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14/05/2019 | FRANCE | N°18/02601

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 14 mai 2019, 18/02601


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



VM

Code nac : 55B



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 MAI 2019



N° RG 18/02601 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SKBO



AFFAIRE :



SAS DHL FREIGHT FRANCE immatriculée au RCS de MEAUX sous le N° 488 985 771, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.





C/

Société N.V. EUROPEAN CONTAINERS SERVICES (ECS)







>
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Octobre 2012 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2010F00693



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

VM

Code nac : 55B

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 MAI 2019

N° RG 18/02601 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SKBO

AFFAIRE :

SAS DHL FREIGHT FRANCE immatriculée au RCS de MEAUX sous le N° 488 985 771, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

C/

Société N.V. EUROPEAN CONTAINERS SERVICES (ECS)

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Octobre 2012 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2010F00693

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Mélina PEDROLETTI,

Me Patricia MINAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE MAI DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation du 7 février 2018 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de versailles le 19 janvier 2016

SAS DHL FREIGHT FRANCE immatriculée au RCS de MEAUX sous le N° 488 985 771, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Adresse 1]

assistée de Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : V 626 - N° du dossier 24004, et Me Cyrille DE SALINS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P132

****************

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

Société N.V. EUROPEAN CONTAINERS SERVICES (ECS)

N° SIRET : 043 513 150 8

[Adresse 2]

[Adresse 2]E (BELGIQUE)

assistée de Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20180178

et Me Hervé LAROQUE de la SCP LAROQUE ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0276,

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Mars 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Mme Véronique MULLER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSÉ DU LITIGE

Courant septembre 2000, la société Parke Davis a confié à la société Danzas, devenue DHL Freight France, l'organisation d'un transport de médicaments de France vers la Grande-Bretagne.

La société Danzas a chargé la société NV European Containers Services (la société ECS) du transport terrestre des marchandises du port de chargement vers le lieu de livraison.

La société ECS a mandaté la société Don Valley Supplies pour réaliser le transport terminal.

Le chargement a été volé en Angleterre dans la nuit du 9 au 10 septembre 2000 alors qu'il était entreposé dans la cour de la société Don Valley.

Le 30 septembre 2000, la société Parke Davis a demandé le paiement de la somme de 44.320,21 euros à la société Danzas, laquelle a adressé une note de débit à la société ECS le 22 novembre 2000.

Courant 2001 et 2002, la société Danzas a confié à la société ECS des prestations.

Le 7 mai 2002, la société Danzas a compensé le paiement du montant de ces prestations (environ 128.000 euros) avec la somme de 44 320,21 euros. Par lettre du 27 juin 2002, la société ECS a contesté cette compensation.

Le 5 août 2003, la société ECS a assigné la société Danzas devant le tribunal de commerce de Bruges (Belgique) afin que la société soit condamnée à lui payer la somme principale de 29 578,08 euros correspondant aux factures impayées.

Par jugement du 13 septembre 2005, le tribunal de Bruges s'est déclaré compétent et a jugé que l'action était prescrite. Par arrêt du 8 février 2007, la cour d'appel de Gand a annulé le jugement au motif que les juridictions belges n'étaient pas compétentes.

Par arrêt du 21 janvier 2010, la cour de cassation belge a rejeté le pourvoi de la société ECS.

Les 4 août et 17 novembre 2010 et 2 janvier 2012, la société ECS a assigné les sociétés DHL Holding, DHL Global Forwarding et DHL Freight France, venant aux droits de la société Danzas, devant le tribunal de commerce de Pontoise.

Par jugement du 11 octobre 2012, le tribunal de commerce de Pontoise a:

- mis hors de cause les sociétés DHL Holding et DHL Global Forwarding ;

- rejeté les exceptions de nullité des assignations et la fin de non-recevoir tirée de la

prescription formées par la société DHL Freight ;

- condamné la société DHL Freight à payer à la société ECS les sommes de 29 578,08

euros et de 2 478,97 euros outre intérêts au taux contractuel de 12% à compter du 5

août 2003, les intérêts étant capitalisés ;

- condamné ladite société à payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700

du code de procédure civile.

Par arrêt du 19 janvier 2016, la cour d'appel de Versailles a:

- déclaré irrecevable la demande formée par la société DHL Freight tendant à la condamnation de l'intimée au paiement de la somme de 35 792,47 euros ;

- confirmé en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 11 octobre 2012 par le tribunal de commerce de Pontoise ;

Y ajoutant

- condamné la société DHL Freight à payer à la société ECS la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté les autres demandes ;

- condamné la société DHL Freight aux dépens.

