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19/09/2019 | FRANCE | N°17/07523

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 19 septembre 2019, 17/07523


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



TA

Code nac : 55B



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 SEPTEMBRE 2019



N° RG 17/07523 - N° Portalis DBV3-V-B7B-R4QT



AFFAIRE :



SAS NNR GLOBAL LOGISTICS FRANCE venant aux droits de la

SAS GLOBAL STAR INTERNATIONAL



C/

SARL CODIME (COMORES-SAFARIS-SERVICES)









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Septembre 2017 par le Tribunal de Commerc

e de PONTOISE

N° Chambre : 2

N° Section :

N° RG : 2015F00945



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT

Me Noémie CHARTIER,







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU N...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

TA

Code nac : 55B

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 SEPTEMBRE 2019

N° RG 17/07523 - N° Portalis DBV3-V-B7B-R4QT

AFFAIRE :

SAS NNR GLOBAL LOGISTICS FRANCE venant aux droits de la

SAS GLOBAL STAR INTERNATIONAL

C/

SARL CODIME (COMORES-SAFARIS-SERVICES)

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Septembre 2017 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre : 2

N° Section :

N° RG : 2015F00945

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT

Me Noémie CHARTIER,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS NNR GLOBAL LOGISTICS FRANCE venant aux droits de la SAS GLOBAL STAR INTERNATIONAL

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629 - N° du dossier 20170402

Représentant : Me Thomas MOLINS, Plaidant, avocat au barreau de LILLE

APPELANTE

****************

SARL CODIME (COMORES-SAFARIS-SERVICES)

N° SIRET : 350 50 7 8 69

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Noémie CHARTIER, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 50 - N° du dossier 17085

Représentant : Me Fabienne MOUREAU-LEVY de l'AARPI MLP AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1292 -

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 Mai 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Thérèse ANDRIEU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSE DU LITIGE

Le 19 mars 2015, la société Codime exerçant sous le nom commercial Comores Safari Services (ci-après Codime) spécialiste du fret sur les Comores, a signé une lettre de transport avec la société Global Star International (ci-après GSI), commissionnaire en transport et en douane, portant sur l'acheminement de cent quarante trois colis aux Comores pour un poids brut de 1728 kilogrammes.

Les colis étaient d'abord transférés par un vol affrété par la société Yémen Airway le 20 mars 2015. Un transbordement était ensuite prévu le 22 mars 2015 pour les acheminer à destination ([Localité 3], capitale de l'état comorien ).

Par courriel du 21 mai 2015, la société Yemen Airway Cargo a informé la société Codime que les colis avaient bien été acheminés par le vol du 20 mars 2015, mais que le transbordement jusqu'à [Localité 3] n'avait pas pu être effectué. Elle ajoutait que depuis le 25 mars 2015, tous les vols avaient été suspendus.

Par courriel du 24 juin 2015, la société Codime a mis en demeure la société GSI d'indiquer le motif de l'annulation du vol d'acheminement du 22 mars 2015, ainsi que la localisation actuelle de la marchandise.

Par courrier du 23 juillet 2015, le courtier en assurance de la société GSI a répondu que le vol avait été annulé en raison de la guerre civile déclarée au Yémen. Les colis seraient stockés à l'aéroport de [Localité 4].

C'est dans ces conditions que par acte d'huissier du 8 décembre 2015, la société Codime a assigné la société GSI devant le tribunal de commerce de Pontoise, aux fins d'obtenir sa condamnation au versement de dommages et intérêts sur le fondement contractuel et en réparation des préjudices subis.

Par actes d'huissier des 13 janvier et 29 février 2016, la société GSI a appelé la société Yemen Airway en garantie.

Par jugement du 15 juillet 2015, le tribunal de commence de Pontoise a décidé, à la demande de la société GSI, la jonction des affaires 2016F00056 et 2016F00227 avec celle enrôlée sous le numéro 2015F00945.

