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03/10/2019 | FRANCE | N°17/06153

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 03 octobre 2019, 17/06153


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



6e chambre







ARRÊT N° 335



CONTRADICTOIRE



DU 03 OCTOBRE 2019



N° RG 17/06153



N° Portalis : DBV3-V-B7B-SBL4







AFFAIRE :



SAS ÉTABLISSEMENTS DOITRAND



C/



[X] [L]









Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 14 Décembre 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA J

OLIE

N° Section : Référé

N° RG : 17/00035







Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées le 04 Octobre 2019 à :

- Me Didier CIEVET

- Me Valentin PLANCHENAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE TROIS OCTOBRE DEUX MILLE DIX N...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRÊT N° 335

CONTRADICTOIRE

DU 03 OCTOBRE 2019

N° RG 17/06153

N° Portalis : DBV3-V-B7B-SBL4

AFFAIRE :

SAS ÉTABLISSEMENTS DOITRAND

C/

[X] [L]

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 14 Décembre 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

N° Section : Référé

N° RG : 17/00035

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées le 04 Octobre 2019 à :

- Me Didier CIEVET

- Me Valentin PLANCHENAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TROIS OCTOBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

La SAS ÉTABLISSEMENTS DOITRAND

N° SIRET : 406 580 332

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Didier CIEVET, constitué/plaidant, avocat au barreau de LYON

APPELANTE

****************

Madame [X] [L]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Valentin PLANCHENAULT, avocat au barreau de CHARTRES, substituant Me Céline LOISEL, constituée/plaidant, avocate au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000057

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Juin 2019, Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, conseiller, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Valérie DE LARMINAT, Président,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Monsieur Hubert DE BECDELIEVRE, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Nicolas CAMBOLAS

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SAS Établissements Doitrand exerce une activité de travaux de menuiserie métallique et serrurerie. Elle emploie 117 personnes et comporte 12 agences en France.

Par contrat de travail à durée indéterminée du 7 décembre 2010, Mme [X] [L], née le [Date naissance 1] 1978, était engagée par la SAS Établissements Doitrand, en qualité de secrétaire au sein de l'agence de [Localité 4] (Yvelines).

Le 25 novembre 2016, Mme [L] informait sa direction que le jour même, elle avait fait l'objet de gestes déplacés de la part de M. [F] [T], responsable de l'agence où elle travaillait. La salariée déposait également plainte pour ces faits.

Lors de son audition par les services de gendarmerie, la salariée relatait les faits suivants : « Il s'est approché de moi pendant que j 'essayais d'ouvrir l'armoire, il m'a saisi par les hanches et m'a donné un coup de reins avec son bassin dans les fesses. Je me suis redressée, je me suis retournée et je lui ai dit "touches à ton cul, n 'éteins pas la lumière, ne me laisses pas dans le noir, j'ai peur du noir" puis je suis sortie. Il m'a dit "Oh non, c'est pour rire." »

La société et le CHSCT de l'entreprise diligentaient chacun une enquête.

Mme [L] était placée en arrêt de travail à compter du 26 novembre 2016.

Le 28 novembre 2016, le personnel de l'agence de [Localité 4] était informé que M. [T] était relevé de ses fonctions en attendant la résolution de la situation. Le 6 décembre 2016, l'intéressé était convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire, à la suite duquel il se voyait notifier un avertissement le 22 décembre 2016.

Puis, en accord avec le CHSCT, il était décidé d'organiser le temps de travail des deux salariés de telle sorte qu'ils ne puissent plus se croiser dans l'agence, M. [T] travaillant pour l'essentiel à partir de son domicile et ne pouvant se présenter à l'agence que le matin avant l'arrivée de Mme [L] ou le soir après son départ.

Le 18 janvier 2017, la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines reconnaissait le caractère professionnel de l'accident du 25 novembre 2016.

Le 14 juin 2017, Mme [L] saisissait le conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie afin de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail, estimant que les mesures prises par l'entreprise à la suite des faits du 25 novembre 2016 étaient totalement insuffisantes.

Le 25 octobre 2017, la salariée faisait l'objet d'un avis d'inaptitude à tout poste de l'agence par le médecin du travail.

Par lettre recommandée du 26 décembre 2017, Mme [L] se voyait notifier son licenciement pour inaptitude.

Le 16 novembre 2017, la SAS Établissements Doitrand saisissait le conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie, en la forme des référés, d'une contestation de l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail, sollicitant la désignation d'un médecin-expert.

Par ordonnance du 14 décembre 2017, le conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie a :

- constaté l'irrecevabilité de la requête et déclaré le recours forclos,

- débouté la SAS Établissements Doitrand de ses demandes,

- débouté Mme [X] [L] de ses demandes reconventionnelles,

- mis les entiers dépens de l'instance, y compris les éventuels frais d'exécution, à la charge de la SAS Établissements Doitrand.

La SAS Établissements Doitrand a interjeté appel de cette ordonnance le 22 décembre 2017.