Par arrêt du 7 février 2018, la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt du 19 janvier 2016, sauf en ce qu'il met hors de cause les sociétés DHL Holding et DHL Global Forwarding et en ce qu'il rejette les exceptions de nullité. La cour de cassation reproche à la cour d'appel de Versailles d'avoir déclaré l'action de la société ECS recevable alors que : "la compensation étant intervenue le 7 mai 2002, l'action en paiement des frais de transport, exercée le 5 août 2003, plus d'un an après, était tardive."

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu la déclaration de saisine du 12 avril 2018 formée par la société DHL Freight.

Vu les dernières conclusions notifiées le 23 novembre 2018 par lesquelles la société DHL Freight demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 11 octobre 2012 en toutes ses dispositions ;

Et, statuant à nouveau :

- déclarer irrecevables, car prescrites, l'ensemble des actions diligentées par la société ECS,

- ordonner la restitution par la société ECS de la somme de 101.468,70 euros à la société DHL Freight avec intérêts de droit à compter du paiement intervenu le 28 novembre 2012,

Subsidiairement,

- dire que la responsabilité de la société ECS est engagée à raison du vol des marchandises survenu dans la nuit du 9 au 10 septembre 2000,

- constater que la société ECS était, en sa qualité de commissionnaire de transport substitué, redevable à la société DHL Freight des sommes dont elle réclame le paiement,

- déclarer mal fondée l'action de la société ECS,

En conséquence,

- ordonner la restitution par la société ECS de la somme de 101.468,70 euros avec intérêts de droit à compter du paiement intervenu le 28 novembre 2012,

Très subsidiairement,

- limiter l'indemnité qui pourrait, par impossible, être mise à la charge de la société DHL Freight, à la somme, en principal, de 29.578,08 euros et dire que les seuls les intérêts au taux légal pourraient courir sur cette somme à compter de l'assignation du 17 novembre 2010, qui seule vaut mise en demeure, conformément aux termes de l'ancien article 1153 du code civil,

- le cas échéant, exercer le pouvoir modérateur du juge quant à la clause pénale et ramener le taux d'intérêt à un montant raisonnable, conformément aux dispositions de l'article 1152 alinéa 2 (ancien) / 1343-5 (nouveau) du code civil,

- ordonner la restitution par la société ECS de la différence entre la somme de 101.468,70 euros réglée par DHL Freight et l'indemnité que la société DHL Freight serait condamnée à verser, avec intérêts de droit à compter du paiement intervenu le 28 novembre 2012,

- constater que la société ECS s'était formellement engagée à régler la somme de 35.792,47 euros à la société DHL Freight,

- condamner la société ECS à payer la somme de 35.792,47 euros à la société DHL Freight, avec intérêts de droit au taux légal à compter du 22 août 2001,

En tout état de cause,

- débouter la société ECS de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions,

- condamner la société ECS au paiement d'une somme de 25.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions notifiées le 14 janvier 2019 au terme desquelles la société ECS demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 11 octobre 2012, sauf en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts conventionnels au 5 août 2003,

- infirmer le jugement sur le seul point de départ des intérêts et dire et juger que les intérêts sur toute somme due par la société DHL Freight courront à compter du 27 juin 2002, date de la première mise en demeure valant interpellation suffisante, et subsidiairement à compter du 5 août 2003 date de l'assignation

En conséquence,

- dire que la prescription de l'action de la société ECS en paiement de ses factures a valablement été interrompue par l'effet des compensations pratiquées par la société Danzas valant reconnaissance du droit du réclamant les 7 mai 2002, 9 avril 2003 et 20 mai 2003,

- dire l'action de la société ECS non prescrite, parfaitement recevable et fondée

- condamner la société DHL Freight à verser à la société ECS les sommes principales de 29.578,08 euros et 2.478,97 euros, avec intérêts de retard au taux contractuel de 12% l'an à compter du 27 juin 2002 date de la première mise en demeure, et subsidiairement à compter du 5 août 2003 date de l'assignation

- ordonner la capitalisation des intérêts par application de l'article 1343-2 du Code Civil,

- dire que la société ECS est intervenue en qualité de commissionnaire-expéditeur de droit belge, qu'elle n'est à ce titre pas garante du transporteur substitué et ne répond que de ses fautes personnelles

- donner acte aux parties que l'indemnité relative au vol survenu le 10 septembre 2000 sous la responsabilité du transporteur anglais Don Valley, a été versée directement par l'assureur du transporteur à l'ayant-droit aux marchandises,

- dire la demande reconventionnelle de la société DHL Freight au titre du sinistre du 10 septembre 2000 irrecevable comme prescrite,

- dire la demande reconventionnelle de la société DHL Freight en paiement de 35.792,47 euros sans objet ni fondement,

