La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2019 | FRANCE | N°16/02700

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 19 septembre 2019, 16/02700


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89A



5e Chambre





ARRET N°



REPUTE CONTRADICTOIRE



DU 19 SEPTEMBRE 2019



N° RG 16/02700



N° Portalis DBV3-V-B7A-QXQY



AFFAIRE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 1]



C/



LYCEE PROFESSIONNEL [Établissement 1]

...



Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 14 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE
>N° RG : 13/00594



Copies exécutoires délivrées à :



la ASSOCIATION ALAIN CLAVIER - ISABELLE WALIGORA



la SCP FRICAUDET & LARROUMET



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 1]



LYCEE PROFESSIONNEL [Établissement ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89A

5e Chambre

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 19 SEPTEMBRE 2019

N° RG 16/02700

N° Portalis DBV3-V-B7A-QXQY

AFFAIRE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 1]

C/

LYCEE PROFESSIONNEL [Établissement 1]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 14 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE

N° RG : 13/00594

Copies exécutoires délivrées à :

la ASSOCIATION ALAIN CLAVIER - ISABELLE WALIGORA

la SCP FRICAUDET & LARROUMET

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 1]

LYCEE PROFESSIONNEL [Établissement 1],

Copies certifiées conformes délivrées à :

Monsieur [Z] [C],

AGENT JUDICIAIRE DE L'éTAT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par M. [F] [Q] (Inspeceteur contentieux) en vertu d'un pouvoir général

APPELANTE

****************

LYCEE PROFESSIONNEL [Établissement 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non comparante, non représenté

Monsieur [Z] [C]

[Adresse 3]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Alain CLAVIER de l'ASSOCIATION ALAIN CLAVIER - ISABELLE WALIGORA - AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 240

AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Alain FRICAUDET de la SCP FRICAUDET & LARROUMET, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 706

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Juin 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,

Madame Caroline BON, Vice présidente placée,

Greffier, lors des débats : Madame Florence PURTAS,

Le 8 mars 2010, M. [C], élève de terminale au lycée professionnel [Établissement 1] (ci-après désigné 'le Lycée'), a été victime, au cours d'une séance de sport organisée par un professeur d'éducation physique et sportive, d'un accident qui l'a rendu tétraplégique.

Cet accident a été pris en charge au titre de la législation sur les accidents du travail en application de l'article L. 412-8 du code de sécurité sociale.

Par requête du 21 mars 2013, M. [C] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts-de-Seine (ci-après désigné 'le tribunal') afin de faire reconnaître la faute inexcusable du Lycée et de voir indemniser ses préjudices.

L'état de M. [C] a été considéré comme consolidé le 1er octobre 2013 et un taux d'incapacité permanente de 100% lui a été attribué en raison d'une tétraplégie post traumatique de niveau C4 compliquée de trouble du rythme appareillé, d'escarre opérée, d'embolie pulmonaire et de dysfonction vésicale.

Par jugement du 13 mai 2013, le tribunal a retenu la faute inexcusable du Lycée et a :

- majoré à son taux maximum la rente servie à M. [C] ;

- ordonné une expertise qu'il a confiée au docteur [U] pour l'évaluation des préjudices de M. [C] ;

- alloué à ce dernier une provision à valoir sur ses préjudices de 50 000 euros à verser par la caisse primaire d'assurance maladie ;

- et condamné l'agent judiciaire de l'état à payer à M. [C] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 16 avril 2015, la cour d'appel de Versailles, autrement composé, à, entres autres dispositions :

- dit que M. [C] ne peut obtenir une majoration de la rente déjà équivalente au salaire annuel de référence;

- dit que M. [C] sera en droit de prétendre au paiement d'une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légale en vigueur à la date de consolidation telle qu'arrêtée par l'expert ;

- et renvoyé la procédure devant le tribunal des affaires de sécurité sociale [Localité 1] afin qu'il soit statué sur les demandes d'indemnisation de M. [C].

