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14/03/2019 | FRANCE | N°17/04671

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 14 mars 2019, 17/04671


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53I



16e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 MARS 2019



N° RG 17/04671 - N° Portalis DBV3-V-B7B-RUDW



AFFAIRE :



[Y] [Q]

...



C/

SA CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL ...











Décision déférée à la cour : Jugement rendule 19 Mai 2017 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 1

4/08056



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :



à :



Me Christian GALLON, avocat au barreau de VAL D'OISE,





l'ASSOCIATION BUISSON & ASSOCIES, avocat au barreau de VAL D'OISE







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 MARS 2019

N° RG 17/04671 - N° Portalis DBV3-V-B7B-RUDW

AFFAIRE :

[Y] [Q]

...

C/

SA CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL ...

Décision déférée à la cour : Jugement rendule 19 Mai 2017 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 14/08056

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Christian GALLON, avocat au barreau de VAL D'OISE,

l'ASSOCIATION BUISSON & ASSOCIES, avocat au barreau de VAL D'OISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [Y] [Q]

né le [Date anniversaire 1] 1970 à [Localité 1]

de nationalité Française

Chez Mme [F] [Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

Représentant : Me Christian GALLON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 97 - N° du dossier 15007

Madame [D] [N] épouse [Q]

née le [Date anniversaire 1] 1972 à [Localité 2]

de nationalité Française

Chez Mme [F] [Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

Représentant : Me Christian GALLON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 97 - N° du dossier 15007

APPELANTS

****************

SA CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL Société anonyme à directoire et conseil de surveillance au capital de 608.439.888 €, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 542.016.381, ayant siège social à [Adresse 4], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 542 01 6 3 811

[Adresse 4]

Représentant : Me Paul BUISSON de l'ASSOCIATION BUISSON & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 6

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Janvier 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nicolette GUILLAUME, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Patricia GRASSO, Président,

Madame Nicolette GUILLAUME, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO,

FAITS ET PROCEDURE,

M. et Mme [Y] et [D] [Q] étaient propriétaires d'un pavillon situé à [Adresse 5] qui constituait leur domicile conjugal.

Ils avaient constitué une SCI dénommée MVS avec pour gérant et associé M. [Q] [Y] et pour associée, son épouse, Mme [D] [Q]. Cette SCI était propriétaire du local commercial situé à [Adresse 6], où la SARL BOOST 2 ROUES exploitait son fonds de commerce, initialement, avant son déménagement à [Localité 3].

Le 3 août 2010, les époux [Q] ont vendu leur maison de [Localité 4] à la SCI MVS, moyennant le prix de 450 000 €.

Le CIC a financé cette acquisition par la SCI MVS en lui octroyant un prêt de 401 000 € reçu par acte notarié en date du 3 août 2010, remboursable en 300 mensualités de 2.404,16 € (assurances comprises moyennant un taux d'intérêts de 4,3% selon le tableau d'amortissement).

En garantie de ce prêt, par acte séparé du 13 juillet 2010, M. et Mme [Y] et [D] [Q] se sont portés cautions solidaires, chacun à hauteur de la somme de 240 600 €.

Le compte de la SARL BOOST 2 ROUES continuant d'être structurellement déficitaire, par acte sous seing privé du 29 avril 2011, et sous le bénéfice du cautionnement solidaire de M. [Q], le CIC lui a accordé un nouveau crédit à moyen terme de 100.000 €, d'une durée de sept ans, remboursable par mensualités constantes de 1.457 €.

La SARL BOOST 2 ROUES a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 11 février 2013, une clôture pour insuffisance d'actif étant prononcée le 28 novembre 2014 par le tribunal de commerce de Pontoise.

