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19/12/2018 | FRANCE | N°16/05593

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 19 décembre 2018, 16/05593


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



17e chambre





ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE



DU 19 DÉCEMBRE 2018



N° RG 16/05593



AFFAIRE :



[U] [K]



C/



SASU SEDI (SOCIETE D'ENRICHISSEMENT DE DONNEES INFORMATIQUES)









Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 octobre 2016 par le conseil de prud'hommes - formation départage de Bouogne Billancourt

Section : activitÃ

©s diverses

N° RG : 14/01249









Expéditions exécutoires et expéditions délivrées à :



Me Catherine ESCOFFIER- TUBIANA,



SELARL LMC PARTENAIRES GRENOBLE



le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







LE DIX NEUF DÉC...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 DÉCEMBRE 2018

N° RG 16/05593

AFFAIRE :

[U] [K]

C/

SASU SEDI (SOCIETE D'ENRICHISSEMENT DE DONNEES INFORMATIQUES)

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 octobre 2016 par le conseil de prud'hommes - formation départage de Bouogne Billancourt

Section : activités diverses

N° RG : 14/01249

Expéditions exécutoires et expéditions délivrées à :

Me Catherine ESCOFFIER- TUBIANA,

SELARL LMC PARTENAIRES GRENOBLE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF DÉCEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [U] [K]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Catherine ESCOFFIER-TUBIANA, constitué, avocate au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 206, et Me Annie MOREAU de l'ASSOCIATION MOREAU DESMICHELLE, plaidant, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : R078, substituée par Me Lucie LEROUS, avocate au barreau de Paris

APPELANTE

****************

SASU SEDI (SOCIETE D'ENRICHISSEMENT DE DONNEES INFORMATIQUES)

N° SIRET : 390 105 864

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Florence MERCADE-CHOQUET de la SELARL LMC PARTENAIRES, constitué, avocate au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 220, et Me Laurent CLEMENT-CUZIN, plaidant, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 octobre 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,

Madame Evelyne SIRE-MARIN, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU,

Par jugement du 14 octobre 2016, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt (section activités diverses), statuant en sa formation de départage, a :

- débouté Mme [U] [K] de toutes ses demandes,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ou de toute autre demande plus ample ou contraire,

- condamné Mme [K] à payer à la SASU Sedi la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [K] aux dépens.

Par déclaration adressée au greffe le 13 décembre 2016, Mme [K] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 4 septembre 2018.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 30 août 2018, Mme [K] demande à la cour de :

- infirmer en tous points le jugement du juge départiteur du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du 14 octobre 2016,

statuant à nouveau,

- ordonner le rejet des débats de la pièce adverse n°19,

- constater l'existence d'une discrimination syndicale,

en conséquence,

- condamner la SASU Sedi à lui payer la somme de 60 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- constater l'existence d'un harcèlement moral,

en conséquence,

- condamner la SASU Sedi à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- annuler la sanction disciplinaire du 28 mai 2014,

en conséquence,

- condamner la SASU Sedi à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,

- constater que la clause du contrat de travail fixant les conditions d'attribution de la prime d'assiduité est discriminatoire,

en conséquence,

- condamner la SASU Sedi à lui payer la somme de 304,90 euros à titre de rappel de prime d'assiduité,

- condamner la SASU Sedi à lui restituer les 22 tickets restaurants qu'elle a injustement retenus depuis son retour d'arrêt maladie,

- ordonner à la SASU Sedi de justifier sous astreinte de 300 euros par jour de retard de son inscription aux garanties mutuelle et prévoyance depuis son embauche et du règlement des cotisations afférentes,

- dire que la cour se réservera la liquidation de l'astreinte,

- condamner la SASU Sedi à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SASU Sedi aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 3 septembre 2018, la SASU Sedi demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions la décision du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 14 octobre 2016,

à titre subsidiaire, si le courrier du 28 mai 2014 était qualifié de sanction disciplinaire,

- dire qu'elle est justifiée,

à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à reconnaître l'existence d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale,

- dire que Mme [K] ne verse aux débats aucune pièce de nature à justifier son préjudice,

- limiter à un montant correspondant au préjudice subi et démontré les dommages et intérêts alloués à Mme [K],

y ajoutant,

- condamner Mme [K] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE LA COUR,

La SASU Sedi (société d'enrichissement de données informatiques), appartenant au groupe Tessi, a pour activité principale le traitement de données.

Mme [U] [K] a été engagée par la SASU Sedi en qualité d'opératrice de catégorisation, par contrat à durée déterminée à compter du 9 février 2007, puis par contrat à durée indéterminée en date du 28 juillet 2007.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire.