Par jugement du 14 mars 2016, rendu après dépôt du rapport de l'expert le 24 octobre 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts-de-Seine a :

- fixé au 11 mars 2014 la date de la consolidation de l'état de M. [C] ;

- fixé la réparation des préjudices indemnisables comme suit :

- 408 379,93 euros au titre des dépenses de santé et d'appareillages futurs ;

- 15 000 euros au titre du préjudice scolaire et de formation ;

- 45 000 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;

- 100 000 euros au titre des souffrances endurées ;

- 30 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;

- 40 000 euros au titre du préjudice esthétique définitif ;

- 700 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- 40 000 euros au titre du préjudice d'agrément ;

- 60 000 euros au titre du préjudice sexuel ;

- rappelé qu'il a été alloué au demandeur une provision de 50 000 euros qui viendra en déduction des sommes ci-dessus ;

- fait droit à l'action récursoire de la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1] à l'encontre de l'agent judiciaire de l'état ;

- dit que l'agent judiciaire de l'état versera à M. [C] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté l'ensemble des parties de leurs plus amples demandes, fins et conclusions.

La caisse a relevé appel partiel de cette décision contestant les montants d'indemnisation dus au titre du déficit fonctionnel permanent et des dépenses de santé et d'appareillages futurs.

L'agent judiciaire de l'état a formé appel incident et s'est associé à la contestation de la Caisse.

Par arrêt du 30 novembre 2017, la cour d'appel de Versailles, autrement composée, a partiellement infirmé le jugement entrepris et, statuant à nouveau, a :

- fixé à la somme de 97 332,64 euros la réparation du préjudice de M. [C] au titre de l'aménagement d'un véhicule adapté ;

- débouté M. [C] de ses demandes indemnitaires au titre des dépenses de santé et d'appareillage futurs et du déficit fonctionnel permanent ;

Avant dire-droit sur l'indemnisation de M. [C] au titre de l'aménagement de son logement, la cour a :

- ordonné une mesure d'expertise et désigné à cette fin M. [H] [H], avec pour mission, en substance, de :

- déterminer les caractéristiques que doit présenter le lieu de vie de M. [C], en terme d'accessibilité, de surface et d'équipements spécifiques, au regard de son handicap et des soins dont il est l'objet, en prenant en considération les cas échéant le coût d'entretien des dits équipements ;

- donner son avis sur la possibilité d'aménager un logement de location existant, en chiffrant le cas échéant le coût des adaptations nécessaires pour le rendre compatible avec le handicap de M. [C] ;

- évaluer le surcoût induit par la location d'un logement déjà adapté à son handicap ;

- donner son avis sur la nécessité, au regard du handicap de M. [C], d'acquérir ou de faire construire un logement ;

- préciser dans ce cas le surcoût correspondant au surcroît de superficies et d'aménagements liés au handicap ;

- formuler toutes observations utiles relevant de son champ de compétences;

- dit que l'expert pourra, s'il le juge nécessaire recueillir l'avis d'un autre technicien dans spécialité distincte de la sienne ;

- dit que M. [C] devra consigner au greffe de la cour la somme de 2 000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert ;

- renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience de la 21e chambre de la cour, du 2 juillet 2018,

- débouté M. [C] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- et dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens, la procédure étant gratuite et sans frais.

Par deux ordonnances du 2 mai 2018, le président chargé du contrôle des expertises a :

- prorogé le délai imparti à M. [H] pour déposer son rapport jusqu'au 30 novembre 2018 ;

- accordé à l'expert un complément de provision d'un montant de 6 955,83 euros qu'il a mis à la charge de M. [C].

M. [H] a rendu son pré rapport d'expertise le 26 juin 2018 et son rapport définitif le 7 septembre 2018.

Les parties ont alors été convoquées à l'audience du 19 février 2019 de la 5ème chambre de la cour puis renvoyées à celle du 11 juin 2019 afin de permettre à l'agent judiciaire de l'état de répondre aux écritures tardives de M. [C].