Le tribunal de grande instance de Pontoise par jugement rendu le 19 mai 2017 a fait droit aux demandes du CIC, condamnant M. et Mme [Y] et [D] [Q] solidairement à lui payer la somme de 420 540,29 € au titre d'un prêt immobilier majoré des intérêts au taux conventionnel de 4,30% à compter du 17 juillet 2014 et jusqu'au parfait paiement, cette condamnation étant limitée à hauteur de la somme de 240 600 € à l'égard de chacun d'eux en application de leur engagement de caution, outre les intérêts de retard calculés au taux légal à compter du 17 juillet 2014 jusqu'au jour du parfait paiement,

Par déclaration du 20 juin 2017, les époux [Q] ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions du 21 juin 2018, ils demandent à la cour, au visa des articles1134 et 1147 du Code civil et L 341-4 du Code de la consommation, de :

- infirmer dans sa totalité le jugement attaqué,

- dire que le CIC a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde en laissant délibérément la SARL BOOST 2 roues poursuivre une activité qu'elle savait être déficitaire depuis 2009 et en favorisant cette poursuite,

- dire que le CIC a manqué à son obligation de loyauté contractuelle en transférant un risque d'irrecouvrabilité de sa créance qu'elle savait certain s'agissant de la SARL BOOST 2 roues sur le patrimoine de la SCI MVS, société tierce, qu'ils détenaient,

- dire que le CIC ne peut se prévaloir de leur cautionnement,

- débouter le CIC de toutes ses demandes,

en conséquence,

- condamner le CIC à leur payer 'solidairement' et à payer à la SCI MVS la somme de 600 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner le CIC à leur payer et à payer à la SCI MVS la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Christian Gallon, avocat, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 28 novembre 2018, le CIC demande à la cour, au visa des articles 1134 et suivants anciens , 2288 et 2298 du Code civil de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Pontoise le 19 mai 2017,

en conséquence,

- condamner solidairement les époux [Q] à lui payer la somme de 420 540,29 € au titre du prêt immobilier majorée des intérêts au taux conventionnel de 4,30 % à compter du 17 juillet 2014 et jusqu'au parfait paiement,

- dire toutefois que cette condamnation sera limitée à hauteur de la somme de 240 600 € à l'égard de M. [Y] [Q] en application de son engagement de caution, outre les intérêts de retard calculés au taux legal à compter du 17 juillet 2014 jusqu'au jour du parfait paiement,

- dire toutefois que cette condamnation sera limitée à hauteur de la somme de 240 600 € à l'égard de Mme [D] [Q] en application de son engagement de caution, outre les intérêts de retard calculés au taux légal à compter du 17 juillet 2014 jusqu'au jour du parfait paiement,

- débouter les époux [Q] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner solidairement les époux [Q] à lui payer la somme de 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et en tous les dépens, lesquels comprendront notamment les frais des mesures d'exécution qui pourront être engagés dont recouvrement au profit de Maitre Paul Buisson, cabinet Buisson & associes, avocat au barreau du Val d'Oise, conformement aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

SUR CE

. Sur les demandes du CIC

Le CIC demande la condamnation solidaire des époux [Q] à hauteur de leur engagement de caution de la SCI MVS pour le prêt immobilier qui lui a été consenti par la banque le 3 août 2010.

Le CIC prétend que le patrimoine des époux [Q] leur permettait de faire face à leurs obligations, que leur incombe la charge de la preuve contraire aux termes des dispositions de l'article L.341-4 du Code de la consommation et que la banque est tenue par le principe de non-ingérence.

Les époux [Q] font valoir que le CIC est mieux placé que quiconque pour connaître la situation patrimoniale du couple. Ils estiment qu'ils ont pris des engagements de caution disproportionnés à leurs biens et revenus, leur patrimoine immobilier au regard des engagements pris étant de surcroît indisponible du seul fait de l'inscription hypothécaire profitant au CIC, ou très sur évalué puisque le local commercial a finalement été vendu pour 380 000 € en août 2011, et la maison aux enchères, 210 000 €, le 17 novembre 2016.

Ils font valoir que pour les années 2010/2011 toutes les cautions que le CIC avait prises sur eux aboutissaient à un total de 624.000 euros.

En effet, selon les termes de l'article L 341-4 du Code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permettent de faire face à son obligation.

Le caractère manifestement disproportionné du cautionnement lors de la conclusion du contrat le 13 juillet 2010, s'apprécie au regard, d'un côté, de l'ensemble des engagements souscrits à cette date par la caution, d'un autre côté, de ses biens et revenus.

