COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
17e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 MARS 2019
N° RG 16/04134
AFFAIRE :
[R] [E]
C/
SAS TF1 PRODUCTION
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 août 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Boulogne Billancourt
Section : Encadrement
N° RG : F15/00687
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Jean-marie GUILLOUX
la AARPI ADER, JOLIBOIS
Expédition numérique délivrée à :
POLE EMPLOI
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT MARS DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [R] [E]
née le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Jean-marie GUILLOUX, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0818, substitué par Me Philippe GUESNIER, avocat au barreau de PARIS.
APPELANTE
****************
SAS TF1 PRODUCTION
N° SIRET : 352 61 4 6 63
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Jocelyne CLERC KACZMAREK de l'AARPI ADER, JOLIBOIS, Plaidant/Constitué, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : T11, substituée par Me Catherine HARNAY, avocate au barreau de PARIS.
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 février 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,
Madame Evelyne SIRE-MARIN, Président,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Corinne DELANNOY,
Par jugement du 4 août 2016, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt (section encadrement) a :
- débouté Mme [R] [E] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné Mme [E] aux dépens.
Par déclaration adressée au greffe le 7 septembre 2016, Mme [E] a interjeté appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture a été prononcée le 8 janvier 2019.
Par dernières conclusions déposées au greffe le 26 septembre 2018, Mme [E] demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du 4 août 2016,
statuant à nouveau,
- dire que la société TF1 Production ne satisfait pas aux obligations légales et conventionnelles de recours au CDD d'usage notamment en ne les lui transmettant pas dans le délai de 48 heures suivant son embauche,
- dire que les fonctions qu'elle a occupées relevaient de l'activité normale et permanente de la société TF1 Production,
- dire qu'elle était dans l'impossibilité de prévoir quand elle devait travailler et devait se tenir constamment à la disposition de son employeur,
- dire que la rupture de sa relation de travail est sans cause réelle et sérieuse,
- dire que sa chaîne de 202 contrats de travail à durée déterminée doit être requalifiée en un contrat unique à durée indéterminée à temps plein,
à titre principal,
- dire qu'elle occupait le poste de chargé de production,
- fixer son salaire à la somme de 4 739 euros,
en conséquence,
- condamner la société TF1 Production à lui payer les sommes suivantes :
. 151 958 euros à titre de rappel de salaires sur temps plein pour la période du 26 avril 2010 au 31 décembre 2014, déduction faite des allocations chômage versées,
. 15 196 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
. 20 174 euros à titre de rappel de salaire pour prime de treizième mois,
. 2 017 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
. 14 217 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
. 1 421 euros à titre de congés payés sur préavis,
. 14 217 euros à titre d'indemnité de requalification,
. 22 987 euros à titre d'indemnité de licenciement,
. 113 736 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 45 587 euros au titre du préjudice de retraite,
à titre subsidiaire,
- dire qu'elle occupait le poste d'administrateur de production,
- fixer son salaire à la somme de 3 981 euros,
en conséquence,
- condamner la société TF1 Production à lui payer les sommes suivantes :
. 109 417 euros à titre de rappel de salaires sur temps plein pour la période du 26 avril 2010 au 31 décembre 2014, déduction faite des allocations chômage versées,
. 10 941 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
. 16 946 euros à titre de rappel de salaire pour prime de treizième mois,
. 1 694 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
. 11 943 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
. 1 194 euros à titre de congés payés y afférents,
. 11 943 euros à titre d'indemnité de requalification,
. 19 309 euros à titre d'indemnité de licenciement,
. 95 544 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 32 825 euros au titre du préjudice de retraite,
en tout état de cause,
- dire que les montants alloués porteront intérêts à compter du jour de la demande introductive s'agissant des créances salariales et à compter de l'arrêt à intervenir s'agissant des dommages et intérêts,
- condamner la société TF1 Production à lui payer la somme de 7 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions déposées au greffe le 21 novembre 2018, la société TF1 Production demande à la cour de :
- fixer la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 3 215,62 euros,
- débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
à titre subsidiaire,
- retenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 19 293,72 euros,
- retenir une indemnité de requalification de 3 215,62 euros,
- retenir une indemnité de licenciement de 7 771,07 euros,
- retenir une indemnité compensatrice de préavis (22 jours) de 2 358,12 euros,
