COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53J
16e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 AVRIL 2019
N° RG 18/00442 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SDQZ
AFFAIRE :
[P] [F]
C/
Association LE CAUTIONNEMENT MUTUEL DE L'HABITAT
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Juin 2015 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° Chambre : 06
N° RG : 14/10239
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Julie THIBAULT, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX HUIT AVRIL DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [P] [F]
né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 1] (MAROC) (Maroc)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2] (MAROC)
Représentant : Me Julie THIBAULT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 471
Représentant : Me Khalid OUADI de la SELEURL Cabinet Khalid OUADI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0202 -
APPELANT
****************
Association LE CAUTIONNEMENT MUTUEL DE L'HABITAT
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625
Représentant : Me Eric LE DISCORDE de la SELARL LE DISCORDE-DELEAU, Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG, vestiaire : 152
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Mars 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nicolette GUILLAUME, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Patricia GRASSO, Président,
Madame Nicolette GUILLAUME, Président,
Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO,
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 9 octobre 2006, la société Caisse de Crédit Mutuel de Foix a consenti à M. [P] [F] deux prêts immobiliers d'un montant de 150 000 euros et 50 000 euros, remboursables en 240 mensualités, au taux effectif global de 4,490 % l'an pour le premier et de 4,459 % l'an pour le second.
Par attestations datées du 18 octobre 2006, l'association Le Cautionnement Mutuel de l'Habitat (CMH) s'est portée caution solidaire de M. [P] [F] pour la totalité du premier prêt et à concurrence de la somme de 23 000 euros pour le second.
À compter du mois d'octobre 2013, M. [P] [F] a cessé de régler les échéances des prêts.
Par lettres recommandées avec accusé de réception des 2 et 30 janvier, puis 25 février 2014, l'association CMH a alors mis en demeure M. [P] [F] de régulariser sa situation.
Par lettre recommandée avec accusés de réception datée du 25 mars 2014, la société Caisse Régionale du Crédit Mutuel a informé M. [P] [F] de la déchéance du terme des deux prêts.
M. [P] [F] ne s'étant pas acquitté de ses obligations, la société Caisse de Crédit Mutuel a exercé un recours contre l'association CMH, caution, laquelle a versé les sommes de 119 085,42 euros et de 18 259,60 euros. Deux quittances subrogatives ont alors été établies le 14 avril 2014.
Par acte d'huissier du 31 juillet 2014, l'association CMH a fait assigner M. [P] [F], sur le fondement des articles 2305 et subsidiairement, 2306 du Code civil, en paiement des sommes qu'elle a réglées entre les mains du créancier, avec intérêts au taux contractuel de 7 % l'an à compter du 14 avril 2014, avec capitalisation annuelle des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil ainsi que la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 26 juin 2015, M. [F] étant défaillant, le tribunal de grande instance de Nanterre a :
- condamné M. [F] à payer à CMH les sommes de :
119 085,42 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2014,
18 259,60 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2014,
800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,
- dit que les intérêts échus pour une année entière depuis la demande en justice (2 septembre 2014) produiront eux-mêmes intérêts à compter du 2 septembre 2015 ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;
- rejeté toutes plus amples demandes de CMH ;
- condamné M. [F] aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le 7 aout 2015, M. [F] a interjeté appel de la décision. L'affaire a été enregistrée sous le n° RG 15/6031.
Par ordonnance d'incident rendue le 9 février 2016, le conseiller de la mise en état, saisi par l'association CMH a ordonné la radiation de l'affaire sur le fondement de l'article 526 du Code de procédure civile.
L'affaire a ensuite été rétablie sous le n° RG 18/442.
Par ordonnance d'incident rendue le 3 mai 2018, le conseiller de la mise en état, saisi par l'association CMH, l'a déboutée de sa demande de péremption d'instance.
Puis par ordonnance d'incident rendue le 13 novembre 2018, le conseiller de la mise en état, saisi par M. [F], a déclaré irrecevable comme tardive l'exception de procédure tendant au sursis à statuer dans l'attente d'un jugement du juge de l'exécution devant statuer sur sa demande de caducité du jugement entrepris.
Dans ses conclusions transmises le 11 février 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [F], appelant, demande à la cour de :
recevoir son action et le dire bien-fondé ;
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement, dont appel, rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre le 26 juin 2015 et tous les actes subséquents ;
statuant à nouveau,
- annuler l'assignation introductive d'instance délivrée, le 31 juillet 2014, par acte de la SELARAL [W] [D], huissier de justice à [Localité 4], sur le fondement des dispositions de l'article 659 du Code de procédure civile ;
- annuler le jugement dont appel du 26 juin 2015 et tous les actes subséquents ;
- déclarer que cette annulation fait obstacle à tout pouvoir de statuer au fond ;
en tout état de cause,
- condamner l'association CMH à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel.
