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21/03/2019 | FRANCE | N°16/03693

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 21 mars 2019, 16/03693


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 21 MARS 2019



N° RG 16/03693 - N° Portalis DBV3-V-B7A-Q3T7



AFFAIRE :



SA ENVIRONNEMENT NUMERIQUE





C/



[G] [O]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juillet 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

Section : Activités dive

rses

N° RG : 14/02105





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Bruno CARRIOU

Me Sébastien DUFAY

Me Véronique DAGONET

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT ET UN MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 MARS 2019

N° RG 16/03693 - N° Portalis DBV3-V-B7A-Q3T7

AFFAIRE :

SA ENVIRONNEMENT NUMERIQUE

C/

[G] [O]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juillet 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

Section : Activités diverses

N° RG : 14/02105

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Bruno CARRIOU

Me Sébastien DUFAY

Me Véronique DAGONET

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA ENVIRONNEMENT NUMERIQUE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Bruno CARRIOU, avocat au barreau de NANTES

APPELANTE

****************

Monsieur [G] [O]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Sébastien DUFAY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0265

POLE EMPLOI, agissant pour le compte de l'UNEDIC

Le Galilée

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Véronique DAGONET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 003

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Février 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine PLANTIN, Magistrat honoraire chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène PRUDHOMME, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

M. [G] [O] a été embauché dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée le 1er juin 2005 par la société Environnement Numérique en qualité de technicien fibre optique. Le 1er novembre 2007, le salarié est devenu chef de bureau d'études.

Par lettre en date du 28 juillet 2012, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre statuant en formation de départage le 12 juillet 2016 qui a :

- fixé la moyenne du salaire à 2 255,84 euros,

- considéré que la prise d'acte doit emporter les conséquences d'une licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Environnement Numérique à verser au salarié les sommes suivantes :

. 96,39 euros à titre de rappel de salaire pour la journée du 6 avril 2012,

. 4 511,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 451,71 euros au titre des congés payés y afférents,

. 4 136,48 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2012,

. 15 790 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- ordonné le remboursement par la société Environnement Numérique des indemnités de chômage versées au salarié pendant un mois,

- dit que la société Environnement Numérique devra remettre les documents sociaux,

- condamné la société Environnement Numérique à verser 1 200 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens,

- débouté les parties de toute autre demande,

Vu l'appel interjeté par la société Environnement Numérique par déclaration au greffe de la cour le 21 juillet 2016,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement le 6 février 2019 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens de la société Environnement Numérique qui demande l'infirmation du jugement entrepris et le rejet des prétentions formées par le salarié devant être condamné à verser 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement le 6 février 2019 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens du salarié M. [O] qui demande la confirmation du jugement sauf sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse pour laquelle il demande 42 960,60 euros et demande et en outre, la condamnation de la société à verser 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions d'intervention volontaire de Pôle-Emploi qui demande :

- par application de l'article L 1235-4 la condamnation de la société Environnement Numérique à lui verser 8 168,40 euros,

- par application de l'article 700 du code de procédure civile la condamnation de la société Environnement Numérique à lui verser la somme de 500 euros et la condamnation de la société à supporter les dépens,

SUR CE,

Sur les demandes liées à la rupture du contrat de travail

Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire d'une démission, étant observé que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture ne fixe pas les limites du litige et qu'il convient d'examiner les manquements de l'employeur invoqués par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Il appartient au salarié d'établir la matérialité des faits invoqués à l'encontre de l'employeur. 

S'il existe un doute sur la matérialité de ceux-ci, la prise d'acte doit produire les effets d'une démission.

Les manquements dénoncés à l'encontre de l'employeur doivent rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

Au soutien de sa prise d'acte aux torts de la société Environnement Numérique, le salarié faisait état de l'exécution de travaux dans des conditions mettant gravement en danger sa sécurité et sa santé et, de manière plus générale, invoquait un défaut de mise à disposition d'équipements conformes aux nécessités imposés par les dits travaux et il évoquait encore les propos enregistrés sur son répondeur téléphonique l'ayant invité à démissionner (pièce n° 14 de la société).