En l'absence de disproportion de l'engagement de caution au moment où il est conclu, il est inopérant de rechercher si le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation au moment où elle est appelée.

En l'espèce, au moment de la souscription de son engagement le 3 août 2010, M. [Q] a rempli, certifié et déclaré sincère une annexe qui laissait apparaître :

-des revenus annuels de 25 000 € en 2009, puis de 10 000 € par mois en 2010,

-la propriété des parts de la SCI MVS à hauteur de 400 000 € et de 450 000 € ( local commercial de [Localité 5] et maison de [Localité 4]),

-un passif, à savoir l'emprunt en cours d'un montant de 401 000 € souscrit par la SCI MVS avec une charge mensuelle de remboursement de 2 420 €.

Dans le même temps, Mme [Q] au moment de la souscription de son engagement le 3 août 2010, a rempli, certifié et déclaré sincère une annexe qui laissait apparaître :

-des revenus mensuels de 1 300 €,

-un patrimoine immobilier que représentait la maison située à [Localité 4]

-des parts de la SCI MVS représentant un montant minimum estimé à 450 000 €.

Il convient de rappeler qu le CIC avait financé l'acquisition le 3 août 2010 de la maison de [Localité 4] par la SCI MVS au prix de 450 000 €, en lui octroyant ce prêt de 401 000 € ce qui correspond aux déclarations des époux [Q].

Il ressort cependant des pièces produites et notamment, des statuts de la SCI MVS qu'elle a été constituée par M. et Mme [Q] le 17 novembre 2004 à parts égales entre les époux, M. [Q] en était le gérant, ce que le CIC ne pouvait ignorer. En conséquence, le CIC aurait du relever l'inexactitude figurant sur la fiche remplie par les époux [Q] consistant à déclarer chacun 450000 € représentant les parts de la SCI. Cette somme aurait du être divisée par 2.

A l'inverse, il convient de relever que Mme [Q] omet d'évoquer le local commercial qui ne sera vendu que le 25 août 2011 pour un prix de 380 000 € par la SCI MVS, ainsi qu'il est dit dans l'attestation de Maître [K], notaire à Taverne, et il n'est pas contesté que le solde de 91569,07€ du prêt accordé pour financer ce bien en novembre 2004 à la SCI a été remboursé lors de la vente du bien immobilier en 2010 conformément à ce qui est dit dans la lettre de la banque datée du 12 mars 2010.

Est également omis dans ces déclarations le produit de la vente de la maison de [Localité 4] à la SCI MVS affecté selon les déclarations des époux [Q] eux-mêmes :

. à la SARL BOOST 2 ROUES par un apport de trésorerie de 90 000 €, le jour même, puis de 60000 €, réalisé le surlendemain 5 août, soit au total 150 000 €,

. à la souscription le 6 août 2010 par chacun des époux et pour un capital de 50 000 € chacun, soit 100 000 € au total, d'un contrat d'assurance-vie PLAN ASSUR HORIZONS.

Ces sommes auraient en effet du être déclarées, de sorte que si le créancier n'a pas suffisamment vérifié et rectifié en conséquence l'exactitude des renseignements figurant sur ces fiches, en y relevant des anomalies évidentes dont il avait forcément connaissance au regard de son implication qui ressort clairement de la lettre produite par les époux [Q] datée du 12 mars 2010, il ne peut pour autant en être déduit une disproportion manifeste entre l'engagement de caution de 240 600 € signé par chacun des époux et l'état de leurs biens (local commercial et produit de la vente dont une partie sera placée en assurance à hauteur de 100 000 euros) et ce, en dépit des garanties prises par la banque (privilège de prêteur de deniers et nantissement des contrats d'assurance-vie) et même si la SARL BOOST 2 ROUES qui constituait leur principale source de revenus était évidemment fragile, les apports en trésorerie étant cependant censé remédier à cette situation.

En conséquence, la créance du CIC n'étant pas contestée en son montant, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné les époux [Q] à hauteur de leur engagement de caution de la SCI MVS pour le prêt immobilier qui lui a été consenti par la banque le 3 août 2010.

