COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88B
5e Chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 21 FEVRIER 2019
N° RG 18/01537
N° Portalis DBV3-V-B7C-SHZ5
AFFAIRE :
SAS LE PARC ZOOLOGIQUE ET DE LOISIRS DE THOIRY
C/
MSA ILE DE FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01Février 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES
N° RG : 16-00059/V
Copies exécutoires délivrées à :
la SCP REYNAUD ASSOCIES
MSA ILE DE FRANCE
Copies certifiées conformes délivrées à :
SAS LE PARC ZOOLOGIQUE ET DE LOISIRS DE THOIRY
le :
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SAS LE PARC ZOOLOGIQUE ET DE LOISIRS DE THOIRY
[...]
[...]
représentée par Me Hélène LAFONT-GAUDRIOT de la SCP REYNAUD ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 177 - N° du dossier 360007 substituée par Me Audrey GAILLARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 59 - N° du dossier 360007
APPELANTE
****************
MSA ILE DE FRANCE
[...]
[...]
représentée par Mme I... U... (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Décembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Caroline BON, Vice présidente placée chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Olivier FOURMY, Président,
Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,
Madame Caroline BON, Vice présidente placée,
Greffier, lors des débats : Madame Florence PURTAS,
La mutualité sociale agricole d'Ile-de-France (ci-après, la MSA ou la Caisse) a procédé à un contrôle au sein de la société Le Parc Zoologique et de Loisirs de Thoiry SAS (ci-après, la Société) les 4 et 9 décembre 2014 sur le site du [...] et portant sur l'assiette des salaires, les rémunérations versées et les déclarations sociales effectuées pour les années 2012 et 2013.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 25 juin 2015, les anomalies constatées ont été signifiées avec des bordereaux rectificatifs joints aux fins de payer des rappels de cotisations.
Par lettre recommandée envoyée le 27 juillet 2015 avec avis de réception, la Société a contesté ce document de fin de contrôle principalement sur le chef de redressement concernant les frais de transport d'un montant principal de 80193,25euros.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 août 2015, l'agent de contrôle de la MSA a apporté les justifications réclamées et précisé le fondement juridique du redressement, lequel a donc été confirmé.
A l'issue de ces échanges, la MSA a maintenu sa position et les cotisations redressées ont été mises en recouvrement par mise en demeure du 25 août 2015, outre la somme de 2368,87euros au titre des majorations de retard.
Le 15septembre2015, la société a saisi la commission de recours amiable afin de contester la validité de la procédure de contrôle et le chef de redressement relatif aux remboursements des frais de transport consentis aux salariés sur la base des frais réels.
La Société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines (ci-après, le TASS) de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable. Le recours a été enregistré au greffe sous le numéro 16-00059/V.
Par décision du 5 avril 2016, la commission de recours amiable a confirmé la décision de la MSA. La Société a saisi le TASS d'un recours contre cette décision. L'affaire a été enregistrée au greffe sous le numéro 16-01139/V.
Par jugement en date du 1er février 2018, le TASS a :
- ordonné la jonction des instances enregistrées au greffe sous le n° 16-00059/V et sous le n° 16-01139/V ;
- déclaré régulière la procédure de contrôle opérée par les agents de contrôle de la MSA et la mise en demeure ;
- débouté la société de l'ensemble de ses demandes ;
- reçu la MSA en sa demande reconventionnelle ;
- en conséquence, condamné la Société à verser à la MSA la somme de 80193,25 euros augmentée des majorations de retard de 2368,87euros ;
- rejeté la demande de la Société au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 16 mars 2018, la Société a interjeté appel de cette décision et les parties ont été convoquées à l'audience de la cour du 17 décembre 2018.
La Société, reprenant oralement ses écritures, demande à la cour de :
- la recevoir en son appel et l'y déclarer bien fondée ;
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et, statuant à nouveau,
- dire et juger nul le document de fin de contrôle établi par la MSA le 25juin2015 et annuler par voie de conséquence le redressement subséquent et notamment la mise en demeure du 25août2015 ;
- à titre très infiniment subsidiaire, les plus larges délais de paiement conformément aux dispositions de l'article 1343-5 du code civil ;
- condamner en tout état de cause la MSA à lui verser la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article700 du code de procédure civile.
La MSA, réitérant à l'oral ses conclusions, sollicite de la cour qu'elle la reçoive en ses écritures, déboute la Société de son recours et confirme en tous points le jugement dont appel.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Sur la procédure de contrôle
La Société dénonce le caractère incomplet du document de fin de contrôle, outre le fait qu'il comporte des mentions erronées et/ou insuffisantes. Elle en déduit que l'objet exact du contrôle et la nature du redressement envisagés ne sont pas suffisamment précis, que la liste des documents consultés n'est pas complète, que la période vérifiée est erronée ainsi que les dates de contrôle et de fin de contrôle et que le mode de calcul des redressements n'est pas précisé. La Société ajoute que les irrégularités du document de fin de contrôle ne peuvent pas être rectifiées ultérieurement. L'appelante conclut que, de ce fait, elle s'est trouvée dans l'incapacité de répondre utilement aux observations de la Caisse et que la procédure de contrôle et la mise en demeure subséquente sont manifestement irrégulières.
