COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 57B
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 16 MAI 2019
N° RG 17/08600
N° Portalis DBV3-V-B7B-SAE3
AFFAIRE :
[S] [V] épouse [L]
C/
Société INORA LIFE FRANCE
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Novembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° Chambre : 6
N° RG : 14/12894
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Philippe CHATEAUNEUF
Me Dominique SANTACRU
Me Jade GUICHERD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE MAI DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [S] [V] épouse [L]
née le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Me Philippe CHATEAUNEUF, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 643 - N° du dossier 20170142
Représentant : Me Dounia HARBOUCHE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2038
APPELANTE
****************
1/ Société INORA LIFE FRANCE
N° SIRET : 434 487 757
[Adresse 2]
[Localité 3]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Dominique SANTACRU, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0470
INTIMEE
2/ Société PREDICTIS PREDICTIS anciennement ARCA PATRIMOINE
N° SIRET : 411 415 565
[Adresse 3]
[Localité 4]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Jade GUICHERD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 708
Représentant : Me Céline LEMOUX de l'AARPI LAWINS AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0246
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 Mars 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise BAZET, Conseiller, et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
------
FAITS ET PROCÉDURE
Le 19 juin 2007, Mme [S] [V] épouse [L] a souscrit un contrat d'assurance vie dénommé ' Imaging' auprès de la société Inora Life France, par l'intermédiaire de la société Arca Patrimoine. Mme [L] a versé la somme de 40 000 euros sur ce contrat, investie sur l'EMTN Lisseo Dynamic 3, puis les 31 juillet et 24 octobre 2007 a procédé à des versements complémentaires de 130 000 sur Lisseo Dynamic 3 et de 150 000 euros placés sur le support EMTN Fastuo Dynamic.
Le 24 juillet 2009, Mme [L] a nanti ce contrat d'assurance-vie à hauteur de 242 460 euros au profit du Crédit Agricole, qui a refinancé le prêt immobilier souscrit avec son époux.
Le 24 février 2010, elle a effectué un arbitrage investissant la totalité de son placement initialement placé sur Lisseo Dynamic 3 sur le support EMTN Alteo Dynamic.
Le 28 juin 2010, elle a désinvesti les fonds placés sur Fastuo Dynamic afin de les placer sur le support Arca Multigestion+.
Mme [L] s'est prévalue de la faculté de renonciation à son contrat par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 août 2014.
La société Inora Life France ayant refusé de restituer les sommes placées dans les trente jours suivant l'envoi de la lettre de renonciation, Mme [L] a, par acte du 23 octobre 2014, assigné les sociétés Arca Patrimoine et Inora Life France devant le tribunal de grande instance de Nanterre.
Par jugement du 24 novembre 2017, la juridiction a :
rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société Inora Life fondée sur l'estoppel,
débouté Mme [L] de sa demande de restitution des sommes versées sur son contrat d'assurance vie,
déclaré Mme [L] irrecevable en sa demande subsidiaire de dommages et intérêts fondée sur des manquements précontractuels,
déclaré Mme [L] recevable en sa demande subsidiaire de dommages et intérêts fondée sur des manquements contractuels,
débouté Mme [L] de sa demande de dommages et intérêts,
condamné Mme [L] à payer à la société Inora Life France la somme de
1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à la société Arca Patrimoine la somme de 1 000 euros sur le même fondement,
dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
condamné Mme [L] aux dépens.