Selon ses dernières conclusions (n°3) déposées à l'audience, M. [C] sollicite de la cour qu'elle :

- fixe à la somme de 520 334,50 euros le montant de son indemnisation au titre de l'acquisition et de l'aménagement d'un domicile adapté à son handicap ;

- dise que cette somme portera intérêt à compter de l'arrêt à intervenir qui se capitaliseront annuellement s'ils venaient à être dus pour une année entière ;

- dise que cette somme sera indexée sur l'indice B01 de la construction entre le 7 septembre 2018, jour du dépôt du rapport de monsieur [H], et l'arrêt à intervenir ;

- condamne l'agent judiciaire de l'Etat à lui verser une somme de 8 955,83 euros au titre des frais d'expertise ainsi qu'une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- statue ce que de droit sur les dépens de l'instance.

Reprenant oralement ses dernières conclusions (n°2), l'agent judiciaire de l'état demande à la cour de fixer les sommes dues à M. [C] ainsi qu'il suit :

- 118 320 euros au titre du coût de l'habitation support ;

- 10 000 euros au titre du coût de la surface complémentaire de 5 m2 ;

- 184 400 euros au titre du coût des aménagements ;

- 3 640 euros au titre de la dépense liée au renouvellement et à l'entretien.

Il demande en outre à la cour de ramener à de justes proportions les demandes formées par M. [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de statuer de ce que droit s'agissant des dépens.

Pour sa part, la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, par son représentant muni d'un pouvoir, indique à la cour qu'elle s'en rapporte sur l'indemnisation des frais d'aménagement du logement dans la limite de la somme de 360 000 euros et sur l'indemnisation des frais de renouvellement et d'entretien liés à l'adaptation du logement dans la limite de la somme de 3 640 euros. Elle demande par contre que la cour déboute M. [C] de sa demande d'indemnisation des frais d'acquisition du logement.

A titre subsidiaire, si la cour y faisait droit elle entend que cette somme soit limitée à 156 694,50 euros.

En tout état de cause, la Caisse demande à la cour :

- qu'elle dise que les indemnités de préjudices seront versées directement à M. [C] par la Caisse qui en récupérera le montant auprès du lycée [Établissement 1] ;

- et qu'elle condamne le lycée [Établissement 1] à rembourser à la Caisse l'intégralité des sommes qui seront versées à M. [C] au titre de la faute inexcusable de l'employeur.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Pour rappel, avant son accident, M. [C] était hébergé chez son père dans un appartement locatif, bailleur social, de type T4 de 90 m2, situé au 2ème étage avec ascenseur en demi-palier, non accessible en fauteuil.

Après son accident, M. [C] est retourné au nouveau domicile de son père du mois d'avril 2014 à  novembre 2015, ce dernier ayant pu obtenir un nouveau logement social plus accessible (situé au 1er étage avec ascenseur), où quelques travaux d'adaptation avaient été réalisés. Cependant les conditions d'accueil restaient relativement précaires pour M. [C].

En novembre 2015, M. [C] a déménagé chez sa compagne, Mme T., propriétaire d'un appartement en rez-de-jardin d'environ 40 m2, lui apportant un meilleur confort puisque de construction récente et d'accessibilité minimum réglementaire. Pour autant, sa superficie était limitée au regard des appareillages nécessaires à M. [C] pour se mouvoir et effectuer les actes de la vie courante.

M. [C] et sa compagne ont alors acheté une habitation de plein-pied située sur la commune [Localité 2] (77) pour un coût de 265 000 euros hors frais de notaire mais frais d'agence compris.

Sur la détermination de l'hébergement le plus rationnel et le plus adapté à la situation de M. [C]:

Au regard de ce qui vient d'être rappelé, l'expert a estimé que :

- la possibilité d'un logement de location existant pour le rendre compatible avec le handicap de M. [C] ne serait pas approprié à sa situation de handicap au motif que :

. chez un bailleur privé, les aménagements et re-configuration des espaces nécessaires au déplacement de M. [C] entraîneraient des travaux d'une certaine importance et d'une certaine complexité rendant peu probable l'autorisation du bailleur ;

. chez un bailleur social, pour les mêmes raisons, il est fort peu probable qu'ils puissent accéder à la demande de M. [C], ce qui rend cette option de logement très aléatoire.