- retenir des congés payés sur préavis de 235,81 euros,
- retenir un rappel de 13ème mois dans la limite de la prescription triennale de 10 182,79 euros,
à titre très subsidiaire, en cas de reclassification en chargée de production,
- fixer la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 3 286,51 euros,
- retenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 19 719,06 euros,
- retenir une indemnité de requalification de 3 286,51 euros,
- retenir une indemnité de licenciement de 7 936,85 euros,
- retenir une indemnité compensatrice de préavis (22 jours) de 2 410,10 euros,
- retenir des congés payés sur préavis de 241 euros,
- retenir un rappel de 13ème mois dans la limite de la prescription triennale de 10 407,28 euros,
- retenir un rappel de salaire du fait de la reclassification en qualité de chargée de production de 2 300 euros,
à titre très subsidiaire, en cas de requalification des CDDU en CDI à temps plein pour un emploi d'administratrice de production pour la période du 30 décembre 2011 au 30 décembre 2014 du fait de la prescription triennale,
- retenir un rappel de salaire de 3 685 euros,
- retenir des congés payés sur rappel de salaire de 368,50 euros,
à titre infiniment subsidiaire, en cas de requalification des CDDU en CDI à temps plein pour un emploi d'administratrice de production sur la période d'avril 2010 à décembre 2014,
- retenir un rappel de salaire de 16 613 euros,
- retenir des congés payés sur rappel de salaire de 1 661,30 euros,
à titre très infiniment subsidiaire, en cas de requalification des CDDU en CDI à temps plein pour un emploi de chargée de production pour la période du 30 décembre 2011 au 30 décembre 2014 du fait de la prescription triennale,
- retenir un rappel de salaire de 13 730 euros,
- retenir des congés payés sur rappel de salaire de 1 373 euros,
à titre infiniment subsidiaire, en cas de requalification des CDDU en CDI à temps plein pour un emploi de chargée de production sur la période d'avril 2010 à décembre 2014,
- retenir un rappel de salaire de 32 364 euros,
- retenir des congés payés sur rappel de salaire de 3 236 euros,
- condamner Madame [E] aux dépens.
LA COUR,
Mme [R] [E] a été engagée par la société TF1 Production Publicité, devenue TF1 Production, qui a pour activité principale la production audiovisuelle, en qualité d'assistante de production, par une succession de 202 contrats à durée déterminée d'usage, à compter du 9 octobre 2003.
A compter du 1er octobre 2008, la salariée a occupé le poste d'administratrice de production.
Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale de la production audiovisuelle.
Le 23 octobre 2014, la société TF1 Production a notifié à la salariée la rupture de sa collaboration, avec une dernière mission pour la société le 30 décembre 2014.
Le 21 avril 2015, Mme [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt d'une demande de requalification de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et aux fins d'obtenir diverses sommes.
SUR CE,
Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :
Mme [E] soutient que la SAS TF1 Production ne respectait pas le formalisme inhérent aux contrats d'usage ; que pour la période 2003-2008, certains contrats ne sont pas datés et que d'autres contrats n'étaient pas remis dans les deux jours de son embauche ; que pour la période 2008-2014, l'ensemble des contrats a été régularisé a posteriori en fonction des très nombreux changements de plannings relatifs à la production du programme ; qu'elle signait ses contrats à la fin de sa mission, ce qui constitue une pratique illicite au regard des dispositions de l'article L. 1242-13 et de l'article V2.2 de la collective de la production audiovisuelle ; que cette pratique était institutionnalisée en raison de ce qu'elle ne connaissait pas à l'avance le nombre exact de jours travaillés pour chaque mission ; qu'à titre d'exemple, elle a été amenée à travailler pour la SAS TF1 Production du 3 février 2014 au 13 février 2014 ; que pour autant, le contrat a été édité le 13 février 2014 et signé le 14 février 2014 soit 10 jours suivant le début de sa mission et un jour suivant sa fin.
Mme [E] fait encore valoir que la SAS TF1 Production ne respectait pas les conditions de fond du recours au contrat de travail à durée déterminée d'usage ; qu'en effet, au fond, elle a été embauchée par la SAS TF1 Production à compter du 9 octobre 2003 pour pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; que l'accord de branche du 12 octobre 1998 prévoit qu'un employeur ne peut imposer au salarié pour ce qui est de la durée du contrat, une incertitude supérieure à celle qui pèse sur l'entreprise pour l'objet du contrat ; qu'or, la SAS TF1 Production l'a embauchée par 202 contrats de travail à durée déterminée d'usage mensuels, hebdomadaires, voire journaliers, alors que les contrats portant sur la production du programme DCCV (pour « du côté de chez vous ») avec la société Leroy Merlin étaient annuels, ce que la SAS TF1 Production ne conteste pas. La salariée invoque à cet égard, la permanence de son emploi suivant 202 contrats depuis le 9 octobre 2003 jusqu'au 30 décembre 2014, dans le cadre d'un programme pérenne ' le programme DCCV ' diffusé sans interruption par TF1 ' et encore aujourd'hui ' depuis près de 20 ans.
