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24/10/2018 | FRANCE | N°17/01841

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 24 octobre 2018, 17/01841


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 24 OCTOBRE 2018



N° RG 17/01841 - N° Portalis DBV3-V-B7B-ROUA



AFFAIRE :



Me [C] [S] (SELARL PJA) - Mandataire liquidateur de l'EURL L'EPI HOTEL





C/



[L] [N]





AGS CGEA [Localité 1]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'homm

es - Formation paritaire de CHARTRES

Section : Commerce

N° RG : 14/00530





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Nicole GRYSON



Me Jean-Christophe LEDUC



SCP HADENGUE & ASSOCIÉS



Copies certifiées conformes délivr...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 24 OCTOBRE 2018

N° RG 17/01841 - N° Portalis DBV3-V-B7B-ROUA

AFFAIRE :

Me [C] [S] (SELARL PJA) - Mandataire liquidateur de l'EURL L'EPI HOTEL

C/

[L] [N]

AGS CGEA [Localité 1]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARTRES

Section : Commerce

N° RG : 14/00530

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Nicole GRYSON

Me Jean-Christophe LEDUC

SCP HADENGUE & ASSOCIÉS

Copies certifiées conformes délivrées à :

Pôle emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE OCTOBRE DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Me [S] [C] (SELARL PJA) - Mandataire liquidateur de l' EURL L'EPI HOTEL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Nicole GRYSON, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000023

APPELANTE

****************

Monsieur [L] [N]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Jean-Christophe LEDUC, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000045

INTIMÉ

****************

AGS CGEA [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Hubert MARTIN DE FREMONT de la SCP HADENGUE & ASSOCIÉS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 substitué par Me Marion HOVSEPIAN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 283

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Septembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc LEBLANC, président chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Luc LEBLANC, Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 21 septembre 2011, M. [L] [N] a été engagé par la société L'Epi Hôtel en qualité de réceptionniste tournant, niveau I, échelon 3 de la convention collective des cafés, restaurants, hôtels. Dans le dernier état de la relation contractuelle, le salarié percevait une rémunération mensuelle brute de 1 878,32 €.

Invoquant les manquements de son employeur à ses obligations contractuelles, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Chartres, le 19 septembre 2014, d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail.

M. [N] a été placé en arrêt de travail le 17 septembre 2014 pour plus de trois mois. A la visite de reprise du 22 décembre 2014, le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude définitive de M. [N] à son poste dans le cadre de la procédure d'urgence pour danger immédiat. Cet avis a été notifié à l'employeur le 26 décembre 2014.

Par lettre du 14 janvier 2015, la société L'Epi Hôtel informait l'intéressé de l'absence de toute possibilité de reclassement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 janvier 2015, le médecin du travail écartait toute possibilité de reclassement dans l'entreprise.

Après avoir été convoqué, le 26 janvier 2015, à un entretien préalable à son éventuel licenciement pour le 5 février 2015, M. [N] a été licencié pour inaptitude physique par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 février 2015.

La société L'Epi Hôtel employait moins de onze salariés au moment de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 11 janvier 2016, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, prétentions et moyens antérieurs des parties, les premiers juges ont :

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [N] à la date du 13 février 2015 et dit qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamné la société L'Epi Hôtel à verser à M. [N] les sommes suivantes :

- 3 500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 756,64 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 375,66 € correspondant aux congés payés y afférents,

- 1 565,26 € à titre de rappel de salaire et 156,53 € correspondant aux congés payés y afférents,

- 1 122,81 € au titre de l'indemnité de licenciement,

- 500 € à titre de rappel de salaire pour absence de respect des temps de pause,

- 50 € à titre d'indemnité pour remise tardive des documents de fin de contrat,

- 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la société L'Epi Hôtel de remettre à M. [N] ses documents sociaux rectifiés conformément au présent jugement, l'ensemble des documents sous astreinte de 30 € par jour de retard à compter du 30e jour suivant la notification de la présente décision,

- dit que le bureau de jugement se réserve le droit de liquider l'astreinte,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit sur les sommes de droit,

- dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire de M. [N] est de 1 878,32 €,

- débouté M. [N] du surplus de ses demandes,

- débouté la société L'Epi Hôtel de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

- condamné la société L'Epi Hôtel aux entiers dépens qui comprendront les frais d'exécution éventuels.

