COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 24 JANVIER 2019
N° RG 16/03696 -
N° Portalis DBV3-V-B7A-Q3UK
AFFAIRE :
[Z] [R]
C/
SAS KANTAR
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Juin 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST GERMAIN EN LAYE
Section activités diverses
N° RG : 15/00254
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Sylvie LE TOQUIN-MERSIN
la SELAFA B.R.L. Avocats
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [Z] [R]
[Adresse 1]
[Localité 1]
comparante en personne, assistée de Me Sylvie LE TOQUIN-MERSIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1813
APPELANTE
****************
SAS KANTAR
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Thomas GODEY de la SELAFA B.R.L. Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0305 substitué par Me Camille BRES
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Décembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Hélène PRUDHOMME, Président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Hélène PRUDHOMME, Président,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
Le 18 juin 1996, Mme [Z] [R] était embauchée par la SAS Kantar en qualité de rédactrice documentaliste par contrat à durée indéterminée à temps partiel. Elle était ensuite embauchée à temps complet à compter du 29 juillet 1996. Le contrat de travail était régi par la convention collective des bureaux d'études techniques (SYNTEC).
Elle était désignée déléguée syndicale CGT en 2000 jusqu'en février 2005.
Par lettre du 9 mars 2004 adressé à la DRH, Mme [R] se plaignait d'une surcharge de travail et l'interrogeait « s'agit-il d'un harcèlement, d'une entrave à l'exercice du droit syndical ou d'une mauvaise organisation de votre service ' ». Une enquête était alors initiée par la société laquelle ne révélait finalement aucun acte de harcèlement à son encontre. Par lettre du 14 juillet 2007, Mme [R] reprochait à son employeur « la façon d'appréhender l'exécution de mon contrat de travail puisqu'il s'inscrit très clairement dans un traitement discriminatoire ou à tout le moins anormal (changements de service, stagnation de carrière, mise à l'écart...) ». L'employeur n'apportait pas de réponse écrite.
Le 27 mars 2009, l'employeur la convoquait à un entretien préalable en vue de son licenciement. Cet entretien préalable se déroulait le 06 avril 2009. Le 09 avril 2009, il lui notifiait son licenciement pour insuffisance professionnelle.
Le 6 juin 2014, Mme [Z] [R] saisissait le conseil de prud'hommes de Paris pour contester le bien fondé de son licenciement. Elle sollicitait en outre la condamnation de son employeur pour harcèlement moral et discrimination. Le conseil de prud'hommes de Paris rendait un jugement le 10 avril 2015 se déclarant incompétent au profit du conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye. Mme [R] saisissait ce second conseil de prud'hommes le 27 mai 2015 des demandes précédentes.
Vu le jugement du 22 juin 2016 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye qui a :
- dit et jugé que l'action en contestation du licenciement est irrecevable, de même que l'action pour harcèlement moral ainsi que pour discrimination.
- laissé les éventuels dépens à la charge de Mme [Z] [R].
Vu la notification de ce jugement le 27 juin 2016.
Vu l'appel interjeté par [Z] [R] le 21 juillet 2016.
Vu les conclusions de l'appelante notifiées le 06 février 2017 et soutenues à l'audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, il est demandé à la cour d'appel de :
- condamner la société Kantar à régler à Mme [R] les sommes suivantes :
- 35 000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement
- 35 000 euros de dommages et intérêts pour discrimination syndicale
- 35 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure prud'homale et 3 000 euros pour la procédure d'appel
- Dépens
Vu les écritures de l'intimée la SAS Kantar notifiées le 03 avril 2017 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, il est demandé à la cour d'appel de :
A titre liminaire et principal :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Saint- Germain-en-Laye en date du 22 juin.
En conséquence :
- dire et juger irrecevable car prescrite l'action introduite par Mme [R] le 6 juin 2014
- débouter Mme [R] de l'intégralité de ses demandes.
A titre subsidiaire :
- constater que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
- constater que Mme [R] n'a subi aucun harcèlement moral ;
- constater que Mme [R] n'a subi aucune discrimination syndicale.
En conséquence :
- débouter Mme [R] de l'intégralité de ses demandes.
A titre infiniment subsidiaire :
- constater l'absence de démonstration du préjudice.
En conséquence :
- réduire les condamnations prononcées à rencontre de la SAS Kantar à de plus justes proportions.