Par jugement du 29 septembre 2017, le tribunal de commerce de Pontoise a:

- Déclaré la société GSI partiellement fondée en son exception de nullité de l'acte introductif d'instance, et limité le litige aux seuls mandats versés aux débats pour une somme totale de 34 122,73 euros (19 000 + 9 213,29 + 5 909,44 euros) qui ont été déclarés réguliers et valables ;

- Condamné, au titre de la commande du 19 mars 2015, la société GSI à payer à la société Codime, exploitant sous l'enseigne Comores Safaris Services, la somme de 34 122,73 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 24 juin 2015, correspondant à la valeur marchande des colis et dont la société transitaire a reçu mandat au titre du recouvrement, ainsi que des colis dont la société Codime, exploitant sous l'enseigne Comores Safaris Services, était propriétaire personnellement et non acheminés le 22 mars 2015 à [Localité 3] ;

- Donné acte à la société Codime, exploitant sous l'enseigne Comores Safaris Services, de son désistement sur le paiement par la société GSI de la somme de 16 399,00 euros, au titre de factures de 2013 demeurées impayées ;

- Déclaré que la société Codime, exploitant sous l'enseigne Comores Safaris Services, ne sera redevable d'aucun frais de transport, facturés 8 021,34 euros par la société GSI et actuellement consignés par la société Codime, exploitant sous l'enseigne Comores Safaris Services, dans le cadre de la procédure en cours devant le tribunal de commerce de Paris ;

- Condamné la société GSI à payer à la société Codime, exploitant sous l'enseigne Comores Safaris Services, la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice commercial et financier ;

- Condamné la société GSI à payer à la société Codime, exploitant sous l'enseigne Comores Safaris Services, la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Déclaré la société GSI mal fondée en sa demande en paiement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'en a déboutée ;

- Condamné la société GSI aux dépens de l'instance, liquidés à la somme de 104,52 euros, ainsi qu'aux irais d'acte et de procédure d'exécution, s'il y a lieu;

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par déclaration du 20 octobre 2018, la société GSI a interjeté appel du jugement.

Par ordonnance du 20 décembre 2018, la disjonction à l'égard de la société Yemen Airways a été prononcée en raison de l'instabilité politique au Yémen et de l'impossibilité de procéder à la notification des actes à l'égard de cette partie.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 2 mai 2019, la société NNR Global Logistics France venant aux droits de la société Global Star International a demandé à la cour de :

Vu les articles 117 et suivants du code de procédure civile,

Vu l'article 74 du code de procédure civile,

Vu l'article 1353 (ex-1315) du code civil,

Vu les articles 1984 et suivants du code civil,

Vu l'article 31 du code de procédure civile,

Vu les articles 70 et 4 du code de procédure civile,

Vu l'article L132-8 du code de commerce,

Vu l'article L.133-6 du code de commerce,

Vu la Convention de Varsovie de 1929 et ses amendements,

Vu les conditions générales de vente de GSI,

Vu le contrat type « commission de transport »,

Vu l'absence de dénonciation de pouvoir spécial et de cession de droits des clients de la société Comores Safari Services,

- Dire et juger la société NNR Global Logistics France venant aux droits de la société GSI recevable et bien fondée en son appel,

-Donner acte à la concluante de ce qu'elle accepte la révocation de l'ordonnance de clôture

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Pontoise en toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau,

In limine litis,

- Dire et juger la société NNR Global Logistics France venant aux droits de la société GSI recevable est bien fondée en son exception de nullité de l'assignation pour défaut de pouvoir de la société Comores Safari Services,

- En conséquence, prononcer la nullité de l'assignation.

A titre principal,

- Déclarer la société Codime sous le nom commercial Comores Safari Services irrecevable en ses demandes pour défaut d'intérêt à agir,

- Déclarer la société Codime sous le nom commercial Comores Safari Services irrecevable en ses demandes additionnelles pour défaut de lien suffisant,

- Débouter la société Codime sous le nom commercial Comores Safari Services de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Si toutefois, la cour d'appel de Versailles venait à déclarer recevable la société Comores Safari Services au titre des deux mandats communiqués a posteriori, il limiterait son intérêt à agir à la somme de 9 231,29 euros (société Makcom) et 5 909,44 euros (Pharmacie Traleni Gobadjou), à l'exclusion de tout autre montant.

