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05/09/2019 | FRANCE | N°17/02982

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 05 septembre 2019, 17/02982


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 05 SEPTEMBRE 2019



N° RG 17/02982 - N° Portalis DBV3-V-B7B-RTPW



AFFAIRE :



SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN





C/

[S] [L] CONSTITUTION EN LIEU ET PLACE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Mai 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

N° Chambre :
>N° Section : C

N° RG : 16/154



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me David RAYMONDJEAN



Me [A] [E]







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEU...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 05 SEPTEMBRE 2019

N° RG 17/02982 - N° Portalis DBV3-V-B7B-RTPW

AFFAIRE :

SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN

C/

[S] [L] CONSTITUTION EN LIEU ET PLACE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Mai 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : 16/154

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me David RAYMONDJEAN

Me [A] [E]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN

N° SIRET : 572 053 833

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me David RAYMONDJEAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0948

APPELANTE

****************

Monsieur [S] [L]

né le [Date anniversaire 1] 1978 à [Localité 1]

de nationalité Marocaine

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me [A] [E], Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 68

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/013125 du 25/10/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Juin 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène PRUDHOMME, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,

Le 9 juillet 2015, M. [S] [L] était embauché par la SAS Entreprise Guy Challancin en qualité d'agent de service par contrat à durée déterminée puis à compter du 02 mai 2016 par contrat à durée indéterminée à temps complet. Ces contrats étaient soumis à la convention collective des entreprises de propreté et services associés.

Le 4 février 2016, M. [S] [L] saisissait le conseil de prud'hommes de Versailles en vue de se voir appliquer la convention collective de la manutention ferroviaire et travaux connexes et obtenir la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, ainsi que le paiement de différents primes.

Vu le jugement du 11 mai 2017 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes de Versailles qui a :

- dit qu'ayant joint l'incident au fond, l'incompétence territoriale soulevée par la société entreprise Guy Challancin n'est pas fondée et qu'en application de l'article R. 1412-1 du code du travail le conseil se déclare territorialement compétent et que l'affaire est recevable en la forme.

- fixé la moyenne mensuelle brute salariale, en application de l'article R 1454-28 du code du travail, à la somme de 1 618,00 euros;

- requalifié le contrat de travail du 09 juillet 2015 à durée déterminée en durée indéterminée, en application de l'article L.1242-12 du code du travail ;

- jugé que le CDD du 09 juillet 2015 est soumis à la convention collective de la manutention ferroviaire ;

Que des indemnités sont donc dues ;

- ordonné à la société entreprise Guy Challancin de verser à M. [L] les sommes de :

-1 608,00 euros (mille six cent dix huit euros) à titre d'indemnité de requalification du CDD en CDI, en application de l'article L 1245-2 du code du travail ;

ainsi que les sommes suivantes en application de la convention collective de la manutention ferroviaire :

- 500,00 euros (cinq cent euros) à titre de paiement de la prime de salissure du 09/07/2015 au 30/04/2016 ;

- 200,00 euros (deux cent euros) due à titre de paiement de la prime de ménage-nettoyage pour cette même période ;

-150,00 euros (cent cinquante euros) au titre du rappel de salaire sur majoration des jours fériés pour cette même période ;

- 2 400,00 euros (deux mille quatre cent euros) au titre du rappel de salaire sur la majoration des dimanches pour cette même période ;

- 230,00 euros (deux cent trente euros) au titre de la prime de vacances afférente ;

- 1 148,05 euros (mille cent quarante huit euros, cinq centimes) au titre de la prime de fin d'année ;

- 755,00 euros (sept cent cinquante cinq euros) à titre de paiement de la prime de panier du 1er octobre 2015 au 30 avril 2016.

- ordonné à M. [L] la restitution à la société entreprise Guy Challancin de la somme de 340,00 euros (trois cent quarante euros), par compensation et concernant la régularisation du trop perçu des salaires par rapport aux coefficients à appliquer, laissant aux parties la détermination ultérieure du taux applicable ;

- ordonné à la société entreprise Guy Challancin d'établir et de remettre à M. [L] un bulletin de paie à titre de régularisation avec soumission aux cotisations sociales en vigueur au moment du paiement et concernant les créances salariales ;

- condamné la société entreprise Guy Challancin à verser à M. [L] la somme de 800 euros (huit cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- constaté l'exécution provisoire de droit du présent jugement dans les conditions définies à l'article R 1454-28 du code du travail.

