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27/09/2018 | FRANCE | N°17/005748

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21, 27 septembre 2018, 17/005748


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

21e chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 27 SEPTEMBRE 2018

No RG 17/00574
jonction AVEC RG 18/02729

AFFAIRE :
Séverine, Géraldine, Jeanine X...
C/
Fabrice Y...
...
LE DEFENSEUR DES DROITS - MISSION LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS ET PROMOTION DE L'EGALITE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Janvier 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CHARTRES CEDEX
No chambre :
No Section : E
No RG : F 15/00538

Expéditions exécutoires
Expéditi

ons
Copies
délivrées le :
à :
Me Oriane Z... de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Martine B... de la SEL...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

21e chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 27 SEPTEMBRE 2018

No RG 17/00574
jonction AVEC RG 18/02729

AFFAIRE :
Séverine, Géraldine, Jeanine X...
C/
Fabrice Y...
...
LE DEFENSEUR DES DROITS - MISSION LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS ET PROMOTION DE L'EGALITE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Janvier 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CHARTRES CEDEX
No chambre :
No Section : E
No RG : F 15/00538

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Oriane Z... de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Martine B... de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Gwendoline C..., avocat au barreau de VERSAILLES REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Séverine, Géraldine, Jeanine X...
née le [...] à CHATOU (78)
de nationalité Française
[...]
Représentant : Me Oriane Z... de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES,
vestiaire : 633 - Représentant : Me Susana W... , avocat constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0318
APPELANTE SUR LE PRINCIPAL
INTIMEE SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE

***************
Monsieur Fabrice Y...
[...]
[...]
Représentant : Me Martine B... de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - No du dossier 1757312 - Représentant : Me Lorraine D..., avocat constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2197
INTIME SUR LE PRINCIPAL
APPELANT SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE

Société ONO PACKAGING
No SIRET : 488 791 252
route de Roinville
28700 AUNEAU
Représentant : Me Elisabeth BIGET de l'AARPI CASTALDI PARTNERS, avocat constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R237 -
Représentant : Me Martine B... de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - No du dossier 1757312
INTIMEE SUR LE PRINCIPAL
INTIMEE SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE
APPELLANT SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE
****************
LE DEFENSEUR DES DROITS - MISSION LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS ET PROMOTION DE L'EGALITE
Direction des affaires juridiques
[...]
Représentant : Me Gwendoline C..., avocat constitué, avocat au barreau de VERSAILLES
INTERVENANT VOLONTAIRE
Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Juin 2018, Monsieur Philippe FLORES, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe FLORES, Président,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Madame Bérénice HUMBOURG, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Christine LECLERC

Mme X... a été engagée le 16 mars 1998 en qualité de responsable grands comptes par la société Polarcup, devenue Huhtamaki, aux droits de laquelle vient la société Ono Packaging (la société). Au dernier état de la relation contractuelle, Mme X... exerçait les fonctions de Directrice des Ventes grande distribution et percevait un salaire de base de 6 166,67 euros, outre une part variable de rémunération.

L'entreprise, qui exerce une activité de commercialisation de produits d'emballage, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective de la plasturgie.

Du 5 février au 13 avril 2014, Mme X... s'est trouvée en arrêt maladie pour grossesse pathologique puis en congé maternité jusqu'au 26 octobre 2014. Après deux semaines de congés payés, Mme X... a, le 12 novembre 2014, repris son poste de travail. A la suite d'une réorganisation effective en juin 2015, l'intitulé des fonctions de Mme X... a été modifié, et la salariée a été placée sous l'autorité de M. Y....

Le 15 septembre 2015, Mme X... a été prise de malaise à l'issue d'une réunion de travail. Elle a été placée en arrêt-maladie le 16 septembre. La caisse primaire d'Assurance Maladie a reconnu le caractère professionnel de cet accident. La société a contesté cette décision et la procédure est actuellement pendante devant la juridiction de sécurité sociale.

Par requête du 4 décembre 2015, Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de Chartres afin d'obtenir la condamnation solidaire de son employeur et de M. Y... à des dommages-intérêts en indemnisation du préjudice moral dont elle s'estime victime depuis son retour de congé maternité. Elle a demandé au conseil de :
- condamner la société Ono Packaging à lui payer les sommes de 5 550 euros au titre du bonus du 3ème trimestre 2015, 555 euros au titre des congés payés afférents, 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudices moral et professionnel depuis son retour de congé maternité,
- condamner solidairement la société Ono Packaging et M. Y... au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral outre la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,
- condamner son employeur à lui remettre un bulletin de salaire conforme au jugement à intervenir, et assortir les condamnations des intérêts légaux et prononcer la capitalisation des intérêts.

La société a conclu au débouté de Mme X... et a réclamé l'allocation de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. Y... a demandé au conseil de débouter Mme X... de ses demandes et de la condamner à lui payer les sommes de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 10 janvier 2017, le conseil (section encadrement formation départage) a :
- débouté Mme X... de l'intégralité de ses demandes au titre de la discrimination et du harcèlement moral ;
- condamné la société Ono Packaging à payer à Mme X... les sommes de 5 550 euros au titre du bonus du 3ème trimestre 2015, 555 euros au titre des congés payés afférents, outre les intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 2015 avec capitalisation des intérêts échus sur une année entière ;
- ordonné à la société Ono Packaging de remettre à Mme X... un bulletin de salaire conforme au présent jugement ;
- rappelé que sont exécutoires de droit à titre provisoire les condamnations ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (bulletin de paie, certificat de travail...) ainsi que celles ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées à l'article R. 1454-14 du code du travail dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire, étant précisé que la moyenne des trois derniers mois de salaire est fixée à 8 146,40 euros ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- condamné la société Ono Packaging à payer à Mme X... la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Mme X... à payer à M. Y... la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- laissé les dépens à la charge de la société Ono Packaging.