Pour sa part, la SAS TF1 Production fait valoir, en ce qui concerne le formalisme des contrats de travail à durée déterminée d'usage, que Mme [E] n'a jamais contesté durant toute la période de sa collaboration ou manifesté de réclamation relativement au fait qu'elle aurait prétendument signé ses contrats après son embauche ; que pour en justifier, Mme [E] se fonde sur des captures d'écran du logiciel XOTIS/MEDIA et interprète inexactement les données fournies par ledit logiciel. L'employeur conclut au caractère inexact des allégations de Mme [E], l'article L. 1242-12 du code du travail ' sur le contenu du contrat de travail à durée déterminée ' ne mentionnant pas la date de signature du contrat au titre des mentions obligatoires ; que l'article L. 1242-13 indique uniquement que le contrat de travail à durée déterminée est transmis au salarié, au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant l'embauche ; que ce texte ne fait pas non plus référence à une obligation de mentionner dans le contrat la date à laquelle il est signé. La SAS TF1 Production estime en définitive qu'aucune objection ne peut être élevée sur les modalités formelles des contrats signés entre les parties et sur leurs modalités de transmission.
La SAS TF1 Production réplique encore que les accords collectifs et collective des 12 octobre 1998 et 13 décembre 2006 autorisent le recours au contrat de travail à durée déterminée d'usage ; que les métiers exercés par Mme [E] ' assistante de production puis administratrice de production ' étaient couverts par ces accords et convention collectifs ; que Mme [E] elle-même souhaitait le recours au contrat de travail à durée déterminée d'usage ce qui lui permettait de conserver son statut d'intermittent et de justifier d'un certain volume d'heures travaillées dans le cadre de contrats d'usage pour se garantir l'ouverture de droits auprès de Pôle emploi ; que cette situation, du reste commune à toutes les sociétés de production audiovisuelle, doit nécessairement être prise en considération par la cour, dès lors que Mme [E] a refusé d'accepter un contrat de travail à durée indéterminée, la salariée ayant alors précisé que son salaire à mi-temps plus les allocations ASSEDIC lui permettaient de vivre confortablement. La SAS TF1 Production ajoute que la présence de Mme [E] a été discontinue (112 jours en 2009, 86 jours en 2010, 97 jours en 2011, 114 jours en 2012, 144 jours en 2013 et 118 jours en 2014 soit en moyenne 9,09 jours par mois) ; qu'au surplus, Mme [E] a été affectée à l'émission spécifique nécessairement non pérenne « Du côté de chez vous », le défaut de pérennité résultant de ce que le contrat conclu entre TF1 et Leroy Merlin relatif à cette émission était conclu pour une durée de 3 ans ce qui conduit à une incertitude sur le sort ou sur le format du programme « Du côté de chez vous ».
L'article L. 1242-2 du code du travail dispose que, sous réserve des contrats spéciaux prévus à l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu'il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d'un salarié (1), l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise (2) et les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d'usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois (3).
Aux termes de l'article D.1242-1 du code du travail, les secteurs d'activité dans lesquels peuvent être conclus des contrats à durée déterminée sont (...) 6° les spectacles, l'action culturelle, l'audiovisuel, la production cinématographique, l'édition phonographique (...).
En application des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et L. 1242-12 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, qui ne peut avoir pour effet ou pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas déterminés par la loi, et doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif, à défaut de quoi il est réputé conclu pour une durée indéterminée.
La possibilité de conclure des contrats à durée déterminés d'usage est prévue et encadrée par l'accord national interprofessionnel de branche de la télédiffusion en date du 12 octobre 1998 étendu par arrêté du 15 janvier 1999 et la collective de la production audiovisuelle du 13 décembre 2006 étendue par arrêté du 24 juillet 2007.
Il appartient toutefois au juge de contrôler le formalisme des contrats et si l'utilisation des contrats de travail à durée déterminée successifs était justifiée par l'existence d'éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de cet emploi.
En l'espèce, il n'est pas contesté que Mme [E] a travaillé pour la SAS TF1 Production en application de 202 contrats de travail à durée déterminée d'usage. Il n'est pas non plus contesté que Mme [E] a constamment travaillé dans le cadre de l'émission « Du côté de chez vous ».