La société L'Epi Hôtel a régulièrement relevé appel du jugement par déclaration formée au greffe le 4 février 2016.

Par jugement du 7 juillet 2016, le tribunal de commerce de Chartres a prononcé la liquidation judiciaire de la société L'Epi Hôtel et nommé la société PJA, représentée par Maître [C] [S], en qualité de liquidateur.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 11 septembre 2018 après réinscription de l'affaire en avril 2017, le liquidateur judiciaire de la société L'Epi Hôtel demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire à ses torts,

- constater que la rupture du contrat de travail est imputable au licenciement pour inaptitude du salarié et à l'impossibilité de reclassement, avec toutes les conséquences de droit,

- débouter M. [N] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis comme non fondée,

- lui donner acte du versement par elle de l'indemnité de licenciement,

- débouter M. [N] de ses demandes d'indemnités au titre des temps de pause de même qu'au titre de la remise tardive des documents de fin de contrat, comme non fondées,

- condamner M. [N] au versement d'une somme de 1 000 € pour procédure abusive sur le fondement de l'article 1382 du code civil ainsi que de la somme de 3 000 € au titre d'une indemnité pour frais irrépétibles de 1ère instance et d'appel,

- condamner M. [N] aux dépens de 1ère instance et d'appel,

- déclarer la décision opposable à l'AGS.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 11 septembre 2018, l'UNEDIC, délégation AGS CGEA [Localité 1], demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes de dommages et intérêts pour utilisation d'un système de vidéosurveillance et d'indemnité pour entretien des tenues de travail,

- infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [N] en date du 13 février 2015 et fait droit à ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents, de rappel de salaire et de congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement, de rappel de salaire pour absence de respect des temps de pause, d'indemnité pour remise tardive des documents de fin de contrat,

- et statuant à nouveau, constater que M. [N] ne justifie d'aucun manquement suffisamment grave de nature à rendre impossible la poursuite du contrat de travail,

- débouter M. [N] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail,

- constater le mal-fondé des demandes de M. [N],

- en conséquence, débouter M. [N] de ses demandes, fins et prétentions,

- à titre subsidiaire, débouter M. [N] de sa demande d'indemnité de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis,

- limiter à un mois de salaire le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouter M. [N] de ses demandes de rappels de salaire et congés payés y afférents,

- débouter M. [N] de sa demande d'indemnité pour entretien des tenues, pour remise tardive des documents de fin de contrat, et pour utilisation d'un système de vidéosurveillance,

- à titre très subsidiaire, ramener à de plus justes proportions le quantum des dommages et intérêts,

- en tout état de cause, mettre hors de cause l'AGS s'agissant des frais irrépétibles de la procédure,

- dire et juger que la demande qui tend à assortir les intérêts au taux légal ne saurait prospérer postérieurement à l'ouverture de la procédure collective en vertu des dispositions de l'article L. 622-28 du code du commerce,

- fixer l'éventuelle créance allouée au salarié au passif de la société,

- dire que le CGEA, en sa qualité de représentant de l'AGS, ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-19 à 21 et L. 3253-17 du code du travail,

- dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 11 septembre 2018, M. [N] demande à la cour de :

- recevoir la société PJA, ès qualités de mandataire liquidateur de la société L'Epi Hôtel en son appel,

- dire la société PJA néanmoins particulièrement mal fondée et la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- le recevoir en son appel incident,

- confirmer le jugement rendu en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date du 13 février 2015 et en ce qu'il a retenu que la résiliation produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

- voir fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société l'Epi Hôtel aux sommes suivantes :