Par acte du 8 décembre 2017, Mme [L] a interjeté appel et, aux termes de conclusions du 8 février 2019, demande à la cour de :
infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, sauf, en ce qu'il a rejeté l'irrecevabilité de son action soulevée par Inora Life fondé sur la règle de l'Estoppel, et en ce qu'il l'a déclarée recevable en sa demande subsidiaire de dommages et intérêts fondée sur un manquement contractuel,
constater le défaut d'information précontractuelle et contractuelle de la société Inora Life France lors de l'adhésion au contrat Imaging,
juger que c'est à bon droit et de bonne foi qu'elle a valablement renoncé à son contrat par LRAR du 21 août 2014,
juger que son action n'est pas entachée d'abus de droit et qu'elle est bien fondée à solliciter la restitution de l'intégralité des sommes versées sur ledit contrat depuis son adhésion, soit la somme de 320 000 euros déduction faite du rachat partiel d'un montant de 20 000 euros effectué le 20 novembre 2007,
juger que ce remboursement s'effectuera dans les conditions prévues par l'article L. 132-5-1 du code des assurances et produira ainsi des intérêts aux taux légal majoré de moitié durant 2 mois à compter du 24/08/2014 puis au double du taux légal avec capitalisation des intérêts jusqu'au parfait règlement à intervenir,
condamner la société Inora Life France à rembourser le Crédit Agricole Centre France, créancier nanti à concurrence des sommes lui restant dues au titre du prêt in fine consenti par ce dernier le 9 juillet 2009 à M. et Mme [L] et garanti par le contrat litigieux à savoir la somme de 243 509,46 euros (capital emprunté de
242 640 euros et indemnités de remboursement anticipé de 869,46 euros),
condamner la société Inora Life France à lui verser le reliquat, à savoir la somme de 56 490,54 euros (300 000 - 243 509,46 ),
à titre subsidiaire :
débouter la société Inora Life de sa demande de voir juger son action irrecevable comme étant prescrite,
juger son action contre Inora Life et Arca Patrimoine pour manquement à leurs obligations précontractuelles et contractuelles d'information et conseil recevable et bien fondée,
juger que Inora Life France et Arca Patrimoine ont manqué à leurs obligations d'information et de conseil,
juger que par la faute de Inora Life France et Arca Patrimoine, elle n'a pas été en mesure d'adhérer à son contrat en toute connaissance de cause,
juger que le préjudice qu'elle a subi, du fait des manquements des intimées doit s'analyser en une perte de chance d'avoir pu renoncer à son adhésion ou d'adhérer à un autre contrat,
condamner solidairement Inora Life France et Arca Patrimoine à réparer le préjudice subi par l'allocation de dommages et intérêts d'un montant de 185 355 euros,
en tout état de cause, condamner solidairement Inora Life France et Arca Patrimoine à lui payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec recouvrement direct.
Par dernières écritures du 17 mai 2018, la société Inora Life demande à la cour de
confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner Mme [L] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec recouvrement direct.
Par dernières écritures du 22 mai 2018, la société Arca Patrimoine, devenue société Predictis, demande à la cour de :
juger que la demande subsidiaire de Mme [L], seule à être dirigée à son encontre est irrémédiablement prescrite,
à titre subsidiaire, juger qu'elle n'a commis aucune faute,
à titre infiniment subsidiaire, juger que Mme [L] ne justifie pas d'un préjudice présentant un quelconque lien de causalité avec les fautes invoquées,
en tout état de cause : confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [L] de ses demandes à son encontre,
condamner Mme [L] au paiement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec recouvrement direct.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 mars 2019.
SUR QUOI LA COUR
La disposition du jugement qui a rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société Inora Life fondée sur l'estoppel ne fait l'objet d'aucune critique et sera confirmée.
Le tribunal a retenu pour l'essentiel que Mme [L] n'avait pas pour objectif de souscrire un contrat sécurisé mais un contrat lui permettant d'obtenir un gain financier important sur le long terme, en contrepartie cependant d'un risque de contre-performance, dont elle avait connaissance dès la signature de son engagement et que l'exercice de la faculté prorogée de renonciation prévue par l'article L.132-5-2 du code des assurances apparaissait, dans ces conditions, comme constituant un détournement de la finalité que la loi a assigné à cette règle, dès lors qu'il tend, non à sanctionner un défaut d'information, mais à compenser des pertes boursières dont la survenance éventuelle ne lui avait pas été dissimulée. Les juges ont donc considéré que c'était de mauvaise foi que Mme [L] avait exercé la faculté prorogée de renonciation à son contrat d'assurance vie.
Le tribunal a jugé que la demande indemnitaire formée par Mme [L] et fondée sur des manquements précontractuels était prescrite, la prescription ayant commencé çà courir à la souscription du contrat et ayant expiré le 19 juin 2013.
S'agissant de la demande indemnitaire fondée sur des manquements contractuels, les premiers juges ont écarté la prescription biennale, les conditions générales ne faisant pas état des causes ordinaires de suspension de celle-ci, mais ils ont rejeté les prétentions de Mme [L] considérant qu'elle était avertie des risques financiers encourus.
Sur les manquements à l'obligation d'information
Le tribunal n'a pas statué sur cette question.
Mme [L] fait valoir que la société Inora Life a manqué à ses obligations légales pour les motifs suivants :
l'encadré défini à l'article L 132-5-5 du code des assurances n'est pas inséré en début de proposition d'assurance ou projet de contrat
contrairement aux dispositions de l'article L 132-5-2 du même code, la nature du contrat, à savoir 'contrat d'assurance vie de groupe à adhésion facultative' n'est pas indiquée en caractères très apparents
Inora Life n'a pas respecté les intitulés des différentes rubriques 'frais' prescrites par l'article A 132-8 du code des assurance.
