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17/10/2018 | FRANCE | N°16/01712

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 17 octobre 2018, 16/01712


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 17 OCTOBRE 2018



N° RG 16/01712 - N° Portalis DBV3-V-B7A-QS7W



AFFAIRE :



Corinne X...





C/



SARL LA VIE FACILE - 497 972 760









Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 28 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

Section : ActivitÃ

©s diverses

N° RG : 14/01620





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Aurélie Y...



Me Z... A...



le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 17 OCTOBRE 2018

N° RG 16/01712 - N° Portalis DBV3-V-B7A-QS7W

AFFAIRE :

Corinne X...

C/

SARL LA VIE FACILE - 497 972 760

Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 28 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

Section : Activités diverses

N° RG : 14/01620

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Aurélie Y...

Me Z... A...

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:

Madame Corinne X...

[...]

[...]

Assistée de Me Aurélie Y..., avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 412

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2016/005079 en vertu de l'ordonnance du 16 novembre 2016 rendue par le magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel de Versailles)

APPELANTE

****************

SARL LA VIE FACILE - 497 972 760

[...]

Comparante en la personne de M. Olivier B... (gérant),assisté de Me Z... A..., avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0409,

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Septembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc C..., président chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Luc C..., Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en date du 1er octobre 2012, Mme Corinne X... a été engagée par la société La Vie Facile en qualité d'agent de service, niveau 1. Initialement fixée à 5 heures de travail hebdomadaire, la durée du travail a été portée, par avenant du 1er février 2013, à 9h30 par semaine.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, la salariée percevait une rémunération mensuelle brute de 1 070,27 €.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 décembre 2013, Mme X... a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 27 décembre 2013 puis s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par lettre adressée sous la même forme le 14 janvier 2014. Il lui était reproché d'avoir falsifié la signature d'une personne âgée et l'absence des interventions prévues au domicile de cette personne.

La société La Vie Facile employait moins de onze salariés au moment de la rupture du contrat de travail.

Contestant son licenciement, Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency, le 26 décembre 2014, pour demander essentiellement la requalification de son contrat en contrat de travail à temps complet ainsi que le paiement de rappel de salaire et diverses indemnités pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 28 janvier 2016, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, prétentions et moyens soutenus devant eux, les premiers juges ont :

- dit que Mme X... n'avait pas dénoncé dans le délai de six mois le solde de tout compte,

- dit que les demandes de rappel de salaire, de congés payés, de requalification du contrat de travail et de fixation du salaire mensuel brut ainsi que la demande d'indemnité pour irrégularité de procédure, celles pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, préavis, étaient infondées,

- débouté Mme X... de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société La Vie Facile de sa demande reconventionnelle,

- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens éventuels.

Mme X... a régulièrement relevé appel du jugement par lettre recommandée avec accusé de réception le 10 mars 2016.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 4 septembre 2018, Mme X... demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

- constater la recevabilité de ses demandes,

- requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et fixer le salaire mensuel brut à la somme de 1 738,13 €.

- condamner la société La Vie Facile à lui payer en conséquence les sommes suivantes :

- 13 200,59 € bruts à titre de rappel de salaire du 1er janvier au 31 décembre 2013 et 1 320,05 € au titre des congés payés y afférents,

- 1 738,13 € à titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure,

- ordonner la remise des bulletins de salaires de janvier à décembre 2013 rectifiés sous astreinte de 50 € par document et par jour de retard,

- requalifier le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner en conséquence la société La Vie Facile à lui payer les sommes suivantes :

- 15 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 738,13 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 173,81 € au titre de congés payés y afférents,

- 434,52 € à titre d'indemnité de licenciement,

- condamner la société La Vie Facile au paiement de la somme de 1 800 € sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 4 septembre 2018, la société La Vie Facile demande à la cour de :

- à titre principal, constater que Mme X... n'a pas dénoncé dans le délai de six mois imparti son reçu pour solde de tout compte signé et daté du 24 janvier 2014,

- déclarer irrecevables et rejeter les demandes de rappel de salaires, au titre des congés payés, de requalification du contrat de travail, de fixation de salaire mensuel brut et de remise de bulletins de salaires rectifiés,

- débouter Mme X... de l'ensemble de ses autres demandes,

- à titre subsidiaire, constater le caractère injustifié et infondé des demandes de Mme X...,

- débouter Mme X... de l'intégralité de ses demandes, fins, moyens et prétentions,

- en tout état de cause,

- confirmer le jugement rendu en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme X... et l'a déboutée,

- dire et juger que le licenciement de Mme X... est justifié, régulier et qu'il repose sur une faute grave,

- condamner Mme X... à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme X... aux entiers dépens.