- 1 565,26 € à titre de rappel de salaire (article L.1226-4 du code du travail) et 156,53 € correspondant aux congés payés y afférents,

- 3 756,64 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 375,66 € correspondant aux congés payés y afférents,

- 1 122,81 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 3 283, 69 € à titre de rappel de salaire pour absence de respect des temps de pause et 328,37 € correspondant aux congés payés y afférents,

- 2 070 € à titre d'indemnité pour entretien des tenues de travail,

- 500 € à titre d'indemnité pour remise tardive des documents de fin de contrat,

- 1 000 € à titre d'indemnité pour utilisation d'un système de vidéosurveillance irrégulier,

- 20 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- décerner en sus injonction à la SELARL PJA, ès qualités de mandataire liquidateur de la société L'Epi Hôtel, d'avoir à lui remettre, sous astreinte journalière de 100 € qui courra passé un délai de quinzaine suivant la notification de l'arrêt à intervenir :

'Un bulletin de salaire conforme,

'Une attestation destinée au Pôle emploi conforme,

'Un certificat de travail conforme,

- ordonner à la société PJA, ès qualités de mandataire liquidateur de la société L'Epi Hôtel, de diligenter la procédure de remboursement auprès du CGEA,

- voir déclarer opposable la décision à intervenir au CGEA pris en sa qualité d'assurance garantie des salaires,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

MOTIFS :

Vu les conclusions des parties,

Vu la lettre de licenciement,

Considérant que lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande du salarié est justifiée et, dans le cas contraire, se prononcer sur le licenciement ;

Qu'il convient donc d'examiner la demande en résiliation présentée par M. [N], le 19 septembre 2014, avant de se prononcer, le cas échéant, sur son licenciement intervenu le 13 février 2015 ;

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail :

Considérant que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [N] est fondée sur le fait que l'employeur n'aurait procédé ni à son reclassement ou à son licenciement, ni repris le paiement de son salaire dans le délai d'un mois prévu à l'article L. 1226-4 du code du travail à compter de la date de l'examen médical de reprise ayant constaté son inaptitude ;

Considérant que le salarié estime que l'inobservation de ce délai et l'absence de reprise du paiement de salaire constitue de la part de l'employeur un manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations contractuelles pour rendre impossible la poursuite de son contrat de travail ;

Considérant cependant que l'employeur justifie avoir engagé la procédure de licenciement, le 26 janvier 2015, un mois après la notification de l'avis d'inaptitude intervenue le 26 décembre 2014 ;

Considérant qu'au demeurant, à la date où le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire, ce grief n'était pas encore né et ne constituait donc pas le motif de son action ;

Considérant qu'à l'appui de sa demande en résiliation, M. [N] invoque aussi l'atteinte à la dignité qu'il aurait subi à la suite des propos humiliants que son employeur lui aurait tenus au mois de septembre 2014 mais cet incident isolé, dont les parties se rejettent mutuellement la responsabilité, ne constitue pas à lui seul un manquement suffisamment grave pour rendre impossible le maintien du contrat de travail de l'intéressé ;

Considérant qu'enfin, les griefs relatifs au non-paiement des temps de pause ou à l'absence de remboursement des frais d'entretien de la tenue de travail sont trop anciens pour pouvoir fonder la demande en résiliation judiciaire et le second est de toute façon erroné ;

Considérant que dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le contrat devait être résilié aux torts de l'employeur alors que celui-ci n'avait commis aucun manquement grave à ses obligations contractuelles ; que notamment, il avait bien engagé une procédure de licenciement à la suite de l'inaptitude de son salarié et de l'impossibilité de le reclasser et le dépassement éventuel du délai d'un mois ne prive pas le licenciement prononcé de cause réelle et sérieuse ;

Que le jugement sera donc infirmé sur ce point et M. [N] sera débouté de sa demande de résiliation judiciaire ;

Sur le bien-fondé du licenciement :