Inora Life soutient qu'elle a respecté ses obligations légales.
L'article L 135-5-3 du code des assurances qui concerne spécifiquement les assurances de groupe sur la vie renvoie notamment à l'article L 135-5-2 s'agissant de l'obligation d'information pesant sur l'assureur.
Ce texte prévoit qu'avant la conclusion du contrat, l'assureur doit remettre contre récépissé au candidat à l'assurance une note d'information sur les conditions d'exercice de la faculté de renonciation prévue à l'article L.132-5-1 et sur les dispositions essentielles du contrat. Les mentions que doit contenir cette note d'information sont précisées à l'article A.132-4.
Toutefois, pour les contrats d'assurance comportant une valeur de rachat ou de transfert, le même article de loi autorise l'assureur à ne pas fournir une note d'information distincte de la proposition d'assurance ou du projet de contrat, à la condition d'insérer en début de proposition d'assurance ou de projet de contrat un encadré indiquant en caractères très apparents la nature du contrat et dont le format et le contenu sont définis à l'article A.132-8 du code des assurances, applicable aux contrats souscrits à compter du 1er mai 2006.
Ces dispositions sont applicables au contrat d'assurance de groupe sur la vie aux termes de l'article L 132-5-3 qui précise que l'encadré mentionné dans l'article L 132-5-2 est inséré en début de notice.
En l'espèce, dans le contrat Imaging, cet encadré intitulé 'dispositions essentielles' figure en page 10 d'une plaquette en comportant 23, après les conditions générales du contrat (pages 1 à 9) et avant la note d'information (pages 12 à 23), et ne figure sur aucune des deux tables des matières figurant en pages 1 et 11.
On ne peut sérieusement soutenir que cette présentation satisfait aux exigences du code des assurances en vertu desquelles le contenu de la note d'information doit se distinguer et être distinct de celui des conditions générales.
En effet, cette présentation en une liasse unique des conditions générales, placées en tête, et de la notice d'information contrevient aux dispositions légales relatives à l'encadré, lesquelles ont pour but d'attirer en premier lieu l'attention du souscripteur, avant la conclusion du contrat, sur les dispositions les plus importantes du contrat, qui seront développées immédiatement après dans la notice d'information.
En ne séparant pas les conditions générales de la note d'information, et en les plaçant en tête d'un document unique qui doit alors être considéré comme formant en son entier la proposition d'assurance, la société Inora Life n'a pas respecté les dispositions de l'article L 135-5-2 du code des assurances, aux termes desquelles, pour valoir note d'information, la proposition d'assurance doit commencer par l'encadré prévu par ce texte (et non comme en l'espèce par les conditions générales).
Il apparaît par ailleurs que l'encadré figurant en tête de la proposition d'assurance ne respecte pas les dispositions légales et réglementaires susvisées s'agissant de l'indication de la nature du contrat (contrat d'assurance vie de groupe), insuffisamment apparente puisqu'elle figure dans la même police que les autres informations, alors que l'article L 132-5-2 du code des assurances exige qu'elle figure en caractères 'très apparents'.
Il en résulte que les dispositions des articles L 132-5-2 et A 132-8 du code des assurances n'ont pas été respectées par Inora Life.
La possibilité de renoncer au contrat s'est donc trouvée prorogée.
Sur l'exercice du droit de rétractation
L'article L. 132-5-2 du code des assurance regroupe les dispositions afférentes au formalisme informatif et à l'exercice d'un droit de renonciation prorogé en cas de méconnaissance par l'assureur des obligations informatives. Ce texte dispose notamment que 'le défaut de remise des documents et informations prévus au présent article entraîne de plein droit la prorogation du délai de renonciation prévu à l'article L. 132-5-1 jusqu'au trentième jour calendaire révolu suivant la date de la remise effective de ces documents, dans la limite de huit ans à compter de la date où le souscripteur est informé que le contrat est conclu.'
La société Inora Life soutient que Mme [L] a exercé son droit de renonciation avec mauvaise foi et de façon abusive.
