COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 72B
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 20 JUIN 2019
N° RG 18/00312
N° Portalis DBV3-V-B7C-SDAU
AFFAIRE :
Association ASL DES RESIDENTS DE LA BELLE ISSUE
C/
[W] [A]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Novembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° Chambre : 3
N° RG : 15/10783
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Monique TARDY de l'ASSOCIATION AVOCALYS
Me Oriane DONTOT de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT JUIN DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Association ASL DES RESIDENTS DE LA BELLE ISSUE
[Adresse 1]
[Localité 1]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Monique TARDY de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 620 - N° du dossier 003650
Représentant : Me Franck LAVAIL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1633
APPELANTE
****************
Madame [W] [A]
née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 2] (78)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 20180136
Représentant : Me Vincent DRAGO de la SCP D.D.A Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0043
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Mai 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise BAZET, Conseiller chargé du rapport, et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
FAITS ET PROCEDURE
M. [R] [A] et la société Le Village étaient chacun propriétaire de différentes parcelles de terrain contiguës à [Localité 1], initialement cadastrées section AL n° [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3].
Ces derniers ont entrepris la réalisation d'un lotissement sur l'ensemble du terrain situé [Adresse 3].
Par arrêté du préfet des Yvelines du 26 février 1981, un permis de lotir a été accordé à M. [R] [A] et à la société Le Village pour douze lots à usage d'habitation, appartenant pour partie à cette dernière (lots [Cadastre 4] à [Cadastre 5]) et pour partie à M. [A] (lots [Cadastre 6] à [Cadastre 7]).
Le lotissement autorisé comprend les douze lots ainsi que les surfaces correspondant aux parties destinées à demeurer communes entre les co-lotis et à être cédées à l'association syndicale qui devra en assurer la gestion :
- la voie nouvelle de desserte du lotissement cadastrée section AL n°[Cadastre 8] pour [Cadastre 9] mètres carrés et AL n°[Cadastre 10] pour 53 mètres carrés,
- l'aire de jeux cadastrée section AL n°[Cadastre 11] pour 606,40 mètres carrés.
L'ensemble des actes relatifs à ce lotissement dénommé '[Adresse 4]' a été déposé au rang des minutes de Maître [A], notaire, suivant acte reçu le 25 septembre 1981 publié à la conservation des hypothèques de [Localité 3] le 23 décembre 1981.
Le même acte notarié prévoyait un échange de parcelles entre M. [A] et la société Le Village, afin notamment de permettre l'établissement de l'état descriptif de division et de former des lots réguliers.
L'association syndicale libre n'a pas été constituée entre les co-lotis à cette époque.
Les copropriétaires se sont regroupés au sein de l'Association Syndicale Libre des Résidents de l'Allée de la Belle Issue (l'ASL), créée en 2005.
M. [A] est décédé le [Date décès 1] 1993 laissant pour unique héritière sa fille Mme [A] Le 16 juillet 2015, cette dernière a fait établir une attestation de propriété afférente aux parcelles cadastrées AL n° [Cadastre 11] et AL n° [Cadastre 8].
Le 17 septembre 2015, l'ASL a adressé une lettre de mise en demeure à Mme [A] lui enjoignant de régulariser les engagements de son père en formalisant le transfert des parcelles litigieuses, en vain.
Par acte du 27 novembre 2015, l'ASL a assigné Mme [A] afin notamment qu'il lui soit fait injonction de se présenter à l'étude de Maître [J] aux fins de régulariser l'acte de vente des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8] au profit de l'ASL dans les conditions prévues à l'acte notarié d'échange en date du 25 septembre 1981, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Par jugement du 23 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Versailles a :
- déclaré recevable l'action de l'ASL formée contre Mme [A],
- débouté l'ASL de toutes ses demandes,
- débouté Mme [A] de sa demande de remboursement de taxes foncières,
- débouté les parties de leurs demandes faites en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement,
- condamné l'ASL aux dépens.