- la nécessité d'une construction neuve après acquisition du terrain entraînerait des délais de réalisation relativement importants et des coût quasiment similaires à ceux avancés dans la proposition suivante envisagée ;

- l'acquisition d'une construction neuve existante de plain-pied reste très optimisée en termes de coût et de caractéristiques techniques, entraînant un surcoût d'adaptation intégrant la surface complémentaire avec des frais d'entretien d'usage et les besoins en équipements avec leur renouvellement de l'ordre de 360 000 euros complétés d'un amortissement annuel de 3 640 euros par an pour les frais complémentaires et le renouvellement des équipements spécifiques.

La cour constate que l'expert justifie parfaitement les raisons qui l'ont conduit à considérer que le choix d'acquisition du nouveau logement du couple est cohérent au regard du handicap de M. [C] et correspond aux possibilités financières du couple même s'il nécessite un certain nombre de travaux. Cette option sera donc retenue par la cour, aucune des parties ne s'y opposant.

Sur les frais d'acquisition du logement de M. [C] :

L'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, dispose qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle peut demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Il s'en déduit que l'indemnisation des préjudices comprend, s'il est constaté par l'expert, non seulement l'aménagement du domicile mais éventuellement le coût, ou le surcoût, de l'acquisition d'un domicile mieux adapté aux difficultés de mobilité de la victime devenue handicapée.

En l'espèce, il n'est pas contesté que le handicap de M. [C] a été occasionné exclusivement par l'accident dont il a été victime et que seul cet accident est la cause de la nécessité d'acquérir et d'aménager un logement, alors que le logement de ses parents dans lequel il vivait était devenu inadapté. Cette acquisition a donc été rendue nécessaire à raison du handicap de la victime et du bouleversement de son mode de vie, l'usage permanent d'un fauteuil roulant nécessitant des aménagements trop lourds pour être compatibles avec le caractère provisoire d'une location. Le changement de lieu de vie n'est donc pas un choix personnel mais a été imposé par les lourdes séquelles de l'accident de sorte que M. [C] doit être indemnisé du coût de cette acquisition.

L'attestation notariée versée au débat par M. [C] enseigne que le logement, d'un montant de 265 000 euros, a été acquis à hauteur de 59,13 %, soit 156 694,5 euros par ce dernier et à hauteur de 40,87%, soit 108 305,50 euros par sa compagne.

Il convient donc de fixer l'indemnisation des frais d'acquisition à hauteur de 156 694,5 euros.

Sur les frais d'aménagement du logement et des frais complémentaires et de renouvellement des équipements spécifiques au regard des besoins de M. [C]

L'expert indique, sans être contesté, que la nature du handicap M. [C] nécessite un important appareillage pour l'ensemble des actes de la vie courante ce qui impose des volumes et des aménagements très importants. Il doit ainsi bénéficier d'un immeuble entièrement adapté.

Il décrit les besoins en appareillage, en espace pour le coucher et la vie quotidienne, en accessibilité au niveau de la salle d'eau, des commodités, du coin repas et il précise les aménagements et équipements nécessaires, la surface complémentaire (zone de circulation, retournement fauteuil, stockage de matériel, espace tierce personne ') estimée à 60 m² et à l'organisation du stationnement. Il conclut à :

' un besoin de surface habitable complémentaire estimé à 60 m² dont 55 m² sur l'existant et 5 m² à créer en extension ;

' un besoin d'extension pour restitution des espaces annexes perdus suite à l'aménagement intérieur soit15 m² ;

' un besoin d'abri véhicule pour un transfert protégé, soit la réalisation d'un carport de 30 m² avec auvent de liaison vers la porte d'entrée soit 12 m² ;

' un besoin de modification intérieure et d'ajouts d'équipements complémentaires au logement tel que défini précédemment ;

' un besoin de modification des extérieurs et d'ajouts d'adaptations tel que défini précédemment.

La cour constate que les parties ne remettent pas en cause les préconisations de l'expert s'agissant des aménagements à réaliser mais leur coût. Plus précisément, les parties s'opposent sur l'intégration des espaces dits 'complémentaires' ou d''habitation support' à la surface habitable de l'immeuble. L'agent judiciaire de l'état estime que cette surface est comprise pour 55 m2 dans l'existant alors que M. [C] estime qu'elle s'y ajoute. En conséquence, le premier déduit le coût de création de ces espaces du coût d'acquisition du pavillon alors que le second le rajoute.