- dit que les dépens éventuels seront supportés par la société entreprise Guy Challancin.

Vu la notification de ce jugement le 19 mai 2017.

Vu l'appel régulièrement interjeté par la SAS Entreprise Guy Challancin le 12 juin 2017.

Vu les conclusions de la SAS Entreprise Guy Challancin notifiées le 17 septembre 2018, soutenues à l'audience par son avocat, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de :

- infirmer le jugement déféré et ce faisant,

- débouter M. [L] de ses prétentions,

A titre subsidiaire,

- rejeter l'appel incident de M. [L]

- limiter les prétentions de M. [L] quant à sa demande de rappel de salaire au titre de la prime de salissure à hauteur de 427,97 euros,

- limiter les prétentions de M. [L] quant à sa demande de rappel de salaire au titre de la prime de ménage-nettoyage au montant de 200 euros,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a limité le montant des prétentions de M. [L] à 755 euros concernant la prime panier,

|- ordonner la compensation des sommes dues avec la somme de 801,61 euros

En tout état de cause,

- le condamner à payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les écritures de M. [L] notifiées le 17 octobre 2018, soutenues à l'audience par son avocat, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Versailles du 11 mai 2017 en ce qu'il a :

- requalifié le contrat de travail à durée déterminée du 9 juillet 2015 en contrat à durée indéterminée

- jugé que le contrat du 9 juillet 2015 était soumis à la Convention Collective de la Manutention Ferroviaire et travaux connexes

- condamné la société Challancin en conséquence à paiement d'une indemnité au titre de la requalification, et de différentes primes pour une période courant du 9 juillet 2015 au 30 avril 2016, soit préalablement à l'embauche sous contrat à durée indéterminée de M. [L]

- infirmer le jugement du conseil pour le surplus, et, statuant à nouveau :

- dire que la convention collective de la manutention ferroviaire & activités connexes s'applique à la relation de travail liant M. [L] à la société Challancin.

- condamner la société Challancin en conséquence au paiement, pour la période courant de mai 2016 à fin juillet 2018, à date, des sommes de :

- 1 221,00 euros à titre de rappel de prime « salissure », outre 122,10 euros (congés payés afférents)

- 2 715,00 euros à titre de rappel d'indemnité de panier, outre 271,50 euros (congés payés afférents)

- 699,55 euros à titre de rappel de majoration sur jours fériés, outre 69,96 euros (congés payés afférents)

- 6 291,91 euros à titre de rappel de majoration des dimanches, outre 629,19 euros (congés payés afférents)

- 463,76 Euros à titre de rappel de prime de ménage/nettoyage, outre 46,37 euros (congés payés afférents)

- 2 991,55 (1 421,55 + 1 570,00) euros à titre de rappel de Prime de fin d'année pour les années 2017 et 2018, outre 299,15 (142,15 + 157,00) euros (congés payés afférents)

- 645,60 euros à titre de rappel de prime de vacances sur ces condamnations

- 1 945,90 (968,44 euros + 977,46) euros à titre de rappel de prime de vacances pour les années 2017 et 2018

- la condamner à :

- 463,76 euros à titre de rappel de prime de ménage, outre 46,38 euros (congés payés afférents)

- 1 000,00 euros à titre de dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

- débouter la Société Challancin de toute demande reconventionnelle, notamment relative à l'application, pour le passé, de minimas conventionnels

- condamner la société Challancin à payer à maître [A] [E] une somme de 1 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, moyennant en cas de règlement renonciation au bénéficie de la part contributive de l'état au titre de l'aide Juridictionnelle, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée.

- condamner la Société aux entiers dépens.

- assortir les condamnations à venir d'une astreinte à charge de la société, de 50,00 euros par jour de retard à courir 15 jours après prononcé de l'arrêt de la Cour

Vu l'ordonnance de clôture du 18 octobre 2018.