A titre subsidiaire,

Si la Cour d'Appel de Versailles entrait en voie de condamnation à l'encontre de la société GSI,

- Prononcer l'application des limitations indemnitaires de responsabilité :

- Au titre de la faute personnelle du commissionnaire de transport, si retenue, à 4 924,80 euros, et à titre subsidiaire en cas d'inopposabilité des conditions générales de la société GSI à 8 640 euros par application de l'article 13 du contrat-type « commission de transport »

- Au titre de la responsabilité du transporteur aérien, si retenue, au préjudice subi sans pouvoir être supérieur à 17 DTS x 1 728 kilogrammes (ou sa contre-valeur en euro au jour du jugement),

- Débouter pour le surplus,

- Déclarer la société NNR Global Logistics France venant aux droits de la société GSI recevable et bien fondée en son appel en garantie à l'encontre de la société Yemen Airways,

- Dire et juger que la société Yemen Airways garantira et relèvera la société NNR Global Logistics France venant aux droits de la société GSI indemne de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.

En tout état de cause,

- Débouter la société Codime sous le nom commercial Comores Safari Services de sa demande visant à ne pas régler la facture 47763 d'un montant de 8 021,34 euros du 20 mars 2015,

- Condamner la société Codime sous le nom commercial Comores Safari Services à restituer les sommes réglées au titre de l'exécution provisoire, avec intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2017 et anatocisme,

- Condamner solidairement Codime sous le nom commercial Comores Safari Services et Yemen Airways à régler à la société NNR Global Logistics France venant aux droits de la société GSI la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- Condamner les mêmes sous la même solidarité aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de traduction, dont distraction au profit de Maître Katell Lallement, avocate au Barreau de Versailles.

Par dernières conclusions notifiées le 5 avril 2019, la société Codime a demandé à la cour de :

Vu les articles 1131, 1134 et 1147, anciens, du code civil ;

Vu l'article 2240 du code civil,

Vu les articles 30, 31, 70, 121 et 126 du code de procédure civile ;

Vu les articles 132-4 à 132-6 du code de commerce ;

Vu les articles 1432-3 et 1432-4 du code des transports ;

Vu l'article 17 de la Convention de Varsovie du 12 octobre 1929 ;

Vu l'article 10 de la Convention de Montréal du 28 mai 1999 ;

- Déclarer la société Codime recevable et bien fondée en ses demandes,

- Débouter la société GSI de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

- Confirmer l'ensemble des dispositions du jugement déféré, rendu le 29 septembre 2017 par le tribunal de commerce de Pontoise,

- Condamner la société GSI au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société GSI aux entiers dépens, dont distraction au profite de Me Noemie Chartier, Avocat au Barreau de Versailles, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 mai 2019.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

La société NNG Global Logistics France venant aux droits de la société Global Star International sera appelée la société GSI sous son ancienne dénomination.

Sur la demande de nullité de l'assignation introductive d'instance du 8 décembre 2015 et l'irrecevabilité à agir de la société Codime

La cour relève que la société GSI soulève une exception de nullité de l'acte introductif d'instance sur le fondement de l'article 117 du code de procédure civile tirée du défaut de pouvoir de la société Codime d'assurer la représentation de ses clients non dénommés dans l'acte introductif d'instance.

Celle-ci peut être soulevée en tout état de cause en application de l'article 118 du code de procédure civile.

Elle soulève ensuite à titre principal l'irrecevabilité à agir de la société Codimes et développe à cet effet les mêmes moyens que ceux à l'appui de sa demande en nullité de l'assignation.

Dès lors sera analysée dans un premier temps la recevabilité à agir de la société Codimes puis ses incidences éventuelles sur la régularité de l'assignation introductive d'instance.

****

La société GSI considère que la société Codime dans ses conclusions de première instance du 9 novembre 2016 devant le tribunal de commerce de Pontoise a reconnu que l'indemnisation qu'elle sollicitait était à destination de clients qui voulaient être remboursés de la valeur des marchandises perdues, qu'elle prenait donc acte du fait qu'elle n'était pas propriétaire de marchandises et avoir agi pour le compte de clients.

Elle fait valoir que la société Codime ne justifie pas d'un mandat de la part de ses clients pour la représenter, qu'elle ne justifie donc pas de ses droits, que dès lors, elle est irrecevable à agir.

Elle ajoute que la société Codime contrairement à ce qu'elle prétend ne justifie pas être propriétaire des marchandises à hauteur de 19000 €, que l'article 2276 du code civil qu'elle invoque ne la dispense pas de rapporter la preuve des droits dont elle disposerait sur les marchandises.

Elle estime en outre qu'elle ne peut a posteriori en cours d'instance régulariser l'acte introductif

d'instance par la production de trois mandats spéciaux de clients qu'elle a communiqués tardivement datés des 27 octobre 2016 et 20 février 2017.