En premier lieu, il exposait que lors de ses interventions se déroulant, selon ses dires, la plupart du temps en milieu confiné, il ne disposait pas du matériel adéquat permettant de détecter les gaz toxiques.

Il ressort du document unique d'évaluation des risques professionnels (pièce n° 29 de la société) qu'est évalué au niveau 1, ce qui correspond au niveau maximum, le risque d'explosion ou d'asphyxie.

En outre, dans son rapport établi le 22 avril 2012, le contrôleur du travail (pièce n° 6 du salarié) avait rappelé les risques spécifiques aux espaces confinés soit asphyxie (suspension de la respiration liée à une déficience en oxygène) ou anoxie (absence transitoire ou définitive d'apport ou d'utilisation d'oxygène) ; la baisse de teneur en oxygène pouvant être due soit au remplacement de l'oxygène par un gaz inerte (azote) soit au remplacement de l'oxygène par un gaz toxique (monoxyde ou dioxyde de carbone).

Dans ces circonstances, la société Environnement Numérique avait pour obligation de mettre à la disposition de ses salariés un matériel permettant de prévenir les risques énoncés.

Il apparaît, à ce propos, que le matériel fourni au salarié (pièces n° 43 et 44 de la société) permettait de détecter les gaz naturels et les gaz explosibles et affichait la nature du gaz détecté de telle sorte que ce matériel était conforme aux préconisations.

En outre, sur les comptes-rendus de chantier établis entre le 4 mai 2011 et le 17 juillet 2012, le salarié n'avait fait aucune observation sur le matériel considéré alors pourtant que le 8 février 2012, il était intervenu une fois en milieu confiné (dans un ouvrage souterrain) en précisant utilisation du détecteur de gaz et EPI (pièce n° 34 de la société). En dernier lieu, le matériel considéré avait été vérifié le 23 février 2012 (pièce n° 47 de la société).

Compte tenu de ces éléments, il n'apparaît pas que le salarié apporte la preuve qui lui incombe de la matérialité du grief formulé qui concerne sa santé et alors qu'il ne s'est pas plus présenté au rendez-vous fixé par le médecin du travail le 16 juillet 2012 (pièces n° 25 et 26 de la société).

En deuxième lieu, le salarié déplorait l'absence de dérouleur de touret autorisé sur la voie publique, de barrières de sécurité en bon état, de matériel de raccordement et de mesure de fibre optique ayant fait l'objet d'une révision. Sur ce point, il ne produit aucune pièce et n'explique pas davantage les raisons de ses doléances. En tous cas, il ne conteste pas les précisions apportées à ce sujet par la société Environnement Numérique (pièce n° 12 du salarié).

Il existe, en conséquence, un doute sur la matérialité de ce grief qui sera écarté.

En troisième lieu, sur l'absence de combinaison assurant une protection contre l'amiante, l'absence d'information lors d'un travail à proximité de ce matériau et la nécessité pour les salariés de faire l'avance des frais afférents aux équipements de protection individuelle (EPI) :

S'agissant des EPI, plusieurs salariés attestent avoir reçu les équipements adéquats lors de leur prise des fonction au sein de la société Environnement Numérique (pièces n° 38 à 41 de la société) ; il apparaît que ces témoignages, dont aucun élément et / ou indice ne permet de mettre en doute la sincérité des attestants, contredisent les affirmations du salarié lequel, en tous cas, au regard des explications qui précédent, n'avait auparavant fait aucune observation à ce propos. Sur l'avance des frais pour se procurer un équipement, la société Environnement Numérique établit, sans être contredite, que le salarié pouvait obtenir une avance de telle sorte que le grief n'est pas établi avec certitude.