SUR CE,

I - Sur l'exécution du contrat de travail

A - Sur la convention collective applicable

M. [L] soutient que, travaillant dans des gares franciliennes des lignes N et U, son contrat devait être soumis à la convention collective de la manutention ferroviaire, au même titre que les salariés qu'il a remplacés, de sorte qu'il ne pouvait relever de la qualification agent de service, niveau AS1A, qui est inhérente à la convention collective de la propreté. Il rappelle que si l'entreprise a des activités différenciées qu'elle exerce dans des centres autonomes, ce sont ces activités qui déterminent la convention applicable et que l'employeur a toujours la possibilité d'appliquer volontairement un dispositif conventionnel. Il estime réaliser, au sens de l'annexe 1 le nettoyage des cours de gare. Il se prévaut de l'égalité de traitement, qui interdit de lui appliquer une convention collective moins favorable, ajoutant que l'application d'une convention collective ne peut être considérée comme un avantage individuel acquis.

Il estime pouvoir prétendre aux primes de salissure, de panier et de ménage/nettoyage, quelles que soient les conditions particulières de son versement, dès lors que ses collègues, qui travaillent dans les mêmes conditions, la perçoivent. Il ajoute qu'il remplit les conditions d'ancienneté permettant le versement de la prime de vacances et qu'il a droit à la prime de fin d'année.

La SAS Entreprise Guy Challancin répond que la convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale de l'employeur et qu'au regard de l'extrait Kbis qui mentionne l'activité « du service dans le domaine de la propreté », c'est la convention collective des entreprises de propreté qui doit s'appliquer. Soulignant la différence de rédaction des annexes 1 et 2 de la convention collective de la manutention ferroviaire qui concernent, pour la première, la SNCF et pour la seconde, la RATP, elle ajoute que le salarié ne démontre pas qu'il effectue d'une des tâches spécifiques visées par l'annexe 1.

L'employeur estime qu'il n'avait pas l'obligation d'appliquer à M. [L] la même convention collective que celle appliquée aux salariés remplacés, dès lors qu'employé à temps partiel, il n'exécutait pas l'intégralité de ses tâches. Il conteste toute inégalité de traitement au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation du 30 novembre 2017, précisant que d'autres salariés bénéficient de la convention collective de la manutention ferroviaire au titre d'un avantage individuel acquis.

Subsidiairement, l'employeur considère qu'à compter de la conclusion d'un contrat à durée indéterminée soumis à la convention collective des entreprises de propreté le 2 mai 2016, le salarié ne peut plus revendiquer les avantages de la convention collective de la manutention ferroviaire. Il ajoute que M. [L] ne justifie pas réaliser les tâches visées à l'article 18 de l'annexe 1 de cette convention collective, de sorte qu'il ne peut prétendre à la prime de salissure, que la prime de ménage réclamée n'a aucun fondement conventionnel, que la prime de vacances n'est due qu'après un an de présence dans l'entreprise et que la prime de panier n'est due qu'au salarié qui a accompli au moins 6 heures consécutives de travail. Il demande en outre à la Cour de circonscrire les indemnités et primes réclamées à la période antérieure à la signature du contrat à durée indéterminée.

La cour relève qu'il ressort des avenants des 30 octobre 2013 et 29 janvier 2016 à l'accord d'entreprise du 15 novembre 2011 que la SAS Entreprise Guy Challancin a procédé à la création de cinq établissements virtuels distincts, parmi lesquels, pour ce qui concerne le litige :

« - l'établissement dit « FEP » regroupant les salariés attachés à l'Île de France et soumis à la convention collective nationale des entreprises de propreté du 26 juillet 2011 ainsi que les salariés régis par la convention collective nationale des prestataires de services dans le domaine du tertiaire du 13 août 1999,

- l'établissement dit « Samara 1 » regroupant les salariés attachés à l'Île de France et soumis à la convention collective nationale de la manutention ferroviaire et travaux connexes, Annexe 1 du 6 janvier 1970,

- l'établissement dit « Samara 2 » regroupant les salariés attachés à l'Île de France et soumis à la convention collective nationale de la manutention ferroviaire et travaux connexes, Annexe 2 du 6 janvier 1970 ».

