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13/12/2018 | FRANCE | N°18/01292

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 13 décembre 2018, 18/01292


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88H



5e Chambre











ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 13 DECEMBRE 2018



N° RG 18/01292



N° Portalis DBV3-V-B7C-SGX7



AFFAIRE :



CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES



C/

CENTRE [Établissement 1]







Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 23 Janvier 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES
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Copies exécutoires délivrées à :



Me Mylène BARRERE



Me Valérie SCHMIERER-LEBRUN





Copies certifiées conformes délivrées à :



CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES



CENTRE [Établissement 1]





le : ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88H

5e Chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 13 DECEMBRE 2018

N° RG 18/01292

N° Portalis DBV3-V-B7C-SGX7

AFFAIRE :

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

C/

CENTRE [Établissement 1]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 23 Janvier 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES

N° RG : 14-01137

Copies exécutoires délivrées à :

Me Mylène BARRERE

Me Valérie SCHMIERER-LEBRUN

Copies certifiées conformes délivrées à :

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

CENTRE [Établissement 1]

le :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE TREIZE DECEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

Département des affaires juridiques

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R295

APPELANTE

****************

CENTRE [Établissement 1]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Valérie SCHMIERER-LEBRUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 164

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Olivier FOURMY, Président chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,

Madame Caroline BON, Vice présidente placée,

Greffier, lors des débats : Madame Florence PURTAS,

Le Centre de rééducation fonctionnelle de l'[Établissement 1] ([Établissement 1]), sis à [Localité 3] (78) (ci-après, le 'Centre'), est un établissement de soins de suite et de réadaptation (SSR) privé.

L'établissement est financé par un prix de journée global.

Dans le cadre de l'article L. 162-22-6 d) du code de la sécurité sociale, le Centre a conclu, le 15 décembre 2003, avec l'agence régionale de santé de l'hospitalisation d'Ile-de-France ('ARHIF'), un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (ci-après, 'CPOM'), pour une durée de cinq ans.

L'établissement bénéficie, dans ce cadre, d'un financement par perception d'un prix de journée global par patient.

Aux termes de l'article 4 de l'annexe à ce contrat, l'établissement 'bénéficie, pour son service de soins polyvalents, d'un prix de journée tout compris. Par dérogation à la réglementation, notamment à l'article R. 162-31 et suivants du Code de la sécurité sociale, ce prix de journée couvre l'ensemble des frais, y compris la rémunération des praticiens, pris en charge par l'assurance maladie à l'occasion de l'hospitalisation de ses patients'.

L'article L. 162-22-5 du code de la sécurité sociale prévoit que les tarifs des prestations afférents aux activités exercées par les établissements de santé privés mentionnés au 'd' de l'article L. 162-22-6 sont fixés chaque année, dans le cadre d'un avenant tarifaire au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens.

La caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines (ci-après, la 'CPAM' ou la 'Caisse'), dans le cadre d'une action locale de contrôle des transports pris en charge et concernant des patients hospitalisés au sein du Centre, a constaté qu'au cours de la période du 1er avril 2010 au 29 février 2012, elle avait remboursé des prestations et transports en sus du prix de journée.

La CPAM estime avoir ainsi réglé, au total, à tort, un montant de 32 373,83 euros sur cette période.

La Caisse a informé le Centre de cette situation, le 14 septembre 2012.

Par courrier du 9 octobre 2012, le Centre a formulé des observations.

Le 21 janvier 2013, la Caisse a adressé au Centre une notification d'indu pour le montant de 32 373,83 euros, indiquant que les remarques qu'il avait faites ne permettaient pas de réduire ce montant.

Le 19 février 2013, le Centre a saisi la commission de recours amiable (ci-après, 'CRA') de la Caisse qui, lors de sa séance du 5 juin 2014, a rejeté le recours ainsi formé.

C'est dans ces conditions que, le 12 juillet 2014, le Centre saisissait le tribunal des affaires de sécurité sociale Yvelines ('TASS') en contestation de cette décision de la CRA.