La fréquence du recours par la SAS TF1 Production à Mme [E] a représenté en moyenne 9,09 jours par mois entre 2009 et 2014 comme l'allègue l'employeur et en moyenne 9,9 jours par mois sur la même période selon la salariée. Ce travail procurait à la salariée une moyenne de 2 283,05 euros par mois lissée sur l'année entre 2009 et 2014, les allocations de Pôle emploi complétant ses revenus.
La sociétéTF1, sur laquelle repose la charge de la preuve de la nature temporaire de l'emploi, soutient que l'emploi de Mme [E] n'était ni continu ni régulier et que sa collaboration a été faible ; que Mme [E] ne voulait pas travailler plus préférant se consacrer à ses activités d'arts plastiques ; qu'elle avait refusé le contrat de travail à durée indéterminée qui lui avait été proposé et que l'émission « Du côté de chez vous » n'était pas pérenne.
Or, elle ne rapporte pas la preuve du caractère temporaire de l'emploi de Mme [E], le fait que cet emploi n'ait pas été régulier étant indifférent au regard de la requalification sollicitée. Le caractère pérenne de l'émission « Du côté de chez vous » est en outre indiscutable, s'agissant d'une émission qui dure depuis près de 20 ans, peu important que le contrat qui préside à cette émission ' c'est-à-dire le contrat qui lie la SAS TF1 Production à la société Leroy Merlin ' soit un contrat à durée déterminée. Par ailleurs, le fait que la SAS TF1 Production ait proposé à Mme [E] de l'employer ' courant 2008 ' suivant un contrat de travail à durée indéterminée (cf. pièces 4 et 20 de l'employeur consistant en les attestations d'un salarié et d'un ancien salarié) accrédite encore l'idée suivant laquelle l'emploi de Mme [E] correspondait à un emploi lié à l'activité normale et permanente de la SAS TF1 Production.
Dès lors, infirmant le jugement, il y a lieu de requalifier cette relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à compter du 9 octobre 2003.
Sur le temps de travail :
Pour conclure à une requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, Mme [E] se fonde sur l'article L. 3123-14 du code du travail. Elle expose que de jurisprudence constante, en cas d'irrégularité ou d'absence d'écrit constatant l'existence d'un contrat de travail à temps partiel et la répartition précise des horaires de travail, ce contrat est présumé à temps complet et que l'employeur qui conteste la présomption d'un emploi à temps complet doit rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas tenu de se tenir constamment à sa disposition.
Mme [E] soutient qu'elle était dans l'impossibilité de prévoir quand elle devait travailler et devait se tenir constamment à la disposition de son employeur ; qu'elle a travaillé en moyenne 120 jours par an tout en étant maintenue à la disposition de son employeur sauf périodes estivales lors des interruptions des productions ; que ses interventions s'effectuaient au gré des sollicitations de son employeur, de manière récurrente, à la même fréquence chaque année, dans les mêmes lieux et suivant un mode d'organisation identique ; que ses contrats étaient systématiquement régularisés a posteriori dans la mesure où elle ne connaissait pas à l'avance le nombre exact de jours travaillés pour chaque mission ; qu'elle n'avait pas de plannings ; que si des plannings étaient établis, il s'agissait de plannings prévisionnels prévoyant des « plages » de présence ne fixant toutefois pas ses jours de travail précis ; que du reste, les plannings prévisionnels étaient constamment modifiés d'une semaine à l'autre pour diverses raisons.
En réplique, la SAS TF1 Production expose que le cadre dans lequel elle s'inscrit résulte de la jurisprudence définissant la règle selon laquelle la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée n'a d'effet que sur le terme du contrat et non sur la durée du travail ; qu'en application de cette jurisprudence, il revient au salarié de prouver qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur afin d'obtenir le paiement de salaires au titre des périodes d'inactivité séparant des contrat de travail à durée déterminée requalifiés ensuite en contrat de travail à durée indéterminée.