Par acte du 15 janvier 2018, l'ASL a interjeté appel et demande à la cour, par dernières écritures du 9 octobre 2018, de :
- la déclarer recevable et bien fondée en ses écritures,
- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a reconnu son action recevable,
- infirmer la décision déférée pour le surplus,
- constater l'accord des volontés entre M. [A], auteur de Mme [A], et la société Le Village pour transférer gratuitement la propriété des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8] à l'ASL,
- dire que l'accord des volontés entre M. [A], auteur de Mme [A], et la société Le Village pour transférer gratuitement la propriété des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8] à l'ASL s'analyse en une stipulation pour autrui,
- constater que le transfert de propriété résultant de cet accord de volonté est parfait,
- faire injonction à Mme [A] de se présenter à l'étude de Maître [J] suivant sommation d'huissier à comparaître, dans le mois de la signification de la décision à intervenir, aux fins de régulariser l'acte de cession des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8], sises [Adresse 5], au profit de l'ASL dans les conditions prévues à l'acte notarié d'échange en date du 25 septembre 1981,
- dire que cette obligation sera assortie d'une astreinte de 500 euros par jour de retard, en garantie de son exécution,
- dire qu'à défaut d'exécution après sommation, de l'injonction visée au présent dispositif, l'arrêt à intervenir vaudra vente et sera publié au service de publicité foncière compétent à la diligence de l'ASL,
- ordonner aux services du cadastre compétents de rectifier le plan cadastral de la commune de [Localité 1], de manière que la parcelle cadastrée AL [Cadastre 11] soit située [Adresse 6],
à titre subsidiaire,
- dire que l'ASL a un droit direct sur les parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8],
- constater l'accord des volontés entre M. [A], auteur de Mme [A], et la société Le Village pour transférer gratuitement la propriété des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8] à l'ASL,
- constater que la vente résultant de cet accord de volonté est parfaite en conséquence,
- faire injonction à Mme [A] de se présenter à l'étude de Maître [J] suivant sommation d'huissier à comparaître, dans le mois de la signification de la décision à intervenir, aux fins de régulariser l'acte de cession des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8], sises [Adresse 5], au profit de l'ASL dans les conditions prévues à l'acte notarié d'échange en date du 25 septembre 1981,
- dire que cette obligation sera assortie d'une astreinte de 500 euros par jour de retard, en garantie de son exécution,
- dire qu'à défaut d'exécution après sommation, de l'injonction visée au présent dispositif, l'arrêt à intervenir vaudra vente et sera publié au service de publicité foncière compétent à la diligence de l'ASL,
- ordonner aux services du cadastre compétents de rectifier le plan cadastral de la commune de [Localité 1], de manière que la parcelle cadastrée AL [Cadastre 11] soit située [Adresse 6],
à titre encore plus subsidiaire,
- dire que la promesse de vente visée audit acte notarié a été dûment acceptée par l'ASL,
- dire que la vente envisagée audit acte est parfaite en conséquence, faire injonction à Mme [A] de se présenter à l'étude de Maître [J] suivant sommation d'huissier à comparaître, dans le mois de la signification de la décision à intervenir, aux fins de régulariser l'acte de vente des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8], sises [Adresse 5], au profit de l'ASL dans les conditions prévues à l'acte notarié d'échange en date du 25 septembre 1981,
- dire que cette obligation sera assortie d'une astreinte de 500 euros par jour de retard, en garantie de son exécution,
- dire qu'à défaut d'exécution après sommation, de l'injonction visée au présent dispositif, l'arrêt à intervenir vaudra vente et sera publié au service de publicité foncière compétent à la diligence de l'ASL,
- ordonner aux services du cadastre compétents de rectifier le plan cadastral de la commune de [Localité 1], de manière que la parcelle cadastrée AL [Cadastre 11] soit située [Adresse 6],
à titre infiniment subsidiaire :
- dire que pour les parcelles cadastrées AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8], sise [Adresse 5], l'ASL bénéficie de la prescription acquisitive abrégée,
- constater que l'ASL est propriétaire des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8], sises [Adresse 5],
- dire que l'arrêt à intervenir vaudra titre de propriété et sera publié au service de publicité foncière compétent,
- ordonner aux services du cadastre compétents de rectifier le plan cadastral de la commune de [Localité 1], de manière que la parcelle cadastrée AL [Cadastre 11] soit située [Adresse 6],
en toutes hypothèses,
- débouter Mme [A] de l'intégralité de ses demandes,
- condamner Mme [A] à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec recouvrement direct.
Par dernières écritures du 11 juillet 2018, Mme [A] demande à la cour de :
- juger l'ASL mal fondée en son appel et l'en débouter,
- confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté l'ASL de toutes ses demandes,
- juger irrecevable comme prescrite l'action de l'ASL,
- juger l'ASL mal fondée en toutes ses demandes et l'en débouter,
- condamner l'ASL à lui verser la somme de 14 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec recouvrement direct.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 avril 2019.
SUR QUOI, LA COUR
Le tribunal a tout d'abord retenu que, par les pièces produites, l'ASL justifiait de sa qualité à agir et a déclaré son action recevable. Ce point n'est pas discuté devant la cour et sera confirmé.