Aux termes des arrêts de la Cour de cassation du 19 mai 2016, il est désormais de principe que si la faculté prorogée de renonciation prévue par l'article L 132-5-2 du code des assurances en l'absence de respect, par l'assureur, du formalisme informatif qu'il édicte, revêt un caractère discrétionnaire pour le preneur d'assurance, son exercice peut dégénérer en abus. La Cour a précisé que 'ne saurait être maintenue la jurisprudence initiée par les arrêts du 7 mars 2006, qui, n'opérant pas de distinction fondée sur la bonne ou la mauvaise foi du preneur d'assurance, ne permet pas de sanctionner un exercice de cette renonciation étranger à sa finalité et incompatible avec le principe de loyauté qui s'impose aux contractants'.
Ainsi, le droit de renonciation demeure une faculté discrétionnaire, dont l'exercice n'est subordonné à aucun motif, mais n'est plus une prérogative dont l'exercice est insusceptible d'abus. Doit être sanctionné un exercice de la renonciation étranger à sa finalité et incompatible avec le principe de loyauté qui s'impose aux contractants.
L'abus de droit est le fait pour une personne de commettre une faute par le dépassement des limites d'exercice d'un droit qui lui est conféré, soit en le détournant de sa finalité, soit dans le but de nuire à autrui.
C'est à la date de souscription du contrat que s'apprécie le contenu de l'information due par l'assureur.
La charge de la preuve de la déloyauté du souscripteur et de l'abus de droit dans l'exercice du droit de renonciation pèse sur l'assureur.
La cour doit rechercher, au regard de la situation concrète du souscripteur, de sa qualité d'assuré averti ou profane et des informations dont il disposait réellement, quelle était la finalité de l'exercice de son droit de renonciation et s'il n'en résultait pas l'existence d'un abus de droit.
Mme [L] soutient que les réponses qu'elle a apportées au bilan de situation patrimoniale réalisé par Arca ne permettent pas d'établir qu'elle avait parfaitement compris les caractéristiques financières du contrat souscrit alors que l'assureur n'avait pas satisfait aux exigences d'informations légales.
Il résulte de ce bilan que Mme [L] a signé le 19 juin 2007 qu'elle avait réparti ses actifs sur différents investissements : en liquidités pour 20%, en assurance-vie support en euro pour 40%, en assurance-vie support en unités de compte pour 30% et en actions pour 10%. Elle a indiqué que l'objectif de placement recherché (portant sur 30% de ses actifs financiers) était 'une performance élevée à long terme en contrepartie du risque de contre-performance' (les deux autres choix étant : 'la sécurité à tout moment' et 'une performance proche du marché obligataire en acceptant un risque de moins-value à court terme'), ce qui signifie clairement qu'elle acceptait le risque d'une perte.
Par ailleurs, elle a coché la réponse 'oui' aux questions suivantes :
êtes vous prêt(e) à immobiliser, sur une durée de 10 ans et plus, la part d'actifs financiers que vous souhaitez investir dans le support '
avez-vous déjà effectué des placements à risque et, plus particulièrement, êtes-vous familier des placements sur les marchés action '
avez-vous bien compris le mode de fonctionnement du support et la nature des risques de moins-values qu'il peut engendrer '
en cas de fortes fluctuations des marchés financiers ou en cas de baisse de la valeur du support, pensez-vous rester investi(e) jusqu'au terme du support '
Enfin, elle a coché la réponse 'non' à cette dernière question : 'souhaitez-vous obtenir des informations complémentaires sur le support ''.
En outre :
Mme [L] a signé le bulletin d'adhésion qui comportait la mention manuscrite suivante : Je reconnais en particulier avoir reçu les conditions générales, la notice d'information, ses annexes 1 à 5, les fiches descriptives de tous les actifs représentant les unités de compte du contrat et comprendre les caractéristiques financières de ceux-ci et déclare accepter les opportunités et les risques associés.
la notice d'information était précédée d'une page intitulée 'dispositions essentielles', comportant un encadré qui commençait par cette mention dactylographiée en majuscules et en gras : cet encadré a pour objet d'attirer l'attention de l'adhérent sur certaines dispositions essentielles de la notice d'information. Il est important que l'adhérent lise intégralement la notice d'information et pose toutes les questions qu'il estime nécessaires avant de signer le bulletin d'adhésion, et à la suite il était indiqué en caractères gras sous le titre 'garanties offertes' : Les montants investis sur les supports des unités de compte ne sont pas garantis et sont sujets à des fluctuations à la hausse ou à la baisse dépendant en particulier de l'évolution des marchés financiers.
