COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 89A
5e Chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 31 JANVIER 2019
N° RG 17/03522
N° Portalis DBV3-V-B7B-SK2W
AFFAIRE :
[P] [N]
C/
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES HAUTS DE SEINE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 23 Janvier 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE
N° RG : 15-02225
Copies exécutoires délivrées à :
la SELARL INTER-BARREAUX LEPORT & ASSOCIES
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES HAUTS DE SEINE
Copies certifiées conformes délivrées à :
[P] [N]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TRENTE ET UN JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [P] [N]
[Adresse 1]
[Localité 1]
comparant en personne, assisté de Me Ludovic TARDIVEL de la SELARL INTER-BARREAUX LEPORT & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 539 substituée par Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 89
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/004928 du 12/06/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
APPELANT
****************
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES HAUTS DE SEINE
Contentieux Général et Technique
[Adresse 2]
représentée par Mme [E] [Y] en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Novembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Caroline BON, Vice présidente placée chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Olivier FOURMY, Président,
Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,
Madame Caroline BON, Vice présidente placée,
Greffier, lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,
M. [P] [N] était assistant administratif et exerçait pour le compte de l'établissement public local d'enseignement Collège [I] [B] à [Localité 2] (92) depuis le 2 novembre 2013.
Le 29 janvier 2015, M. [N] a déclaré avoir été victime d'un accident de travail survenu le 15 novembre 2013 à 08 heures 30 dans les circonstances suivantes : 'A l'[Localité 3] maternelle [Établissement 1], à la demande du bras droit de la directrice Mme [A], il a fallu que je déplace de lourds cartons contenant des jouets métalliques à monter, cela a duré plusieurs jours, afin de débarrasser le bureau dans lequel je devais travailler. Ces cartons étaient présents depuis septembre 2013". Il était précisé 'siège des lésions : bas du dos, rachis lombaire (Tronc)' et 'nature des lésions : Hernie discale (opérée le 20 janvier 2015)'. M. [N] désignait Mme [F] [E], Directrice, comme témoin avec la mention 'Directrice ne s'est pas sentie concernée'.
Y était joint un certificat médical initial du 18 novembre 2013 constatant une 'lombosciatique aigue G'.
Le 4 mars 2015, Mme [S], Prinipal du collège [I] [B], remplissait un formulaire de déclaration en indiquant que la victime exerçait des 'activités administratives' et, après avoir précisé sur la nature de l'accident que 'nous avons été informés par courrier daté du 16 juin 2014", émettait les réserves suivantes : 'nous n'avons pas été informés des circonstances de l'événement déclaré par le salarié par son courrier du 16 juin 2014".
Une enquête administrative était diligentée par la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (ci-après, la CPAM). Le 2 mars 2015, la caisse informait M. [N] qu'un délai complémentaire d'instruction était nécessaire.
Par courrier en date du 30 avril 2015, la caisse a informé M. [N] de son refus de prendre en charge l'accident du 15 novembre 2013 dans le cadre de la législation relative aux risques professionnels pour le motif suivant : 'l'existence d'un fait accidentel survenu par le fait du travail ou à l'occasion du travail n'est pas établi. Le 15/11/2013, jour de votre accident, vous avez travaillé à l'école [Établissement 2] à [Localité 4], où vous avez effectué normalement vos tâches administratives habituelles. Les faits invoqués sur la déclaration d'accident de travail, se sont déroulés à l'école [Établissement 1], les jours précédant la date de l'accident de travail du 15/11/2013".
Le 11 mai 2015, M. [N] a saisi la commission de recours amiable d'une requête en contestation qui, par décision du 24 septembre 2015, a confirmé le refus de la CPAM de prendre en charge l'accident au titre de la législation professionnelle.
Par jugement en date du 23 janvier 2017, le TASS des Hauts-de-Seine a confirmé la décision de la commission de recours amiable du 9 septembre 2015 en ce qu'elle a confirmé la décision de refus par la CPAM de prendre en charge l'accident du 15 novembre 2013 au titre de la législation professionnelle et débouté les parties de leurs plus amples demandes.
Le 12 juillet 2017, M. [P] [N] a interjeté appel de cette décision et les parties ont été convoquées à l'audience de la cour du 26 novembre 2018.
M. [P] [N], reprenant oralement ses écritures, demande à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 janvier 2017 par le TASS des Hauts-de-Seine ;
- statuant à nouveau, dire que le fait survenu le 15 novembre 2013 et ses conséquences bénéficient du régime légal applicable aux risques professionnels ;
- à titre subsidiaire, ordonner l'audition de Mme [E] sous la responsabilité de laquelle M. [N] était placé ;
- en tout état de cause, condamner la CPAM à verser la somme de 1 500 euros entre les mains de Maître Abdelaziz Mimoun, Avocat, par application des dispositions de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle en cause d'appel ;
- condamner la CPAM aux entiers dépens.
La CPAM, réitérant à l'oral ses conclusions, demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le TASS le 23 janvier 2017 ;
- y ajoutant, dire et juger que la caisse a parfaitement respecté les délais d'instruction ;
- en conséquence, rejeter la demande de prise en charge implicite de l'accident du travail dont M. [P] [N] prétend avoir été victime le 15 novembre 2013.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Sur la régularité de la procédure
M. [N] se prévaut d'une reconnaissance implicite de l'accident du travail par la caisse du fait de l'irrespect des délais visés aux articles R. 441-10 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale.