La salariée est titulaire de plusieurs mandats au sein de la SASU Sedi :

- représentante du personnel au comité de groupe depuis le 3 mai 2012,

- déléguée du personnel et membre du comité d'entreprise depuis le 22 novembre 2013,

- déléguée syndicale depuis le 28 novembre 2013,

- membre du CHSCT depuis le 20 mai 2014.

En 2008, après une altercation avec son superviseur, Mme [P], la salariée, initialement affectée sur la prestation du client Numéricable, a été affectée sur la prestation du client Direct Energie.

La salariée a fait l'objet de deux rappels à l'ordre, le 25 mars 2010 et le 11 décembre 2012, rappels à l'ordre qu'elle a contestés.

Le 1er avril 2014, le directeur Grand Est, M. [A], a demandé à la salariée de venir s'entretenir avec lui au sujet d'une altercation avec M. [H]. La salariée ne s'y est pas rendue.

Le 2 avril 2014, la salariée a été placée en arrêt maladie.

Par lettre du 12 mai 2014, Mme [K] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 21 mai 2014.

Par lettre du 28 mai 2014, la société a demandé à la salarié de modifier son attitude, lettre contestée par la salariée le 11 juin 2014.

Par lettre du 20 juin 2014, la société a précisé que la lettre du 28 mai 2014 n'était pas une mesure disciplinaire et qu'elle ne figurait pas dans son dossier.

Le 10 juillet 2014, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt aux fins de faire constater des agissements de discrimination syndicale et de harcèlement moral.

Le 17 juillet 2014, la salariée a assisté au compte-rendu de la réunion extraordinaire du CHSCT.

Par lettre du 1er août 2014, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 25 août 2014, puis reporté au 5 septembre 2014.

Le 23 septembre 2014, le comité d'entreprise a été convoqué pour donner son avis sur le projet de licenciement de Mme [K]. Celui-ci a rendu un avis négatif le 1er octobre 2014.

Le 3 octobre 2014, la SASU Sedi a adressé à l'inspection du travail une demande d'autorisation de licencier Mme [K], demande rejetée par lettre du 28 octobre 2014. Le 24 novembre 2014, la SASU Sedi a déposé un recours hiérarchique auprès du Ministre du travail. Le 26 mai 2015, le Ministre du travail a confirmé la position de l'inspecteur du travail. Le 27 juillet 2015, la SASU Sedi a saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'une demande d'annulation de cette décision.

La salariée a repris le travail le 8 juin 2015.

Sur la note en délibéré :

Par courrier du 29 novembre 2018, Mme [K] a adressé à la cour, sans y avoir été autorisée, des documents. Ce courrier comme ces pièces seront écartés des débats.

Sur l'incident de communication de pièce :

Mme [K] demande le rejet des débats de la pièce n°19 produite par la SASU Sedi, cette pièce correspondant à la retranscription d'un enregistrement de la réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (ci-après « CHSCT ») du 17 juillet 2014. Mme [K] soutient qu'il s'agit d'un enregistrement clandestin, réalisé à son insu. Pour sa part, la SASU Sedi rétorque que l'enregistrement était licite.

Le principe d'égalité des armes, qui est une des composantes du procès équitable, implique la loyauté dans la recherche des preuves et leur administration. Doit être déclaré irrecevable la preuve obtenue de façon déloyale.

En l'espèce, la pièce dont Mme [K] demande le rejet consiste en la retranscription d'un enregistrement effectué lors d'une réunion du CHSCT de la SASU Sedi qui s'est tenue le 17 juillet 2014.

Il n'est pas discuté qu'habituellement, les réunions du CHSCT faisaient l'objet d'un enregistrement sur un dictaphone. Il résulte des débats que les réunions du CHSCT de la SASU Sedi étaient toutes enregistrées au moyen d'un dictaphone.

Suivant Mme [K], le dictaphone a présenté un dysfonctionnement, ce dont elle et les membres de la réunion avaient été avisés ; en revanche, elle affirme qu'ils n'ont pas été informés de ce qu'un autre moyen d'enregistrement était utilisé.

Cette version est contredite par la pièce 68 de l'intimée dont il ressort qu'il n'a été su que dans un deuxième temps que le dictaphone du secrétaire de séance n'avait pas fonctionné. Le dictaphone défectueux était bien sur la table de la réunion. Il s'ensuit que tous les membres de la réunion, y compris Mme [K], savaient que la réunion était enregistrée. La circonstance qu'elle l'ait été par le dictaphone (ce qui ne s'est pas révélé être le cas par la suite) ou par le téléphone du secrétaire de séance ne présente dès lors aucune importance : il faut et il suffit que les membres de la réunion aient su que la réunion était enregistrée ce qui est le cas en l'espèce.