Par jugement rendu en date du 23 janvier 2018 (RG 14-01137/V), le TASS a notamment :

. débouté la Caisse de sa demande en paiement de la somme de 32 373,83 euros à l'encontre du Centre de rééducation fonctionnelle [Établissement 1] ;

. débouté le Centre de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive ;

. condamné la Caisse à payer au Centre la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La CPAM a interjeté appel de ce jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience de la cour du 18 octobre 2018.

Par ses conclusions écrites soutenues oralement à l'audience, la CPAM demande à la cour de :

. infirmer le jugement du 23 janvier 2018 en toutes ses dispositions ; et statuant à nouveau,

. dire et juger bien fondée sa créance d'un montant de 32 373,83euros;

. accueillir sa demande reconventionnelle et condamner le Centre à lui rembourser la somme de 32 373,83 euros;

. rejeter la demande formulée par le Centre au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions écrites soutenues oralement à l'audience, le Centre demande à la cour de :

. déclarer la Caisse mal fondée en son appel ;

. confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

. condamner la Caisse à lui payer la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions et pièces déposées et soutenues à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A l'appui de son appel, la CPAM soutient en particulier, pour sa part, que le 'contrat constitue la loi des parties de sorte que lorsqu'un forfait est contractuellement institué afin de fixer un prix, nulle sortie de forfait ne peut être arbitrairement et unilatéralement décidée par l'une des parties'. La tarification dérogatoire à la réglementation s'entend notamment d'un prix de journée tout compris couvrant l'ensemble des frais pris en charge par l'assurance maladie à l'occasion de l'hospitalisation des patients y compris la rémunération des praticiens, ainsi que tous les médicaments, qu'ils soient ou non en rapport avec les causes de l'hospitalisation, les frais de transport et toutes autres dépenses de soins en cours de séjour SSR.

La CPAM souligne que seules les séances de dialyse, de chimiothérapie, de radiothérapie et les frais de transport afférents à ces traitements ont été expressément exclus du prix de journée et donnent lieu, sur justificatif, à un remboursement en sus du tarif journalier.

La CPAM ajoute que le 'fait que les signataires du CPOM aient exclus (sic) de la tarification 'prix de journée tout compris' seulement trois types d'actes, lesquels de par leur nature sont nécessairement prescrits et exécutés à l'extérieur de l'établissement, signifie bien en toute logique, que tous les autres prescrits et exécutés aussi hors établissement, doivent être inclus dans le prix de journée tout compris dès lors qu'ils se situent dans le temps de l'hospitalisation de l'établissement SSR' (en gras et souligné dans les conclusions).

La CPAM rappelle, enfin, que la position prise par l'un de ses subordonnés, dans un courrier du 15 mars 2006, selon lequel la Caisse aurait expressément admis que seuls les actes prescrits par l'établissement de soins de suite devaient être inclus dans le 'prix de journée tout compris', ne pouvait être invoquée par le Centre, dès lors que, par un courrier postérieure, le directeur général de la Caisse avait précisé: 'En revanche et dès à présent, l'ambiguïté que pouvait laisser subsister notre courrier du 15/03/2006 ayant été levée, je vous demande d'appliquer strictement les termes de la convention que vous avez signée et qui prévoit, je vous le rappelle, que le prix de journée est tout compris, exception faite des prestations limitatives énumérées à l'annexe tarifaire' (en gras dans l'original des conclusions).

Le Centre fait notamment valoir que la décision de la CRA de la CPAM a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, faute de mise en demeure préalable adressée par la caisse.

Sur le fond, le Centre souligne que les sommes dont le remboursement est demandée par la Caisse 'correspondent, non pas à des prestations dont a bénéficié le patient au sein de l'établissement, tel que prévu par l'article 4 de la (convention signée avec la Caisse), mais à des prestations diligentées à l'initiative de prestataires de santé extérieurs au Centre', en l'espèce des établissements publics hospitaliers.

Le Centre ajoute que la Caisse a déjà été déboutée par un jugement du TASS, en date du 6 mai 2014, dont elle n'a pas relevé appel, dans une affaire similaire.

Quant à la lettre du directeur de la Caisse du 28 juillet 2009, elle ne pouvait en aucune manière avoir une 'valeur légale'.