Le 10 janvier 2017, Mme X... a relevé appel de cette décision par voie électronique. Le 24 février 2017, M. Y... a constitué avocat. Le 3 mars 2017, Mme X... a été avisée de la nécessité de faire citer la partie intimée avant le 3 avril 2017. Le 15 mars 2017, Mme X... a signifié à la société Ono Packaging la déclaration d'appel. Le 8 mars 2017 , l'intimée la société Ono Packaging a constitué avocat.

Dans des conclusions notifiées le 23 avril 2017, Mme X... a notamment demandé à la cour d'appel de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Les 2 et 11 mai 2017, Mme X... a été déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise. Elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 31 juillet 2017.

Par ordonnance du 7 mars 2018, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction et fixé les plaidoiries au 25 juin 2018.

Le Défenseur des droits est intervenu à l'instance le 21 juin 2018 et a communiqué ses conclusions.

Par ordonnance du 25 juin 2018, le conseiller de la mise en état a ordonné le rabat de l'ordonnance de clôture du 7 mars 2018 et ordonné à nouveau la clôture.

Par dernières conclusions communiquées au greffe le 6 juin 2018, auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, Mme X... demande à la cour de :
- dire et juger recevables l'appel de Mme X... et l'ensemble de ses demandes ;
- infirmer partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Ono Packaging à payer à Mme X... une somme de 5 550 euros bruts au titre du bonus du 3eme trimestre 2015 et une somme de 555 euros bruts au titre des congés payés incidents et en ce qu'il a ordonné la remise d'un bulletin de salaire ;
- condamner la Société Ono Packaging à payer à Mme X... :
• au titre du 4ème trimestre 2015 : bonus de 2.442 euros bruts, outre 244,20 euros bruts au titre des congés payés incidents ;
• au titre du 2ème trimestre 2016 : bonus de 5.550 euros bruts, outre 555 euros bruts au titre des congés payés incidents ;
• au titre du 4ème trimestre 2016 : bonus de 5.550 euros bruts, outre 555 euros bruts au titre des congés payés incidents ;
- la condamner à remettre à Mme X... un bulletin de salaire en paiement de ces bonus
- constater, à titre principal, la discrimination subie par Mme X... en raison de son sexe, de sa grossesse et de sa maternité ainsi qu'en raison de sa situation familiale ou subsidiairement, constater l'absence de bonne foi de la société Ono Packaging dans l'exécution du contrat de travail ;
- constater en outre qu'en violation des dispositions des articles L.4121 -1 et L.4121-2 du code du travail, la société Ono Packaging n'a pris aucune mesure de prévention des agissements de harcèlement moral commis par M. Y... mais a, au contraire, promu, sur la base de critères non objectifs, un homme qui s'est employé à dégrader les conditions de travail de Mme X... ;
- condamner la société Ono Packaging à payer à Mme X... la somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices moral et professionnel qu'elle a subis depuis son retour de congé maternité jusqu'à la cessation de son contrat de travail ;
- constater les manquements suffisamment graves de la société Ono Packaging à ses obligations légales et contractuelles qui ont rendu impossible la poursuite du contrat de travail de Mme X... ;
- prononcer en conséquence la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la SAS Ono Packaging à la date du 31 juillet 2017 ;
- dire et juger que la résiliation judiciaire du contrat de travail produira les effets d'un licenciement nul, ou subsidiairement, d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- fixer la moyenne des trois derniers mois de salaires bruts, servant au calcul de l'indemnité pour licenciement nul, ou à défaut, de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la somme de 8 146,40 euros bruts ;
- condamner la société Ono Packaging à payer à Mme X... une somme de 195 513,60 euros nets, à titre principal, à titre d'indemnité pour licenciement nul ou, subsidiairement, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- ordonner la remise par la société Ono Packaging à Mme X... d'un certificat de travail (mentionnant l'ensemble des emplois successifs qu'elle a occupés, dont le poste de responsable des ventes GMS occupé du 1/10/2005 au 31/12/2006) et d'une attestation Pôle Emploi conforme à l'arrêt ;
- dire et juger que M. Y... a harcelé moralement Mme X... ;
- condamner M. Y... à payer à Mme X... la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudices moral et de santé ;
- assortir les condamnations indemnitaires des intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt et les condamnations salariales des intérêts au taux légal à compter de la réception de la saisine prud'homale par la société Ono Packaging ;
- prononcer la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, la première demande ayant été formulée dans la saisine prud'homale ;
- condamner la société Ono Packaging à payer à Mme X... la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- constater que la procédure d'appel introduite par Mme X... n'est pas abusive et que la demande de la société Ono Packaging en paiement d'une somme de 1 000 euros pour procédure abusive n'est pas fondée,
- rejeter, en conséquence, la demande de la société Ono Packaging tendant à voir Mme X... condamnée à lui verser une somme de 1 000 euros à ce titre ;
- condamner la société Ono Packaging à lui verser une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- confirmer le jugement du 10 janvier 2017 en ce qu'il n'a pas constaté d'agissements de harcèlement moral de Mme X... envers M. Y... ;
- déclarer mal fondé l'appel incident formé par M. Y... et rejeter sa demande tendant à voir Mme X... condamnée à lui verser une somme de 15 000 euros au titre de l'article 1152-1 ou de l'article 1240 du code civil ;
- rejeter la demande de M. Y... tendant à voir Mme X... condamner à lui verser une somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Ono Packaging et M. Y... aux dépens de l'instance d'appel qui pourront être directement recouvrés par la SELARL JRF Avocats, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions communiquées au greffe le 6 mars 2018, auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, M. Y... demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, à l'exception de celles concernant la demande de M. Y... de voir condamner Mme X... au titre du harcèlement et au titre de l'article 1240 du code civil, et, concernant le montant, la demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- réformer le jugement en ce que celui-ci a débouté M. Y... de sa demande de voir condamner Mme X... à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 1152-1 du code du travail et au titre de l'article 1240 du code civil ;
- réformer le jugement dans son montant en ce que celui-ci a condamné Mme X... à payer à M. Y... la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
le réformant ;
- condamner Mme X... à payer à M. Y... la somme de 15 000 euros au titre de l'article 1152-1 du code du travail et au titre de l'article 1240 du code civil ;
- réformer partiellement le jugement en ce que celui-ci a condamné Mme X... a payer à M. Y... la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner Mme X... à payer à M. Y... la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 7 juin 2018, M. Y... a demandé à la cour de lui donner acte ce qu'il s'en rapporte à justice sur la demande de révocation de clôture de Mme X....