. Sur la demande en dommages et intérêts

Les appelants à ce titre sollicitent la somme de 600.000 € représentant la valeur marchande de la maison de [Localité 4], de 338.000 € prix de vente obtenu par eux et non celle de 210.000 € prix auquel elle a été bradée, dans le cadre de la vente par adjudication, somme à laquelle s'ajoutent tous les frais et intérêts qui ont été générés par les procédures engagées par le CIC à leur encontre et les conséquences dommageables liées à l'expulsion de la maison vendue.

Les époux [Q] se sont portés cautions de l'emprunt souscrit par la SCI MVS dont ils sont les seuls associés et gérant associé.

Il n'est nullement allégué une différence de statut entre les époux qui aurait pu conduire le juge à apprécier différemment les devoirs de la banque vis-à-vis de l'un ou de l'autre.

Les appelants estiment que le CIC a entretenu une situation structurellement déficitaire de la SARL BOOST 2 ROUES, par un montage financier qui a consisté à transférer son propre risque sur le patrimoine personnel des cautions et notamment, en accordant deux prêts successifs en août 2010 et avril 2011.

Ils reprochent au CIC des manoeuvres, un manque de loyauté lors de la vente de leur maison, la souscription de l'emprunt et un engagement disproportionné de leur part en qualité de caution, un manquement à son devoir de conseil et de mise en garde vis-à-vis d'eux qui n'avaient pas les connaissances nécessaires pour, ne serait-ce qu'imaginer, un tel montage financier. Ils soulignent le fait qu'à aucun moment ils n'ont été incités à cesser l'activité commerciale de la SARL BOOST 2 ROUES, pourtant structurellement déficitaire, pour preuve la cessation de paiement déclarée début 2012.

Ils considèrent comme fautif le refus de la banque, en juillet 2014, de consacrer la somme de 100000 € placée en assurance-vie au paiement des échéances du crédit souscrit par la SCI MVS, ce qui leur a occasionné des frais supplémentaires (notamment, le paiement des intérêts et d'une indemnité conventionnelle de 26.337,65 €).

Le CIC fait valoir que les époux [Q] ne rapportent la preuve d'aucune faute qui justifierait l'octroi de dommages et intérêts. A cet égard, il rappelle qu'ils étaient les associés fondateurs de la SCI MVS et qu'ils étaient donc les mieux à même d'apprécier les risques pris ainsi que les bénéfices escomptés de l'opération financée.

Il soutient que, tenu par le principe de non ingérence, il n'avait pas à s'immiscer dans les affaires de ses clients en leur conseillant un dépôt de bilan, qu'il n'a commis aucun manquement au devoir de conseil ou à l'obligation de mise en garde s'agissant de cautions averties, qu'aucune manoeuvre ne peut lui être reprochées et qu'il n'a agi qu'au regard des besoins exprimés : les époux [Q] ayant librement décidé de l'affectation de la somme de 401.000 € qu'ils ont reçue de la vente de leur bien à la SCI MVS.

Il convient d'observer en préliminaire que s'il ressort de la description des opérations que les époux [Q] ont mis en risque leur patrimoine immobilier pour créer la trésorerie nécessaire à la poursuite de leur activité commerciale, ce constat ne permet pas pour autant de caractériser une faute de la banque dans le montage financier qui lui est imputé.

Sur le point précis que concerne le refus de la banque d'affecter au remboursement des échéances impayées, les assurances-vie, il sera relevé qu'aucun accord contractuel n'est produit qui permettrait de démontrer qu'il était convenu que le déblocage des fonds investis dans les assurances-vie souscrites le 6 août 2010 devait permettre le paiement d'un arriéré d'échéances du crédit litigieux, alors que les deux contrats étaient nantis au profit du CIC en garantie de ce prêt accordé à la SCI MVS . Cet argument sera donc écarté et aucun manquement au devoir de loyauté contractuelle de la banque ne peut être établi à cet égard.

La banque n'est tenue d'un devoir de mise en garde sur les risques d'endettement qu'à l'égard de la seule caution non avertie.