Par ailleurs, le Centre conteste le raisonnement a contrario de la Caisse, selon lequel seuls certains soins ont été expressément exclus du prix de journée, dès lors que le régime dérogatoire dont il bénéficie tel que défini par le CPOM ne s'applique qu'aux actes, consultations et transports y afférents en lien avec le séjour du patient au sein du SSR, et ne met en aucun cas à la charge de l'établissement le coût des actes de suivi post opératoires et des soins liés à des maladies intercurrentes ou le coût des transports y afférents.

Le Centre fait référence, à cet égard, à un courrier de l'hôpital [Établissement 2], en date du 7 avril 2010, dont il convient qu'il est postérieur à la période en cause ici, mais dans lequel le directeur de cet hôpital rappelle le principe du 'prescripteur-payeur', et écrit notamment: '(Le) transport ambulancier (de ces patients) est à notre charge' et invite en conséquence le Centre à télécopier sa commande d'ambulance 48 heures à l'avance.

Enfin, le Centre, soulignant que tant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines que celui de 'Bobigny' (en fait, celui de Seine Saint-Denis, la cour le précise à toutes fins) ont donné raison à des établissements SSR dans la même situation, refuse à la Caisse la possibilité d'adopter un raisonnement a contrario, comme a pu le faire la cour d'appel de Paris et considère que l'arrêt de cassation (Civ. 2, 15 février 2018) cité par la Caisse ne permet pas de considérer que la Cour de cassation a statué dans le sens invoqué par la Caisse. A titre subsidiaire, le Centre plaide que la Caisse 'ne démontre pas l'existence d'une créance certaine, liquide et exigible, justifiant une répétition de l'indu'. Le tableau produit par la Caisse constitue une preuve à soi-même et est au demeurant 'abscons et inexploitable'. Le centre explique que l'action en restitution de la CPAM est mal dirigée dès lors qu'il n'existe aucun indu, et que le Centre n'est ni le 'prescripteur' ni 'l'exécutant' des prestations, et n'a perçu aucun remboursement au titre de ces prestations. Le Centre en conclut qu'il ne peut être réclamé le remboursement d'une somme que lui-même n'a ni facturée, ni perçue.

Sur ce

La cour estime utile de mentionner ici que la procédure devant elle en matière de sécurité sociale est orale et que, à l'audience, elle a invité les parties à s'expliquer sur deux observations.

La première est que la cour de céans a déjà statué dans des affaires en tous points similaires à celle en cause ci, dans un sens défavorable à la Caisse (voir notamment l'affaire RG 16/01948 Société Clinéa contre Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine et Agence régionale de santé). Les parties ont indiqué ne pas avoir connaissance de ces décisions.

La seconde est que, si le CPOM prévoit expressément trois uniques cas dans lesquels les transports des malades peuvent être pris en charge en sus du prix de journée convenu dans le cadre du CPOM, ce dernier est en revanche silencieux sur ce qu'il advient en cas d'accident subi au sein du Centre, par exemple, ou de pathologie intercurrente pour laquelle un transport s'avère nécessaire qui n'est pas décidé par Le Centre. La cour croit comprendre de la réponse orale fournie par la défense de la Caisse que les frais encourus en de telles circonstances seraient inclus dans le prix de journée.

Par ailleurs, un autre dossier abordant des questions similaires, sinon identiques, dans lequel les parties étaient représentées par les mêmes conseils, a été débattue lors de la même audience de la cour, qui y apportera donc des réponses, toutes choses égales par ailleurs, similaires.

Sur la nécessité d'une mise en demeure préalable

Le Centre fait notamment valoir que ce sont les dispositions de l'article L. 133-4 et R. 133-9 (dans sa rédaction issue du décret du 20 août 2009) du code de la sécurité sociale qui doivent s'appliquer, lesquelles imposent une procédure en trois temps: une notification émise par la Caisse de payer les sommes réclamées tout en invitant le débiteur à présenter ses observations ; en cas de rejet total ou partiel de ces observations et en l'absence de règlement de l'indu, une mise en demeure de payer ; le débiteur peut contester cette mise en demeure devant la commission de recours amiable.