La SAS TF1 Production ajoute qu'au cas d'espèce, Mme [E] a travaillé 109 jours par an ; qu'elle n'a entendu exercer son activité qu'à mi-temps ; qu'elle jouissait d'une liberté d'organisation en qualité d'administratrice de production excluant sa présence au tournage ; qu'en effet, le travail de Mme [E] consistait simplement à organiser la logistique des « vagues » (que l'employeur définit comme le fait d'envoyer une équipe tourner dans les différentes maisons sélectionnées) c'est-à-dire de s'assurer de la réservation d'hôtels, taxis, restaurations, salles de visionnage ainsi que la régularisation des contrats et du suivi des moyens financiers. L'employeur ajoute qu'au retour des « vagues », Mme [E] devait récupérer les notes de frais et réaliser les budgets de production ; qu'ainsi, le travail de Mme [E] ne s'effectuait jamais dans l'urgence et était parfaitement planifié et qu'elle avait une visibilité de son activité sur de nombreux mois à l'avance. La SAS TF1 Production fait valoir que Mme [E] a créé, le 1er janvier 1998, une affaire personnelle dans le domaine de la création artistique relevant des arts plastiques. L'employeur en déduit que Mme [E] n'était pas tenue constamment à sa disposition.
Ainsi que le soutient à juste titre l'employeur, la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles sur la durée du travail.
Sous couvert d'une demande de requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, Mme [E] tente en réalité d'obtenir le paiement des rappels de salaire pour les périodes d'inactivité consécutivement à la requalification de ses contrats de travail à durée déterminée d'usage en un contrat de travail à durée indéterminée. Or, en cas de requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée (ce qui est le cas en l'espèce comme il a été vu plus haut), il appartient au salarié d'établir qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur pendant les périodes interstitielles pour en obtenir le paiement.
Cela conduit à l'examen de la question, débattue entre les parties, de la remise des plannings à Mme [E].
La salariée verse aux débats plusieurs courriels (ses pièces 10 à 18) couvrant une période de 3 ans et demi ' du 21 janvier 2010 au 1er juillet 2013 ' dont il ressort, ainsi qu'elle le soutient à raison, que les plannings n'étaient pas précis et se trouvaient sujets à des annulations ou à des reports. Il doit être en particulier relevé que lors d'un échange électronique entre Mme [E] et Mme [D] (rédactrice en chef des programmes courts) le 8 novembre 2010, cette dernière indiquait à l'appelante quels étaient les travaux attendus d'elle et à quel moment ils étaient prévus : il était question de tournages « début mars », ou « fin mai » ou « avril » ou « mai » ou « fin mars » sans indication précise des dates. Mme [D] ajoutait, en fin de courriel : « Si tu as besoin de dates précises, dis-le moi, mais c'est difficile à ce stade », signe évident que les plannings n'étaient pas précis mais que Mme [E] devait, respectivement « début mars », ou « fin mai » ou « avril » ou « mai » ou « fin mars » se tenir à la disposition de son employeur sans pouvoir identifier clairement les jours durant lesquels elle serait sollicitée. Certains échanges ' pièce 18 de l'appelante ' montrent encore que Mme [E] pouvait être sollicitée deux jours avant un tournage.
Inévitablement, les plannings étaient sujets à des variations inhérentes à la disponibilité des interlocuteurs de Mme [E] comme en témoignent ses pièces 19 à 24-4 (des courriels évoquant des modifications de dates) ou consécutives à des reports de montage (courriels en pièces 25 à 28-3) ou à des problèmes de décor lui imposant parfois, en urgence, d'être présente sur son lieu de travail alors que sa présence n'était pas prévue (cf. courriel en pièce 29) ou encore à l'organisation même de la production (échanges de courriels en pièces 64-1 à 64-20 où il peut être relevé que même la rédactrice en chef des programmes « ne comprend plus rien à toutes ces réunions » (pièce 64-11)).
L'attestation de Mme [U] (pièce 86 de l'appelante) révèle qu'elle a été amenée, un temps, à remplacer la rédactrice en chef des programmes courts et qu'elle a rencontré Mme [E] à cette occasion. Il ressort du témoignage de Mme [U] que « l'emploi du temps de [Mme [E]] se faisait au fil de l'eau au gré des besoins de la production, entre septembre et juillet, en fonction de différents facteurs comme le choix des maisons (') ou la disponibilité des propriétaires de ces maisons ou les demandes ponctuelles du client. Ces facteurs définissaient les dates de tournage parfois à l'avance mais parfois au dernier moment et les dates de post-production et donc en définitive, les jours où [Mme [E]] devait aller travailler (') » Le témoin évoque ensuite la question d'une refonte du programme et de l'attente de la décision du client Leroy Merlin à la rentrée 2014, indiquant en substance que de cette décision dépendait l'emploi du temps des salariés affectés à l'émission « Du côté de chez vous ». Et le témoin ajoute : « Il n'était pas possible pour moi et [Mme [E]] de planifier son emploi du temps à venir d'ici la fin de l'année 2014. Néanmoins, dans ce temps d'attente, elle devait rester disponible à tout moment pour une reprise qui pouvait être immédiate ou non. », avant de conclure qu'elle avait été surprise du départ de Mme [E] qui, selon elle, « faisait partie de l'équipe depuis tant d'années. Bien qu'intermittente, elle était totalement intégrée au service ».