MOTIFS :

Sur la recevabilité des demandes de Mme X... :

Considérant que pour s'opposer à ces demandes, la société La Vie Facile se prévaut d'abord du fait que Mme X... a signé son reçu pour solde de tout compte et ne l'a pas dénoncé dans le délai de six mois qui lui était imparti par l'article L. 1234-20 du code du travail ;

Considérant cependant que le reçu pour solde de tout compte ne produit un effet libératoire pour l'employeur qu'à l'égard des éléments de rémunération dont le paiement a été envisagé par les parties ;

Considérant qu'en l'espèce, le reçu pour solde de tout compte ne porte que sur la somme de 842,59 € correspondant aux éléments de salaire pris en compte sur le bulletin de paie de janvier 2014 et n'a d'effet libératoire que pour cette somme ;

Considérant que la signature par la salariée de son reçu pour solde de tout compte ne lui interdit donc pas de demander la requalification de son contrat avec les conséquences financières en résultant et ne vaut pas renonciation à contester la cause réelle et sérieuse de son licenciement ;

Considérant que c'est donc à tort que les premiers juges se sont fondés sur l'effet libératoire du reçu pour solde de tout compte pour rejeter l'ensemble des prétentions dont ils étaient saisis par Mme X... ;

Sur la demande de requalification du contrat de travail en contrat à temps complet :

Considérant que Mme X... demande la requalification de son contrat au motif que la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail excédait largement les durées prévues au contrat et qu'elle accomplissait en réalité des heures complémentaires au-delà de la limite du dixième mentionnée à l'article L. 3123-8 du code du travail ;

Considérant qu'elle ajoute qu'elle ne connaissait pas à l'avance la durée exacte de travail et sa répartition sur la semaine ou le mois de sorte qu'elle était dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail et se tenait en permanence à la disposition de son employeur ;

Considérant toutefois que le contrat de travail et son avenant du 1er février 2013 comportent les mentions obligatoires prévues à l'article L. 3123-6 du code du travail, à savoir la durée hebdomadaire et mensuelle de travail envisagée ainsi que sa répartition précise entre les jours de la semaine et rappelle la possibilité d'accomplir des heures complémentaires dans la limite de 10% de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail ;

Considérant que ces documents fixent non seulement la durée de travail convenue entre les parties et sa répartition entre les jours de la semaine mais déterminent aussi le nombre d'heures de travail nécessaires et le jour exact de chaque intervention au domicile des personnes aidées nommément désignées ;

Considérant que l'employeur rapporte ainsi la preuve que la salariée n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;

Considérant ensuite que le seul dépassement des heures complémentaires au-delà du dixième du temps contractuel n'entraîne pas nécessairement la requalification du contrat en contrat à temps complet ;

Considérant qu'en l'espèce, le recours par l'employeur à des heures complémentaires n'a jamais eu pour effet de porter la durée de travail de la salariée au-delà de la durée légale et les interventions supplémentaires de quelques heures qu'il lui était demandé d'effectuer certains jours de la semaine chez des clients réguliers ne l'empêchait pas d'exercer d'autres activités au cours de la même semaine ;

Considérant que, dans ces conditions, la demande en requalification présentée par Mme X... en raison de l'accomplissement excessif d'heures complémentaires n'est pas fondée ;

Que les demandes en fixation et en paiement de salaire et remise de documents rectifiés seront en conséquence rejetées ;

Sur la demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement :

Considérant que Mme X... présente une demande indemnitaire au motif que son licenciement serait intervenu après la dénonciation d'une rupture conventionnelle ;

Considérant que l'employeur conteste avoir fait une telle proposition de rupture ;

Considérant que le formulaire de rupture conventionnelle produit par Mme X... n'est pas revêtu de la signature de l'employeur ;

Considérant qu'il n'est donc pas établi que la société La Vie Facile ait, comme l'affirme la salariée, détourné de son objet l'entretien préalable du 27 décembre 2013 en lui proposant de rompre son contrat de travail d'un commun accord ;