La caisse répond qu'elle a respecté les délais d'instruction.
Sur ce,
L'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale dispose que
La caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration d'accident ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration de maladie professionnelle pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie.
Il en est de même lorsque, sans préjudice de l'application des dispositions du chapitre Ier du titre IV du livre Ier et de l'article L. 432-6, il est fait état pour la première fois d'une lésion ou d'une maladie présentée comme se rattachant à un accident du travail ou maladie professionnelle.
Sous réserve des dispositions de l'article R 441-14, en l'absence de décision de la caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.
Aux termes de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige,
Hors les cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droit et de l'employeur, préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief.
En cas de réserves de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse, envoie avant décision à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.
La victime adresse à la caisse la déclaration de la maladie professionnelle dont un double est envoyé par la caisse à l'employeur. L caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail. La même procédure s'applique lorsque la déclaration de l'accident, en application du deuxième alinéa de l'article L. 441-2, n'émane pas de l'employeur. Le double de la demande de reconnaissance de la rechute d'un accident du travail déposé par la victime est envoyé par la caisse primaire à l'employeur qui a déclaré l'accident dont la rechute est la conséquence.
En l'espèce, il ressort des échanges de correspondances entre la CPAM et M. [N] que la caisse a été en possession de la déclaration d'accident du travail et du certificat médical initial le 2 février 2015. C'est donc à partir de cette date qu'a commencé à courir le délai de trente jours pour la caisse pour rendre sa décision.
Ainsi qu'elle en a la possibilité, la CPAM a indiqué à l'assuré par courrier du 2 mars 2015 que l'instruction de sa demande nécessitait un délai d'instruction complémentaire de deux mois. Elle disposait donc d'un délai jusqu'au 2 mai 2015.
Bien que le courrier du 2 mars 2015 ait été reçu plus tard par M. [N], seule la date d'établissement du courrier est à prendre en considération pour l'interruption du délai, la caisse ne pouvant se voir opposer le délai de prise en charge par la Poste.
Il en résulte que la CPAM a respecté les délais de la procédure d'instruction.
Sur le caractère professionnel de l'accident
M. [N] affirme apporter la preuve du lien de causalité entre l'accident et le travail et précise que le port de charges lourdes est à l'origine de la pathologie dont il souffre. L'enquête réalisée par la caisse ne permet pas de contredire ses déclarations.
La caisse soutient également que sa décision de refus de prise en charge est justifiée, M. [N] n'apportant pas la preuve de la matérialité d'un événement soudain survenu au temps et au lieu du travail.
Sur ce,
L'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose que
Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.
Constitue un accident du travail tout fait précis survenu soudainement au cours ou à l'occasion du travail et qui est à l'origine d'une lésion corporelle.
L'accident survenu alors que la victime se trouve au temps et sur les lieux de travail est présumé accident du travail parce que le travailleur est sous l'autorité et sous la surveillance de l'employeur, même s'il n'existe aucun lien direct entre l'accident et le travail. Du fait de la présomption, la victime n'a qu'à établir la matérialité des faits pour que son accident soit présumé être un accident du travail. Les déclarations de la victime ne suffisent pas à elles seules à établir le caractère professionnel de l'accident.
En cas de contestation de la caisse, il lui appartient de rapporter la preuve que l'accident avait une cause entièrement étrangère au travail.
Les juges apprécient souverainement la matérialité des faits.
En l'espèce, avant même de rechercher si les lésions dont souffre la victime sont ou non en lien avec l'accident du travail qu'il allègue, il convient de vérifier la réalité du fait accidentel en lui-même.
La cour ne peut que constater que M. [N] a tardivement déclaré avoir été victime d'un accident du travail.
Mais, de façon constante tout au long de la procédure jusqu'à l'audience devant la cour, M. [N] a expliqué qu'il avait ressenti de vives douleurs le 15 novembre 2013 et que ces douleurs seraient en lien avec le port de charges lourdes effectué les jours précédents.
Il se déduit donc des seules déclarations de M. [N] que le 15 novembre 2013, il ne s'est produit aucun événement brutal et soudain ayant provoqué ses douleurs.
Force est également de constater qu'aucun témoin n'était présent et que M. [N] ne produit aucun élément objectif, aucune attestation, pour établir la réalité de ses allégations.
Quant à l'audition de Mme [E], qui est réclamée par M. [N], elle n'est pas de nature à éclairer la cour puisqu'elle aurait simplement recueilli les doléances de l'assuré quant à ses souffrances le 15 novembre 2013 sans être témoin d'un quelconque fait accidentel ce même jour.
Dès lors, M. [N] ne rapporte la preuve d'aucun événement brutal et soudain survenu au temps et au lieu du travail le 15 novembre 2013.
Sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident du 15 novembre 2013 sera rejetée et le jugement sera confirmé.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
M. [N] succombant, il sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles.
La cour rappelle enfin que la procédure est exempte de dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement rendu le 23 janvier 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts-de-Seine en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Constate que la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine a respecté les délais de la procédure d'instruction ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes, plus amples ou contraires ;
Déboute M. [N] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
Rappelle que la présente procédure est exempte de dépens.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Florence Purtas, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,