Il importe en outre de relever que les réunions du CHSCT sont publiques et font l'objet d'un compte-rendu, qu'un enregistrement ait lieu ou non. Il en résulte que la pièce n°19 de l'intimée est licite. La demande de Mme [K] tendant à l'écarter des débats sera donc rejetée.

Sur la demande d'annulation de la sanction du 28 mai 2014 :

Mme [K] s'est vue adresser, le 28 mai 2014, un courrier par lequel M. [A], directeur régional (Grand Est), lui fait plusieurs reproches liés, notamment, à une altercation intervenue entre elle et un autre salarié-M. [H]-.

Mme [K] voit dans ce courrier un avertissement tandis que la SASU Sedi n'y voit pas une sanction disciplinaire.

L'article L. 1331-1 du code du travail dispose que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

Si l'écrit est nécessaire à la qualification de sanction disciplinaire, il n'est pas suffisant. Une mesure disciplinaire implique de la part de l'employeur une volonté réelle de sanctionner un agissement fautif. Ne présente pas ce caractère un simple rappel à l'ordre.

En l'espèce, le courrier adressé à Mme [K] par la SASU Sedi le 28 mai 2014 a été précédé d'un entretien préalable à une sanction disciplinaire le 23 mai 2014. Il ressort de ce courrier (pièce 23 de l'appelante) que sont reprochés à Mme [K] d'une part son comportement à l'égard d'un autre salarié (M. [H]) et d'autre part son comportement ayant consisté, pour elle, à refuser un entretien informel à M. [A] et à l'inviter à la convoquer officiellement. Ledit courrier indique à propos de l'entretien informel sollicité par M. [A] : « Ainsi, votre refus de vous soumettre à une directive de votre hiérarchie relève purement et simplement de l'insubordination. Ce que je n'accepterai pas une seconde fois. ». Il ajoute, à propos de l'altercation avec M. [H] : « (') nous vous invitons vivement à ne pas réitérer ce type d'habitude. »

Eu égard au contenu du courrier du 28 mai 2014 dont certains passages ont été reproduits ci-avant, et eu égard au fait que ce courrier a été précédé d'une convocation à un entretien préalable à une sanction disciplinaire ce qui traduit la volonté réelle de l'employeur de prendre des sanctions à l'encontre de Mme [K], ce courrier doit être considéré-non pas comme un simple rappel à l'ordre-mais comme un avertissement, quand bien même l'employeur ne considérerait par ce courrier comme une sanction disciplinaire ainsi qu'il en a avisé Mme [K] par courrier du 20 juin 2014 (cf. pièce 25 de l'appelante par lequel l'employeur lui indique que son courrier ne constitue pas une mesure disciplinaire).

Il convient dès lors d'examiner, au fond, la demande de Mme [K] tendant à l'annulation de cette sanction.

Le fait, pour Mme [K], d'avoir demandé à M. [A] de procéder à sa convocation à un entretien alors que ce dernier n'entendait formuler à son encontre que des observations verbales n'est pas fautif et ne peut donc pas faire l'objet, en tant que tel, d'une sanction.

Reste à examiner la question du comportement fautif qui lui est reproché à l'égard de M. [H].

L'attestation de M. [H] est ainsi rédigée (pièce 41 de l'intimée) : « le 26 mars 2014, durant ma pause déjeuner, j'ai subi une humiliation devant plusieurs collègues en salle de pause. [U] [K] s'est permise de me rabaisser en public pour le seul motif d'avoir fait mon travail. Sans raison apparente, elle s'est chargée de me forger une mauvaise réputation auprès de mes collègues ('). Elle s'est mise à parler à haute voix en m'accusant d'être, selon ses termes, « une balance (') et que tout le monde le savait » et « qu'on savait comment tu es devenu chef de groupe ». Elle a dit en arabe « toi tu es un homme '! Tu es une femme ». »

Mme [W] (pièce 42) atteste encore : « [A] (M. [H]) et moi sommes allé en pause déjeuner au premier vers 12H45 le mercredi 26 mars. Arrivé en salle de pause, [U] (Mme [K]) a pris [A] à part pour lui parler. A leur retour, [U] s'est mise à accuser [A] d'être une balance et qu'elle comprenait comment il avait fait pour évoluer en tant que chef de groupe et qu'il n'irait pas loin. Suite à ces propos, j'ai demandé à [U] quel était le problème et pourquoi elle disait ces choses. De là elle s'est mise à parler fort afin que tout le monde entende et s'est permise de traiter [A] de balance auprès de la direction et que c'est comme ça qu'il était devenu chef de groupe. Elle est partie en lui parlant en arabe ».