- débouter la société DHL Freight de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société DHL Freight à verser à la société ECS la somme de 10.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Et y ajoutant,

- condamner la société DHL Freight au paiement de la somme complémentaire de 25.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner la société DHL Freight aux entiers dépens de première instance d'appel, et d'appel sur renvoi de cassation dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 janvier 2019.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties et au jugement dont appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur l'action en paiement exercée par la société ECS

Il résulte de l'article 32 de la CMR que les actions auxquelles peuvent donner lieu les transports soumis à la présente Convention sont prescrites dans le délai d'un an (...) La prescription court (') :

c) dans tous les autres cas, à partir de l'expiration d'un délai de trois mois à dater de la conclusion du contrat de transport. Le jour indiqué ci-dessus comme point de départ de la prescription n'est pas compris dans le délai.

2. - Une réclamation écrite suspend la prescription jusqu'au jour où le transporteur repousse la réclamation par écrit et restitue les pièces qui y étaient jointes. En cas d'acceptation partielle de la réclamation, la prescription ne reprend son cours que pour la partie de la réclamation qui reste litigieuse. La preuve de la réception de la réclamation ou de la réponse et de la restitution des pièces est à la charge de la partie qui invoque ce fait. Les réclamations ultérieures ayant le même objet ne suspendent pas la prescription.

3 - Sous réserve des dispositions du paragraphe 2 ci-dessus, la suspension de la prescription est régie par la loi de la juridiction saisie. Il en est de même en ce qui concerne l'interruption de la prescription.

Il est acquis et non contesté qu'une compensation de créances, telle que celle opérée par la société DHL le 7 mai 2002, peut constituer une reconnaissance du droit du réclamant (droit de la société ECS au paiement de ses factures).

Il résulte en outre de l'article 2248 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 17 juin 2008, que la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur ou le possesseur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait.

La cour de cassation reproche à la présente cour dans son précédent arrêt - après avoir constaté l'interruption de la prescription annale par la reconnaissance de dette résultant de la compensation du 7 mai 2002 - d'avoir opéré une interversion de prescription en appliquant le délai de prescription décennale de droit commun aux lieu et place du délai de prescription annale de l'article 32 précité, la cour de cassation décidant : « qu'en statuant ainsi, alors que le compensation des frais de transport, si elle vaut reconnaissance de dette au profit du transporteur, n'a pas d'effet novatoire et n'entraîne pas l'interversion de la prescription ainsi interrompue, de sorte que, la compensation étant intervenue, en l'espèce le 7 mai 2002, l'action en paiement des frais de transport, exercée le 5 août 2003, plus d'un an après, était tardive, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

La société DHL soutient que la question de la prescription est ainsi définitivement tranchée par la cour de cassation, en ce sens que la prescription annale - interrompue par la compensation du 7 mai 2002 valant reconnaissance des droits de la société ECS sur le paiement de ses factures ' a recommencé à courir jusqu'au 7 mai 2003, de sorte que l'action introduite par la société ECS le 5 août 2003 est prescrite.

La société ECS soutient que trois nouveaux faits interruptifs de prescription sont intervenus après le 7 mai 2002, à savoir d'une part un courrier de la société DHL du 9 avril 2003, d'autre part un courrier du 4 juillet 2002 et enfin un virement du 20 mai 2003. Elle fait notamment valoir que, par son courrier du 9 avril 2003, la société DHL a indiqué vouloir "régulariser la situation" par le paiement du "solde des factures" en pratiquant une nouvelle compensation. Elle soutient que ce courrier emporte reconnaissance de dette, de sorte qu'il est également interruptif de prescription, ajoutant que le règlement annoncé dans ce courrier du 9 avril 2003 est intervenu le 20 mai 2003.

* S'agissant des courriers du 4 juillet 2002 et virement du 20 mai 2003, ces faits sont sans incidence sur la prescription. Si l'on devait retenir un effet interruptif pour le courrier du 4 juillet 2002, il n'en resterait pas moins que l'action introduite 13 mois plus tard, le 5 août 2003, serait tardive. Quant au virement du 20 mai 2003, il est intervenu postérieurement au terme de la prescription annale (le 7 mai 2003), de sorte qu'il n'a pas d'effet interruptif de prescription.