Elle fait valoir en tout état de cause qu'à la date de production des mandats, son action était prescrite en application de l'article L 133-6 du code de commerce.

Elle demande en conséquence de déclarer la société Codime irrecevable à agir ou pour le moins de limiter son intérêt à agir aux deux mandats communiqués soit pour les seuls montants de 9213,29 € et de 5909,44 €.

En réponse, la société Codime indique justifier de sa propriété de 70 colis pour un poids total de 907 kg pour une valeur de 19000 € suivant le bordereau d'expédition, acheminant régulièrement depuis la France vers les Comores des colis destinés à l'organisation d'expédition en Afrique. Elle explique avoir également fait acheminer des colis pour le compte de clients s'agissant de la société Makcom et de la société Pharmacie Traleni Gobadjou pour les montants de 9213,39 € et 5909,44 €. Elle considère que son action qui n'est pas prescrite est recevable et que la nullité alléguée a été couverte par la production des mandats des clients précités.

Elle conclut à la confirmation du jugement.

Sur ce :

L'article 31 du code de procédure civile dispose que 'l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès d'une prétention , sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention , ou pour défendre un intérêt déterminé.

L'article 122 du même code dispose que constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en ses demandes, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 126 du code de procédure civile dispose que 'dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.

En réponse à l'irrecevabilité à agir qui lui est opposée au motif que celle-ci ne justifie pas avoir reçu pouvoir de ses clients aux fins d'agir en indemnisation du fait des colis perdus, la société Codime produit d'une part une attestation de valeur pour la somme de 19000 € correspondant à 70 colis pour un poids de 907 kilogrammes signée de la société Comores Safari Services faite le 19 mars 2015 à destination de [Localité 3] aux Comores sous le n° LTA 635 0753 9033, le total de l'expédition étant de 143 colis pour 1728 kilogrammes.

Par la production de cette attestation de valeur, la société Codime justifie avoir confié en son nom personnel à la société GSI 70 colis parmi les 143 colis figurant dans la lettre de voiture signée du même jour le 19 mars 2015.

Par-ailleurs, la société Codime produit une facture n° 103897618 émise le 11 mars 2015 pour un montant de 9163,29 € HT et de 9213,29 € frais de transport compris par C discount à l'adresse de la société Makcom à [Localité 3]. Elle verse un pouvoir établi le 27 octobre 2016 par M.[S], gérant de la société Makcom à l'effet de recouvrer toutes sommes correspondant à la valeur des marchandises transportées représentant six colis et objet de la facture n° 103897618.

Elle produit deux factures n°15004251 et 15004365 émises par la société E.P.DIS à l'adresse de Pharmacie Traleni-Gobadjou pour un montant global de 5909,44 €. Elle verse un pouvoir établi le 27 octobre 2016 établi par M.[E] [M] gérant de la pharmacie Traleni Gobadjou à l'effet de recouvrer les sommes correspondant à la valeur des marchandises représentant 29 colis pour une valeur de 5909,44 €.

En conséquence, par la production de ces pièces, la société Codimes justifie soit agir en recouvrement des sommes qui seraient dues en son nom personnel à hauteur d'une valeur de 19000 € soit agir pour le compte de deux clients pour les sommes respectives de 9163,29 € et 5909,44 €.

La société GSI fait valoir que la société Codime ne peut régulariser la situation par la production de deux mandats très largement postérieurs à la prescription de l'action laquelle est annale et court selon elle à compter de la constatation de la perte des marchandises. Elle considère que la constatation de la perte des marchandises datant du 22 mars 2015, l'action est prescrite depuis le 22 mars 2016 et ne pouvait donc être régularisée par la production de pouvoirs postérieurs.

Cependant l'assignation introductive d'instance date du 8 décembre 2015 et a interrompu la prescription, un nouveau délai d'un an courant à compter de cette date soit jusqu'au 8 décembre 2016.

La régularisation de la qualité à agir de la société Codimes pour le compte de ses clients par la production de pouvoirs datant du 27 octobre 2016 est dès lors valable et doit être prise en compte en application de l'article 126 du code de procédure civile.

En conséquence, la société Codimes rapporte la preuve de sa qualité à agir tant en son nom personnel que pour le compte de deux clients.

Elle est donc recevable à agir en ses demandes, l'assignation dont la société GSI soulevait la nullité étant régularisée du fait de la production des pouvoirs des clients et de l'attestation de valeur précités, la société Codimes agissant tant en son nom personnel que pour le compte de deux clients.