La CPAM ne répond pas sur ce point.

La cour de céans note que la Cour de cassation, dans un arrêt du 15 décembre 2016, a écarté l'hypothèse de la nécessité d'une mise en demeure préalable.

Cet arrêt (pourvoi n°15-28.915) se lit notamment :

Sur le deuxième moyen :

Vu les articles L. 133-4, R. 133-9-1 dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012 et R. 142-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que la société Hôpital privé [Établissement 3] (la société) a fait l'objet d'un contrôle d'activité portant sur la période courant du 1er mars au 31 décembre 2011 ; que ce contrôle ayant relevé des anomalies dans la tarification et la facturation de certains soins, la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Loire (la caisse) lui a adressé, le 23 septembre 2013, une notification de payer une certaine somme ; qu'à la suite du rejet de sa contestation par la commission de recours amiable, la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour accueillir ce recours et annuler la procédure de recouvrement, le jugement relève que la notification de payer précisait que l'établissement de soins disposait d'un délai de deux mois pour saisir la commission de recours amiable d'un recours ; que la société a usé de cette faculté ; qu'aucune mise en demeure n'a par la suite été adressée à cet établissement ; qu'il énonce que cette formalité destinée à l'information de l'établissement et par là-même à assurer le caractère contradictoire de la procédure présente un caractère substantiel et occasionne nécessairement un grief en cas de non-respect par l'organisme social ;

Qu'en statuant ainsi, alors que saisi d'un recours contre la décision de la commission de recours amiable de la caisse, il lui appartenait de prononcer sur le bien-fondé de l'indu, peu important l'absence de délivrance, par la caisse, d'une mise en demeure, le tribunal a violé les textes susvisés ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'en application de l'article 625 du code de procédure civile la cassation intervenue sur le deuxième moyen entraîne, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif déboutant la caisse de sa demande reconventionnelle tendant à voir condamnée la société au paiement de la somme de 2 088,09 euros ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement (entrepris). (souligné par la cour de céans)

La cour de céans considère qu'il n'existe aucune raison de se départir, dans le cas présent, de cette appréciation de la Cour de cassation, dès lors que le Centre ne peut alléguer aucune violation du contradictoire puisqu'il a pu à la fois faire valoir ses observations et contester au fond, devant la commission de recours amiable de la Caisse, le bien-fondé de l'indu qui lui était réclamé, avant que de ne faire valoir ses droits devant la juridiction sociale compétente.

Aucun grief ne peut être allégué par le Centre du fait de la procédure suivie par la Caisse.

La cour dira la procédure régulière.

Sur l'indu

A titre préliminaire, la cour observe que la circonstance que la Caisse n'aurait pas relevé appel d'un jugement qui lui était défavorable, dans une affaire similaire, n'est pas de nature à interdire à celle-ci de réclamer un indu dans la présente affaire.

En revanche, il peut être noté qu'il ne semble pas qu'un pourvoi ait été formé à l'encontre des décisions prises par la cour de céans dans les précédentes affaires mentionnées plus haut, observation faite, toutefois, qu'elles concernaient une autre caisse primaire d'assurance maladie (celle des Hauts de Seine).

La cour conçoit, certes, que, pour se référer à une note de l'ARS, les 'tarifs ont été fixés après une étude approfondie des charges d'un ou deux établissements de référence pour chaque spécialisation et chaque poste de dépense a été étudié avec la Fédération Hospitalière privée et le représentant légal de l'établissement identifié comme premier demandeur et référence pour les autres structures exerçant la même modalité'.

De fait, il est constant que, dans un souci de meilleure gestion mais surtout d'économie, l'Agence régionale de l'hospitalisation d'Ile de France a souhaité mettre en place un système spécifique de prise en charge des soins, notamment des soins de suite et de réadaptation, par la signature de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens.

Aux termes de ces CPOM, l'établissement 's'engage à respecter les tarifs qui lui sont applicables tels que fixés par les avenants tarifaires. Il se conforme aux caractéristiques de fonctionnement attachées au bénéfice de modalités tarifaires particulières, notamment prix de journée tout compris (pour les cliniques privées)'.

