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13/03/2019 | FRANCE | N°16/04339

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 13 mars 2019, 16/04339


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 13 MARS 2019



N° RG 16/04339 - N° Portalis DBV3-V-B7A-Q7RK



AFFAIRE :



SARL AMILCAR





C/

[M], [A] [Z]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Septembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CERGY-PONTOISE

Section : I

N° RG : F15/00585



Expé

ditions exécutoires

Expéditions



délivrées le :

à :

Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA



Me Carole DUTHEUIL de la SCP EVODROIT





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE TREIZE MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La co...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 13 MARS 2019

N° RG 16/04339 - N° Portalis DBV3-V-B7A-Q7RK

AFFAIRE :

SARL AMILCAR

C/

[M], [A] [Z]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Septembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CERGY-PONTOISE

Section : I

N° RG : F15/00585

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA

Me Carole DUTHEUIL de la SCP EVODROIT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TREIZE MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SARL AMILCAR

N° SIRET : 335 09 1 2 111

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : Me Joëlle BERENGUER GUILLON de la SELEURL SOCIALEX, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0524 - Représentant : Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619

APPELANTE

****************

Monsieur [M] [Z]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 2] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Carole DUTHEUIL de la SCP EVODROIT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 13 -

INTIMÉ

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Janvier 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Luc LEBLANC, Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,

FAITS ET PROCÉDURE :

M. [M] [Z] a été embauché selon deux contrats de travail à durée déterminée pour la période du 19 mars au 20 juillet 2012 puis pour la période du 17 septembre au 18 janvier 2013, en qualité de dessinateur-projeteur par la société Amilcar ayant une activité d'aménagement de véhicules utilitaires.

À compter du 19 janvier 2013, M. [Z] a été embauché dans un même emploi selon contrat de travail à durée indéterminée.

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale de la métallurgie.

À compter du 8 avril 2015, M. [Z] a été placé en arrêt de travail pour maladie.

Par lettre du 15 avril 2015, la société Amilcar a convoqué M. [Z] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique.

Par lettre du 11 mai 2015, la société Amilcar a notifié à M. [Z] son licenciement pour motif économique et impossibilité de reclassement, après que ce dernier a refusé un contrat de sécurisation professionnelle.

Le 10 août 2015, M. [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise pour demander notamment la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée, contester son licenciement et demander la condamnation de son employeur à lui verser diverses sommes.

Au moment de la rupture du contrat de travail, la société Amilcar employait habituellement au moins 11 salariés et la rémunération moyenne mensuelle de M. [Z] s'élevait à 2 495,70 euros brut.

Par un jugement du 6 septembre 2016, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, moyens et prétentions des parties, le conseil de prud'hommes (section industrie) a :

- dit que le licenciement de M. [Z] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société Amilcar à payer à M. [Z] les sommes suivantes :

* 5 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

* 29'948,40 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 2 495,70 euros net à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;

* 7 487,10 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 748,71 euros brut au titre des congés payés afférents ;

* 1 500 euros net à titre de dommages-intérêts pour non délivrance des documents sociaux ;

* 1 000 euros net au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation par la partie défenderesse en ce qui concerne les créances salariales et à compter du jugement en ce qui concerne les créances indemnitaires ;

- ordonné à la société Amilcar de remettre à M. [Z] un certificat de travail, une attestation pour Pôle emploi et un solde de tout compte, conformes au jugement ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement en application de l'article 515 du code de procédure civile ;

- mis les dépens à la charge de la société Amilcar.