Sur la responsabilité contractuelle de la société GSI

La société GSI fait valoir qu'en tant que commissionnaire, elle n'a commis aucune faute personnelle. Elle fait valoir que le retard de transbordement des marchandises causé par les circonstances liées à la déclaration de guerre est intervenu tandis que les marchandises n'étaient plus sous sa responsabilité mais sous celle du transporteur, qu'elle n'intervient en aucun cas dans l'exécution effective du transport.

Le choix de la compagnie non critiqué par la société Codime au moment de la transmission de ses instructions ne peut lui être reproché.

Enfin elle ajoute que sa responsabilité ne saurait être engagée au titre d'opérations antérieures.

La société Codime en réplique conclut à la responsabilité contractuelle de la société GSI laquelle dans le cadre de son contrat de commissionnaire a failli à ses obligations d'instruction et de conseil.

Elle fait valoir que la société GSI n'a pas respecté les instructions qui lui avaient été données dans le cadre de sa mission d'organisation du déplacement de la marchandise. Elle considère que la société GSI a commis une faute du fait de l'absence de transport aérien prévu le 22 mars 2015 de l'escale à l'aéroport de destination , qu'elle ne peut se limiter à invoquer la déclaration de guerre civile survenue au Yemen le 25 mars 2015 soit trois jours après le transbordement prévu des marchandises pour s'exonérer de sa responsabilité.

Elle remarque que le choix de la compagnie aérienne ne dépend que du commissionnaire et que la société GSI ne peut se saisir des problèmes posés par la compagnie aérienne alors qu'elle a un devoir de conseil à l'égard de la société Codime et qu'elle aurait du l'alerter sur les problèmes du Yemen et s'abstenir de choisir une compagnie y faisant escale.

Elle fait enfin valoir que les manquements de la société GSI s'inscrivent dans une série de difficultés rencontrées à l'occasion du manquement à ses obligations par la société GSI pour des opérations antérieures.

Sur ce

L'article L 132-4 du code de commerce dispose que le commissionnaire de transport est garant de l'arrivée des marchandises et effets dans le délai déterminé par la lettre de voiture hors les cas de force majeure légalement constatée.

L'article L 132-5 du code de commerce édicte qu'il est garant des avaries ou pertes des marchandises et effets s'il n'y a stipulation contraire dans la lettre de voiture ou force majeure.

Suivant la lettre de voiture du 19 mars 2015, la société Codime agissant sous le nom commercial Comores Safaris Services a confié à la société Global Star International en qualité de commissionnaire, des marchandises s'agissant de 143 colis comme étant des effets personnels et des médicaments à destination de [Localité 3] aux Comores sous le vol IY 749 DTD du 20/03/2015 et IY626 du 22 mars 2015, étant mentionné 'TOP TOP URGENT, indébarquable'.

Il appartient au commissionnaire de transport au regard des articles précités d'assurer le déplacement et l'arrivée des marchandises à destination, ayant organisé le transport selon son choix et ayant pris les mesures nécessaires à l'acheminement de la marchandise.

Dans ces conditions, le choix de la compagnie aérienne Yemen Airways comme transporteur relève du commissionnaire, la société GSI, laquelle ne peut s'exonérer de sa responsabilité à l'égard de la société Codime en invoquant les défaillances de la compagnie ou l'absence d'opposition de la part du commettant sur ce choix.

La guerre civile invoquée par la société GSI pour expliciter l'absence de transfert des marchandises du Yemen aux Comores aurait été déclarée le 25 mars 2015 soit trois jours après la date du 22 mars 2015 convenue sur la lettre de voiture pour l'arrivée des marchandises à leur destination.

L'événement ne peut dès lors caractériser un cas de force majeure puisqu'en tout état de cause il est survenu postérieurement à la date limite d'acheminement des marchandises, la preuve n'étant donc pas rapportée de ce que le fait dommageable est imputable à cette cause étrangère.

La société GSI en sa qualité de commissionnaire de transport est dès lors responsable du non acheminement des marchandises à destination comme convenu dans la lettre de voiture aux Comores le 22 mars 2015.

En conséquence, la société GSI doit réparer le préjudice subi par la société Codime .

Le jugement entrepris est confirmé.