Il résulte par ailleurs des annexes 1 et 2 de la convention collective nationale de la manutention ferroviaire et travaux connexes, que l'annexe 1 concerne les chantiers exécutés pour le compte de la SNCF, tandis que l'annexe 2 vise les chantiers réalisés pour la RATP.

Il ressort des annexes 1 et 2 de la convention collective nationale de la manutention ferroviaire et travaux connexes, que l'annexe 1 concerne les chantiers exécutés pour le compte de la SNCF, tandis que l'annexe 2 vise les chantiers réalisés pour la RATP.

En l'espèce, les chantiers auxquels M. [L] a été affecté ont été exécutés pour le compte de la SNCF pour le contrat à durée indéterminée et les contrats à durée déterminée des 7 juillet, 3 septembre 2015, 20 janvier, 5 février 2016 et au profit du rectorat de [Localité 2] [Localité 3] pour les contrats des 14 et 28 septembre 2015.

Il apparaît donc d'une part, que l'annexe 2 ne peut être appliquée à ces contrats et que la convention collective revendiquée par le salarié ne peut concerner les contrats des 14 et 28 septembre 2015 qui ne se sont pas exécutés dans une gare gérée par la SNCF.

S'agissant de l'annexe 1, elle renvoie, concernant son champ d'application, à l'article 1er de la convention collective nationale de la manutention ferroviaire et travaux connexes du 6 janvier 1970 qui prévoit : : « 1. La présente convention collective nationale règle les rapports entre les employeurs et travailleurs des deux sexes de l'industrie de la manutention, de l'entretien et des travaux connexes pour le rail et pour l'air.

Elle est applicable à l'ensemble des employeurs français ou étrangers et à l'ensemble de leurs personnels sauf exceptions visées dans le texte même des articles.

a) Elle s'applique sur l'ensemble du territoire national à l'industrie de la manutention ferroviaire et travaux connexes, dans les gares, estacades, chantiers, parcs, dépôts, etc., de la société nationale des chemins de fer français (c'est-à-dire les infrastructures ferroviaires historiquement gérées par la SNCF), puis du réseau ferré national (1) et des voies ferrées d'intérêt local (VFIL) pour :

- travaux de chargement et déchargement de marchandises ;

- travaux de chargement et déchargement de matériel ;

- travaux de chargement et déchargement de charbon ;

- désinfection de wagons ;

- nettoyage des cours de gares ;

- nettoyage des dépôts ;

- lavage et nettoyage des voitures à voyageurs ;

- portage des bagages ;

- travaux de mutation des boggies et des essieux dans les gares frontalières ».

Il ressort des attestations de MM. [P] et [B] que la mission confiée à M. [L] consiste à effectuer le nettoyage du hall 2, de la passerelle, des escaliers et des quais de la gare.

L'employeur soutient que ces espaces n'entrent pas dans la catégorie « cours de gare » et se prévaut d'une définition donnée par l'article 6 du décret n° du 22 mars 1942 : « les cours dépendant des gares de chemin de fer dans lesquelles peuvent circuler ou stationner des voitures publiques ou particulières destinées soit au transport de personnes soit au transport de marchandises ».

Cette définition, bien qu'issue d'un texte ancien aujourd'hui abrogé, fournit des éléments de compréhension de la notion de cours de gare qui demeurent applicables aux différents espaces d'une gare. Dès lors qu'elle doit être interprétée strictement, la convention collective de la manutention ferroviaire et travaux connexes ne peut s'appliquer aux halls de gare, aux passerelles, escaliers et quais destinés aux déplacements pédestres des voyageurs.

Par ailleurs, si M. [L] invoque l'égalité de traitement, la Cour relève qu'aucune pièce versée aux débats ne permet d'établir que les collègues du salarié, placés dans la même situation que lui et exerçant les mêmes activités, bénéficient de la convention collective collective nationale de la manutention ferroviaire et travaux connexes.

En effet, si MM. [B], [X], [Z], [S], [O], [J], [R], [Y] et [H] bénéficient de cette convention, il apparaît qu'ils en ont tous bénéficié au titre du transfert de leur contrat de travail opéré le 1er novembre 2014, à la suite de la reprise du marché par la SAS Entreprise Guy Challancin.

