de la société, qui est une SCI alors que M. [B] a déclaré le contraire dans le questionnaire. Plus généralement, elle souligne que les notions comptables visées aux questionnaires remplis par M. [B] le 15 avril 2013 renvoient à une ligne bien précise des comptes, soit GG pour le résultat d'exploitation, DI pour le résultat net et DL pour les capitaux propres, ce que sait très bien M. [B], qui a d'ailleurs reconnu dans des écritures du 18 avril 2017 devant le tribunal l'existence d'un résultat négatif pour Reinerie Finance et Reinerie Immobilier pour 2011. Elle ajoute que, la liasse fiscale pour 2012 ayant été déposée le 5 avril 2013 pour Reinerie Immobilier, M. [B] avait connaissance, à la date à laquelle il a rempli les questionnaires, soit le 15 avril 2013, des résultats négatifs de cette société. Elle rappelle que M. [B] était tenu de lui indiquer les modifications du risque préalablement à la prise d'effet du contrat, soit le 2 juillet 2013, et qu'à cette date, il avait connaissance des résultats négatifs des sociétés.

Axa observe enfin qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération les engagements hors bilan, qui n'étaient pas visés par la question posée, et qui ne peuvent aller contre le bilan lui même, sauf à admettre de faux bilans. Elle rappelle les éléments soumis à la juridiction pénale, ou à d'autres juridictions concernant les malversations reprochées à M. [B], qu'elle qualifie d'escroqueries, et fait état de sa détention provisoire entre février et juillet 2015. Plus généralement, elle fait valoir que les multiples irrégularités et anomalies de la gestion de M. [B] excluaient qu'il pût affirmer ne pas avoir connaissance de faits, circonstances ou fautes susceptibles de donner lieu à réclamations contre les sociétés du groupe ou leurs dirigeants.

***

Aucune demande n'est formée devant la cour au titre d'un contrat d'assurance souscrit par Negma.

Le tribunal a justement rappelé les termes de l'article L113-8 du code des assurances, selon lesquels le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre.

Les bulletins de souscription simplifiés des polices 'responsabilité des dirigeants entreprises' souscrites pour le compte de Reinerie Finance et Reinerie Immobilier par M. [B]

comportent les déclarations préimprimées suivantes du souscripteur, invité à y répondre par oui ou par non en cochant les cases prévues à cet effet :

'La forme juridique de la société proposante est privée, publique ou mixte, à l'exclusion de celles de société civile'.

'Les situations financières de la société proposante et de chacune de ses filiales sont positives (Résultat d'exploitation, Résultat net et Capitaux propres positifs) sur leurs 2 derniers objectifs).

M. [B] a coché les cases 'oui' dans les deux questionnaires.

Au verso de ces documents, figuraient les mentions selon lesquelles 'la société proposante ....déclare que les réponses faites ci-dessus sont exactes complètes et sincères et qu'elles ne comportent aucune restriction de nature à induire en erreur l'assureur dans l'appréciation du risque proposé.'

'En cas de modification des déclarations effectuées dans le présent bulletin de souscription simplifiée avant prise d'effet du contrat, et notamment en cas de changement de risque majeur, ou de réclamation, sinistre ou notification de circonstances survenant entre la date de signature du présent bulletin et la prise d'effet du contrat, le soussigné notifiera ces modifications à l'assureur qui se réserve le droit d'infirmer, de confirmer ou de modifier son offre'.

'Je reconnais avoir été informé...du caractère obligatoire des réponses aux questions posées ci-dessus ainsi que des conséquences qui pourraient résulter d'une omission ou d'une fausse déclaration prévues aux articles L.113-8 (nullité du contrat) et L.113-9 (réduction des indemnités) du code des assurances.'

M. [B] a apposé le tampon de la SCI Reinerie Immobilier, à côté de sa signature, en sorte qu'Axa a été informée d'emblée de l'inexactitude de la déclaration de M. [B] sur ce point, et ne saurait s'en plaindre, ainsi que l'a justement considéré le tribunal.

Contrairement à ce que soutient M. [B], les termes précis employés, dont aucun dirigeant de société n'ignore le sens, renvoient à des mentions bien identifiées du bilan, et non pas à l'incidence d'éventuelles opérations hors bilan. Au demeurant, l'affirmation selon laquelle la situation réelle des sociétés ne pouvait être appréciée indépendamment de ces opérations hors bilan revient à reconnaître que le bilan ne donnait pas une image fidèle de la situation des sociétés.

Compte tenu de la date de la souscription, et plus encore de la date d'effet des polices, les comptes de l'exercice 2012 étaient connus, et devaient donc être pris en compte les bilans des exercices clos les 31 décembre 2011 et 2012.

Aucune hésitation n'est non plus permise sur le fait qu'était déclarée une situation positive sur les deux derniers exercices connus, et non une moyenne entre ces deux exercices.

Or selon le bilan 2012 de Reinerie Finances, son résultat d'exploitation 2012 était négatif de 42 712 euros, et celui de 2011 de 338 604 euros. Les résultats nets étaient également négatifs pour 119 981 euros en 2012, et 35 229 en 2011.