La société reproche ensuite à la MSA d'avoir privé le redressement de base légale en se fondant sur des dispositions législatives et réglementaires erronées visant les frais de transport en commun et non les frais de transport personnels.
La MSA répond que le document de fin de contrôle litigieux est conforme aux exigences textuelles et mentionne la période contrôlée, la nature de chaque redressement opéré, les bases réintégrées par année, le taux de cotisations appliqué et le montant des cotisations en résultant, mettant ainsi la Société en mesure de connaître la nature, la cause et l'étendue de ses obligations. Elle affirme que le principe du contradictoire et les droits de la défense ont été respectés.
Sur ce,
L'article R. 724-9 du code rural et de la pêche maritime dispose que
A l'issue du contrôle, la caisse de mutualité sociale agricole adresse aux personnes contrôlées, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa réception, un document rappelant l'objet du contrôle et mentionnant les documents consultés, la période vérifiée et la date de fin de contrôle et, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature et du mode de calcul des redressements d'assiette et de taux envisagés, ainsi que des éventuelles majorations et pénalités prévues aux articles L. 725-25 du présent code et des articles L. 243-7-6 et L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale, ou du montant des prestations à reverser, tels que connus à cette date.
En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, ce document précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale.
Les agents mentionnés à l'article L. 724-7 peuvent également remettre en mains propres, contre récépissé, en lieu et place de la caisse et en informant celle-ci, le document prévu aux deux alinéas précédents, qu'ils datent et signent. Le récépissé est signé par la personne contrôlée.
Celle-ci dispose d'un délai de trente jours pour faire part de sa réponse à ces observations à la caisse de mutualité sociale agricole.
Le recouvrement des prestations indues, des cotisations, des pénalités et des majorations ne peut intervenir qu'au terme du délai prévu à l'alinéa précédent.
Ces formalités, dont la preuve de l'accomplissement incombe à l'organisme social, sont substantielles et destinées à assurer la sauvegarde des droits de la défense dont l'omission entraîne la nullité de la procédure subséquente.
En l'espèce, alors que la Société avait reçu un avis de passage daté du 27octobre2014, la date du contrôle réalisé par la MSA ne peut être contestée même si le document de fin de contrôle comportait une erreur matérielle puisqu'il indiquait : 'début de contrôle : 04/12/2014" et 'fin de contrôle : 04/12/2014" et mentionnait ensuite un 'contrôlé réalisé le 09/12/2014". La Société a fait l'objet d'un seul contrôle et ne pouvait donc pas de se méprendre sur sa date. Elle n'a d'ailleurs pas commis d'erreur quant au contrôle effectué lorsqu'elle a contesté le document de fin de contrôle deux jours après l'avoir reçu.
S'il est vrai que la Caisse a ensuite commis une erreur sur la date du contrôle dans la mise en demeure, en se référant au 18 novembre 2014, la Société ne pouvait toujours pas se méprendre compte tenu des périodes visées et des sommes réclamées.
La période ayant fait l'objet du contrôle n'est pas erronée puisque les documents consultés concernaient bien les années 2012 et 2013. Le fait que la MSA ait ensuite choisi de n'opérer un redressement qu'au titre des 3ème et 4ème trimestres 2012 et 3ème et 4ème trimestres 2013 n'implique pas qu'une erreur sur la période vérifiée ait été commise.
S'agissant des documents consultés, alors que les documents sociaux et comptables consultés sont précisément détaillés, les agents de contrôle ont fait référence à des 'justificatifs de frais professionnels' dans la rubrique 'divers' sans donner le détail de l'ensemble de ces documents. Or, ceux-ci consistant nécessairement en de multiples documents relatifs aux véhicules et aux itinéraires empruntés par chacun des salariés de la Société, une liste exhaustive se serait avérée fastidieuse aussi bien qu'inutile étant relevé qu'aucun texte n'impose un tel degré de précision.
Ensuite, concernant le mode de calcul du redressement opéré, s'il n'est pas explicité dans le document de fin de contrôle qui mentionne uniquement le montant global des cotisations redressées, la cour constate qu'à ce même document étaient joints des bordereaux rectificatifs d'appel de cotisations qui ne sont pas produits aux débats par la Société et l'empêche ainsi de vérifier que ces éléments n'y figuraient pas. Au contraire, il résulte de la lecture attentive du courrier d'observations de la Société à la suite de la réception du document de fin de contrôle que des tableaux étaient effectivement joints même si la Société regrettait déjà que leur lecture et leur compréhension soit difficile.