En toute hypothèse :
- condamner Mme [R] à la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et débouter Mme [R] de sa demande fondée à ce titre
Vu la lettre de licenciement
SUR CE,
La SAS Kantar soulève la prescription de l'action introduite par Mme [R] le 6 juin 2014 devant le conseil de prud'hommes de Paris où elle a demandé des dommages et intérêts tant pour discrimination syndicale et harcèlement moral que pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Mme [R] soutient au contraire qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une action concernant le harcèlement moral dont elle avait été victime et donc pour demander que le licenciement qui en était la conséquence soit dit sans cause réelle et sérieuse, dans le délai de 5 ans courant depuis le dernier jour de son préavis expiré le 10 juin 2009, de sorte que son action n'était pas prescrite au jour de la saisine de la juridiction, tandis qu'en ce qui concerne ses réclamations au titre de la discrimination syndicale, elle expose que l'action courant à compter du jour où elle a reçu les éléments de comparaison mettant en évidence ladite discrimination, ces éléments ne lui ayant été transmis par l'employeur qu'en cours de procédure, il apparaissait qu'aucune prescription ne pouvait lui être opposée.
Sur le harcèlement moral et le licenciement :
La cour constate que Mme [R] a été licenciée pour insuffisance professionnelle par lettre du 9 avril 2009 ; l'avis de réception de la lettre recommandée de licenciement, qui a été présentée à la salariée le 11 avril 2009, est signé par elle le 14 avril 2009. Mme [R] disposait à compter de cette date, en application de la loi du 17 juin 2008 en vigueur lors de son licenciement, d'un délai de 5 ans pour contester la mesure prise à son encontre, de sorte qu'elle devait agir et introduire son action judiciaire avant le 11 avril 2014, la loi du 14 juin 2013 n'ayant apporté aucun changement à ce sujet ; en ayant saisi le conseil de prud'hommes de sa demande le 6 juin 2014, l'action de Mme [R] relative au harcèlement moral et au licenciement est prescrite.
Sur la discrimination :
En matière de discrimination, la loi du 17 juin 2008 a ramené également le délai de la prescription légale à 5 ans, délai qui commence à courir à compter du moment de la révélation de la discrimination en application de l'article L. 1134-5 du code du travail, cette révélation n'étant pas la simple connaissance de la discrimination par le salarié mais correspondant au moment où il dispose de tous les éléments de comparaison lui permettant de mettre en évidence la discrimination.dont il se prétend victime,
Mme [R] expose qu'elle n'a eu les éléments probants qu'au cours de la procédure devant la juridiction du travail de sorte qu'il ne peut être retenue que son action est prescrite contrairement à ce qu'a retenu le conseil de prud'hommes.
La SAS Kantar soutient au contraire que si l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par 5 ans à compter de la révélation de la discrimination, elle relève que la discrimination invoquée par la salariée est une discrimination syndicale et alors que celle-ci reconnaît avoir cessé d'être déléguée syndicale de l'entreprise à compter du 28 février 2005, elle avait écrit à l'entreprise le 14 juillet 2007 que le comportement de l'employeur à son égard s'inscrivait « très clairement dans un traitement discriminatoire ou à tout le moins anormal (changements de service, stagnation de carrière, mise à l'écart...)» de sorte que la salariée s'estimait déjà discriminée à cette époque et que son action introduite le 6 juin 2014 est prescrite.
La cour note que Mme [R] a cessé d'être déléguée syndicale le 28 février 2005, mandat qu'elle exerçait depuis le 21 avril 2000, lorsque le syndicat CGT a adressé à l'employeur une lettre pour désigner un autre salarié la remplaçant dans cette fonction (pièce 3 de l'employeur) ; le 9 mars 2004, Mme [R] se plaignait à son employeur d'une surcharge de travail et le questionnait pour savoir s'il s'agissait d'une « entrave à l'exercice du droit syndical ' » ; l'employeur lui répondait le 7 septembre 2005 (') que la maladie de sa supérieure à la suite de ses congés n'était qu'une coïncidence regrettable et imprévisible et nullement une marque d'atteinte à son droit syndical, affirmant qu'elle exerçait son mandat avec la plus grande liberté. Puis, le 14 juillet 2007, Mme [R] reprochait encore à son employeur d'avoir eu à son encontre un « traitement discriminatoire » dans l'exécution de son contrat de travail, mentionnant des changements de services, une stagnation dans sa carrière et une mise à l'écart ; de ce fait, si dès cette époque, Mme [R] avait le sentiment que son employeur usait d'un comportement discriminatoire à son encontre, elle ne recevait aucune réponse de l'employeur tandis que ce dernier n'apportait les éléments de comparaison pour répondre à la discrimination reprochée que durant la procédure devant le conseil de prud'hommes ; en conséquence, la SAS Kantar ne peut utilement invoquer la prescription quinquennale de son action, le point de départ de celle-ci étant la date du dépôt devant le conseil de prud'hommes des conclusions de l'employeur donnant les éléments de comparaison soit le 21 décembre 2015 permettant de répondre à la discrimination syndicale dont la salariée se prétend victime.
Sur la discrimination syndicale :
Aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, tel que défini par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 notamment en matière de rémunération au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'action, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de se m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance vraie ou supposée à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou à raison de son état de santé ou de son handicap.