De surcroît, il convient de relever que Mme [E] démontre avoir été professionnellement contactée par M. [Y] ainsi que par M. [G], tous deux désireux de lui confier du travail (pièces 88 et 89 de l'appelante). M. [Y] et M. [G] attestent tous deux de façon circonstanciée que Mme [E] a décliné leur proposition en raison de son emploi auprès de TF1, son planning ne lui permettant pas d'anticiper s'agissant du premier témoin ou son planning étant très dense s'agissant du second.
Il convient en outre de relever que l'activité de Mme [E] dans le domaine des arts plastiques est marginale comme en témoignent ses déclarations de revenus.
Enfin, le moyen tiré de ce qu'un contrat de travail à durée indéterminée avait été proposé à Mme [E] mais qu'elle l'a refusé est inopérant, dès lors qu'après lui avoir proposé de signer un tel contrat et après que la salarié l'a refusé, la SAS TF1 Production a continué à l'embaucher suivant des contrats de travail à durée déterminée d'usage.
De l'ensemble de ces éléments, il ressort une incertitude de Mme [E] sur la connaissance de ses plannings qui conduit à estimer établi qu'elle ne pouvait prévoir par avance ses jours et temps de travail et qu'elle était en réalité à la disposition permanente de la SAS TF1 Production.
Dès lors, Mme [E] étant à la disposition permanente de son unique employeur, la SAS TF1 Production, il convient, infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt, de faire droit à sa demande de requalification à temps plein.
Sur la demande de rappels de salaires et primes :
Sur la prescription des salaires
Se fondant sur la loi du 14 juin 2013, la SAS TF1 Production invoque la prescription partielle de la demande de rappel de salaires formée par Mme [E], laquelle conteste que la prescription soit acquise, se prévalant des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013.
Les actions en paiement ou en répétition des salaires sont prescrites au bout de 3 ans par application de l'article L. 3245-1 du code du travail qui dispose : « L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. »
Ce texte est issu de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 (article 21 IV) qui, pour avoir été publiée au journal officiel de la République française le 16 juin 2013, s'applique à compter du 17 juin 2013.
Avant l'entrée en vigueur de cette loi, la prescription de l'action portant sur le paiement ou la répétition du salaire était régie par le code civil et se prescrivait par cinq ans s'agissant d'une action personnelle (article 2224 du code civil).
Or, l'article 21-V de la loi du 14 juin 2013 dispose « Les dispositions du code du travail prévues aux III et IV du présent article s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. »
Il s'ensuit que les dispositions de la loi nouvelle qui ont réduit le délai de prescription de 5 à 3 ans se sont appliquées à compter du 17 juin 2013 aux prescriptions en cours, pour le temps qu'il leur restait à courir, sans que celui-ci puisse excéder les limites fixées par la loi nouvelle.
La demande de rappel de salaires de Mme [E] porte sur la période comprise entre le 26 avril 2010 et le 30 décembre 2014. Une partie de cette demande de rappel de salaire était régie par la prescription antérieure (la demande portant sur les salaires entre le 26 avril 2010 et le 16 juin 2013) et l'autre partie de cette demande est régie par la loi de prescription telle qu'issue de la loi du 14 juin 2014 (la demande portant sur les salaires entre le 16 juin 2013 et le 30 décembre 2014).
L'action portant sur les salaires de Mme [E] du 26 avril 2010 au 16 juin 2013 était prescrite par 5 ans sous l'empire de la loi antérieure. Mme [E] pouvait donc saisir le conseil de prud'hommes jusqu'au 26 avril 2015 pour obtenir le rappel de salaire le plus ancien. Est entre temps intervenue la loi du 14 juin 2013 s'appliquant immédiatement à compter du 17 juin 2013. L'application immédiate de la loi de prescription conduirait à allonger le délai de prescription de l'action de Mme [E] jusqu'au 17 juin 2016 sous réserve que le délai de prescription antérieur ne soit pas dépassé. Mme [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 21 avril 2015. Elle n'est donc pas prescrite s'agissant des salaires qu'elle réclame depuis le 26 avril 2010.