il était indiqué dans la notice d'information à l'article 2-7, en caractères gras : Inora Life FRANCE ne s'engage que sur le nombre d'unités de compte mais non sur leur contre-valeur en euros. La valeur de rachat des parts de FCP ou des coupures de Titre représentant les unités de compte n'est pas garantie et est sujette à des fluctuations à la hausse comme à la baisse dépendant en particulier de l'évolution des marchés financiers,
la même mention figurait dans l'article 7.1 des conditions générales, sur la faculté de rachat,
plus spécifiquement, le support Lisseo Dynamic 3 était décrit dans l'annexe 2 de la notice d'information comme un EMTN, en l'espèce un panier équipondéré de trente actions internationales, offrant une garantie en capital de 45%, d'une maturité au 10 octobre 2017. Il était en outre indiqué en fin d'annexe, en petits caractères : les adhérents devront procéder à leur propre analyse des risques et devront, si nécessaire, consulter préalablement leurs propres conseils juridiques, financiers, fiscaux, comptables ou tout autre professionnel, suivait cette mention : l'obligation s'adresse à des adhérents expérimentés capables d'apprécier la nature des risques inhérents aux produits dérivés. Certes, ces mentions figurent en petits caractères, mais elles font partie de la notice descriptive du produit et il faut rappeler que Mme [L] s'est dite suffisamment informée sur le support dans le bilan de situation patrimoniale et a opté pour un produit exposé au risque de contre-performance.
Plus généralement, il apparaît aux termes de ces pièces que Mme [L], 'gérante retraitée' selon l'information figurant sur le bilan de situation patrimoniale, et donc dotée d'une capacité de compréhension normale, a été avertie du risque de perte d'une partie significative de son investissement et s'estimait suffisamment informée, ayant parfaitement conscience des risques et avantages de ce placement.
Elle a par ailleurs effectué un certain nombre d'arbitrages qui ne militent pas en faveur d'une incompréhension totale des produits financiers choisis.
Mme [L], pour étayer son argument selon lequel elle n'a pas été correctement informée sur des dispositions essentielles du contrat, faisait en outre valoir que la mention relative aux frais était incomplète pour ne pas respecter les intitulés du texte légal.
Les frais sont mentionnés dans l'encadré même s'ils ne portent pas exactement les mêmes noms que ceux cités dans le code des assurances, ce qui n'en compromet pas la compréhension.
La finalité des dispositions législatives en cause est d'imposer à l'assureur de fournir une information claire aux souscripteurs, de façon à ce qu'ils comprennent l'économie générale du contrat d'assurance-vie et mesurent correctement ses avantages et ses risques.
Il apparaît donc qu'aucun des griefs développés par l'appelante au soutien de son argument selon lequel elle n'aurait pas été correctement informée sur des points essentiels n'est fondé.
Dans ces conditions, il est manifeste que Mme [L] n'a pas souffert d'un défaut d'information dans la période précontractuelle et qu'en réalité, ayant pris en toute connaissance de cause le risque d'une opération financière dans l'espoir d'un gain conséquent, elle s'est emparée de manquements de l'assureur au formalisme imposé par la loi dans l'unique dessein de lui faire prendre en charge ses pertes financières.
Or, ce comportement est constitutif d'un abus, car le droit de renonciation prévu par les textes (qui est un droit de repentir) a pour finalité de protéger le contractant contre lui-même (et donc contre des souscriptions d'impulsion ou faites dans un contexte de sous-information) et non pas contre l'évolution des résultats financiers de son contrat. La finalité recherchée par le titulaire du droit, à savoir échapper aux fluctuations des marchés financiers, risque qu'il a pourtant expressément accepté, et ce au détriment de son co-contractant, n'est pas celle voulue par le législateur. Le motif n'est pas légitime, il est incompatible avec le principe de loyauté qui s'impose aux contractants et la mauvaise foi de Mme [L] est caractérisée.
Le jugement sera par conséquent confirmé de ce chef et Mme [L] sera déboutée de sa demande de restitution du montant de la somme investie sur le contrat litigieux.
Sur les demandes de dommages-intérêts
Mme [L] expose que le manquement de l'assureur à son obligation précontractuelle d'information n'est pas soumis à la prescription biennale de l'article L 114-1 du code des assurances, mais à la prescription de 10 ans ramenée à 5 ans depuis la loi du 17 juin 2008.
Elle fait valoir que le point de départ de cette prescription, en cas d'information inexistante ou défaillante, ne peut être le jour de la souscription du contrat et qu'en l'espèce, c'est en se penchant sur les documents précontractuels et contractuels de son contrat qu'elle a, profane en la matière, découvert que l'information dispensée notamment par Inora Life était défaillante.