Sur le préjudice

La société GSI fait valoir que les conditions générales de vente auxquelles se réfère la société Codime et qui lui sont donc opposables prévoient une limitation de responsabilité conventionnelle en cas de faute personnelle du commissionnaire de transport et l'application de limitations de responsabilité propres à chaque mode de transport.

Elle conclut qu'elle ne devrait en application de ces conditions générales et de son article 7.2-1 que la somme de 2850 € x 1,728 tonnes soit 4924,80 €.; que la société Codime ne rapporte pas la preuve d'une faute inexcusable qui exclurait les limites de responsabilité ; qu'enfin, la société Codime ne peut réclamer l'application d'une législation générale alors que le régime de responsabilité du commissionnaire est prévu par les conditions générales et qu'à défaut le contrat-type 'commission de transport' s'applique, que l'indemnisation serait limitée en ce cas à la somme de 8640 €.

La société Codime considère que la clause limitative de responsabilité doit être réputée non écrite du fait du manquement du commissionnaire à son obligation essentielle et ce en dehors de toute faute lourde ou inexcusable ce qui est le cas en l'espèce ayant commis un manquement avéré à son obligation essentielle d'acheminement.

Elle conclut en conséquence à la confirmation du jugement.

Sur ce

La société Codime ne conteste pas avoir eu connaissance des conditions générales du contrat de commissionnaire de transport et de l'article 7.2-1 y figurant.

En revanche, elle conteste l'application de cette limitation de responsabilité au motif que la clause doit être réputée non écrite car la société GSI a manqué à son obligation essentielle d'acheminer les marchandises à destination.

Cependant, elle doit établir que le manquement par la société GSI à une obligation essentielle équivaut au dol ou à une faute inexcusable laquelle est définie comme une faute délibérée ui implique la conscience de la probabilité du dommage ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Dans ces conditions, il convient d'appliquer les clauses limitatives de responsabilité prévues à l'article 7-2.1 des conditions générales qui prévoient que : 'dans tous les cas où la responsabilité personnelles de l'OTL serait engagée, pour quelque cause et à quelque titre que ce soit, elle est strictement limitée pour tous les dommages à la marchandise imputables à l'opération de transport par suite de pertes et avaries et pour toutes les conséquences pouvant en résulter à 17,35 € par kilogramme de poids brut de marchandises manquantes ou avariées sans pouvoir excéder quels que soient le poids, le volume, les dimensions, la nature ou valeur de la marchandise concernée, une somme supérieure au produit de poids brut de la marchandise exprimé en tonnes multiplié par 2850 € avec un maximum de 60000 € par événement.'

En application des dispositions contractuelles, il y a lieu de fixer le montant du préjudice à la somme de 1,728 T x 2850 € soit 4924,80 €.

La société GSI sera donc condamnée à verser à la société Codimes la somme de 4924,80 € en réparation du préjudice subi.

Sur l'appel en garantie par la société GSI de la société Yemen Airways

La déclaration d'appel et les conclusions n'ont pu être signifiées à la société Yemen Airways, la disjonction de l'instance à son égard ayant été prononcée.

Dès lors, la société GSI ne peut en appel demander la condamnation de la société Yemen Airways à la relever indemne des condamnations prononcées à son encontre , celle-ci n'étant pas dans la cause, la demande devant être examinée dans une instance distincte.

Sur le règlement de la facture de transport d'un montant de 8021,34 €

La société GSI estime que le tribunal de commerce de Pontoise qui a déclaré que la société Codime n'était redevable d'aucun frais de transport facturés 8021,34 € par la société GSI et actuellement consignés par la société Codime dans le cadre du litige pendant devant le tribunal de commerce de Paris ne pouvait statuer sur cette demande.

Elle conclut à l'infirmation du jugement et demande que la cour laisse cette demande à l'appréciation de la juridiction commerciale parisienne qui en est saisie, concluant dans le dispositif de ses conclusions au débouté de la société Codime de sa demande.

La société Codime conclut à la confirmation du jugement entrepris estimant qu'elle était bien fondée à demander au tribunal de se prononcer sur le règlement de la facture afférente au transport litigieux.

Sur ce,

Il convient de rappeler que la société Codime a saisi par acte d'huissier du 8 décembre 2015 le tribunal de commerce de Pontoise en condamnation de la société GSI à lui verser des dommages et intérêts à hauteur de 40000 € du fait notamment de la non exécution du contrat fixé à la lettre de voiture du 19 mars 2015 portant sur le transport de marchandises.