Par dernières conclusions communiquées au greffe le 4 juin 2018, auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société Ono Packaging SAS demande à la cour de :
- dire et juger la société Ono Packaging SAS tant recevable que bien fondée en ses moyens, défenses et conclusions d'intimée et d'appel incident ;
- dire et juger que la société Ono Packaging SAS n'est redevable d'aucune somme envers Mme X... au titre de son bonus trimestriel du 3ème 2015 et des congés payés afférents, pas plus qu'au titre des bonus trimestriels pour 2016 ;
- dire et juger que Mme X... n'a été victime d'aucune discrimination en raison de son sexe, de sa grossesse ou de la situation familiale, à quelque moment que ce soit ;
- dire et juger que Mme X... n'a jamais fait l'objet d'un quelconque harcèlement moral de la part de son employeur ou de M. Y..., et qu'au surplus elle n'en apporte aucun début de preuve ;
- dire et juger que la société Ono Packaging SAS a appliqué de bonne foi le contrat de travail de Mme X... ;
- dire et juger que Mme X... n'a subi aucune rétrogradation ni aucune modification de son contrat de travail ;
- dire et juger qu'il ne peut être relevé aucun manquement d'Ono Packaging SAS au regard de la sécurité au travail de Mme X... ;
- dire et juger qu'en conséquence, qu'il ne peut être relevé aucun manquement grave d'Ono Packaging SAS à l'égard de Mme X... ;
- constater la demande tardive et nouvelle de Mme X... au titre d'une prétendue résolution judiciaire de son contrat de travail ; déclarer irrecevable Madame X... en cette demande ; subsidiairement l'en débouter ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme X... au titre de la discrimination, du harcèlement moral et de tout manquement de l'employeur ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a accueilli les demandes de Mme X... au titre du bonus du 3ème trimestre 2015 et congés payés afférents ; et rejeter la demande de Mme X... à ce titre ;
- débouter Mme X... de toute demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société Ono Packaging SAS ;
- débouter Mme X... de toutes ses demandes de remise de documents sociaux (certificat de travail, attestation Pôle emploi, bulletin de salaires comprenant les indemnités de rupture) ;
- débouter Mme X... de toutes ses autres demandes d'intérêts, de capitalisation des intérêts et d'article 700 du code de procédure civile ;
- débouter Mme X... de toutes ses plus amples demandes, fins et conclusions d'appel ;
en tout état de cause ;
- constater que le Défenseur des Droits n'intervient pas à la présente instance et qu'il a réouvert son enquête à la suite du Jugement et de la réponse fournie par Ono Packaging SAS ;
- condamner Mme X... à verser à la société Ono Packaging SAS la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- condamner Mme X... à verser à la société Ono Packaging SAS la somme de 1 000 euros au titre de la procédure abusive ;
- condamner Mme X... aux entiers dépens.

Par décision no 2018-169 du 19 juin 2018, le défenseur des droits a présenté des observations par lesquelles il soutient que Mme X... a fait l'objet de discrimination et de harcèlement discriminatoire de sorte que la demande de résiliation judiciaire était justifiée. Il fait valoir, subsidiairement, que le licenciement de Mme X... pour inaptitude encourt la nullité.

Motifs de la décision

Sur la jonction :

Eu égard à leur connexité les affaires enrôlées sous les numéros 17/574 et 18/2729 seront jointes dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et poursuivies sous le no 17/574.

Sur la recevabilité de la demande en résiliation judiciaire en cause d'appel :

L'employeur soulève l'irrecevabilité de la demande de résiliation judiciaire présentée en cause d'appel par Mme X... en s'appuyant sur l'article 70 du code de procédure civile.

Mme X... conclut au rejet de cette exception en soulignant que le litige a été introduit avant l'entrée en vigueur du décret no 2016-660 du 20 mai 2016, supprimant la règle de l'unicité de l'instance. Elle en déduit que conformément aux dispositions réglementaires applicables, cette demande en résiliation judiciaire est recevable.

Aux termes de l'article R. 1452-6 du code du travail, dans sa rédaction antérieure au décret no 2016-660 du 20 mai 2016, "toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une seule instance. Cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes". L'article R. 1452-7, alinéa 1er, de ce code, dans sa rédaction antérieure au même décret, ajoutait que "les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel."

La salariée ayant saisie la juridiction prud'homale le 4 décembre 2015, la procédure relève des dispositions antérieures au décret no 2016-660 du 20 mai 2016, et par suite des articles R. 1452-6 et R. 1452-7 du code du travail, alors applicables. En conséquence, la demande de résiliation judiciaire formée, qui dérive du contrat de travail liant Mme X... à son employeur, est recevable.

Sur les demandes de rappel de salaire au titre des bonus :

Mme X... soutient que les objectifs étaient fixés d'un commun accord entre les parties et que l'employeur a essayé d'imposer, au titre de ces objectifs, la prise en compte de l'EBITDA à concurrence de 50 %. Elle considère qu'il s'agissait d'une modification du contrat de travail qu'elle n'avait pas acceptée, de sorte que la rémunération variable ne pouvait pas être modifiée et réclame un rappel de salaire au titre du troisième trimestre 2015. Mme X... réclame en outre le paiement des bonus pour les 4o trimestre 2015, 2o et 4o trimestres 2016. Elle considère que son absence consécutive à un accident de travail ne saurait la priver de tout versement de bonus pour les périodes ayant donné lieu à l'attribution d'une part variable aux membres de l'équipe GMS, car cela reviendrait alors à la priver du paiement d'un élément contractuel de sa rémunération, qu'elle percevait avant son arrêt travail.