La cour ne peut cependant que constater que la Caisse ne lui soumet aucune des annexes listés au contrat, ni même le contrat lui-même, ce qui place la cour dans l'impossibilité de vérifier que les clauses invoquées par la Caisse figurent dans l'un ou l'autre de ces documents.

Par ailleurs, les tableaux 'd'anomalies' présentés par la Caisse, qui contiennent une liste de patients pour lesquels des 'actes' ont été ordonnés, sont inexploitables par la cour: ces actes sont codés, sans que la Caisse ne prenne la peine, élémentaire, de fournir la traduction de ces codes (ABA, AMI, CS, MCS, PH4, VSL, etc...), quand bien même certains renvoient vraisemblablement à des transports (VSL), à des prescriptions de médicaments (PH suivi d'un chiffre) ou à des consultations de spécialistes. Sur ce point, d'ailleurs, la cour souligne que la circonstance qu'un spécialiste ait été consulté ne justifierait pas pour autant la créance de la Caisse, puisqu'il pourrait s'agir de l'une des spécialités exclues du prix de journée global (chimiothérapie, radiothérapie ou dialyse).

En tout état de cause, la Caisse ne conteste pas que sa réclamation résulte d'un changement d'interprétation des conventions, sans qu'elle fournisse aucune explication sur ce revirement, quand bien même il relève effectivement des pouvoirs du directeur de la Caisse d'infirmer la position précédemment prise par l'un de ses subordonnés.

Pourtant, rien ne justifie que le principe du 'prescripteur-payeur' soit remis en cause soudainement.

Si les CPOM prévoient expressément trois exceptions seulement, à savoir les transports liés aux soins de chimiothérapie, de radiothérapie ou de dialyse, il demeure que, comme la Caisse l'a souligné elle-même dans ses écritures, chaque poste de dépense a été étudié par la fédération hospitalière avant que ne soit déterminé le prix de journée.

Or, précisément, les transports en cause ici ne peuvent constituer un tel 'poste de dépense' puisque, par définition, ils ne peuvent être ni anticipés ni connus par le Centre.

En effet, il n'est aucunement démontré que ces transports ne sont pas déterminés par la demande d'un médecin qui n'est pas le salarié du Centre et à la demande duquel celui-ci ne saurait s'opposer (sauf motif impératif de santé, naturellement).

En d'autres termes, imposer aux établissements privés de santé sous CPOM de payer pour de tels transports reviendrait à leur demander d'anticiper sur l'imprévisible.

La Caisse ne fournit au demeurant aucun élément d'aucune sorte qui permettrait de considérer que de tels transports ont été pris en compte lors des discussions ayant conduit au prix de journée.

Enfin, la position de la Caisse est incohérente puisque, si les transports devaient être pris en charge par le Centre, celui-ci devrait également prendre en charge les soins justifiant ce transport. Or, précisément, il ne résulte pas des écritures de la Caisse qu'elle demande que ces frais soient imputés au Centre.

Quant aux prescriptions de médicaments qui auraient été remboursées à tort, la cour ne peut que souligner que la Caisse ne présente aucune explication qui permettrait à la cour d'apprécier le bien-fondé, éventuel, de sa demande, étant souligné que toutes les observations faites ci-dessus en ce qui concerne les transports sont, toutes choses égales par ailleurs, transposables à ces prescriptions.

Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que la Caisse a prétendu au remboursement par le Centre d'une somme d'un montant de 32 373,83 euros.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Le premier juge a alloué au Centre la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Centre sollicite de la cour la condamnation de la Caisse à lui payer, en cause d'appel, la somme de 4 500 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Caisse ne formule aucune demande à cet égard.

Elle sera condamnée à payer au Centre une somme de 1 000 euros, en cause d'appel, sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, par arrêt réputé contradictoire,

Confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines en date du 23 janvier 2018 (RG 14/01137/V) en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines à payer au Centre de rééducation fonctionnelle de l'[Établissement 1] ([Établissement 1]) la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de toute demande autre, plus ample ou contraire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Florence Purtas, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 18/01292
Date de la décision : 13/12/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°18/01292 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-13;18.01292 ?
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