Conformément à l'article L. 1134-1 du code du travail, il incombe au salarié qui estime avoir été victime d'une discrimination prohibée, de fournir au juge des éléments de fait susceptibles de laisser présumer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, l'autre partie doit prouver que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
En l'espèce, Mme [R] invoque les faits suivants : les sanctions multiples, le licenciement pour insuffisance professionnelle, l'absence de formation alors que d'autres salariés en ont bénéficié, des entraves à son mandat syndical, sa rétrogradation, la différence de traitement en ce qui concerne les « loupés » donnant lieu pour elle à des sanctions et pour les autres à de l'indulgence et le retard dans sa promotion professionnelle
Pour étayer ses affirmations, elle produit notamment :
1°) en ce qui concerne les sanctions multiples :
une mise en garde sérieuse du 24 février 2006 pour avoir menacé [O] [W] en lui disant que « cela ne se passerait pas comme cela, que vous aviez des preuves qui s'accumulaient contre elle dont des papiers signés de sa main »,
un avertissement du 14 juin 2007 pour plusieurs absences injustifiées en mai et juin à son poste de travail entrainant une désorgnisation du service et de la production,
un avertissement du 19 mai 2008 pour des manquements dans son exercice professionnel
la lettre de son employeur du 4 juillet 2008 maintenant l'avertissement précédent
un avertissement du 31 juillet 2008 pour quantité et qualité de son travail notoirement insuffisantes
une mise en garde du 10 décembre 2008 pour absence d'information dans les délais préscrits sur son absence début décembre
sa mise à pied conservatoire du 27 mars 2009 avant entretien préalable pour licenciement pour faute grave prévu pour le 6 avril 2009,
toutes ces sanctions ayant été prononcées alors que Mme [R] n'était plus déléguée syndicale, qu'elle ne les conteste pas et n'en a pas sollicité l'annulation de sorte que ce reproche non justifié ne peut laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son égard
2°) en ce qui concerne son licenciement pour insuffisance professionnelle : sa lettre de licenciement du 9 avril 2009,
la procédure ayant été entamée plusieurs années après la fin du mandat syndical et l'insuffisance professionnelle reprochée relevant de son poste de lectrice-chargée de dossiers qu'elle n'accomplissait pas lorsqu'elle était déléguée syndicale (puisqu'elle était à cette époque rédactrice-documentaliste), de sorte que ce reproche non justifié ne peut laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son égard
3°) en ce qui concerne son absence de formation :
sa demande du 2/10/2007 pour effectuer une formation (lecture rapide, anglais individuel ou access les bases) outre son souhait pour faire un CIF en informatique, et la réponse de son supérieur du 3/10/2007, « il faut faire un choix, lecture rapide ou anglais individuel sont adaptés à notre travail et en ce qui conerne le CIF, il faut te rapprocher de [C] [F] pour demander un dossier »
sa relance du 24/09/2008 et la réponse de Mme [F] du 29/09/2008 « nous ne considérons pas qu'il y ait un besoin prioritaire en anglais pour votre poste (') concernant l'informatique (son supérieur) vous a proposé le 21/08 de faire venir un informaticien pour répondre à vos interrogations, il attend que vous lui communiquiez les points à aborder ce que vous n'avez toujours pas fait, il est donc nécessaire que vous précisiez vos besoins » et en ce qui concerne le DIF, « la rubrique DIF de notre intranet vous précise la démarche à suivre que je vous invite à initier »
ses entretiens annuels d'évaluation du 21/02/2007 et du 27/02/2008 sur lesquels elle ne donne à la cour aucun élément sur les reproches à en tirer,
alors que ses demandes ont toutes été présentées postérieurement à la cessation de sa désignation comme déléguée syndicale et que l'employeur n'a pas refusé les formations réclamées dont il ne contestait pas la pertinence pour certaines d'entre elles, ce reproche non justifié ne peut donc laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son égard
4°) en ce qui concerne les entraves au mandat syndical :
la lettre du 28/09/2000 de la CGT sollicitant l'employeur pour qu'elle puisse exercer dans des conditions correctes son mandat de déléguée syndicale CGT
sa lettre du 9 mars 2004 se plaignant auprès de son employeur de sa surcharge de travail par rapport à sa chef [N] [N]
la lettre de la CGT du 5 janvier 2006 se plaignant d'entraves à l'exercice du droit syndical dans l'entreprise,
alors que la lettre du syndicat du 28/09/2000 ne faisait que rappeler à l'employeur ses obligations en la matière, celle du 5/01/2006 ayant été écrite alors qu'elle était déchargée par le syndicat de toute fonction de représentation et qu'elle n'était pas mentionnée dans ce courrier et enfin que celle du 9/03/2006 ne reliait nullement sa charge de travail à son mandat, ce qu'elle ne fait pas plus dans ses écritures devant la cour de sorte que ce reproche non justifié ne peut donc laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son égard