S'agissant des travaux à proximité de l'amiante : il apparaît que la société Environnement Numérique avait mis au point des documents spécifiant les règles de conduite à adopter en ce cas (pièces n° 27-1 et 28-1 de la société) ; de plus, lors des interventions sous la maîtrise d'ouvrage de la société France Telecom, le risque lié à ce matériau était pris en compte dans le cadre du document technique amiante (DTA) (pièces n° 36 et 37 de la société) ; pour les travaux s'étant déroulés à compter du 10 juin 2011, et pendant une année, M. [O] n'avait formé aucune opposition et / ou objection sur les conditions de déroulement du chantier (pièce n° 30 de la société).

En définitive, au regard de ce qui précède, le reproche examiné n'est pas caractérisé.

Enfin, sur la teneur des propos enregistrés sur le répondeur téléphonique du salarié : il ne peut être contesté que le 24 avril 2012, l'employeur a téléphoné à l'intéressé et a manifesté le regret que celui-ci ne démissionne pas et manifeste tant d'opposition à son égard en ayant exercé un second droit de retrait le 6 avril 2012.

Sur ce point, le salarié ne prouve pas s'être, ce jour là, déplacé sur le chantier de telle sorte que le droit considéré ne pouvait être régulièrement exercé et il n'y a lieu d'allouer au salarié un rappel de salaire correspondant à cette journée.

Sur la volonté de démissionner du salarié : trois salariés de la société Environnement Numérique attestent de la volonté de M. [O] de quitter son emploi en obtenant un licenciement économique et M. [T] souligne que l'intéressé a refusé tout dialogue et multiplié les échanges conflictuels ; M. [Y] précise que depuis que M. [O] avait déménagé, il se plaignait de la distance entre son lieu de travail et son domicile et au cours d'un entretien le 23 juillet 2012, cinq jours avant la prise d'acte, la société Environnement Numérique lui avait proposé un poste en Seine et Marne qu'il avait refusé (pièces n° 13, 31-1, 32-1 et 33-1 de la société). Dans ces circonstances, l'on ne peut considérer que le salarié ait été, comme il l'affirme, contraint de quitter l'entreprise.

Au regard de ce qui précède, il n'apparaît à la charge de la société Environnement Numérique aucun manquement ayant rendu impossible la poursuite du contrat de travail.

Le jugement déféré sera infirmé, la prise d'acte devant être analysé dans le cadre d'une démission et M. [O] sera, en conséquence débouté de l'intégralité de ses demandes

Sur la demande de Pôle-Emploi

Les dispositions de l'article L 1235-4 du code du travail n'étant pas applicables en cas de démission, Pôle-Emploi doit être débouté de sa demande en remboursement des indemnités de chômage versées au salarié.

Sur les dépens et sur l'indemnité de procédure

M. [O] qui succombe dans la présente instance sera condamné aux dépens.

Par ailleurs, le salarié et Pôle-Emploi seront déboutés de leur demande formée au titre des frais irrépétibles.

Enfin, compte tenu de la situation respective des parties, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la société la charge les frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre (section activités diverses) en date du 12 juillet 2016 en ce qu'il a dit que la prise d'acte notifiée le 28 juillet 2012 par M. [G] [O] devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que la prise d'acte notifiée par M. [G] [O] le 28 juillet 2012 doit produire les effets d'une démission,

Déboute M. [G] [O] de ses demandes liées à l'existence d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse (indemnité compensatrice de préavis, indemnité conventionnelle de licenciement et indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse),

Déboute M. [G] [O] de sa demande de rappel de salaire pour la journée du 6 avril 2012,

Y ajoutant,

Déboute Pôle-Emploi de sa demande en remboursement des indemnités de chômage versées au salarié,

Déboute les parties de leur demande formée par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [G] [O] aux dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme Sophie RIVIERE, greffier.

Le GREFFIERLe PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 16/03693
Date de la décision : 21/03/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°16/03693 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-21;16.03693 ?
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