Considérant qu'en l'espèce, le licenciement de M. [N] fait suite à la reconnaissance, le 22 décembre 2014, de son inaptitude définitive à occuper son poste de travail et à l'absence de toute possibilité de reclassement dans l'établissement hôtelier qui l'employait ;

Considérant que la réalité et le sérieux du motif de licenciement ainsi que l'exécution de l'obligation de reclassement de l'employeur ne font l'objet d'aucune critique ;

Considérant qu'il y a donc lieu de dire que le licenciement de M. [N] est bien fondé et de le débouter de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de celle tendant à la remise tardive de documents de fin de contrat rectifiés ;

Sur les conséquences financières du licenciement :

Considérant qu'en application de l'article L 1226-4, alinéa 3, du code du travail, en cas de licenciement prononcé pour inaptitude non professionnelle, le préavis n'est pas exécuté et cette inexécution ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice ;

Considérant que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il alloue à M. [N] une indemnité au titre du préavis et les congés payés afférents ;

Considérant qu'en raison de son ancienneté, le salarié a droit en revanche à une indemnité de licenciement d'un montant de 1 191 €, compte tenu de l'absence de prise en compte de la période de suspension du contrat de travail pour la détermination de la durée de l'ancienneté ;

Considérant que dans ces conditions, le dispositif du jugement sera infirmé en son quantum et il sera donné acte à l'employeur du versement de cette indemnité ;

Sur les demandes de rappel de salaire :

Considérant que M. [N] présente d'abord une demande en paiement de la somme de 1 565,26 € représentant le montant du salaire qui lui est dû sur le fondement de l'article L. 1226-4 du code du travail lorsque le licenciement n'intervient pas dans le délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise ;

Considérant que sur point, la condamnation prononcée par les premiers juges est justifiée et sera confirmée ;

Considérant que le salarié se prévaut ensuite des dispositions de l'article L. 3121-33 du code du travail prévoyant une pause obligatoire de vingt minutes chaque fois que le temps de travail effectif quotidien atteint six heures ;

Considérant qu'en l'espèce, il ressort des plannings de travail produits aux débats que l'intéressé effectuait un travail quotidien de plus de six heures ;

Considérant que l'employeur ne justifie pas lui avoir permis de bénéficier des temps de pause prévus par la loi ;

Considérant qu'il est également établi que les fonctions de réceptionniste exercées par le salarié ne lui auraient pas permis de s'éloigner de son poste de travail pendant les pauses ;

Considérant que, dans ces conditions, le salarié est en droit de réclamer le paiement de l'intégralité des salaires dont il a été privé ;

Considérant qu'il lui sera alloué la somme de 3 283,69 € de rappel de salaire au titre des temps de pause non pris et celle de 328,37 € correspondant aux congés payés correspondants ;

Que le jugement qui a limité à 500 € le montant du rappel de salaire sera infirmé pour le quantum retenu ;

Considérant que l'employeur devra remettre au salarié les bulletins de salaire conformes à la présente décision sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette condamnation d'une mesure d'astreinte ;

Sur les autres demandes salariales et indemnitaires :

Considérant que le salarié présente une demande en paiement des frais d'entretien de sa tenue de travail sur le fondement de l'article L. 1121-1 du code du travail au motif que ses fonctions l'amenaient à porter une tenue vestimentaire imposée ;

Considérant cependant que les premiers juges ont à juste titre débouté M. [N] de cette demande après avoir constaté qu'il lui était seulement demandé de 'porter une tenue stricte, correcte et propre' ;

Considérant que le salarié n'était donc soumis à aucune contrainte vestimentaire particulière pour son travail et le salarié n'a donc pas exposé d'autres dépenses que celles lui incombant normalement pour l'entretien de ses vêtements habituels ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Considérant M. [N] demande également une indemnisation en raison de la mise en place dans l'entreprise d'un système de vidéosurveillance sans respect des formalités nécessaires auprès des autorités compétentes ni information des salariés concernés ;