Selon l'appelante, la prescription n'aurait commencé à courir qu'à compter du 3 février 2014, date à laquelle elle a écrit à Arca Patrimoine en lui demandant de lui rappeler notamment les versements effectués sur son contrat depuis l'origine et les arbitrages réalisés.
L'obligation de conseil des intermédiaires d'assurance a été introduite dans le code des assurances par la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005, qui, au II, 2° de l'article L 520-1, a prescrit aux intermédiaires en assurance, avant la conclusion de tout contrat, de préciser les exigences et les besoins du souscripteur éventuel ainsi que les raisons qui motivent le conseil fourni quant à un produit d'assurance déterminé.
Ce texte est entré en vigueur le 1er mai 2007.
Alors que l'assureur est tenu d'une obligation d'information portant sur les caractéristiques du contrat proposé, le courtier en assurances, mandataire de son client, est tenu d'une obligation de conseil qui consiste à analyser les besoins de son client et à lui proposer les solutions de placement les plus adaptées.
En outre, après avoir porté à la connaissance de son client des informations objectives sur les caractéristiques de l'investissement qu'il lui propose de réaliser afin que celui-ci puisse se faire une idée suffisamment précise du bien ou du service et qu'il s'engage ainsi en toute connaissance de cause, le devoir de mise en garde auquel le courtier est également tenu consiste à attirer spécifiquement son attention sur les dangers et les risques encourus alors que l'obligation de conseil a pour objet de l'informer sur l'opportunité de contracter.
Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Cette seconde hypothèse permet de retenir que la loi a entendu ne pas laisser le point de départ de la prescription à la disposition de celui qui entend mettre en oeuvre un droit ni de le faire dépendre des seules diligences de ce dernier.
L'action fondée sur un manquement à l'obligation d'information et de conseil se prescrivait, avant la réforme de la prescription par la loi du 17 juin 2008, par 10 voire 30 ans. L'article 26, II, de la loi du 17 juin 2008, a prévu que les dispositions nouvelles qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Le point de départ de la prescription ne peut être laissé à la discrétion de celui qui l'invoque, sauf à lui conférer un caractère potestatif incompatible avec les impératifs de sécurité juridique garantis par la prescription.
Il vient d'être jugé ci-dessus que Mme [L] avait été informée des risques de perte du capital investi dès la souscription du contrat, et elle a eu la confirmation de l'effectivité de ce risque à réception de la première lettre d'information annuelle du 17 janvier 2008 (soit 7 mois seulement après la souscription) aux termes de laquelle il apparaissait que les sommes investies sur l'EMTN Lisso Dynamic 3 (170 000 euros) avaient subi une baisse de 10,67%, tandis que celles investies sur l'EMTN Fastuo Dynamic (150 000 euros) avaient augmenté de 0,32%, risque confirmé par la lettre d'information du 24 février 2009, révélant une baisse respective de 35,32% et de 35,07% pour chacun des EMTN.
C'est donc bien au plus tard à compter de février 2009 que Mme [L] a pu comprendre que le placement ne répondait pas à ses attentes et, si l'on suit son raisonnement, qu'elle a réalisé qu'elle avait été mal informée sur le produit auquel elle avait souscrit.
Elle ne saurait donc soutenir que la prescription n'a commencé à courir qu'à compter du 3 février 2014, jour où elle a écrit au courtier pour lui demander des informations sur les versements effectués sur son contrat depuis l'origine et les arbitrages réalisés, cette date ne correspondant pas à celle à laquelle elle a connu, ou aurait dû connaître le défaut d'information qu'elle allègue.
Disposant d'un délai de 10 ans pour agir à compter de juillet 2007 et au plus tard à compter de février 2009, la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile lui laissait jusqu'au 19 juin 2013 voire jusqu'en février 2014 pour introduire son action, que ce soit à l'encontre d'Inora Life ou d'Arca, devenue Predictis.
Or, elle n'a délivré son assignation que le 23 octobre 2014.
Toute demande d'indemnisation liée au devoir d'information et de conseil dans le cadre de la souscription du contrat litigieux est donc prescrite.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [L] de ses demandes de dommages-intérêts de ce chef.
Il le sera également s'agissant de ses dispositions relatives aux frais et dépens.
Succombant, Mme [L] supportera les dépens d'appel.
Pour des considérations d'équité, il n'y a pas lieu d'allouer à la société Inora Life et à la société Predictis une indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris.
Y ajoutant :
Condamne Mme [L] aux dépens d'appel lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Rejette les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,