Suivant arrêt avant dire droit du 31 janvier 2019, la cour a :

- dit que le délai de 15 jours ouvert pour la saisine du conseil des prud'hommes a couru à compter de la réception par l'employeur de l'avis d'inaptitude et non d'éléments de nature médicale justifiant l'avis d'inaptitude ;

- ordonné la réouverture des débats sur les conséquences à tirer de ce principe sur la recevabilité de la requête en contestation de l'avis d'inaptitude ;

- dit que la SAS Établissements Doitrand devra conclure avant le 15 février 2019 ;

- dit que Mme [L] devra conclure avant le 15 mars 2019 ;

- fixé la clôture au jeudi 21 mars 2019 à 14h00 ;

- renvoyé l'affaire à l'audience rapporteur du lundi 1er avril 2019 à 11h00 en salle n°1 de la cour d'appel de Versailles ;

- réservé les dépens.

Par conclusions reçues au greffe le 13 février 2019, la SAS Établissements Doitrand demande à la cour de :

- dire que la requête introductive d'instance en la forme des référés adressée au conseil des prud'hommes de Mantes-la-Jolie par courrier recommandé AR en date du 16 novembre 2017, réceptionné le 17, n'était pas forclose au regard de l'avis d'inaptitude médicale rempli le 25 octobre 2017 par M. le docteur [U] [P] de l'Association Paritaire de Santé au Travail de Boulogne-Billancourt ayant examiné Mme [X] [L],

- constater qu'en l'absence de communication « des éléments de nature médicale justifiant l'avis », le délai de recours prévu par la loi n'a pas couru,

- désigner tel médecin-expert inscrit sur la liste des experts près la cour d'appel de Versailles aux fins d'examiner Mme [L], et dire si elle était apte ou non à reprendre son poste à l'agence où elle travaillait avant le 25 novembre 2016, compte-tenu des aménagements de poste mis en place par son employeur dont il est justifié,

- dire que le médecin-expert qui sera désigné pourra demander au médecin du travail la communication du dossier médical en santé au travail de Mme [L],

- définir le montant de la provision sur frais d'expertise que la société Doitrand offre de consigner, soit entre les mains de la caisse des dépôts et consignations, soit entre les mains de la régie de la présente cour d'appel.

Par conclusions communiquées par voie électronique le 13 mars 2019, Mme [L] demande à la cour de :

- dire irrecevable et à tout le moins mal fondée la société Établissements Doitrand en son appel et en ses demandes,

À titre principal,

- juger irrecevables les demandes de la société Établissements Doitrand, sur le fondement des dispositions de l'article R. 4624-45 et de l'alinéa 1 de l'article L. 4627-4 du code du travail,

À titre subsidiaire,

- constater le non respect par la société Établissements Doitrand des dispositions de l'article L. 4624-7 du code du travail,

En conséquence :

- juger la société Établissements Doitrand mal fondée en ses demandes,

- débouter la société Établissements Doitrand de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer, en conséquence, l'ordonnance rendue le 14 décembre 2017 par le conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie,

En tout état de cause,

- condamner la société Établissements Doitrand à payer à Mme [L] la somme de 3 000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 21 mai 2019.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour ayant soulevé d'office la question de l'intérêt à agir de la société Doitrand, employeur de Mme [X] [L], les parties ont été invitées à s'expliquer sur ce point, conformément aux dispositions de l'article 442 du code de procédure civile.

Selon une note en délibéré remise à l'audience de plaidoirie du 18 juin 2019, Mme [L] relève que la position de la société Établissements Doitrand est contradictoire entre la contestation de l'avis d'inaptitude de la médecine du travail et son licenciement pour inaptitude. Elle en déduit que la société Établissements Doitrand, qui ne justifie pas d'un intérêt à agir, doit être déclarée irrecevable en son action de contestation de l'avis d'inaptitude du médecin du travail du 25 octobre 2017.

L'employeur considère qu'il a un intérêt à agir.

Il résulte des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile que constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Selon l'article 125 du même code, le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

L'intérêt à agir se définit comme une condition de recevabilité de l'action consistant dans l'avantage que procurerait au demandeur la reconnaissance par le juge du bien-fondé de sa prétention. L'intérêt doit être personnel, direct, né et actuel.

En l'espèce, la salariée a fait l'objet, le 25 octobre 2017, d'un avis d'inaptitude à tout poste de l'agence, ce que l'employeur estime contestable et entend voir remis en cause dans le cadre de la présente instance.

Or, sans attendre l'issue du litige, la SAS Établissements Doitrand a choisi de licencier Mme [L] en se prévalant de l'avis inaptitude que justement elle conteste.

Il en résulte que la société Établissements Doitrand ne justifie plus d'aucun intérêt à agir en contestation de l'avis d'inaptitude.

Son action sera dès lors déclarée irrecevable.

La société Établissements Doitrand supportera les dépens en application des dispositions de l'article'696 du code de procédure civile.

En revanche, il n'est pas inéquitable de laisser à Mme [L] la charge de ses frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

CONFIRME l'ordonnance déférée notamment en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action formée par la SAS Établissements Doitrand à l'encontre de Mme [X] [L] ;

DÉBOUTE Mme [X] [L] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que la SAS Établissements Doitrand supportera les dépens ;

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valérie DE LARMINAT, faisant fonction de Président, et par Monsieur Nicolas CAMBOLAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 17/06153
Date de la décision : 03/10/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 06, arrêt n°17/06153 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-03;17.06153 ?
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