La cour constate que l'expert a proposé une estimation au regard des aménagements nécessaires dans les termes suivants :

- s'agissant du coût des surfaces complémentaires estimé sur la base du logement existant soit 55m2 et de l'extension (5m2comme précisé ci-dessus) : la somme de 209 175 euros outre 490 euros d'amortissement ; (souligné par la cour)

- s'agissant des aménagements intérieurs : 72 500 euros outre 680 euros d'amortissement ;

- s'agissant de la domotique, afin que M. [C] puisse se mouvoir sans aide : 32 000 euros outre 2 200 euros d'amortissement ;

- s'agissant des aménagements extérieurs (démolition de muret, aménagement de terrasse et création d'un cheminement) : 15 800 euros outre 250 euros d'amortissement ;

- et s'agissant des frais divers (architecte, assurance, taxes diverses) : 30 500 euros.

Pour autant, la lecture du rapport et la réponse de l'expert aux dires des parties enseignent que la notion 'd'habitation support' a été utilisée pour expliquer la surface minimale d'habitation rendue nécessaire par l'usage d'un fauteuil roulant entièrement automatisé. Il ne s'agit donc nullement d'une création de surface.

De même, si dans le cadre de l'estimation des aménagements, l'expert évoque une 'surface complémentaire de 60m2 ', il explique que cette surface correspond à la surface habitable indispensable à M. [C] et l'oppose à une surface normative classique. Elle ne s'ajoute donc à la construction existante que si celle-ci est insuffisante. En l'occurrence, l'expert a précisé que la surface complémentaire était de 60m2 dont 55m2 sur l'existant. Il n'y a donc besoin que d'une surface nouvelle de 5m2, la cour relevant que l'habitation a une surface totale de 100 m2. En conséquence, M. [C] ne peut obtenir, en plus du remboursement des frais d'acquisition de la maison qui lui a été accordée, une indemnité correspondant au coût d'une surface complémentaire de 55 ou 60m2.

L'expert explique d'ailleurs très précisément qu'à partir du logement acquis, il doit être ajouté :

. une surface complémentaire à créer en extension de 5 m2 pour 10 000 euros ;

. une surface en extension pour compenser la perte d'annexe sur existant de 15 m2 pour 30 000 euros ;

. la création d'un auvent de liaison de 12 m2 pour 9 600 euros ;

. la création d'une carport pour transfert de 30 m2 pour 24 000 euros.

La cour précise que l'évaluation du coût des extensions a été faite au regard du prix d'acquisition du pavillon ce qui représente une somme de 2 465 euros le m2 (montant non contesté des parties) et selon que les surfaces créées sont habitables (extension) ou non (auvent et carport).

D'ailleurs, le croquis de l'habitation avant et après l'aménagement (page 19 et 23) fait par l'expert démontre sans ambiguïté que s'il y a effectivement eu besoin d'augmenter la surface habitable, les constructions nouvelles se sont limitées à :

- d'une annexe de stockage sur toute la surface gauche du pavillon,

- d'un auvent,

- d'un carport,

le reste étant de l'aménagement intérieur pour gagner de la surface utile (déconstruction/reconstruction des cloisons et pièces existantes) qui sera indemnisé indépendamment.

Dans la mesure où il est demandé par M. [C] le remboursement des frais d'acquisition de son logement à hauteur de 156 694,50 euros, il ne peut être ajouté à cette acquisition que le coût des créations de surface soit 73 500 euros.

Par ailleurs, l'expert a estimé le coût des aménagements spécifiques pour l'adaptation du logement de M. [C] aux sommes suivantes :

. 72 500 euros au titre de l'aménagement intérieur (remplacement des portes, reprises de menuiserie, réorganisation de la partie habitable comprenant les cloisons, le plafond, les sols et la zone chambre/salle de bain) ;

. 32 000 euros au titre de la domotique, la cour rappelant que M. [C] est dans un fauteuil roulant du fait que seule la tête et les deux cervicales hautes demeurent mobiles volontairement ;

. 15 800 euros au titre des aménagements extérieurs (démolition des murs de clôture, création d'un cheminement complémentaire en façade avec revêtement de type béton lavé, mise en place de caniveaux, reprise de la terrasse et reprise des espaces verts) ;

. 30 500 euros de frais divers c'est-à-dire de frais d'architecte, de police d'assurance, d'études de sol et de structure et les taxes diverses notamment d'aménagement.