La société GSI a par acte d'huissier du 24 février 2016 saisi le tribunal de commerce de Paris en paiement de factures pour cinq expéditions réalisées au profit de la société Codime dont le règlement était retenu par la société Codime et en versement de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies.

Par conclusions d'incident du 31 mai 2016 devant le tribunal de commerce de Paris, la société Codime a fait valoir que pour le transbordement concerné par la facture du 20 mars 2015, celui-ci n'a pas été réalisé et qu'elle en a saisi le tribunal de commerce de Pontoise. Elle soulève en conséquence une exception d'incompétence territoriale au profit du tribunal de commerce de Pontoise et une exception de litispendance et de connexité.

Par jugement du 29 septembre 2017 dont appel, le tribunal de commerce de Pontoise s'est prononcé sur la facture du 20 mars 2015 disant que 'la société Codime ne sera redevable d'aucun frais de transport facturés 8021,34 € par la société GSI et actuellement consignés par la société Codime dans le cadre de la procédure en cours devant le tribunal de commerce de Paris'

Par conclusions devant le tribunal de commerce de Paris du 20 février 2019, la société Codime a conclu à l'irrecevabilité de la demande de la société GSI, au regard de l'autorité de la chose jugée.

Par jugement du 24 janvier 2019 dans l'affaire enrôlée sous le n° 2016015721 suite à l'assignation introductive d'instance du 24 février 2016, le tribunal de commerce de Paris a déclaré la société Codime irrecevable en son exception d'incompétence, débouté la société Codime de sa demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision de la cour d'appel de Versailles et renvoyé l'affaire sur le fond.

Les parties n'indiquent pas si un jugement sur le fond a été rendu depuis lors par le tribunal de commerce de Paris.

En l'état, il ressort des éléments de procédure précités que le tribunal de commerce de Pontoise s'est prononcé sur le règlement de la facture de 8021,34 € , que sa décision est revêtue de l'autorité de la chose jugée, qu'il appartient à la cour de se prononcer sur toutes les disposition du jugement, objet de l'appel.

Sur le fond, c'est à juste titre que la société GSI fait valoir que l'article 12-2 du contrat-type de commissionnaire de transport dispose que ' la compensation unilatérale du montant des dommages allégués sur le prix dû au commissionnaire de transport est interdite'.

Dès lors, il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la société Codime n'était redevable d'aucun frais de transport facturés 8021,34 € et de débouter la société Codime de sa demande, étant relevé que la société GSI ne sollicite pas la condamnation de la société de la société Codime au versement du montant de la facture.

Sur les autres demandes

La société Codime conclut à la confirmation du jugement qui a condamné la société GSI à lui verser la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice commercial et financier.

Cependant, elle ne justifie pas d'un préjudice autre que celui indemnisé par les sommes précitées.

Le jugement est donc infirmé sur ce point et la société Codime déboutée de sa demande.

La société Global Star International est déboutée de sa demande de condamnation de la société Codime à lui restituer les sommes versées en vertu de l'exécution provisoire, les comptes entre les parties se faisant dans le cadre de l'exécution de la décision rendue.

La société Global Star International est condamnée aux dépens d'appel avec distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Les parties sont déboutées en appel de leurs demandes fondées sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du 29 septembre 2017 rendu par le tribunal de commerce de Pontoise en ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la société Global Star International aux dépens ,

Statuant à nouveau,

Déclare la société Codime recevable à agir,

Condamne la société NNR Logistics France venant aux droits de la société Global Star International à verser à la société Codime la somme de 4924,80 € en réparation du préjudice subi,

Dit que l'appel en garantie de la société NNR Logistics France venant aux droits de la société Global Star International à l'égard de la société Yemen Airways sera examiné dans le cadre de la procédure ayant fait l'objet d'une disjonction,

Déboute la société Codime de sa demande en dommages et intérêts,

Déboute la société Codime de sa demande de ne pas être déclarée redevable des frais du transport litigieux correspondant à la facture d'un montant de 8021,34 €,

Déboute les parties pour le surplus de leurs demandes,

Condamne la société NNR Logistics France venant aux droits de la société Global Star International aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 17/07523
Date de la décision : 19/09/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 12, arrêt n°17/07523 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-19;17.07523 ?
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