Pour Reinerie Immobilier, sont positifs les résultats de 2012, seul celui de 2011 est négatif pour 1 911 euros.

M. [B] avait connaissance des résultats de 2012 à la date à laquelle il a signé les bulletins de souscription, puisque la liasse fiscale qu'il produit est datée du 5 avril 2013. Il avait en outre connaissance de ceux de 2011, et était tenu de déclarer à Axa les résultats négatifs de 2012 avant la prise d'effet des polices début juillet 2013, date bien postérieure à la date de l'assemblée générale de mai 2013 ayant approuvé les comptes 2012, ce qu'il n'a pas fait.

Il est évident que la responsabilité d'un dirigeant de société a beaucoup plus de chances d'être recherchée si la situation financière de la société est mauvaise, et la probabilité d'avoir à couvrir des frais de défense du dirigeant est ainsi beaucoup plus grande pour l'assureur en un tel cas, indépendamment de l'issue des procédures entreprises et de leur mérite. Dès lors, contrairement aux affirmations de M. [B] sur ce point, l'inexactitude de ses déclarations sur les résultats de ses sociétés, dont il a indiqué faussement qu'ils étaient positifs sur les deux dernières années précédant la souscription, a bel et bien minoré l'opinion d'Axa sur le risque qu'elle assurait.

La circonstance qu'Axa ait été l'assureur de M. [B] à d'autres titres ne saurait établir qu'elle avait ainsi acquis une connaissance exacte de la situation des deux sociétés. De même, le fait que les contrats aient été souscrits par l'intermédiaire d'un mandataire d'Axa auquel M. [B] avait habituellement affaire n'a en lui même aucune incidence sur la connaissance qu'Axa pouvait avoir de la situation des sociétés. M. [B] ne saurait par ailleurs se prévaloir utilement de la notification d'une augmentation de ses cotisations en 2014, faute de démontrer qu'Axa a eu connaissance à ce moment là de la réalité du risque de mise en oeuvre de sa garantie, et faute de tout élément remettant en cause l'affirmation d'Axa selon laquelle il s'agit d'une augmentation générale de ses cotisations.

Il est exclu par la nature même de la question que M. [B] ait pu y répondre de manière erronée de bonne foi. Il n'est pas allégué qu'il ait fait une erreur en cochant la case 'oui'. En revanche, le contexte dans lequel M. [B] a souscrit ces contrats confirme encore le caractère intentionnel des inexactitudes précédemment caractérisées.

La société Negma est spécialisée dans la location financière de matériels bureautiques, informatiques et téléphoniques. Elle est contrôlée par la société holding Reinerie Finance. La SCI Reinerie Immobilier est propriétaire des locaux dans lesquelles toutes trois exercent leur activité.

Selon les pièces produites par M. [B] lui-même, et notamment l'assignation délivrée à la requête de [W] en 2014, et ses propres conclusions en défense, souhaitant prendre sa retraite, il a cherché à céder son entreprise et est entré en contact avec M. [Y], qui a investi dans le groupe et en est devenu salarié début 2013. M. [Y] considérant en janvier 2013 que la situation réelle du groupe était beaucoup moins favorable que ce qui lui avait été présenté par M. [B], les relations entre ce dernier, M. [Y] et M. [H], dirigeant de Negma, se sont tendues, ceux-ci reprochant à M. [B] sa gestion frauduleuse du groupe, consistant en des ventes multiples de matériel loué en crédit-bail depuis plusieurs années, gonflant artificiellement les résultats de Reinerie Finance, et alourdissant les charges de Negma, et en des opérations fictives aux fins d'enrichissement personnel de M. [B]. C'est ainsi que, de retour d'une absence de quelques jours, M. [B] relate lui-même avoir été sommé par ses collaborateurs fin janvier 2013 de démissionner de ses fonctions au sein de Reinerie Finance. Les associés de Reinerie Immobilier lui ont par ailleurs écrit en janvier 2013 afin de lui demander de réunir une assemblée générale afin qu'il soit statué sur sa révocation, qui sera effective pour les deux sociétés quelques mois plus tard, après désignation d'un administrateur ad hoc.

Ces éléments factuels montrent que M. [B] ne pouvait avoir aucun doute lors de la souscription des contrats en avril 2013 sur l'imminence d'actions contre lui, et du grand intérêt qui s'attachait par conséquent à une garantie au titre de frais de défense. Ils sont d'ailleurs de nature à retirer aux contrats souscrits une grande partie de leur caractère aléatoire.

La nullité des contrats souscrits aux noms de Reinerie Finance et Reinerie Immobilier sera dès lors confirmée.

M. [B], qui succombe en son appel, en supportera les dépens, et contribuera aux frais de procédure exposés devant la cour par Axa à hauteur de 3 000 euros.

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et indemnités de procédure de première instance seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [J] [B] à payer à la société Axa France Iard la somme complémentaire de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Le condamne également aux dépens d'appel, avec recouvrement direct.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 18/03860
Date de la décision : 24/10/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°18/03860 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-24;18.03860 ?
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