5°) en ce qui concerne sa rétrogradation, alors que Mme [R] a été embauchée en qualité de rédactrice-documentaliste, son employeur l'a affectée le 5/01/2006, un an après la cessation de son mandat syndical, à l'équipe revues de presse du département presse du pôle information, le libellé de sa fonction étant lectrice-chargée de dossiers, les autres dispositions de son contrat de travail restant inchangées, modification de ses conditions de travail que Mme [R] n'a pas contestée et alors qu'elle ne donne aucun élément dans ses écritures pour exposer en quoi ce changement de fonction correspondrait à une rétrogradation de sorte que ce reproche n'est pas justifié et ne peut donc laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son égard
6°) en ce qui concerne la différence de traitement s'agissant de la gestion des « loupés », Mme [R] produit 46 pages de mails datant des années 2008 et 2009 reproduisant à ses dires une centaine de mails de clients se plaignant de loupés, dont elle affirme que « ce n'est que rarement qu'ils ont donné lieu à des mails de reproches écrits, qu'exceptionnellement à des avertissements et en aucun cas à un licenciement », sans qu'elle ne relie ce qu'elle dit être des « loupés » de sa part aux sanctions prononcées, aucune n'ayant d'ailleurs été infligée pour ce motif de sorte que ce reproche non justifié ne peut donc laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son égard
7°) en ce qui concerne le retard dans la promotion professionnelle, elle indique avoir été nommée chargé d'études par contrat seulement en 2003 au lieu de 2001 soit 7 années après son embauche en 1996, puis retour aux revues de presse en 2006 pendant un an, et mentionne être resté beaucoup plus longtemps de nuit que ses collègues embauchés au même moment, soit pendant 5 ans de 1996 à 2001 et reproche l'absence de promotion en terme de statut.
Mme [R] verse la lettre de son employeur du 16 juillet 1996 précisant ses horaires de travail lors de son recrutement, du lundi au vendredi de 1h30 à 9h15 puis la modification de ses horaires de travail du 6 février 2001 indiquant qu'elle serait de service dorénavant du lundi au vendredi de 8h30 à 16h40, tandis que le 24 novembre 2003, elle était nommée chargée d'études, position 2.2 coefficient 310 de la grille de classification ETAM. Par courrier du 5 janvier 2006, Mme [R] était nommée lectrice-chargée de dossiers, dans l'équipe revues de presse du département presse du pôle information. Elle expose dans ses écritures qu'au bout de 3-4 ans, étant donné la pénibilité, tous les salariés passaient de jour, chargé d'études alors qu'elle même a dû attendre 6 ans pour être nommée chargée d'études.
Sur le reproche d'être restée plus longtemps que les autres collègues sur un horaire de nuit, la SAS Kantar conteste l'existence de l'usage prétendu par Mme [R] et verse une liste de travailleurs de nuit qui ont « plus de 10 ans d'ancienneté dans cet horaire » (pièce 53) et alors que l'accord collectif d'entreprise prévoit que « les travailleurs de nuit intéressés par un poste de jour devront alors formuler et motiver par écrit leur demande à la Direction des ressources humaines », sans qu'elle justifie avoir, entre son recrutement en qualité de travailleur de nuit et 2001 fait part de son souhait d'être affectée à un poste en journée de sorte que le maintien pendant presque 5 ans en horaire de nuit ne peut donc laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son égard.
Sur le retard dans sa promotion professionnelle par rapport aux salariés du département presse avec qui elle travaillait de nuit et embauchés entre 1993 et 2001 qui ont eu, selon les écritures de la salariée, une promotion en terme d'évolution, la SAS Kantar justifie qu'ils ont été promus après 6 ans, 7 ans, 9 ans ou 13 ans de leur embauche et ainsi, Mme [R], qui a reçu sa promotion un peu plus de 7 ans après son embauche, ne peut reprocher un traitement discriminatoire à son égard de sorte qu'en l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de faits précis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale directe ou indirecte au sens du texte ci-dessus rapporté n'est pas démontrée. Il convient de débouter Mme [R] de sa demande de ce chef.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de Mme [R] ;
La demande formée par la SAS Kantar au titre des frais irrépétibles en cause d'appel sera accueillie, à hauteur de 1 000 euros.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant publiquement et contradictoirement
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit prescrites les demandes de Mme [R] au titre du harcèlement moral et du licenciement et l'infirme pour le surplus
Déboute Mme [R] de sa demande au titre de la discrimination syndicale
Condamne Mme [R] aux dépens d'appel ;
La condamne à payer à la SAS Kantar la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme Claudine AUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIERLe PRESIDENT