L'employeur soutient que la détermination des objectifs attachés à la rémunération variable n'était pas de nature contractuelle mais relevait du pouvoir de direction de l'employeur. Il affirme que l'utilisation de l'indice Ebitda était licite et opposable à la salariée. L'employeur s'oppose à tout droit à bonus pendant la période de suspension du contrat de travail.

Le contrat de travail du 12 janvier 1998 contient une clause prévoyant une part de rémunération variable : "un bonus dont le montant sera apprécié chaque trimestre, en fonction des résultats obtenus par rapport aux objectifs de performance fixés pour le trimestre. Ce bonus, compris entre 0 et 20 % de votre rémunération fixe de la période, sera fixé au plus tard le mois qui suit la fin du trimestre". Le montant de ce bonus a été modifié à l'occasion de la conclusion d'avenant, sans que les dispositions relatives aux critères d'attribution soient modifiées. Le contrat ne prévoit pas les critères précis d'attribution du bonus et ne renvoie pas non plus à une négociation contractuelle pour leur détermination chaque trimestre. Au contraire, l'indication que ceux-ci sont "fixés pour le trimestre", renvoie au pouvoir de direction de l'employeur. Il en découle que celui-ci peut fixer librement les objectifs de performance, sous réserve que ceux-ci ne soient pas excessifs. Dans ce cadre, il peut choisir d'utiliser des indicateurs personnels ou collectifs. La signature par la salariée des documents par lesquels les objectifs étaient fixés, le cas échéant après discussion, ne signifie pas que ceux-ci étaient contractuels, mais caractérise la notification de la décision prise par l'employeur en la matière. Le fait que la détermination des objectifs ait pu faire l'objet d'une discussion préalable avec la salariée n'a pas pour effet de rendre ceux-ci contractuels et ne crée aucun usage, faute de réunion des critères de constance, de généralité et de fixité.

Dès lors c'est à tort que la salariée soutient que l'utilisation d'un critère comme l'indice EBITDA constituait une modification du contrat de travail nécessitant son accord exprès.

Les objectifs de performance fixés par l'employeur n'ayant pas été atteints lors du troisième trimestre 2015, la demande de rappel de salaire à ce titre doit être rejetée. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Mme X... était en arrêt de travail à compter du 16 septembre 2015, jusqu'à son licenciement. Son contrat de travail se trouvait donc suspendu et elle pouvait, le cas échéant, prétendre à l'indemnité complémentaire prévue par les articles L. 1226-1 et D. 1226-3 du code du travail, ou tout dispositif contractuel ou conventionnel plus favorable. Si, pour la détermination de cette indemnité, il peut être tenu compte des parts de rémunération variable, la salariée, qui ne réclame aucune somme à ce titre, ne peut prétendre au paiement d'un bonus correspondant aux périodes d'arrêt de travail. Elle sera donc déboutée de ce chef.

Sur la discrimination invoquée par Mme X... :

Mme X... estime avoir fait l'objet d'une discrimination liée à sa grossesse, à sa situation de famille et à son sexe, qui ont commencé pendant son congé maternité. Elle fait valoir qu'elle n'a pas été mise en copie du courriel du 28 juillet 2014 diffusé à l'ensemble du personnel et relatif aux nouvelles règles de décision, que la nouvelle direction a tenté de promouvoir M. Y... au poste de responsable du département des ventes. Elle indique qu'après son retour, elle n'a pas été informée de la nouvelle organisation commerciale, que l'entretien prévu par l'article L. 1225-27 du code du travail n'a pas été organisé, qu'elle n'a pas retrouvé l'intégralité de ses fonctions et de ses responsabilités, que la structure de la hiérarchie a été modifiée en entraînant un recul pour elle, que son intitulé de poste a été modifié, qu'elle a été rétrogradée dans une mission commerciale de terrain, ce qui caractérise une modification unilatérale du contrat de travail.

L'employeur affirme qu'aucune discrimination ne peut être caractérisée à l'endroit de Mme X... et que les arguments développés par cette dernière sont anachroniques, en total décalage avec la réalité opérationnelle et tendent en réalité à une discrimination positive à son profit.

Le Défenseur des droits fait valoir que la salariée n'a pas retrouvé l'intégralité de ses fonctions et a été mise à l'écart à la suite de son congé maternité, ce qui est constitutif d'une discrimination en lien avec son état de grossesse.

Il résulte des dispositions de l'article L.1132-1 du code du travail qu'aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son appartenance physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap. En application de l'article L. 1134-1du code du travail, lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Au soutien de son allégation de discrimination liée à sa grossesse, sa maternité, sa situation de famille et son sexe, Mme X... invoque :
- le fait, pendant son congé maternité, de n'avoir pas été mise en copie du courriel du 28 juillet 2014 relatif aux nouvelles règles de prise des décisions en matière commerciale,
- l'absence d'entretien ou de réunion par la hiérarchie, entre le retour de congé maternité et juin 2015, afin de lui présenter la nouvelle organisation commerciale mise en place,
- le défaut d'organisation de l'entretien prévu à l'article L. 1225-27 du code du travail,
- le fait de n'avoir pas retrouvé l'ensemble de ses attributions à son retour de congé,
- la modification de sa situation hiérarchique par la création, à son détriment, d'une strate supplémentaire,
- le changement d'intitulé de son poste de travail,
- sa rétrogradation à une mission commerciale de terrain, caractérisant une modification du contrat de travail,
- l'absence d'ouverture d'une procédure de recrutement en interne pour le poste de chef des ventes France et Bénélux confié à M. Y..., empêchant Mme X... de postuler alors qu'elle avait davantage d'ancienneté, d'expérience et de diplômes que la personne retenue.