Considérant toutefois que l'employeur fait observer que les caméras de surveillance ne sont pas destinés à surveiller le personnel mais à protéger l'établissement contre les vols et autres effractions, l'installation étant légère et proportionnée à son objet ;

Considérant que les premiers juges ont débouté à bon droit le salarié de sa demande après avoir constaté que les caméras ne procédaient à aucun enregistrement et fait ressortir que l'intéressé ne justifiait d'aucun préjudice ;

Que le jugement sera donc également confirmé de ce chef ;

Sur les autres demandes :

Considérant que M. [N] soutient que les documents de fin de contrat lui ont été remis tardivement et que ce retard lui a nécessairement causé préjudice ;

Considérant cependant que ces documents ont été mis à la disposition de M. [N], le 25 février 2015, soit douze jours après la notification de son licenciement et le salarié ne justifie aucunement du dommage que cela lui aurait causé ;

Considérant que c'est donc à tort que les premiers juges ont considéré que la non-remise de ces documents dès l'expiration du contrat lui avait nécessairement porté préjudice et ont condamné l'employeur à lui verser la somme de 50 € à titre d'indemnité ;

Que le jugement sera donc infirmé de ce chef ;

Considérant qu'en raison de la liquidation judiciaire dont l'employeur fait l'objet, il convient de fixer au passif de la société l'Epi Hôtel les sommes auxquelles elle est tenue au profit de M. [N] ;

Considérant qu'il sera également rappelé que les intérêts au taux légal ne pourront prospérer postérieurement à l'ouverture de la procédure collective en vertu des dispositions de l'article L. 622-8 du code du commerce ;

Considérant qu'enfin, il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA [Localité 1] qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et de déclarer que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement ;

Considérant que la demande en paiement d'une indemnité pour procédure abusive sera rejetée dès lors qu'une partie au moins des prétentions de M. [N] est justifiée ;

Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il n'y a pas lieu de faire application en l'espèce des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire ;

Infirme le jugement sauf en ce qu'il déboute M. [L] [N] de ses demandes de prise en charge de l'entretien de ses tenues de travail, de dédommagement pour l'utilisation non conforme d'un système de vidéosurveillance et lui accorde un rappel de salaire d'un montant de 1 565,26 € ainsi que 156,53 € correspondant aux congés payés y afférents ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Déboute M. [L] [N] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ;

Dit que son licenciement du 13 février 2015 repose sur une cause réelle et sérieuse ;

Le déboute en conséquence de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et de congés payés y afférents ;

Constate que l'intéressé a déjà perçu l'indemnité de licenciement de 1 191 € correspondant à son ancienneté ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société l'Epi Hôtel les sommes suivantes en faveur de M. [L] [N] :

- 1565,26 € à titre de rappel de salaire pour la période postérieure au délai d'un mois suivant l'examen médical de reprise et 156,53 € correspondant aux congés payés y afférents ;

- 3 283,69 € à titre de rappel de salaire au titre des temps de pause non pris et 328,37 € correspondant aux congés payés y afférents ;

Rappelle que la production d'intérêts sur ces sommes est suspendue par l'effet de la procédure collective dont fait l'objet la société l'Epi Hôtel ;

Déboute M. [L] [N] de sa demande d'indemnité pour remise tardive des documents de fin de contrat ;

Ordonne la remise à M. [L] [N] de bulletins de salaire conformes à la présente décision et dit n'y avoir lieu d'assortir cette décision d'une mesure d'astreinte ;

Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA [Localité 1] qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et déclare que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement ;

Déboute la société PJA, prise en la personne de Me [C] [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société l'Epi Hôtel de sa demande en paiement d'une indemnité de 1 000 € pour procédure abusive ;

Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Laisse les éventuels dépens à la charge de chacune des parties qui les a engagés ;

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Luc LEBLANC, président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 17/01841
Date de la décision : 24/10/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°17/01841 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-24;17.01841 ?
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