Enfin, la Caisse n'a pas commis d'erreur de base légale en visant l'article R. 3261-5 du code du travail pour procéder au redressement même si ce texte est visé à la section 1 relative à la prise en charge des frais de transports publics en ce que s'il est constant que le siège de la Société n'est pas desservi par les transports en commun, l'article R. 3161-11 issu de la section 2 relative à la prise en charge des frais de transports personnels fait expressément référence à la section précédente.
Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu'en l'absence d'irrégularité, la procédure de contrôle et la mise en demeure subséquente étaient régulières.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur les frais de transport
La Société plaide que lorsque le salarié est contraint d'utiliser son véhicule personnel pour effectuer le trajet domicile/lieu de travail en raison de difficultés d'horaires ou de l'inexistence de transports en commun, l'employeur peut soit lui verser une prime de transport dont le montant est exonéré de cotisations dans la limite de 200 euros par an, soit lui rembourser les frais réellement exposés, soit opter pour le versement d'indemnités kilométriques. S'il opte pour ce dernier cas, les indemnités kilométriques sont alors exclues de l'assiette des cotisations sociales si leur montant n'excède pas les limites des barèmes annuellement publiés par l'administration fiscale. Elle rappelle que l'arrêté du 20 décembre 2002 édicte une présomption d'utilisation conforme à l'objet de l'indemnité kilométrique lorsque son montant ne dépasse pas les limites fixées par les barèmes, et ce sans qu'il soit nécessaire de produire des pièces justificatives.
Sur le montant du redressement, l'appelante reproche à la MSA d'avoir procédé à une appréciation globale, imprécise et arbitraire.
La Caisse réplique que si l'employeur opte pour le versement d'indemnités kilométriques, il doit démontrer qu'il s'agit pour le salarié d'une dépense supplémentaire par rapport à la vie courante et liée à l'exécution de son travail ; si tel n'est pas le cas, l'indemnité versée par l'employeur constitue un complément de salaire soumis à cotisations. La MSA soutient que le trajet domicile/lieu de travail reste un trajet personnel du salarié qui ne présente pas le caractère spécial d'un déplacement professionnel constitutif d'une charge inhérente au travail et que les sommes ainsi versées doivent être réintégrées dans l'assiette des cotisations. Elle ajoute que l'employeur doit justifier des éléments justifiant sa prise en charge de tout ou partie des frais de carburant ou d'alimentation électrique d'un véhicule.
Sur ce,
Les déplacements du domicile au lieu de travail ne constituent pas des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi, mais des dépenses personnelles. Dans ce cas, la prise en charge des indemnités de transport ne peut être exonérée qu'à concurrence du tarif du transport en commun le plus économique.
Par contre, ces remboursements correspondent à de frais professionnels si l'utilisation du véhicule personnel résulte de difficultés d'horaires ou de l'inexistence de transports en commun, ce qui est le cas en l'espèce. Il faut alors que l'éloignement de la résidence du salarié et l'utilisation du véhicule personnel ne relèvent pas d'une convenance personnelle. L'employeur doit apporter des justificatifs relatifs au moyen de transport utilisé par le salarié, à la distance séparant le domicile du lieu de travail, à la puissance fiscale du véhicule et au nombre des trajets effectués chaque mois. Le salarié doit en outre attester qu'il ne transporte pas dans son véhicule une autre personne de la même entreprise bénéficiant des mêmes indemnités.
Les salariés de la Société ne pouvant utiliser les transports en commun pour se rendre sur leur lieu de travail, ils n'utilisent pas leur véhicule personnel par convenance personnelle et le principe du remboursement par l'employeur des frais correspondant est justifié.
Mais, la Société n'a pas apporté les justificatifs exigés au cours du contrôle ni au cours de toute la procédure qui s'en est suivie.
Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que, dans ces conditions, la réintégration des sommes injustement déduites devaient être réintégrées dans l'assiette des cotisations.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé.
Sur la demande de délais de paiement
La Société ne développe aucune argumentation à l'appui de cette demande.
La Caisse n'y répond pas.
Sur ce,
La Société ne justifie pas avoir saisi la Caisse aux fins d'obtenir des délais de paiement et justifie encore moins des motifs de cette demande.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
La Société succombant, il convient de la débouter de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par décision contradictoire :
Confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines en date du 1erfévrier2018 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Rejette la demande de délais de paiement de la société Le Parc Zoologique et de Loisirs de Thoiry SAS ;
Déboute la société Le Parc Zoologique et de Loisirs de Thoiry SAS de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que la procédure est exempte de dépens.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Florence Purtas, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,