Il résulte des dispositions combinées des articles L. 1225-27 et L. 6315-1 du code du travail, qu'un entretien professionnel, consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualification et d'emploi, sans porter sur l'évaluation du travail de la salariée, doit être proposé systématiquement à la salariée qui reprend son activité à l'issue d'un congé maternité. Par ailleurs l'accord d'entreprise sur l'égalité professionnelle et des chances entre les femmes et les hommes et sur le développement de la mixité des emplois, qui a pour objectif de "concilier au mieux la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salarié(e)s", prévoit, afin de garantir à la salariée les meilleurs conditions de départ et de retour de congé maternité, la mise en place d'un entretien facultatif dont la tenue dépend de la volonté de la salariée dûment informée. L'employeur ne justifie pas avoir proposé à Mme X... l'entretien prévu par l'article L. 1225-27 du code du travail. Il ne justifie pas davantage avoir informé la salariée de la réorganisation de l'entreprise intervenue pendant son congé maternité, alors que les autres salariés de son équipe l'avaient été dans un mail du 28 juillet 2014.

Après son retour de congé maternité et la réorganisation de l'entreprise, Mme X... a vu l'intitulé de ses fonctions modifié pour passer de "directrice des ventes GMS" à celui de "chef des ventes GMS", alors que, dans le même temps, un niveau hiérarchique était créé, s'intercalant entre Mme X... et son ancien N+1, M. H.... Ce nouveau poste de "chef des ventes National France et Bénélux", était confié à un collègue masculin de Mme X..., M. Y..., qui jusqu'alors exerçait des fonctions hiérarchiques de même niveau qu'elle, en qualité de "directeur des ventes industrie", et avait une ancienneté dans l'entreprise moindre que celle de Mme X.... M. Y... était remplacé dans ses précédentes fonctions, désormais intitulées "chef des ventes industries", par la promotion d'un inspecteur des ventes, M. I....

Lors d'une réunion du 22 juillet 2015, la direction a notamment fait état du projet d'affecter Mme X..., dont les fonctions étaient essentiellement sédentaires, à des missions de commerciale de terrain avec l'attribution d'un secteur géographique obtenu par le redécoupage des trois secteurs attribués jusqu'alors aux trois commerciaux membres de l'équipe qu'elle dirigeait. Dans un mail du 25 juillet 2015, M. J..., l'un de ces trois commerciaux, relève "j'ai également été surpris sur le fait qu'il souhaite te rétrograder à une fonction de commerciale de terrain avec attribution d'un secteur géographique. Je pense que cela est déplacé de le faire devant une assemblée de 10 personnes". Il en découle que le sort fait à Mme X... apparaissait bien à l'égard du personnel comme une rétrogradation.

Enfin, alors que les secteurs géographiques d'intervention des commerciaux étaient divisés en trois, et répartis entre les subordonnés de Mme X..., MM. K..., J... et L..., une nouvelle répartition des secteurs a été décidée, entraînant leur partage en quatre, Mme X... se voyant attribuer un secteur couvrant des parties du Nord-Est de la France, dont la Lorraine, du Centre-Ouest, et du Centre. Dans un mail du 21 septembre 2015, M. Antonio M... indique : "Ci-joint la nouvelle carte des commerciaux ONO préparée en collaboration avec Fabrice Y... et déjà validée par EDP. (...). La nouvelle répartition exige à tous les commerciaux, y compris les chefs de ventes GMS et Industrie, d'avoir un secteur géographique avec un portefeuille de clients à suivre directement. Lors de la réunion commerciale ONO de juillet 2015, on avait déjà communiqué à toutes les personnes présentes (...). Les nouvelles règles de fonctionnement avec la décision d'assigner à chaque commercial et chef des ventes un secteur géographique. (...). Je tiens à préciser que dans les critères d'attribution des clients, nous avons tenu compte que les chefs des ventes ont un secteur et un nombre de clients plus limité (...) Afin de suivre, de coordonner et d'aider les vendeurs dans la région". Ce mail démontre que la décision d'affecter Mme X... à un secteur géographique était bien prise. Par ailleurs, l'attribution à Mme X..., dont les fonctions étaient essentiellement sédentaires, de tâches dans un secteur géographique, qui, jusqu'alors était confiées à ses subordonnés, constitue une perte de substance de ses fonctions et une modification du contrat de travail, qui ne peut être mise en oeuvre qu'avec son accord exprès. En outre, alors que la situation familiale de Mme X... est connue, puisqu'elle est rentrée de congé maternité, les difficultés pratiques qui en résulteront pour elle du fait de son affectation à un secteur géographique d'une telle ampleur ne pouvaient échapper à sa hiérarchie.

Mme X... fait ainsi la preuve d'éléments de faits, qui, pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une discrimination liée à sa grossesse, sa maternité et à son sexe. Il appartient donc à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

S'agissant de l'absence d'information de Mme X... pendant son congé maternité sur la réorganisation de l'entreprise, l'employeur indique qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas lui avoir adressé de mail pendant son congé maternité. Pourtant, Mme X... produit des échanges par mail intervenus entre elle, un client, Artedist, sur des problèmes de facturation et de paiement, et Mme F..., salariée de la société Ono Packaging. Dans un courriel du 3 avril 2014, à Artedist, Mme F... indique, "je fais suite à vos différents échanges avec Sévérine X... (....). Et nous vous confirmons le règlement dans les brefs délais de 92 270 euros (...)". De même, le 5 mars 2014, M. N... écrivait par mail à Mme X... pour lui demander un formulaire de sondage de satisfaction. Elle a également été sollicitée par le service comptabilité les 3, 7 et 13 mars, 10 avril 2014 pour valider des factures ou des notes de frais. L'employeur n'explique pas pourquoi le respect de la période de congé maternité s'opposait à ce que Mme X... soit, comme les autres salariés de l'entreprise, informée des nouvelles règles de décision en matière commerciale, mais qu'il n'interdisait pas à l'employeur de la solliciter sur des problèmes liés à la vie de l'entreprise dont il pensait qu'elle pouvait contribuer à la solution.