Pour démontrer que les époux [Q] étaient des clients avertis, le CIC rappelle que M. [Q] avait la qualité de gérant de la SCI. Orle simple statut de gérant n'entraîne pas une présomption du caractère averti de la caution. Dans le cas présent, ni l'expérience, ni les compétences financière ne qualifiaient particulièrement les époux [Q] pour mesurer les enjeux et les risques de l'opération dans laquelle ils s'engageaient. Sera donc écartée la qualité de caution avertie. Le devoir de mise en garde s'imposait donc à l'organisme financier.

Dans cette hypothèse, cette mise en garde consiste à informer les cautions et à les avertir du risque d'endettement que comporte le cautionnement s'il est inadapté à leurs capacités financières appréciées au jour de son engagement.

Dans le cas présent, le risque d'endettement ne résulte pas de l'engagement de caution dont on a pu constaté ci-dessus qu'il n'était pas disproportionné par rapport au patrimoine immobilier et mobilier des intéressés, mais de la poursuite de l'activité de la SARL BOOST 2 ROUES au regard de ses faibles performances.

Néanmoins, la banque peut avoir manqué à son devoir de mise en garde, indépendamment du principe de proportionnalité, et peut voir sa responsabilité retenue sur le fondement de l'article 1147 de l'ancien Code'civil devenu l'article'1231-1 du Code civil.Le dommage résultant d'un tel manquement consiste en une perte de chance de ne pas contracter. Reste que la faute de la banque doit être caractérisée.

La lettre incriminée datée du 12 mars 2010 qui consiste à exposer les conditions requises par la banque pour l'octroi du prêt litigieux, comprenant l'engagement de caution solidaire des époux [Q] où il y est indiqué que cette proposition répond à une demande de prêt de ceux-ci et n'est valable que pendant 10 jours, ne permet pas de caractériser de manoeuvres fautives de la banque qui laisse au contraire, les époux [Q] libres de consentir ou non à ses propositions. La banque, contrairement aux allégations des appelants, ne peut donc être convaincue d'avoir 'totalement incité' les époux [Q] à signer la vente de leur bien immobilier.

En outre, les époux [Q] ne peuvent prétendre n'avoir trouvé aucun intérêt dans la vente de leur maison puisque cette transaction leur a permis de recouvrer une trésorerie pour poursuivre leur activité commerciale.

Il sera ajouté qu'au regard des exigences et des garanties prises par la banque : remboursement des prêts en cours, privilège de prêteur de deniers, nantissement d'un contrat d'assurance-vie souscrit au CIC et cautions solidaire des époux [Q], ceux-ci ne pouvaient pas ne pas être alertés des risques que comportait le montage financier qui leur était proposé et qui, c'est écrit 'noir sur blanc' correspondait à une demande de leur part.

Par ailleurs, ils ne pouvaient ignorer, sauf à faire preuve d'une négligence coupable, les difficultés financières que rencontrait la SARL BOOST 2 ROUES qu'ils évoquent eux mêmes dans leurs écritures : une diminution des bénéfices de 25 361 € en 2006 à 2 529 € en 2009, le déficit d'exploitation de 64 546 € à la fin de l'exercice 2009, le compte déficitaire de la société et enfin une diminution de la cotation de la Banque de France.

Aucun manquement au devoir de mise en gade, aucune faute ne peut donc être retenue à l'encontre du CIC et le jugement sera donc confirmé, les époux [Q] étant condamnés aux dépens.

M. et Mme [Y] et [D] [Q] qui succombent seront condamnés aux dépens. L'équité justifie de laiser à chacun la charge de ses frais irrépétibles.

Les autres dispositions du jugement qui ne sont pas critiquées doivent être confirmées.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Vu l'article 700 du Code de procédure civile, rejette les demandes formées par les parties,

Rejette toute autre demande,

Condamne M. et Mme [Y] et [D] [Q] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Patricia GRASSO, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 17/04671
Date de la décision : 14/03/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 16, arrêt n°17/04671 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-14;17.04671 ?
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