Quoique Mme [K] conteste avoir insulté et rabaissé M. [H], ces deux attestations, concordantes et circonstanciées, suffisent à établir la réalité des faits qui lui sont reprochés. Ces faits, avérés, pouvaient justifier un avertissement. C'est donc sans outrepasser son pouvoir de direction que la SASU Sedi a pris cette sanction à l'égard de Mme [K].

Il en résulte que le jugement critiqué sera, par substitution de motifs, confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Mme [K] tendant à annuler son avertissement du 28 mai 2014.

Sur le rappel de prime d'assiduité :

L'article 3 du contrat de travail liant Mme [K] à la SASU Sedi prévoit que la salariée peut prétendre à une prime d'assiduité de 152,45 euros bruts mensuels sauf dans les cas suivants : « absence injustifiée d'une journée ou plus sur le mois, absences justifiées supérieures à deux jours sur le mois (sauf congés payés et congés pour événements familiaux), absences maladie, accidents du travail supérieurs à quatre jours sur le mois, plus de cinq retards dépassant quinze minutes sur le mois, pendant l'absence maternité. »

Les parties sont en discussion sur les primes d'assiduité des mois de mars 2012 et février 2014 qui n'ont pas été versées à Mme [K].

La SASU Sedi justifie l'absence de versement de la prime par le fait que Mme [K] a été absente :

. durant sept jours en raison d'un congé pour enfant malade du 6 au 14 février 2012,

. durant neuf jours en raison d'un congé pour enfant hospitalisé et pour enfant malade du 13 au 21 janvier 2014.

Mme [K], pour sa part, estime que l'article 3 du contrat de travail doit être annulé car relevant d'une mesure discriminatoire.

Quelle qu'en soit la source, les conditions d'octroi des primes ou compléments de salaires doivent être exemptes de toute discrimination illicite ou d'atteinte aux droits et libertés fondamentaux des salariés.

Une prime d'assiduité ne peut être supprimée ou réduite que si toutes les absences, autorisées ou non, entraînent la même conséquence. En l'espèce, toutes les absences-autorisées ou non-entraînent la même conséquence : la suppression de la prime. Un sort particulier est réservé par le contrat de travail aux absences pour maladie mais dans un sens plus favorable en ce qu'il ne supprime la prime qu'à partir d'une absence de quatre jours.

Il en résulte que le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

Sur la justification de l'affiliation de Mme [K] aux garanties de prévoyance :

Par sa pièce 19, Mme [K] établit qu'elle a eu un contact avec le groupe APICIL qui, le 17 mars 2014, lui a indiqué : « nous pouvons enregistrer votre affiliation avec rétroactivité jusqu'en 2007. Pour ce faire, nous vous proposons de prendre contact avec votre employeur afin qu'il nous transmette un bulletin individuel d'affiliation », signe évident que ce bulletin n'avait pas été transmis.

Par sa pièce 53, Mme [K] établit encore de quelle façon les salariés doivent être affiliés à la mutuelle APICIL ou sur le contrat de prévoyance APICIL : il convient que l'entreprise adresse à APICIL une « demande individuelle d'affiliation complétée et signée par les deux parties ».

Néanmoins, l'attestation de l'institution de prévoyance APICIL par laquelle elle indique que la SASU Sedi adhère à l'institution au moyen d'un « contrat à caractère collectif et obligatoire » ayant pris effet le 1er septembre 2000 (pièce 20 de Mme [K]) est suffisante. En effet, il découle de la pièce 124 de l'intimée (courrier d'APICIL adressé à la SASU Sedi le 7 juillet 2015) que « le défaut d'affiliation au régime de prévoyance, ou une erreur de la date dans notre système d'information ne remet pas en cause les garanties du salarié ni les prélèvements sur sa fiche de paie ». Cette position a été confirmée par APICIL à Mme [K] le 20 juillet 2015 puisqu'APICIL écrivait alors à Mme [K] (pièce 125 de l'intimée) : « le défaut d'affiliation d'un salarié dès la date d'embauche ne remet pas en cause les garanties ». Qui plus est, il apparaît que Mme [K] a bien bénéficié des prestations de remboursement d'APICIL comme en témoignent clairement les pièces 126 à 129 de l'intimée. Il est donc établi que Mme [K] est bien affiliée au groupe APICIL.

Il en résulte que le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

Sur la restitution de 22 tickets restaurant :

Mme [K] ne vise à propos de cette demande aucune pièce propre à démontrer que les 22 tickets qu'elle revendique lui sont effectivement dus.