Considérant qu'en réalité, la procédure de licenciement a bien été observée, la salariée ayant été en mise en mesure de présenter sa défense après avoir reçu le 13 décembre 2013 une lettre recommandée la convoquant à un entretien préalable à un éventuel licenciement et s'y étant rendue avec l'assistance d'un conseiller ;

Considérant qu'il convient donc de débouter Mme X... de sa demande en paiement d'une indemnité pour irrégularité de procédure ;

Sur la contestation du bien-fondé du licenciement :

Considérant que la faute grave s'entend d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation de ses obligations contractuelles d'une importance telle que cela rend impossible son maintien dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; que la charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur ;

Considérant qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reproche à Mme X... d'avoir remis à son employeur des feuilles d'heures comportant des signatures grossièrement imitées d'une cliente et de pas avoir assuré, à trois reprises, les interventions prévues auprès de cette personne âgée, sans avoir prévenu sa hiérarchie ni apporté le moindre justificatif pour ces absences ;

Considérant que pour établir le premier grief, la société La Vie Facile verse aux débats les feuilles d'heures des mois d'août et septembre 2013 sur lesquelles figure une signature différente de celle de la cliente ainsi qu'une attestation de celle-ci déniant la signature apposée sur ces feuilles au bas de la mention 'signature client' ;

Considérant que Mme X... soutient que ce grief ne peut pas fonder son licenciement dans la mesure où les faits datent de plus deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement;

Considérant cependant que l'employeur fait observer à juste titre que le délai de prescription prévu à l'article L. 1332-4 du code du travail ne court qu'à compter de la découverte du comportement fautif de la salariée et qu'en l'espèce, il n'en a eu exactement connaissance qu'à partir du moment où la cliente lui a confirmé, par l'attestation du 26 novembre 2013, ne pas avoir signé les documents litigieux ;

Considérant ensuite que Mme X... fait observer qu'il n'est pas établi que les heures comptabilisées n'ont pas été effectuées mais ne dément pas avoir imité la signature de Mme D... alors que celle-ci avait jusqu'alors toujours signé les feuilles de travail ;

Considérant que l'employeur relève aussi que le fait que Mme D... reproche à Mme X... la falsification du nombre d'heures de travail accomplies ne signifie pas qu'elles aient été effectivement réalisées ;

Considérant que pour établir le second grief, la société La Vie Facile verse aux débats la feuille d'heures du mois d'octobre 2013 sur laquelle Mme D... a relevé que la salariée avait été absente à deux reprises, les 8 et 22 octobre 2013 ;

Considérant que pour se défendre, la salariée prétend que l'employeur ne justifie pas lui avoir adressé ses plannings en respectant le délai de prévenance mais l'examen des feuilles de prestations montre qu'elle était, chaque semaine, chargée de la même intervention chez Mme D... de 14h à 17h ;

Considérant qu'il est donc démontré que Mme X... n'a pas assuré l'ensemble des interventions qu'elle devait accomplir auprès de Mme D..., sans avoir prévenu sa hiérarchie ni justifié de ses absences ;

Considérant qu'enfin, il n'existe aucun élément sérieux permettant de dire que le licenciement aurait en réalité pour cause, comme l'affirme la salariée, son prétendu refus de rompre le contrat de travail d'un commun accord ou sa volonté d'obtenir un contrat à temps plein ;

Considérant que le fait d'apposer sur des fiches de travail des signatures falsifiées relatives à l'exécution de ses prestations et de laisser sans justification une personne âgée seule et sans assistance constitue de la part de la salariée une faute grave rendant impossible son maintien pendant la période du préavis ;

Considérant que Mme X... sera donc déboutée de sa demande en paiement des indemnités de rupture et de ses prétentions indemnitaires sur le fondement d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il n'y a pas lieu de faire application en l'espèce des dispositions sur les frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire ;

Infirme le jugement en ce qu'il rejette les prétentions de Mme Corinne X... sur le seul fondement de l'effet libératoire du reçu pour solde de tout compte ;

Statuant à nouveau de ce chef et sur le fond du litige :

Déclare recevable l'ensemble des demandes présentées par Mme Corinne X... ;

L'en déboute sur le fond ;

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Luc C..., président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 16/01712
Date de la décision : 17/10/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°16/01712 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-17;16.01712 ?
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