En outre, seule une fiche de paie d'un des salariés remplacés par M. [L] est communiquée, celle de M. [A]. Elle mentionne effectivement la convention collective nationale de la manutention ferroviaire et travaux connexes. Toutefois, il apparaît que ce salarié a manifestement bénéficié, lui aussi, d'une reprise de la convention collective qui lui était appliquée lors du transfert du marché à la SAS Entreprise Guy Challancin, puisqu'il est indiqué une date d'entrée au 1er novembre 2014.

Or, la différence de traitement entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré en application d'une garantie d'emploi instituée par voie conventionnelle par les organisations syndicales représentatives investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote et les salariés de l'employeur entrant, qui résulte de l'obligation à laquelle est tenu ce dernier de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, n'est pas étrangère à toute considération de nature professionnelle et se trouve dès lors justifiée au regard du principe d'égalité de traitement.

Le bénéfice de la convention de la manutention ferroviaire et travaux connexes apparaît donc attaché à la personne de ces salariés ; il ne peut en conséquence profiter à M. [L], salarié embauché par la SAS Entreprise Guy Challancin, même dans le cadre du remplacement, au surplus partiel, de MM. [A] .

Les autres contrats de travail ou fiches de paie des salariés remplacés par M. [L] ne sont pas communiqués à la Cour. Il ne peut donc être argué d'une rupture d'égalité avec ces salariés.

Le délai de survie invoqué par M. [L] n'apparaît pas applicable en cas de transfert de contrat de travail dans le cadre de l'annexe 7 de la convention collective des entreprises de propreté et services associés. Il ne peut donc être argué d'une rupture d'égalité entre les salariés.

Dans ces conditions, M. [L] doit être débouté de sa demande tendant à l'application de la convention de manutention ferroviaire et travaux connexes et des demandes indemnitaires subséquentes.

B - Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

M. [L] soutient que les contrats à durée déterminée sont irréguliers dès lors que la qualification n'est pas précisée et que l'échelon de la classification visée ne correspond pas à la convention collective appliquée aux salariés remplacés. Le salarié conclut au débouté de la demande relative au trop perçu, au regard du salaire minimum de la convention collective de la manutention ferroviaire applicable.

La SAS Entreprise Guy Challancin conclut à la régularité des contrats qui comportent tous les mentions légales obligatoires. Il rappelle que la qualification de M. [L] pouvait être différente de celle du salarié remplacé, dès lors qu'il n'était employé qu'à temps partiel. Il souligne que la mention de la qualification du salarié ne figure pas à l'alinéa 1° de l'article L 1242-12 du code du travail, alors que l'article L 1245-1 du même code ne vise que l'alinéa 1er de l'article L 1242-12, de sorte que la demande de requalification ne peut aboutir. Subsidiairement, l'employeur réclame le remboursement par le salarié d'un trop perçu au titre des salaires versés d'un montant de 801,61 euros au regard du taux horaire applicable.

En application des dispositions de l'article L 1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu pour pourvoir au remplacement d'un salarié absent.

Le contrat à durée déterminée doit préciser la qualification du salarié embauché.

En l'espèce, les contrats conclus entre la SAS Entreprise Guy Challancin et M. [L] indiquent que sa qualification est AS1A. Contrairement à ce que soutient le salarié, il apparaît donc que la qualification d'agent de service (AS) est bien précisée au contrat.

Au surplus, cette qualification est conforme à la convention collective des entreprises de propreté appliquée aux contrats litigieux.

Le salarié doit par conséquent être débouté de sa demande de requalification.

II - Sur les autres demandes

Compte tenu de la solution du litige, la demande du salarié tendant à l'allocation de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat ne peut aboutir.

Pour le même motif, la décision entreprise sera infirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de M. [L].

En revanche, il n'apparaît pas inéquitable de débouter la SAS Entreprise Guy Challancin de sa demande au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Déboute M. [S] [L] de l'ensemble de ses demandes ;

Déboute la SAS Entreprise Guy Challancin de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

Condamne M. [S] [L] aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme Sophie RIVIÈRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIERLe PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 17/02982
Date de la décision : 05/09/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°17/02982 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-05;17.02982 ?
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