Le 30 septembre 2016, la société Amilcar a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 22 mai 2017, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société Amilcar demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [Z] de ses demandes, l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau, de :

- à titre principal, dire le licenciement valide et fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouter M. [Z] de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, limiter le montant de l'indemnité pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse à la somme de 14'974 euros, correspondant à six mois de salaire ;

- en tout état de cause, ordonner le remboursement des sommes perçues au titre de l'exécution du jugement de première instance, et condamner M. [Z] à lui verser une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Minault Patricia, représentée par Me Patricia Minault en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Aux termes de ses conclusions du 31 janvier 2018, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [Z] demande à la cour de :

1°) confirmer le jugement sur l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents,

2°) infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau, de :

- ordonner la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et condamner la société Amilcar à lui verser une somme de 2 495,70 euros à titre d'indemnité de requalification ;

- dire le licenciement nul ou, à titre subsidiaire, dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamner la société Amilcar à lui verser les sommes suivantes :

* 10'000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

* 44'922,60 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ou, subsidiairement 29'948,40 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive dans la remise des documents de fin de contrat ;

* 10'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour défaut de rémunération supplémentaire pour les inventions réalisées pour la société ;

- dire que les intérêts au taux légal courent à compter de la demande ;

- ordonner à la société Amilcar de lui remettre un certificat de travail, une attestation pour Pôle emploi et un solde de tout compte conformes à l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document à compter de la notification ;

- condamner la société Amilcar à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 21 novembre 2018.

SUR CE :

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée :

Considérant que M. [Z] soutient que ses deux contrats à durée déterminés initiaux avaient pour objet de pourvoir un emploi relevant de l'activité normale et permanente de la société Amilcar ; qu'il demande donc, en faisait valoir que ses demandes sont recevables, la requalification de ses contrats en un contrat à durée indéterminée et l'allocation d'une indemnité de requalification ;

Que la société Amilcar soulève une fin de non-recevoir tirée de la prescription de ces demandes et à titre subsidiaire conclut au débouté ;

Considérant, sur la prescription des demandes, qu'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa version issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'il résulte du V. de l'article 21 de cette même loi que ces dispositions s'appliquent à la prescription quinquennale en cours à compter de sa date de promulgation, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ;

Qu'en l'espèce, M. [Z] ayant connu le 18 janvier 2013, au terme de son second contrat à durée déterminée, l'irrégularité qu'il invoque et ayant saisi le conseil de prud'hommes le 10 août 2015, son action en requalification, qui courrait jusqu'au 14 juin 2015 par application des dispositions mentionnées ci-dessus, est donc prescrite ; qu'il y a ainsi lieu de déclarer irrecevables les demandes de M. [Z] ; que le jugement, qui déboute M. [Z] au fond, sera infirmé pour ce motif ;

Sur les dommages et intérêts pour harcèlement moral :

Considérant que M. [Z] soutient qu'il a été victime d'agissements répétés de harcèlement moral 'avec l'intégration de M. [P], fils du dirigeant la société' constitué par des propos incorrects, le retrait des collaborateurs l'assistant dans son travail, des brimades, un ton vexatoire, des ordres et contre-ordres, une volonté de diviser l'équipe et de le mettre écart, une pression continuelle, des reproches incessants, des propos agressifs et humiliants au cours de réunions avec la direction, une accusation lors d'une réunion du 7 avril 2015 qu'il est responsable de tous les dysfonctionnements de la société et le fait d'avoir vidé son bureau de tous ses dossiers papier après le début de son arrêt de travail du 8 avril 2015 ; que ces faits, sont à l'origine de son syndrome dépressif réactionnel ; qu'il réclame en conséquence l'allocation d'une somme de 10'000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Que la société Amilcar conclut au débouté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié établit des faits précis et concordants qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Qu'en l'espèce, M. [Z] ne verse aucune pièce venant établir la réalité des propos, brimades et agissements divers qu'il impute à son employeur ;

Qu'ensuite, s'agissant du fait d'avoir retiré ses dossiers papier de son bureau après le début de son arrêt travail du 8 avril 2015, les photographies versées aux débats, qui ne comportent aucune date, n'établissent pas la réalité de ce fait ;

Qu'enfin, s'agissant de la dégradation de l'état de santé, les documents médicaux versés aux débats soit ne font état d'aucun lien de causalité entre le syndrome dépressif relevé et les conditions de travail de M. [Z], soit se bornent à reprendre ses dires quant à l'existence d'une 'souffrance au travail' et d'un lien de causalité entre l'état de santé et ses conditions de travail (à l'instar du dossier du médecin du travail), soit relient abusivement son état de santé à ses conditions de travail en l'absence de toute constatation personnelle des médecins relatives aux conditions de travail de l'intéressé au sein de la société Amilcar ;