L'action portant sur les salaires de Mme [E] du 17 juin 2013 au 30 décembre 2014 était pour sa part prescrite par 3 ans. Mme [E] pouvait donc saisir le conseil de prud'hommes jusqu'au 30 décembre 2017 pour obtenir paiement desdits salaires. Comme il a été rappelé ci-dessus, Mme [E] a saisi le conseil de prud'hommes le 21 avril 2015.
En définitive, Mme [E] n'est prescrite en aucune de ses demandes de rappel de salaire.
Sur le fond
Mme [E] revendique à titre principal un salaire sur la base d'un emploi en qualité de « chargée de production » et subsidiairement en qualité « d'administrateur de production ». Elle explique que faute, pour la SAS TF1 Production de communiquer les salaires en vigueur au sein de l'entreprise dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, elle a pris pour référence un salaire reconstitué de 3 981 euros mensuels pour un administrateur de production, se fondant en cela sur les salaires perçus par des salariés en poste au sein de la SAS TF1 Production dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, et de 4 739 euros pour un poste de chargé de production, se fondant sur le salaire d'un administrateur de production (3 981 euros comme il a été vu ci-avant) majoré de 19,05%, cette majoration étant évaluée par référence à l'écart qu'elle a constaté entre sa propre rémunération en qualité d'administrateur de production et la rémunération d'un chargé de production engagé, comme elle, par contrat de travail à durée déterminée.
Pour sa part, la SAS TF1 Production estime que la reconstitution de carrière de Mme [E] ne peut s'opérer que sur la base d'un poste d'administrateur de production. Elle se fonde sur le salaire minimum tel que prévu par la collective.
Les rappels de salaire portent sur la différence entre la moyenne des salaires que Mme [E] aurait dû percevoir d'une part, et les salaires effectivement perçus d'autre part ; cette différence donne droit à un rappel de salaires.
Entre le 26 avril 2010 et le 30 décembre 2014, Mme [E] a constamment été embauchée en qualité d'administratrice de production. Aucune raison objective ne vient démontrer que la reconstitution de carrière de Mme [E] doive être réalisée sur la base d'une autre catégorie.
Il conviendra donc de reconstituer sa carrière, entre le 26 avril 2010 et le 30 décembre 2014, sur la base de la catégorie des administrateurs de production.
Le salaire de référence à temps complet fixé par le barème minimum prévu par la collective pour la catégorie des administrateurs de production n'est pas pertinent en ce qu'il ne fixe qu'un minimum de rémunération pour la catégorie de salariés à laquelle Mme [E] doit être rattachée et en ce qu'aucun des salariés de la SAS TF1 Production n'est rémunéré au minimum de sa catégorie.
La SAS TF1 Production ne verse aux débats aucun élément permettant à la cour de se forger une représentation de la moyenne des salaires perçus par ses salariés de la catégorie des administrateurs de production. Il convient dès lors de prendre pour référence celle proposée par la salariée qui repose sur les salaires perçus par des employés de la SAS TF1 Production à des postes équivalents.
Ainsi, son salaire moyen reconstitué sera-t-il fixé à la somme de 3 981 euros ainsi que Mme [E] le réclame.
Sur la base de son tableau, présenté en pièce 47-1, qui, sur toute l'étendue de la période comprise entre le 26 avril 2010 et le mois de décembre 2014, opère une différence entre son salaire reconstitué et les sommes qu'elle a perçues chaque mois, il convient d'arrêter à la somme de 109 417 euros le rappel de salaire brut qui lui est dû et auquel la SAS TF1 Production sera condamnée, outre à celle de 10 941 euros au titre des congés payés afférents.
Il doit enfin être précisé que la somme de 109 417 euros ci-dessus arrêtée n'intègre pas les indemnités versées à Mme [E] par Pôle emploi durant ses périodes de chômage. De fait, elles n'ont pas à être déduites de la somme due à Mme [E] par la SAS TF1 Production. En revanche, Mme [E] ne peut être accueillie en sa demande tendant à préciser que la condamnation porte sur la somme de 109 417 euros « déduction faite des allocations chômage versées », cette précision étant inexacte.
Il n'est pas contesté que les salariés permanents, employés en contrat de travail à durée indéterminée par la SAS TF1 Production, perçoivent une prime de treizième mois. Il sera donc alloué à Mme [E] la somme de 20 174 euros à ce titre outre celle de 2 017 euros au titre des congés payés afférents.
Les sommes ainsi arrêtées produiront intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2015, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de jugement.