L'expert a justifié ces sommes poste par poste et a prévu un coût de renouvellement des équipements spécifiques et d'entretien d'usage de l'ordre de 3 640 euros annuel, amortissement qui n'est pas contesté.

Dans ces conditions, il convient de fixer l'indemnisation de M. [C] a :

. 156 696,50 euros représentant sa quote-part dans l'acquisition du logement ;

. 73 500 euros au titre des surfaces supplémentaires à bâtir ;

. 72 500 euros au titre de l'aménagement intérieur ;

. 32 000 euros au titre de la domotique ;

. 15 800 euros au titre des aménagements extérieurs ;

. 30 500 euros de frais divers,

soit un total de 380 996,50 euros auquel devra s'ajouter le coût d'entretien de 3 640 euros par an.

Il sera en outre précisé que ces sommes seront indexées sur l'indice B01 de la construction pour la période allant du 8 juillet 2018 (dépôt du rapport d'expert) à la date de l'arrêt.

Sur les frais d'expertise

M. [C] a dû consigner la somme de 8 955,83 euros au titre des frais d'expertise de M. [H].

Il convient en conséquence de condamner l'agent judiciaire de l'état à lui verser la somme de 8 955,83 euros à ce titre.

Sur les intérêts des condamnations

Les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Par ailleurs, il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur l'action récursoire de la Caisse

Conformément aux dispositions de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, la caisse primaire d'assurance maladie fera l'avance de l'ensemble des sommes ci-dessus allouées directement à M. [C], sommes qu'elle pourra récupérer auprès de l'agent judiciaire de l'état.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [C] en cause d'appel et de lui allouer à ce titre la somme de 5 000 euros.

Par ailleurs, l'agent judiciaire de l'état sera condamné aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile désormais applicables aux juridictions de sécurité sociale.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, par décision réputée contradictoire, dans les limites de l'appel,

Décide que les frais d'acquisition du logement de M. [Z] [C] constituent un préjudice non couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale et ouvrant droit à réparation ;

Fixe l'indemnisation de M. [Z] [C] ainsi qu'il suit :

- 156 696,50 euros au titre des frais d'acquisition de logement ;

- 73 500 euros au titre des surfaces supplémentaires à bâtir ;

- 72 500 euros au titre de l'aménagement intérieur ;

- 32 000 euros au titre de la domotique ;

- 15 800 euros au titre des aménagements extérieurs ;

- 30 500 euros de frais divers,

soit la somme totale de 380 994,50 euros ;

Dit que cette somme sera indexée sur l'indice B01 de la construction pour la période du 7 septembre 2018 à la date du présent arrêt ;

Dit que la somme allouée portera intérêt à compter du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Dit que le coût de renouvellement des équipements spécifiques et d'entretien d'usage est fixé à la somme de 3 640 euros par an ;

Dit que cette somme de 3 640 euros sera indexée sur l'indice B01 de construction pour la période du 7 septembre 2018 à la date du présent arrêt et ensuite, annuellement, à la date du 19 septembre;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine à avancer les sommes dues ci-dessus par l'agent judiciaire de l'état à M. [Z] [C] ;

Dit que la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1] récupérera le montant des sommes allouées à M. [C] auprès de l'agent judiciaire de l'état;

Condamne l'agent judiciaire de l'état à payer à M. [Z] [C] la somme de 8 955,83 euros au titre des frais d'expertise ;

Condamne l'agent judiciaire de l'état à payer à payer à M. [Z] [C] une indemnité d'un montant de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

Déboute les parties de toute autre demande plus ample ou contraire ;

Condamne l'agent judiciaire de l'état aux dépens d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

Signé par Monsieur Olivier FOURMY, Président, et par Madame Florence PURTAS, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 16/02700
Date de la décision : 19/09/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°16/02700 : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-19;16.02700 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award