Devant la cour Mme [A] ne forme plus de demande tendant au remboursement des taxes foncières dont le rejet par le tribunal doit donc être confirmé.
- Sur la prescription de l'action
Mme [A] fait valoir que, quelle que soit la qualification et la portée données à l'acte d'échange et au dépôt de pièces du lotissement par l'acte reçu les 25 septembre et 18 décembre 1981, l'action de l'ASL est en tout état de cause prescrite, qu'elle soit de nature contractuelle ou réelle. Elle souligne que même si l'action de l'ASL est de nature réelle immobilière, elle est soumise à la prescription trentenaire de l'article 2262 ancien du code civil dont le point de départ est le 25 septembre 1981, date de l'acte notarié ou le 23 décembre 1981, date de sa publication.
L'ASL réplique que l'objet de sa demande n'est pas de faire établir son droit de propriété mais de le faire constater et que, par application de l'article 2227 du code civil, le droit de propriété ne peut s'éteindre par le non-usage.
* * *
Il est de principe constant que le droit de propriété ne s'éteignant pas par le non usage, l'action en revendication n'est pas susceptible de prescription. L'action introduite par l'ASL tend à faire constater son droit de propriété sur les parcelles litigieuses et présente donc un caractère imprescriptible, son exercice n'étant pas enfermé dans le délai de prescription extinctive trentenaire.
Il y a lieu en conséquence de dire que l'action de l'ASL n'est pas prescrite.
- Sur la stipulation pour autrui
Les premiers juges ont retenu qu'il ne ressortait pas de l'acte d'échange du 25 septembre 1981 l'intention de stipuler, même tacitement, de la part de la SCI Le Village au profit de l'ASL s'agissant de la cession par M. [A] des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8]. Ils ont jugé que s'il était constant que M. [A] n'avait pas respecté les termes de l'échange tels que résultant de l'acte notarié, il n'en demeurait pas moins que cet acte ne pouvait s'analyser comme étant une stipulation pour autrui.
L'appelante fait valoir que l'acte notarié du 25 septembre 1981 est un acte complexe insuffisamment dénommé, qui traite de trois opérations juridiques distinctes mais s'inscrivant dans une même logique : un échange de terrain, un engagement de céder contre indemnité et un dépôt de pièces de lotissement entre la SCI le Village et M. [A]. Si seules deux opérations sont nommées, soit l'échange et le dépôt de pièces, l'engagement de cession à titre gratuit des parcelles litigieuses est traité dans chacune des deux parties dénommées, sans pour autant avoir été individualisé dans une partie distincte.
L'appelante reproche au tribunal de s'être arrêté à une lecture littérale du seul acte d'échange, sans rechercher à apprécier la portée globale de l'acte notarié dans son ensemble et son efficacité. Elle affirme que l'intention des parties, à la constitution du lotissement, était bien de transférer gratuitement à I'ASL les parcelles litigieuses, ce qui ressort de I'acte notarié, de la demande de lotissement et des pièces déposées à I'appui. L'ASL affirme que le fait que la mutation effective n'ait pas été formalisée n'autorise pas Mme [A] à revendiquer la qualité de propriétaire des parcelles AL[Cadastre 11] et AL [Cadastre 8], contredisant ainsi la volonté de son auteur et la logique globale de l'opération de lotissement.
L'ASL affirme ensuite que l'indemnité de 200 000 francs évoquée à l'acte se rapporte nécessairement à cette cession et non à l'opération d'échange en elle même dont il est bien précisé qu'elle s'effectue sans soulte. Elle soutient que l'acte notarié comporte bien une stipulation pour autrui au sens des articles 1121 et 1122 du code civil et que cet acte notarié trouve sa cause dans I'opération de lotissement.
L'ASL ajoute que le fait que le tiers bénéficiaire du contrat n'ait pas encore existé au moment de la formation du contrat n'affecte pas la validité de l'acte dés lors que ce tiers était suffisamment identifiable.
Mme [A] réplique que, dans l'acte d'échange du 25 septembre 1981, on cherche en vain un acte unilatéral attributif d'une créance à l'ASL, en particulier à défaut d'existence d'une stipulation et d'une volonté effective du stipulant d'en conférer le bénéfice à ladite ASL. Elle souligne que ni la parcelle AL [Cadastre 11] ni la parcelle AL [Cadastre 8] ne sont comprises dans les terrains échangés, lesdites parcelles étant et restant la propriété de M. [A], et d'autre part, qu'au titre des charges et conditions de l'échange, il n'est prévu aucune stipulation ou au profit de l'ASL. Ce n'est qu'au paragraphe consacré à l'évaluation des terrains échangés et en considération de ce qu'une partie des terrains de M. [A] est prévue pour être cédée gratuitement à l'ASL en vue de constituer la voie nouvelle et l'aire de jeux, que l'acte prévoit que la SCI Le Village versera à M. [A] une indemnité compensatrice de 200 000 francs.