Qu'il résulte donc de ce qui précède que M. [Z] n'établit pas des faits précis et concordants qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'il convient donc de le débouter de sa demande de dommages-intérêts ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur la validité du licenciement :

Considérant que M. [Z] soutient que son licenciement est nul aux motifs qu'il 'a été victime de harcèlement moral' et que la rupture est en réalité fondée sur son état de santé ;

Que la société Amilcar soutient que le licenciement repose bien sur une cause économique réelle et sérieuse et n'est pas entaché de nullité ;

Considérant, sur la discrimination liée à l'état de santé, qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu'en application de l'article L. 1134-1, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Qu'en l'espèce, M. [Z] se borne à alléguer que son licenciement est fondé sur son état de santé, sans établir aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une telle discrimination ;

Considérant ensuite qu'aucun harcèlement moral ne ressort en tout état de cause des débats ainsi qu'il a été dit ci-dessus ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. [Z] n'est pas fondé à invoquer la nullité de son licenciement et à réclamer des dommages-intérêts pour licenciement nul ; qu'il y a donc lieu de le débouter de ses demandes ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences :

Considérant que M. [Z] soutient à titre subsidiaire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse aux motifs que les difficultés économiques invoquées par l'employeur ne sont pas établies et en tout état de cause ne justifient pas la suppression de son poste, que 's'agissant d'un groupe, il est tenu compte des résultats de l'ensemble des sociétés', que la lettre de licenciement ne précise pas l'incidence sur son emploi du motif invoqué, que des embauches ont eu lieu après son licenciement, qu'aucune recherche de reclassement n'a été effectuée et qu'aucune précision n'est donnée sur les critères d'ordre des licenciements ;

Que la société Amilcar soutient que les difficultés économiques invoquées sont établies et justifient la suppression du poste de M. [Z] ; que l'obligation de reclassement a été remplie ; qu'elle en conclut que le licenciement pour motif économique est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Considérant en premier lieu, s'agissant de la motivation de la lettre de licenciement, que contrairement à ce que soutient M. [Z], celle-ci précise bien que les difficultés économiques invoquées aboutissent à la suppression de son poste ;

Considérant en deuxième lieu, s'agissant de la réalité des difficultés économiques, qu'en application de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise ou, dans certaines conditions, à une cessation d'activité ; que lorsque l'entreprise appartient à un groupe, les difficultés économiques ou la nécessité de sauvegarde de la compétitivité s'apprécient au niveau du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise ;

Qu'en l'espèce, M. [Z] fait valoir au détour d'une phrase de ses conclusions que 's'agissant d'un groupe, il est tenu compte des résultats de l'ensemble des sociétés', sans désigner là où les autres entités devant être prises en considération, ni même alléguer aucun fait se rapportant à l'existence d'un groupe ;

Qu'ensuite, il ressort des pièces versées aux débats, et notamment des comptes de résultat de la société Amilcar, que, à la suite d'une baisse de commandes de son principal client, le chiffre d'affaires de cette société était au moment du licenciement en baisse significative passant d'environ 2,85 millions d'euros au 30 avril 2014 à 2,47 millions d'euros au 30 avril 2015, que le résultat courant avant impôts est passé d'environ +166'000 euros au 30 avril 2014 à -48 598 euros au 30 avril 2015 et que le résultat comptable est passé de +124 293 euros au 30 avril 2014 à -5 037 euros au 30 avril 2015 ; que le résultat net de la société Amilcar au 30 avril 2016 s'est encore dégradé avec une perte de 103 425 euros ; que la réalité et l'ampleur des difficultés économiques ainsi rencontrées par la société Amilcar justifiaient la suppression du poste de M. [Z] ;