S'agissant de l'entretien professionnel prévu par l'article L. 1225-27 du code du travail et qui doit être proposé par l'employeur lors du retour de congé maternité d'une salariée, l'employeur indique qu'il n'y a eu aucun manquement délibéré, tout au plus un éventuel oubli, que Mme X... reprenait ses fonctions et son rôle à périmètre constant, qu'elle avait participé en cette qualité à la réunion commerciale du 18 novembre 2014, qu'elle avait reçu le planning de l'ensemble des réunions, que les échanges étaient quotidiens et que le défaut d'entretien professionnel n'avait pas pu porter atteinte aux perspectives d'évolution de la salariée. L'éventuel oubli invoqué par l'employeur ne saurait constituer un élément objectif étranger à toute discrimination, alors même que la cause de cet oubli n'est en rien documentée et que le comportement difficultueux imputé par l'employeur à Mme X... rendait cet entretien d'autant plus nécessaire, afin, notamment, d'évoquer les évolutions de l'organigramme dans la société et la place qui serait la sienne dans ce contexte, et ce d'autant plus qu'une modification unilatérale du contrat de travail a été mise en oeuvre par l'employeur. Par ailleurs, le fait que la salariée ait pu être associée aux réunions, ait eu connaissance des plannings et ait pu échanger avec sa hiérarchie dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail ne saurait pallier l'absence d'organisation d'un entretien sur les perspectives d'évolution professionnelle de la salariée dans un tel contexte.

La modification des missions de Mme X... qui, alors que son poste était essentiellement sédentaire, s'est vu confier des fonctions de commerciale et un secteur géographique, emporte une perte de substance du poste qu'elle exerçait jusqu'alors. En effet, la salariée se voit contrainte d'exercer de nouvelles tâches, jusqu'alors attribuées à ses subordonnés, avec de nouvelles contraintes de déplacement sur un secteur géographique couvrant le quart de la France, et l'obligation d'être sur ce secteur quatre jours sur cinq. Une telle obligation signifie que les nouvelles tâches de commerciale sont prépondérantes par rapport à celles qui étaient jusqu'alors les siennes. Le mail du 25 juillet 2015 de M. J... confirme que le personnel a également perçu les nouvelles attributions de Mme X... comme une rétrogradation. Cette nouvelle définition du poste de travail constitue donc une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès de la salariée. L'évocation de ce sujet au cours de deux réunions successives en juillet et septembre, la volonté affichée d'intensifier l'activité commerciale de terrain et d'y associer étroitement les chefs des ventes et la diffusion du redécoupage des secteurs avec celui affecté à Mme X... confirment qu'il ne s'agit pas d'un simple projet, mais bien d'une décision arrêtée. Du reste, dans un mail du 17 septembre 2015, M. M... indiquait "ci-joint la nouvelle carte des commerciaux ONO préparée en collaboration avec M. Y... et déjà validée par EDP (...). La nouvelle répartition sur le terrain exige que tous les commerciaux, y compris les chefs de vente CMS et Industrie, d'avoir un secteur géographique avec un portefeuille de clients à suivre directement (...). Je tiens à préciser que dans les critères d'attribution des clients nous avons tenu compte que les chefs des ventes ont un secteur et un nombre de clients plus limité (...) afin de suivre, de coordonner et d'aider les vendeurs dans la région." Il en résulte que le choix d'affecter à Mme X... un secteur était arrêté définitivement et qu'il ne s'agit pas d'un simple projet soumis à son accord. Si, ce projet n'a pas été mis en oeuvre du fait de l'arrêt de travail et de l'inaptitude de la salariée, il n'en demeure pas moins que l'information a été diffusée au sein de l'entreprise et que la modification du contrat de travail était acquise. L'employeur ne justifie pas qu'un avenant du contrat de travail ait été conclu, ni même soumis à la salariée. Au contraire, il apparaît que cette nouvelle définition du poste de Mme X... a été présentée, dans le cadre de la réorganisation de l'entreprise lors de deux réunions, les 22 juillet et 15 septembre 2015, laquelle s'est achevée sur le malaise de la salariée. L'employeur ne justifie pas davantage pourquoi il était nécessaire ou utile de présenter lors de ces réunions les nouvelles attributions de Mme X... alors qu'il n'avait pas obtenu l'accord de Mme X....

Après la nomination de son collègue masculin, M. Y..., à un poste de supérieur hiérarchique alors qu'il avait une ancienneté moindre qu'elle, Mme X... a vu le changement de l'intitulé de ses fonctions et la modification substantielle de ses fonctions, par l'affectation d'un secteur géographique, au même titre que les trois salariés de l'équipe qu'elle dirigeait. L'exercice du pouvoir de direction n'exclut pas, par lui-même, l'existence d'une discrimination illicite. Or, si l'employeur soutient que l'ensemble de ses mesures critiquées par la salariée, à savoir la nomination au nouveau poste de hiérarchie qui avait été créé, le nouvel organigramme, la réorganisation de la société, relève de l'exercice normal de son pouvoir de direction, il n'apporte aucun élément permettant d'expliquer que la conjonction de la promotion du collègue masculin moins ancien, de sa nouvelle subordination à ce dernier, de la perte de substance des fonctions de Mme X... et des nouvelles contraintes en termes de déplacement géographique qui en résultaient pour une jeune mère, de même que l'absence d'information pendant son congé maternité sur les nouvelles règles de décision commerciale, ou l'absence d'organisation de l'entretien prévu par l'article l'article L. 1225-27 du code du travail, reposent sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Il ne justifie pas davantage que la modification du contrat de travail mise en oeuvre unilatéralement et sans l'accord, pourtant nécessaire, de la salariée, est également étranger à une telle discrimination.

Il découle de l'ensemble de ces éléments que Mme X... a effectivement fait l'objet d'une discrimination par son employeur. Le jugement du conseil de prud'hommes doit donc être infirmé en conséquence.