Mme [A] soutient que la cession des parcelles à l'ASL n'est rappelée qu'au seul titre de l'évaluation de l'indemnité compensatrice entre les co-échangistes, s'agissant d'un fait relatif aux modalités de réalisation du lotissement, mais en aucun cas comme d'un engagement au profit d'un tiers et encore moins comme la condition d'une stipulation de l'échange ainsi que l'impose l'article 1121 du code civil.
* * *
Aux termes de l'article 1121 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, on peut pareillement stipuler au profit d'un tiers, lorsque telle est la condition d'une stipulation que l'on fait pour soi-même ou d'une donation que l'on fait à un autre. Celui qui a fait cette stipulation ne peut plus la révoquer, si le tiers a déclaré vouloir en profiter.
Le tribunal a très exactement rappelé que la stipulation pour autrui était nécessairement une convention accessoire à une convention principale, par laquelle le stipulant obtenait du promettant qu'il s'engage au profit d'un bénéficiaire qui n'était pas partie à ces conventions et qui acquérait un droit de créance contre le promettant, trouvant sa source dans le contrat conclu entre le stipulant et le promettant. Il a pu ainsi être dit en doctrine que la stipulation pour autrui était l'acte unilatéral attributif de la créance dont le stipulant est l'auteur et que cet acte ne peut exister que si ce dernier a réellement l'intention de rendre le bénéficiaire créancier, l'intention du stipulant d'agir dans l'intérêt d'un tiers étant déterminante.
L'acte d'échange du 25 septembre 1981 conclu entre la SCI Le Village et M. [A], mentionne : ' pour permettre l'établissement de l'état descriptif de division ci-après, et afin de former des lots réguliers, appartenant à chaque lotisseur, il est fait entre les parties les échanges suivants.". L'acte dispose que M. [A] cède à titre d'échange, en s'obligeant à toutes les garanties ordinaires et de droit en pareille matière, à la SCI le Village, ce qui est accepté par elle, les parties de terrains d'un contenant total de six cent vingt deux mètres carrés quarante centièmes cadastrés : section AL n° [Cadastre 12], n° [Cadastre 13], n° [Cadastre 14], n° [Cadastre 15], n° [Cadastre 16]. En contre-échange, M. [Z], gérant de la SCI Le Village, cède en obligeant la société qu'il représente, à toutes les garanties ordinaires et de droit en pareille matière, à M. [A] qui accepte : les parcelles cadastrées section AL n° [Cadastre 17], n° [Cadastre 18].
L'acte ajoute que "les échangistes seront propriétaires des terrains présentement échangés à compter de ce jour, et ils auront la jouissance à compter également de ce jour, par la prise de possession réelle et effective, lesdits biens étant libres de toutes locations occupations, ou réquisitions."
L'acte d'échange du 25 septembre 1981 prévoit au paragraphe consacré à l'évaluation des terrains échangés que le présent échange a lieu sans soulte.
Il est ensuite mentionné : 'indemnité au profit de M. [A] pour la partie de terrain qui sera cédée par lui gratuitement à l'association syndicale ci-après dénommée. Attendu que la majeure partie du sol de la Voie nouvelle (soit 1036m² sur 1090 m²) et la totalité de l'aire de jeux (606,40 m²) se trouvent en totalité sur le terrain appartenant à M. [A] il est versé par la SCI Le Village audit M. [A] à titre d'indemnité la somme de 200 000 francs' "ladite somme ainsi payée, dès avant ce jour et directement".
L'état descriptif de division révèle que les lots [Cadastre 6] à [Cadastre 7] appartiennent à M. [A] et que la voie nouvelle (section AL n° [Cadastre 8]) et l'aire de jeux (section AL n° [Cadastre 11]) qui appartiennent à M. [A] seront cédées par ce dernier à l'association syndicale.
L'acte notarié du 25 septembre 1981 mentionne au chapitre intitulé 'Etat descriptif de division' : 'les comparants établissent ainsi qu'il suit la désignation des douze lots de la Voie Nouvelle, de l'aire de jeux et des emprises concernant le présent lotissement. Pour plus de facilité il est ici précisé que les lots [Cadastre 4] à [Cadastre 5] appartiennent à la SCI Le Village, que les lots [Cadastre 6] à [Cadastre 7] appartiennent à M. [A] et que la voie nouvelle et l'aire de jeux qui appartiennent à M. [A] seront cédés par ce dernier à l'Association syndicale'. Ainsi l'état descriptif de division du lotissement intègre dans son périmètre les parcelles litigieuses.