Mme [E] peut également prétendre à une indemnité de requalification, en application de l'article L. 1245-2 du code du travail correspondant à un minimum d'un mois de salaire. Il n'est à cet égard pas justifié que l'indemnité de requalification soit élevé à un montant supérieure au minimum prévu par la loi. Il sera donc alloué à Mme [E] une indemnité de 3 981 euros à ce titre. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Sur la rupture de la relation contractuelle :
Lorsqu'un contrat de travail à durée déterminée est requalifié en contrat à durée indéterminée postérieurement à son exécution, la relation contractuelle se trouve rompue de fait et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la date du premier jour suivant celui auquel l'employeur, qui s'estimait à tort lié au salarié par un contrat de travail à durée déterminée venu à échéance, a cessé de lui fournir un travail et de le rémunérer.
En l'espèce, plus aucun travail n'a été proposé à Mme [E] à partir du 30 décembre 2014.
En mettant fin aux relations de travail au seul motif de l'arrivée du terme d'un contrat improprement qualifié par la société de contrat de travail à durée déterminée d'usage, la SAS TF1 Production a pris l'initiative de la rupture du contrat de travail sans notification écrite de motif légitime ; dès lors, cette rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ouvre droit au profit de Mme [E] au paiement des indemnités de rupture, soit l'indemnité compensatrice de préavis de trois mois, l'indemnité de licenciement, sur la base d'une ancienneté de 11 ans, 2 mois et 21 jours (que les parties s'accordent pour arrondir à 11 ans et 3 mois) et sur la base d'une référence salariale mensuelle de 3 981 euros, compte tenu de la reconstitution de carrière réalisée plus haut.
Compte tenu de ces éléments, il sera alloué à Mme [E] :
. 11 943 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 1 194 euros au titre des congés payés afférents,
. 19 309 euros à titre d'indemnité de licenciement.
Les sommes ainsi arrêtées produiront intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2015, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de jugement
En outre, selon l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, dans le cas d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le juge octroie une indemnité, qui ne peut être inférieure aux 6 derniers mois de salaire pour un salarié ayant plus de 2 ans d'ancienneté.
Compte tenu de ce que Mme [E], pour être née le [Date naissance 3] 1957, avait 57 ans au moment de la rupture de son contrat de travail, de ce qu'elle jouissait d'une ancienneté de 11 ans, 2 mois et 21 jours (du 9 octobre 2003 au 30 décembre 2014), le préjudice qui résulte, pour elle, de son licenciement sans cause réelle et sérieuse sera intégralement réparé par une indemnité de 36 000 euros, somme au paiement de laquelle la SAS TF1 Production sera condamnée, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Mme [E] ne justifie pas d'un préjudice distinct qui ne serait pas déjà réparé par l'indemnité qui lui a été allouée au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse et le rappel de salaire accordé comprenant les cotisations retraite. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande relative à un préjudice de retraite.
L'article L. 1235-4 dispose que dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.
Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
Le licenciement ayant été jugé comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il conviendra d'ordonner, d'office, le remboursement par la SAS TF1 Production aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à Mme [E], du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage.
Sur les autres demandes :
Sera ordonnée la remise par la SAS TF1 Production à Mme [E] d'une attestation Pôle Emploi et de bulletins de salaires conformes au présent arrêt.
La SAS TF1 Production sera condamnée à payer à Mme [E] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SAS TF1 Production sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe, la cour :
Infirme en toutes ses dispositions le jugement,
Statuant à nouveau,
Requalifie la relation contractuelle entre Mme [E] et la SAS TF1 Production en contrat à durée indéterminée à compter du 9 octobre 2003,
Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription,
Fixe le salaire de Mme [E] à la somme de 3 981 euros en qualité d'administrateur de production,
Condamne la SAS TF1 Production à payer à Mme [R] [E] :
. 109 417 euros à titre de rappel de salaire brut, outre 10 941 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2015,
. 20 174 euros à titre de rappel de prime de 13ème mois outre 2 017 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2015,
. 3 981 euros à titre d'indemnité de requalification, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
. 11 943 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 1 194 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2015,
. 19 309 euros à titre d'indemnité de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2015,
. 36 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Y ajoutant,
Déboute Mme [E] de sa demande tendant à la réparation de son préjudice de retraite,
Ordonne le remboursement par la SAS TF1 Production aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à Mme [E], du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage en application de l'article L. 1235-4 du code du travail,
Ordonne la remise, par la SAS TF1 à Mme [E], d'une attestation Pôle emploi et de bulletins de salaires conformes au présent arrêt,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne la SAS TF1 Production à payer à Mme [E] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS TF1 Production aux dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Mme Clotilde Maugendre, présidente et Mme Corinne Delannoy, greffière.
La greffière La présidente