* S'agissant du courrier adressé par la société DHL le 9 avril 2003 à la société ECS, il rappelle en premier lieu que la responsabilité de la société ECS est engagée du fait de la perte de la marchandise transportée, et que l'assureur de cette dernière avait, dans un premier temps, accepté d'indemniser la société DHL à hauteur d'une somme de 35.792,47 euros qui n'a toutefois jamais été versée. La société DHL indique ensuite (selon la traduction libre de ce courrier fournie par les parties) : " Mais nous n'avons rien reçu de vous, ni de personne, c'est la raison pour laquelle la compensation de 44.320,21 euros a été effectuée. Désormais, nous avons reçu le règlement de WE Cox de USD 16.060,71 euros, donc ce montant peut vous être adressé pour régulariser la situation et clore le dossier. Mais la différence entre 44.320,21 euros et 16.060,71 USD doit rester à la charge de ECS en tant que responsable (...)."

Il convient de rappeler que la société DHL a opéré, le 7 mai 2002, une compensation entre une créance alléguée à l'encontre de la société ECS d'un montant de 44.320,21 euros (en réparation du préjudice subi du fait du vol des marchandises), et une dette envers cette société pour des factures de prestations de services d'environ 128.000 euros.

Par son courrier du 9 avril 2003, la société DHL informe la société ECS qu'elle a finalement reçu un règlement de l'assureur du transporteur final (Don Valley), à hauteur de 16.060,71 USD, qu'elle considère devoir restituer à la société ECS dès lors qu'elle a déjà été indemnisée de l'intégralité de son préjudice (44.320,21 euros) par l'effet de la compensation.

Contrairement à ce que soutient la société ECS, l'annonce de ce règlement par DHL (qui interviendra le 21 mai 2003) à hauteur de 16.060,71 USD, n'a pas pour objet le règlement d'une dette de la société DHL envers la société ECS, en rapport avec d'anciennes factures. La société DHL rappelle en effet le fait que - par la compensation opérée en mai 2002 - elle a réglé cette dette envers la société ECS qui est ainsi éteinte. La société DHL n'a donc, en avril 2003, plus de dette envers la société ECS concernant les factures anciennes.

En outre, aucun élément ne permet d'affirmer que l'annonce du règlement de 16.060,71 USD correspondrait à un règlement partiel de factures de la société ECS. Il ressort au contraire clairement des termes du courrier litigieux que la société DHL ne l'a jamais corrélé avec la dette antérieure et désormais éteinte de la société DHL, mais uniquement à la rétrocession de la somme reçue de l'assureur, alors que cette dernière ne lui est plus due (du fait que la société DHL a déjà été indemnisée de son préjudice par le biais de la compensation).

Force est également de constater que, dans ce courrier d'avril 2003, la société DHL n'invoque plus aucune créance sur la société ECS, dès lors qu'elle s'estime remplie de ses droits par la compensation opérée en mai 2002.

L'annonce du règlement de la somme de 16.060,71 USD ne peut dès lors constituer une reconnaissance d'une dette éteinte, et encore moins une compensation entre une dette et une créance, toutes deux éteintes par la voie de la compensation antérieure.

Au regard de ces éléments, il apparaît qu'aucun effet interruptif ne peut être attaché au courrier du 9 avril 2003.

Le seul fait interruptif de prescription est donc celui résultant de la compensation valant reconnaissance de dettes, opérée le 7 mai 2002.

L'action en paiement des factures de la société ECS n'ayant été introduite que le 5 août 2003, soit plus d'une année plus tard, celle-ci sera déclarée prescrite, le jugement du 11 octobre 2012 étant dès lors infirmé en toutes ses dispositions, hormis la décision de mise hors de cause des sociétés DHL Holding et DHL Globabl Forwarding qui n'a pas fait l'objet de la cassation.

La société DHL sollicite restitution de la somme qu'elle a réglée à la société ECS à hauteur de 101.468,70 euros, sans expliciter cette demande, qui semble toutefois correspondre à la somme versée en exécution du jugement du 11 octobre 2012. En tout état de cause, l'infirmation d'un jugement emporte de plein droit obligation de rembourser les sommes versées en vertu de cette décision de première instance, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.

Dès lors qu'il est fait droit à la demande principale de la société DHL tendant à la prescription de l'action, il n'y a pas lieu de statuer sur sa demande subsidiaire.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société ECS qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Il est équitable d'allouer à la société DHL une indemnité de procédure de 8.000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Vu l'arrêt de la cour de cassation du 7 février 2018,

Infirme en toutes ses dispositions - à l'exception de la mise hors de cause des sociétés DHL Holding et DHL Global Forwarding dont la cour n'est pas saisie - le jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 11 octobre 2012,

Et statuant à nouveau,

Déclare irrecevable, car prescrite, l'action exercée par la société NV European Containers Services à l'encontre de la société DHL Freight France,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société NV European Containers Services à payer à la société DHL Freight France la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société NV European Containers Services aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 18/02601
Date de la décision : 14/05/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 12, arrêt n°18/02601 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-14;18.02601 ?
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