Ce transfert de ces parcelles à l'ASL faisait partie intégrante du projet de lotissement puisqu'il figurait déjà dans le document intitulé 'profil de la Voie Nouvelle', qui vise expressément les parcelles AL [Cadastre 8] et AL [Cadastre 11] comme étant des parties cédées à l'association syndicale.
Le cahier des charges annexé à l'acte du 25 septembre 1981 (pièce n° 3 de l'appelante) et établi par les deux co-lotisseurs que sont la SCI le Village et M. [A] indique en son article 2 qu'il y a lieu d'ajouter à la surface totale celle de la voie nouvelle et celle de l'aire de jeux. Il en va de même du règlement régissant le lotissement, également annexé à la minute de l'acte notarié et établi par les deux co-lotisseurs (pièce 4 de l'appelante) qui intègre ces mêmes surfaces et qui précise que la surface de l'aire de jeux sera utilisée par les propriétaires riverains de la voie et ne sera en aucun cas cessible.
Ainsi que le souligne l'appelante, l'économie générale du projet de lotissement qu'avaient en commun la SCI Le Village et M. [A] intégrait nécessairement la cession des parcelles litigieuses qui appartenaient à ce dernier. En sa qualité de co-lotisseur, la SCI Le Village avait au demeurant un intérêt certain à ce que ces parcelles intègrent le périmètre du lotissement afin de le rendre plus attractif pour les acquéreurs potentiels de lots. C'est à cette fin que la SCI Le Village, stipulant pour autrui, a obtenu de M. [A] l'engagement de céder à l'ASL gratuitement les dites parcelles, en contrepartie duquel elle lui a versé immédiatement la somme de 200 000 francs, étant observé qu'il n'est soumis à la cour aucune autre explication plausible à ce versement.
Le fait que l'ASL n'ait pas eu d'existence lors de cette stipulation pour autrui est sans incidence sur la validité de celle-ci dés lors que l'ASL était aisément identifiable.
Cette stipulation au bénéfice de l'ASL lui a conféré un droit direct envers Mme [A] venant aux droits de M. [A] de nature à lui permettre de revendiquer la propriété des parcelles litigieuses.
Il y a lieu en conséquence d'accueillir la demande formée par l'ASL et de faire injonction à Mme [A] de régulariser l'acte de cession des parcelles AL [Cadastre 11] et AL [Cadastre 8] selon les modalités qui seront précisées au dispositif du présent arrêt, avec les conséquences de droits qui s'y rattachent. A défaut d'exécution, après sommation, de cette injonction, le présent arrêt vaudra vente et sera publié au service de publicité foncière compétent à la diligence de l'ASL. Le prononcé d'une astreinte ne s'avère pas opportun.
Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.
Mme [A], qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel avec recouvrement direct et versera à l'ASL la somme de 5000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'action de l'Association Syndicale Libre des Résidents de l'Allée de la Belle Issue et débouté Mme [A] de sa demande de remboursement de taxes foncières,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Déclare l'action de l'Association Syndicale Libre des Résidents de l'Allée de la Belle Issue non prescrite,
Fait injonction à Mme [A] de se présenter devant le notaire désigné par le Président de la chambre départementale des notaires des Yvelines aux fins de régulariser l'acte de cession des parcelles cadastrées section AL [Cadastre 11] pour [Cadastre 9] mètres carrés et section AL [Cadastre 8] pour 606,40 mètres carrés, sises [Adresse 7] au profit de l'Association Syndicale Libre des Résidents de l'Allée de la Belle Issue dans les conditions prévues à l'acte notarié d'échange en date du 25 septembre 1981 déposé au rang des minutes de l'étude de Maître [A], notaire,
Dit qu'à défaut d'exécution, après sommation, de l'injonction sus visée dans les trois mois suivant cette sommation, le présent arrêt vaudra vente et sera publié au service des hypothèques compétent à la diligence de l'Association Syndicale Libre des Résidents de l'Allée de la Belle Issue,
Dit que les services du cadastre compétents procéderont à la rectification du plan cadastral de la commune de [Localité 1] afin que la parcelle cadastrée AL [Cadastre 11] soit située [Adresse 6],
Condamne Mme [A] à payer à l'Association Syndicale Libre des Résidents de l'Allée de la Belle Issue la somme de 5000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,
Condamne Mme [A] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,