Dans ses conclusions, comportant appel incident, transmises le 24 janvier 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, l'association CMH, intimée, demande à la cour de :
- constater que M. [F] a prétendu être domicilié, dans sa déclaration d'appel, à l'adresse même à laquelle l'assignation lui a été signifiée, dont il demande la nullité sur le fondement de l'article 659 du Code de procédure civile ;
- dire que les conclusions d'appel régularisées par M. [F] sont irrecevables et mal fondées;
- débouter M. [F] de l'ensemble de ses demandes ;
confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre en date du 26 juin 2015 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a limité les intérêts au taux légal, lesquels font l'objet de l'appel incident ;
sur l'appel incident,
- condamner M. [F] à lui payer les sommes principales de 119 085,42 euros et 18 259,60 euros majorées des intérêts de retard au taux contractuel de 7 % l'an à compter du 14 avril 2014, date de la délivrance des quittances subrogatives de règlement ;
en tout état de cause,
- condamner M. [F] à lui payer la somme de 4 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers frais et dépens de l'instance dont distraction au profit de la SELARL Lexavoue Paris-Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
*****
La clôture de l'instruction a été prononcée le 26 février 2019.
L'audience de plaidoirie a été fixée au 13 mars 2019 et le délibéré au 18 avril suivant.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la nullité du jugement
M. [F] fait valoir que les significations de l'assignation introductive d'instance (par acte d'huissier de justice daté du 31 juillet 2014) et celle du jugement du 26 juin 2015 (par acte d'huissier de justice daté du 28 juillet 2015) au [Adresse 3] sont entachées de nullité, ladite adresse n'étant plus valide au jour des significations.
L'association CMH soutient que l'appel formé par M. [F] permet d'écarter les dispositions protectrices de l'article 478 du Code de procédure civile ; elle prétend, à titre liminaire, que la cour d'appel est incompétente pour connaître d'une demande en nullité de l'acte introductif d'instance, par application de l'article 771 du Code de procédure civile. Elle se prévaut enfin de l'article 694 du même code pour voir écarter la nullité de l'assignation invoquée.
Sur la signification du jugement
Auteur de l'appel du jugement dont il critique la signification, M. [F] est irrecevable à en demander la nullité de ce chef en application de l'article 478 du Code de procédure civile.
Sur la délivrance de l'assignation
Selon l'article 654 du code de procédure civile : "La signification doit être faite à personne".
En application de l'article 659 du même code, les diligences nécessaires accomplies par l'huissier instrumentaire sont celles qui auraient permis de découvrir le domicile, la résidence ou le lieu de travail de celui à qui l'acte doit être signifié.
L'assignation introductive d'instance a été délivrée le 31 juillet 2014 au [Adresse 4], par "procès-verbal 659 du Code de procédure civile" et non à la dernière adresse connue de M. [F], laquelle était le [Adresse 5], comme cela ressort de toutes les correspondances échangées avec la société Caisse de Crédit Mutuel de Foix à laquelle l'intéressé qui avait souscrit un autre prêt par acte du 22 octobre 2012, avait déclaré cette dernière adresse. En outre, CMH connaissait l'identité de l'employeur de M. [F], commandant de bord à Air France depuis novembre 1992, renseignement porté sur la demande de prêt à laquelle la caution avait eu accès (pièce 4). Peu importe que M. [F] soit revenu à son adresse initiale à [Localité 4] à laquelle il se domicilie au jour de sa déclaration d'appel.
Faute de diligences suffisantes, l'assignation encourt la nullité dès lors qu'un grief peut être démontré par celui qui invoque la nullité.
M. [F] qui n'a été régulièrement assigné, n'a pu faire valoir ses droits devant un premier degré de juridiction ce qui lui fait nécessairement grief. L'instance est en effet atteinte dans son principe même. Le jugement sera en conséquence annulé.
M. [F], ne conclut pas sur le fond à hauteur de cour, de sorte qu'il ne peut y avoir d'effet dévolutif de l'appel et que la demande reconventionnelle au fond de l'association CMH sur les intérêts ne peut être examinée. Cette demande sera déclarée irrecevable.
L'association CMH qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
En application de l'article 700 du Code de procédure civile, chacune des parties gardera à sa charge ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,
Annule l'assignation introductive d'instance délivrée le 31 juillet 2014 et tous les actes subséquents,
Annule le jugement,
Déclare l'association CMH irrecevable en sa demande reconventionnelle sur les intérêts,
Vu l'article 700 du Code de procédure civile, rejette les demandes formées à ce titre,
Rejette toute autre demande,
Condamne l'association CMH aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile pour les avocats qui en ont fait demande.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Patricia GRASSO, Président et par Mme COLAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,