Il n'y a donc pas matière à faire droit à cette demande de sorte que le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

Sur la discrimination syndicale :

Il ressort de l'article L. 1132-1 du code du travail qu'aucune personne ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte notamment en matière de promotion professionnelle en raison de ses activités syndicales.

L'article L. 2141-5 prévoit qu'il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail. Un accord détermine les mesures à mettre en 'uvre pour concilier la vie professionnelle avec la carrière syndicale et pour prendre en compte l'expérience acquise, dans le cadre de l'exercice de mandats, par les représentants du personnel désignés ou élus dans leur évolution professionnelle.

Sur le terrain de la preuve, il n'appartient pas au représentant du personnel ou au délégué syndical qui s'estime victime d'une discrimination d'en prouver l'existence. Suivant l'article L. 1134-1, il doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, Mme [K] expose ainsi les éléments qui, selon elle, laissent supposer qu'elle a fait l'objet d'un traitement discriminatoire :

. le fait d'être régulièrement prise à partie par l'employeur dans le cadre de ses fonctions et d'avoir fait l'objet de multiples procédures disciplinaires,

. le fait de ne pas avoir la même évolution professionnelle que les autres salariés de la SASU Sedi,

. le fait qu'elle soit cantonnée depuis des années à des tâches répétitives,

. le fait d'avoir été isolée des autres salariés,

. le fait que la SASU Sedi se soit séparée des deux seules élues FO.

Sur les éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte :

sur le fait, pour Mme [K], d'être régulièrement prise à partie par l'employeur dans le cadre de ses fonctions et d'avoir fait l'objet de multiples procédures disciplinaires :

Mme [K] invoque, à l'appui de ce qu'elle considère comme des prises à partie « régulières » : une humiliation publique datant de février 2014 à propos de la climatisation et de l'ouverture de fenêtres et une altercation entre elle et M. [A], son supérieur hiérarchique en mars 2014 à propos de la dispute intervenue entre elle et un autre salarié-M. [H]. L'existence de ces deux événements n'est pas contestée par l'employeur.

Le second trouve une issue par l'avertissement du 28 mai 2014.

Le premier consiste en une altercation ayant, selon Mme [K], été accompagnée d'une humiliation publique. Pour en justifier, Mme [K] produit sa pièce 60 qui consiste en un courriel qui a été rédigé par elle et qui ne peut donc, à lui seul, présenter un caractère probant. Il doit en outre être relevé que l'enquête du CHSCT réalisée courants avril, mai et juin 2014 n'a pas permis d'établir l'existence des humiliations publiques alléguées (pièce 17 de l'appelante).

Sur les sanctions, Mme [K] expose avoir fait l'objet d'un rappel à l'ordre le 15 mars 2010, d'un rappel à l'ordre le décembre 2012, d'un avertissement du 28 mai 2014 et d'une procédure de licenciement en août 2014.

Le rappel à l'ordre du 15 mars 2010 est nécessairement étranger à toute discrimination syndicale, le premier mandat de Mme [K] étant postérieur (3 mai 2012).

Mme [K] a en revanche effectivement fait l'objet d'un rappel à l'ordre au mois de décembre 2012. Toutefois, un rappel à l'ordre ne constitue pas, à proprement parler, une sanction disciplinaire.

Les développements qui précèdent s'agissant de l'avertissement du 28 mai 2014, tendent à écarter purement et simplement le moyen tiré de l'existence de cet avertissement comme laissant supposer l'existence d'une discrimination, ledit avertissement ayant été considéré comme étant justifié.

Reste donc, pour seule sanction, celle ayant consisté à engager, contre Mme [K], une mesure de licenciement envisagée en raison d'un comportement agressif permanent et des propos qu'elle a tenus lors de la réunion du CHSCT du 17 juillet 2014 et à l'occasion de laquelle ledit CHSCT avait donné les conclusions-négatives-de son rapport d'enquête sur la discrimination de l'appelante. Le fait, pour la SASU Sedi, d'avoir initié contre Mme [K] une procédure de licenciement n'est pas contesté.

sur le fait, pour Mme [K], de ne pas avoir la même évolution professionnelle que les autres salariés de la SASU Sedi :

Mme [K] reproche en premier lieu à son employeur d'avoir été écartée du poste de superviseur (pour la prestation Numéricable) qui lui avait été promis. Le poste qui fait débat consiste en un poste de superviseur attribué à la fin de l'année 2012 à Mme [P] que Mme [K] avait formée (cf. pièce 44 de l'appelante-attestation de Mme [N]). Néanmoins, il résulte de la pièce 137 de l'intimée (attestation de Mme [T]) que Mme [K] n'avait jamais été pressentie pour occuper ce poste. Cette version est partiellement contredite par le témoignage de Mme [Q] (pièce 98 de l'intimée) qui, à l'occasion de son audition par la commission d'enquête du CHSCT, a déclaré : « en novembre 2013, Mme [Q] a demandé à Mme [K] si elle serait intéressée par un poste de superviseur sur la prestation numericable (prestation traitée au rez-de-chaussée) ». Cependant, Mme [Q] a ajouté : « Mme [K] a tout de suite répondu qu'elle était bien au premier étage et qu'elle ne voulait pas descendre ». Ainsi, la preuve de ce premier reproche n'est-elle pas rapportée par Mme [K].