Sur le harcèlement moral imputé par Mme X... à M. Y... :

Mme X... affirme que M. Y... a tenu des propos vexatoires et humiliants en public lors de réunions, qu'il a exercé en ses lieu et place des responsabilités qui étaient les siennes et qu'il a organisé sa mise à l'écart progressive.

L'employeur conteste l'existence de toute situation de harcèlement moral à l'encontre de Mme X..., une telle situation ne pouvant pas être caractérisée.

M. Y... estime que les faits reprochés ne sont pas susceptibles de caractériser un élément permettant de présumer un harcèlement.

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Au soutien de son allégation de harcèlement moral, Mme X... invoque :
- des propos vexatoires et humiliants tenus par M. Y... en réunion,
- l'exercice en ses lieu et place de responsabilités lui incombant.

En premier lieu, Mme X... invoque le contenu de la réunion du 22 juillet 2015. Dans un mail du 29 juillet 2015, M. J... indique : "Je souhaite également revenir sur les propos tenus à ton égard lors de la réunion commerciale en te demandant de ne pas intervenir : "prends des notes et fais un écrit si tu as des choses à dire" (...). J'ai été surpris également sur le fait qu'il souhaite te rétrograder à une fonction de commerciale terrain avec l'attribution d'un secteur géographique. Je pense que cela est déplacé de le faire devant une assemblée de 10 personnes". Selon l'attestation délivrée par M. I..., lors de cette réunion, Mme X... a interrompu une première fois M. Y... pour s'opposer à la présentation de la nouvelle organisation commerciale du fait de l'absence de certains salariés, et, à la suite d'une seconde interruption, M. Y... a indiqué qu'il ne souhaitait plus être interrompu et que les questions devaient être notées par écrit, afin qu'il y soit répondu ensuite. Il ne s'agit donc pas d'interruptions nombreuses, comme le soutiennent l'employeur et M. Y..., et il convient de souligner que ces interruptions portaient sur un projet dont la mise en oeuvre emportait modification du contrat de travail de Mme X..., ainsi qu'il a été vu ci-dessus, et qu'une telle modification nécessitait son accord préalable. La présentation publique d'un tel projet pouvait donc justifier que la salariée fasse connaître son opposition.

Certes , dans son attestation M. I... relève que, lors de la réunion du 15 septembre 2015, Mme X... a réagi de façon arrogante en réfutant le choix qui lui était présenté. Il convient toutefois de souligner que la réorganisation commerciale présentée lors de cette réunion avait notamment pour conséquence l'affectation "sur le terrain" de Mme X... avec attribution d'un secteur géographique, laquelle, du fait de la perte de substance des fonctions exercées jusqu'alors, constituait une modification du contrat de travail qui ne pouvait être mise en oeuvre qu'avec l'accord exprès de la salariée.

Il apparaît donc que cette modification des fonctions de la salariée a été présenté de façon publique lors des réunions des 22 juillet et 15 septembre 2015, alors qu'elle n'y avait pas consenti, et que le personnel en a déduit qu'il s'agissait d'une rétrogradation, ainsi qu'il résulte du mail de M. J.... S'agissant de l'évolution d'un élément contractuel soumis à l'accord de la salariée, la présentation de ce projet lors de réunions impliquant d'autres personnes était de nature à dégrader ses conditions de travail et à porter atteinte à sa dignité. Au terme de la réunion du 15 septembre 2015, Mme X... a été saisie d'un malaise, pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie, l'employeur ayant par ailleurs contesté le caractère professionnel de cet accident. Les propos tenus à l'encontre des supérieurs de Mme X... par M. O..., son conjoint, lorsqu'il est intervenu à son secours, n'ont aucune incidence sur la cause.

Enfin, M. P... atteste, le 27 janvier 2018, avoir entendu M. Y... dire, en parlant de Mme X..., "Je vais lui mettre la pression. Elle pliera ou elle s'en ira. J'ai le soutien de la direction italienne. Il y a trop de directeurs commerciaux et le futur chef des deux équipes commerciales, ce sera moi".

Mme X... justifie avoir été en arrêt de travail à la suite du malaise du 15 septembre 2015. Les arrêts de travail prescrits par le médecin traitant relèvent un état anxio-dépressif prolongé avec instabilité de l'humeur en relation avec la situation professionnelle. Le docteur Q... certifie le 6 juillet 2017 suivre la salariée dans sa consultation de souffrance et travail. L'avis d'inaptitude du médecin du travail précise qu'un reclassement est possible dans un autre contexte organisationnel.

La salariée démontre donc la réalité de faits, qui, pris dans leur ensemble et après prise en compte des éléments médicaux, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail.

L'employeur ne justifie pas des mesures qu'il aurait prises pour prévenir de tels faits de harcèlement moral, ni des mesures mises en oeuvre pour les faire cesser. Or, dans un mail du 16 juin 2015 adressé à M. ONO, M. H... s'interrogeait sur la plus-value apportée par M. Y... dans son action à l'égard du service de Mme X..., en relevant l'expertise et l'excellente image de cette dernière auprès de gros clients. Il soulignait que l'attitude de M. Y... laissait apparaître beaucoup de problèmes avec beaucoup de personnes et qu'il avait commencé une formation pour améliorer ce point. Il en découle que l'employeur avait connaissance des problèmes de comportement de M. Y... et n'a pas pris les mesures adéquates pour prévenir ou faire cesser le harcèlement subi par Mme X.... Cette connaissance de la situation par l'employeur est confirmée par le mail de M. P... qui avait entendu M. Y... dire qu'il avait le soutien de la direction italienne pour mettre la pression sur Mme X... et imposer la réorganisation des services.