Considérant en troisième lieu s'agissant de l'obligation de reclassement, qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du même code, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente ou à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure, ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ; qu'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible, à l'époque du licenciement, dans l'entreprise, ou s'il y a lieu dans le groupe auquel elle appartient ;

Qu'en l'espèce, la société Amilcar justifie par la production du registre des entrées et sorties du personnel qu'elle employait seize personnes au moment du licenciement, que M. [Z] était le seul dessinateur-projeteur de l'entreprise et qu'aucun poste n'était disponible dans l'entreprise au moment du licenciement ;

Considérant enfin que les moyens soulevés par M. [Z] de prouver que ces agissements tirés d'embauches postérieures à son licenciement et notamment d'une embauche de M. [I] en qualité de technico-commercial le 9 novembre 2015, ainsi que le moyen tiré d'une 'absence de précision concernant les critères d'ordre des licenciements' sont inopérants pour contester le bien-fondé du licenciement ;

Considérant qu'il résulte donc de ce qui précède que le licenciement de M. [Z] est fondé sur une cause réelle et sérieuse contrairement à ce qu'a estimé le conseil de prud'hommes ; qu'il y a donc lieu de débouter le salarié de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ces points ;

Sur les dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement :

Considérant que s'il est constant que la lettre de convocation à entretien préalable au licenciement indique que la liste des conseillers susceptible de l'assister pendant l'entretien préalable est consultable à la mairie de [Localité 1], siège de la société, et non à la mairie de [Localité 3], domicile de M. [Z], ce dernier ne justifie d'aucun préjudice résultant de cette irrégularité en application des règles du droit commun de la responsabilité civile ; qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande de dommages-intérêts à ce titre ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive dans la remise des documents de fin de contrat :

Considérant qu'en tout état de cause, M. [Z] ne justifie d'aucun préjudice à ce titre ; qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande de dommages-intérêts ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur les dommages-intérêts pour défaut de rémunération supplémentaire pour les inventions :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa du 1 de l'article L. 611-7 du code du travail, les inventions faites par le salarié dans l'exécution soit d'un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, soit d'études et de recherches qui lui sont explicitement confiées, appartiennent à l'employeur et les conditions dans lesquelles le salarié, auteur d'une telle invention, bénéficie d'une rémunération supplémentaire sont déterminées par les conventions collectives, les accords d'entreprise et les contrats individuels de travail ;

Qu'en l'espèce, M. [Z] n'établit pas être l'auteur des quatre inventions qu'il revendique ; qu'il ne justifie au surplus pas de la réalité et de l'étendue du préjudice qu'il invoque à ce titre ; que le débouté de cette demande de dommages et intérêts sera donc confirmé ;

Sur la remise de documents sociaux rectifiés :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris sur ce point et de débouter M. [Z] de sa demande ;

Sur la restitution par M. [Z] des sommes versées au titre de l'exécution provisoire :

Considérant qu'il y a lieu de rappeler que le présent arrêt infirmatif constitue pour la société Amilcar un titre suffisant pour demander à M. [Z] la restitution des sommes versées en exécution du jugement attaqué ; que sa demande est donc sans objet ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris sur ces deux points ; que M. [Z], partie succombante, sera débouté de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel et sera condamné à verser à la société Amilcar une somme de 2 000 euros à ce titre ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL Minault Patricia, représentée par Me Patricia Minault ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il déboute M. [M] [Z] de ses demandes indemnitaires pour licenciement nul et pour défaut de rémunération supplémentaire pour ses interventions,

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

Déclare prescrite la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et la demande d'indemnité de requalification formées par M. [M] [Z],

Dit que le licenciement de M. [M] [Z] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [M] [Z] de l'ensemble de ses demandes,

Condamne M. [M] [Z] à verser à la société Amilcar une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel,

Condamne M. [M] [Z] aux dépens de première instance et d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL Minault Patricia, représentée par Me Patricia Minault.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Luc LEBLANC, président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 16/04339
Date de la décision : 13/03/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°16/04339 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-13;16.04339 ?
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