Mme [K] reproche en second lieu à la SASU Sedi de lui avoir offert une évolution différente de celle des autres salariés placés dans une situation comparable. Elle prétend avoir été embauchée à un coefficient 130 et que, 10 ans plus tard, elle occupe toujours les mêmes fonctions au même coefficient. Toutefois, la pièce 2 de l'appelante (liasse de ses bulletins de salaire depuis janvier 2011 jusqu'à octobre 2015) montre qu'en novembre 2011 elle bénéficiait du coefficient 130 et qu'en octobre 2015, elle bénéficiait du coefficient 140 (auquel elle a été admis en octobre 2011). Il reste cependant qu'effectivement, Mme [K] n'a pas connu d'autre évolution depuis son entrée dans la société, ce qui au demeurant n'est pas contesté par la SASU Sedi qui l'admet mais qui explique que la majorité de ses opérateurs disposent des coefficients 130 et 140. Il en résulte que l'absence d'évolution de carrière de Mme [K] est bien établie.

Sur le fait, pour Mme [K], d'être cantonnée depuis des années à des tâches répétitives :

Mme [K] reproche à la SASU Sedi de ne pas lui donner accès à la polyvalence c'est-à-dire à d'autres tâches que celles qui lui ont été assignées. De fait, elle verse aux débats les témoignages de sept collègues indiquant que Mme [K] était en demande de plus de polyvalence, c'est-à-dire d'une plus grande variété de tâches dans son travail, étant précisé d'une part que les témoignages montrent qu'un accès à la polyvalence était possible car Mme [K] n'occupait pas intégralement ses journées avec le travail qui lui était confié et d'autre part qu'il résulte de l'audition d'une salariée par la commission d'enquête du CHSCT (Mme [V]-pièce 108 de l'intimée) que « Mme [K] est restée le plus longtemps à faire des ADP » (c'est-à-dire des tâches que Mme [V] qualifie dans une attestation de « tâches simples de saisie pure et dure sans réflexion »-pièce 50 de l'appelante).

Sur le fait, pour Mme [K], d'avoir été isolée des autres salariés :

Mme [K] reproche à son employeur de l'avoir physiquement mise à l'écart. Par les attestations qu'elle verse aux débats, Mme [K] établit la réalité de ce reproche. En effet, dans son attestation, Mme [N] (pièce 44 de l'appelante) indique : « (Mme [K]) se retrouvait toujours isolée au bout de la table ». Mme [S] (pièce 52 de l'appelante) atteste « (Mme [K]) est placée toute seule dans une place et ses collègues comme nous autres salariés nous n'avons pas le droit de la voir ». Mme [M] témoigne, de façon plus circonstanciée : « après les élections 2009, avant de me rendre à [Localité 4] (') j'ai téléphoné à [U] [K] pour lui demander comment je vais la reconnaître parce que je ne la connaissais pas physiquement. Elle me répondit tu vas me reconnaître, je suis sur un grand plateau au rez-de-chaussée et ils m'ont mise sur une rangée toute seule. Quand je suis rentrée sur le plateau, j'ai été surprise parce qu'elle se trouvait toute seule sur la rangée sachant que le reste du plateau était rempli. Par la suite, je me suis déplacée à plusieurs reprises en délégation et je n'ai constaté qu'il n'y a eu aucun changement » (pièce 51 de l'appelante). Ces attestations ne sont nullement contredites par celles produites par l'intimée (pièce 36, 52, 105, 107 et 108). Le témoignage de Mme [D] recueilli par la commission d'enquête du CHSCT (pièce 102 de l'intimée) pourrait laisser supposer qu'il les contredit puisque Mme [D] indique qu'elle a vu que Mme [K] n'était pas seule assise sur sa rangée. Pour autant, Mme [K] indique, sans être contredite sur ce point, que Mme [D] n'a pu être témoin de son isolement dès lors qu'elle a intégré la société après les faits. Il en va de même en ce qui concerne le témoignage de Mme [C].

Mme [K] reproche encore à son employeur de ne pas avoir, lors du déménagement de l'équipe dans laquelle elle travaillait alors, déménagé son poste de travail en même temps que les autres membres de l'équipe. Ce fait n'est corroboré par aucune pièce.

Mme [K] reproche enfin à son employeur de l'isoler sur le plan fonctionnel, ayant été écartée de certaines formations. Mme [K] rapporte la preuve de ce fait par le témoignage de Mme [L] (pièce 49) dans lequel elle indique : « Je confirme avoir eu pour consigne de former l'équipe du contrat Direct Energie afin de les mutualiser au niveau de la saisie et des différentes activités. Mais je n'ai pas formé Mme [K] qui ne faisait que de la saisie de RIB comme demandé par ma hiérarchie. De plus, celle-ci s'est retrouvée isolée du groupe. Ma consigne étant de la laisser seule sur une rangée même pendant sa période de grossesse et également après son retour de congé mat. » Ce témoignage est corroboré par celui de M. [Y] (pièce 48).

Sur le fait que la SASU Sedi se soit séparée des deux seules élues FO :

Ce facteur, qui est un facteur exogène et n'intéresse pas spécifiquement la situation de Mme [K] ne doit exercer aucune influence sur les éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte à l'encontre de Mme [K].

Sur l'ensemble des faits dénoncés par Mme [K], certains ont été reconnus comme étant établis :

. l'existence d'une procédure de licenciement initiée en août 2014,

. l'absence d'évolution de carrière de Mme [K],

. l'affectation de Mme [K] à des tâches répétitives,

. l'isolement physique de Mme [K] et son isolement lors d'une formation par Mme [L].

Ces faits laissent supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.

Il incombe donc à la SASU Sedi de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Sur la justification, par l'employeur, d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination :

L'absence d'évolution de carrière est justifiée par l'employeur par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la grande majorité des salariés de l'entreprise étant classée aux coefficients 130 et 140.

L'affectation à des tâches répétitives est manifestement le lot réservé à d'autres salariés qui en attestent (pièces 98, 103, 104, 107, 108 et 122 de l'intimée). Qui plus est, par sa pièce 88 (courriel de Mme [K] à son superviseur le 23 avril 2012) la SASU Sedi montre que Mme [K] n'était pas toujours disposée à changer de poste : « Bonjour, concernant le fait de me déplacer d'une prestation à une autre sans mon accord, je te rappelle qu'en tant qu'élue sans mon accord j'ai agi dans la contrainte en suivant tes instructions. Je t'informe que je tiens à revenir à mon poste et continuer mon travail comme le prévoit le code du travail ». Ainsi, l'employeur justifie sa décision par un motif étranger à toute discrimination.

L'isolement physique et fonctionnel de Mme [K] a été démontré. Il n'est justifié par aucun élément qui serait étranger à toute discrimination.

La procédure de licenciement initiée en août 2014 ne traduit pas de la part de l'employeur, tout au moins en apparence, une discrimination, l'employeur se fondant sur un élément objectif étranger à toute discrimination comme en témoigne la pièce 19 dans laquelle apparaissent les propos virulents, outranciers et parfois vindicatifs de Mme [K]. Cependant, les propos de Mme [K] ne doivent pas être déconnectés du contexte, à savoir celui de la lecture de l'enquête du CHSCT qui a conclu à l'absence de discrimination alors qu'elle subit une mise à l'écart. Les conclusions du CHSCT pouvaient donc légitimement apparaître aux yeux de Mme [K] comme tout à fait inadmissibles et déclencher chez elle le sentiment qu'elle a maladroitement exprimé. Ce contexte enlève aux propos de Mme [K] leur caractère fautif. L'engagement de la procédure de licenciement, envisagé dans ledit contexte, est donc dépourvu de l'objectivité requise.

Deux faits qui laissent supposer l'existence d'une discrimination (l'ouverture d'une procédure de licenciement à l'encontre de Mme [K] et l'isolement de Mme [K]) ne sont pas justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

La discrimination syndicale est donc établie. Le jugement sera en conséquence infirmé sur ce point.

Le préjudice qui en est résulté pour Mme [K] sera correctement réparé par l'octroi d'une indemnité de 15 000 euros, somme au paiement de laquelle la SASU Sedi sera condamnée.

Sur le harcèlement moral :

L'article L. 1152-1 du code du travail dispose qu'« aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. ».

Le salarié est tenu d'établir la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, à charge pour le juge d'apprécier si ces éléments, pris en leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

A l'appui de sa demande, Mme [K] invoque :

- le contexte général et l'absence de prévention suffisante des risques psycho-sociaux,

- les difficultés rencontrées par elle du fait de son opposition à l'attribution d'une prime de production au profit des seuls superviseurs,

- la multiplication des procédures disciplinaires à son égard,

- d'autres faits qu'elle décrit ainsi :

. l'absence de polyvalence,

. l'isolement,

. les erreurs sur ses fiches de paie.

Elle ajoute que ces faits ont eu des répercussions sur sa santé.

Le contexte général et l'absence de prévention suffisante des risques psycho-sociaux est mis en évidence par le courrier du 18 juin 2014 du médecin du travail (pièce 13 de Mme [K]).

La question des difficultés rencontrées par Mme [K] du fait de son opposition à l'attribution d'une prime de production au profit des seuls superviseurs a déjà été évoquée plus haut, lorsqu'a été étudiée la question de l'avertissement qu'elle a reçu en raison de son attitude envers M. [H]. L'avertissement dont elle a alors fait l'objet était justifié de sorte que le grief que Mme [K] invoque n'est pas établi.

La question de la multiplication des procédures disciplinaires a été évoquée. Il a été admis que Mme [K] avait fait l'objet de rappels à l'ordre qui ne sont pas des sanctions disciplinaires. L'avertissement qui lui a été adressé le 28 mai 2014 n'était pas injustifié. En revanche, il a été vu que l'ouverture d'une procédure de licenciement était injustifiée. Mais il n'y a pas, comme le soutient Mme [K] de « multiplication » des procédures disciplinaires à son endroit.

L'absence de polyvalence et l'isolement ont été examinés plus haut. La cour a estimé que l'absence de polyvalence, avérée, était justifiée eu égard à l'absence de polyvalence des autres salariés. Elle a en revanche estimé que l'isolement dans lequel Mme [K] avait été maintenue n'était pas justifié par des raisons objectives. Quant aux erreurs sur les fiches de paie de Mme [K], dès lors que la salariée a été déboutée de ses demandes au titre de la prime d'assiduité et des tickets restaurant elles se limitent à une omission de l'employeur sur son bulletin de paie du mois d'octobre 2015 en rapport avec un jour de délégation que l'employeur a considéré à tort comme une absence injustifiée.

Finalement, les faits établis par la salariée, un contexte général d'absence de prévention suffisantes, l'ouverture d'une procédure de licenciement était injustifiée en 2014, l'isolement dans lequel Mme [K] avait été maintenue et une erreur d'un jour de délégation sur son bulletin de paie du mois d'octobre 2015, pris dans leur ensemble laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Il revient donc à l'employeur de justifier que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le dernier fait consiste en une erreur que l'employeur a rectifiée dès le 4 novembre 2015 (cf. pièce 90 de l'appelante). Il peut être admis que l'employeur ait de ce chef commis une erreur et il doit être observé qu'elle a du reste très rapidement été réparée. Cette erreur ne participe donc pas du harcèlement dénoncé.

En revanche, les trois premiers faits, dont deux sont communs à la discrimination syndicale ne sont justifiés par l'employeur par aucun élément objectif étranger à tout harcèlement.

Le harcèlement moral est donc établi.

Compte tenu des éléments qui précèdent et compte tenu de ce que Mme [K] apporte la démonstration de ce que les faits imputables à l'employeur (procédure de licenciement injustifiée et isolement) ont eu des répercussions sur sa santé (cf. ses pièces 34 à 37), étant rappelé que les obligations résultant des articles L. 1132-1 et celles résultant de l'article L. 1152-1 du code du travail sont distinctes en sorte que la méconnaissance de chacune d'elle, lorsqu'elles entraînent des préjudices distincts, ouvre droit à des réparations spécifiques, le préjudice subi par Mme [K] sera intégralement réparé par l'octroi d'une indemnité de 10 000 euros, somme au paiement de laquelle la SASU Sedi sera condamnée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La SASU Sedi succombant, il conviendra de la condamner aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La SASU Sedi sera par ailleurs condamnée à payer à Mme [K] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Écarte des débats le courrier et les documents transmis par Mme [K] en cours de délibéré,

Rejette la demande de Mme [K] tendant à écarter des débats la pièce adverse n°19,

Infirme partiellement le jugement et, statuant à nouveau,

Condamne la SASU Sedi (Societe d'Enrichissement de Données Informatiques) à payer à Mme [K] les sommes suivantes :

. 15 000 euros en réparation de son préjudice consécutif à la discrimination syndicale,

. 10 000 euros en réparation de son préjudice consécutif au harcèlement moral,

Confirme le jugement pour le surplus,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Condamne la SASU Sedi à payer à Mme [K] une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SASU Sedi aux dépens qui seront recouvrés conformément aux prescriptions de l'article 699 du code de procédure civile,

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 16/05593
Date de la décision : 19/12/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°16/05593 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-19;16.05593 ?
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