Il résulte des éléments ci-dessus que M. Y... a bien souhaité exercer une pression sur Mme X... afin de lui imposer, soit de se soumettre au projet qu'il mettait en oeuvre, soit de démissionner, M. Y... considérant par ailleurs qu'il y avait trop de directeurs commerciaux. La présentation en réunion des nouvelles attributions de Mme X... a eu pour effet de notifier publiquement la rétrogradation de la salariée, alors qu'elle n'avait pas consenti expressément à la modification du contrat de travail qui en résultait. Cela constitue une humiliation de nature à affecter la dignité et les conditions de travail de la salariée concernée.

Les faits de harcèlement moral imputables à M. Y... sont constitués et la responsabilité de ce dernier engagée. Le jugement du conseil de prud'hommes sera donc infirmé de ce chef.

Sur la réparation des préjudices subis :

Mme X... souligne que l'employeur a manqué à ses obligations et que les agissements de celui-ci comme les répercussions sur sa vie de famille l'ont profondément affectée. Elle sollicite l'allocation d'une somme de 70 000 euros en réparation du préjudice causé.

Mme X... justifie du retentissement sur sa santé des faits de discrimination et de harcèlement qu'elle a subis, par la production des éléments médicaux sus-visés. Le préjudice résultant de l'action de l'employeur doit être évalué à 15 000 euros, alors que celui résultant du harcèlement exercé par M. Y... doit être fixé à 2 000 euros.

Sur la demande de résiliation judiciaire de Mme X... :

Mme X... considère que les manquements imputables à l'employeur justifient la résiliation du contrat de travail. Elle fait valoir que la moyenne des trois derniers mois de salaires bruts s'élève à 8 146,40 euros pour en déduire que cette moyenne doit servir de base pour la fixation de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Soulignant son ancienneté dans l'entreprise (19 ans), sa situation de famille (un enfant en bas âge et un autre handicapé moteur) et le fait qu'elle se trouve sans emploi, Mme X... réclame l'allocation de la somme de 195 513,60 euros.

L'employeur s'oppose à la demande de résiliation judiciaire, les manquements invoqués à son soutien par la salariée n'étant pas établis.

Le Défenseur des droits soutient que la discrimination subie par la salariée a donné lieu à une dégradation de son état de santé conduisant à son licenciement pour inaptitude, ce qui caractérise un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat prévue par l'article L. 4121-1 du code du travail, justifiant la résiliation judiciaire de son contrat de travail ayant les effets d'un licenciement nul.

Lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande en résiliation est fondée. La résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée à l'initiative du salarié et aux torts de1'employeur, lorsque sont établis des manquements par ce dernier à ses obligations d'une gravité suffisante pour faire obstacle à la poursuite du contrat de travail. Dans ce cas, la résiliation du contrat produit, selon le cas, les effets d'un licenciement nul ou d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les faits de discrimination et de harcèlement moral retenus ci-dessus constituent des manquements graves de l'employeur à ses obligations, faisant obstacle à la poursuite du contrat de travail. La résiliation judiciaire doit donc être prononcée aux torts de l'employeur. Les effets de cette résiliation sont acquis au 31 juillet 2017, date de la rupture du contrat de travail par l'employeur. Elle a les effets d'un licenciement nul. De ce fait, Mme X... est en droit de réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Conformément à l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance no 2017-1387 du 22 septembre 2017 applicable à la cause, en cas de licenciement nul, le salarié peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure au six derniers mois de salaire. Contrairement à ce que soutient la salariée, cette indemnité n'est pas calculée en fonction de la moyenne des trois derniers mois de salaire, mais sur la base des six derniers mois de salaire.

La salariée justifie, par la production d'un avis adressé par Pôle emploi, que, le 12 janvier 2018, elle se trouvait au chômage et percevait encore l'ARE.

Au vu de la rémunération de Mme X..., de son âge et des conséquences de la résiliation judiciaire du contrat de travail, il lui sera alloué la somme de 90 000 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement nul.

L'employeur est tenu de remettre à la salariée un certificat de travail, reprenant l'ensemble des postes successivement occupés par elle et une attestation Pôle emploi conforme à la présente décision.

Sur la demande au titre du harcèlement moral présentée par M. Y... :

Mme X... conteste l'existence du harcèlement allégué par M. Y....

Au soutien de son allégation de harcèlement moral commis par Mme X..., M. Y... invoque une remise en cause virulente et déstabilisante de ses capacités comme supérieur hiérarchique. Il s'appuie à cette fin sur les déclarations de M. I... indiquant : "mon sentiment est que SF fait un déni de la nomination de FR et s'oppose systématiquement à ses idées, à son organisation" ou encore "ce qui me dérange le plus est la remise en cause permanente de la nomination de FR par SF sur tout ce qu'il peut proposer, je n'ai pas assisté à des faits anormaux, la situation pour moi est normale nous sommes là pour travailler". Il produit également un mail de Mme X... relatif à la communication des congés : "Fabrice, quand tu as besoin d'informations concernant mon équipe, je te remercie de me faire la demande directement." Le procès-verbal de constatation de la caisse primaire d'assurance maladie relève que M. I... a déclaré que Mme X... remettait en cause les propositions de M. Y... sur un ton relativement correct. Les éléments invoqués par M. Y... confirment les désaccords que pouvait manifester Mme X..., d'autant que M. Y... mettait en oeuvre une modification unilatérale du contrat de travail sans l'accord de celle qui était devenue sa subordonnée et qu'une situation de harcèlement moral de sa part a été retenue, mais ne démontrent pas l'existence d'une situation anormale imputable à Mme X.... Les faits invoqués ci-dessus ne sont pas matériellement établis.

M. Y... soutient que Mme X... invoquait inlassablement ses prétendues lacunes culturelles en langue française et en anglais. Il se réfère à cette fin aux conclusions de la salariée en première instance (P.20). Toutefois, l'élément de preuve invoqué étant un élément de la procédure judiciaire extérieur à l'exécution du contrat de travail, cette allégation doit être écartée.

Dans ces conditions, en l'absence de faits matériellement établis, la demande au titre du harcèlement moral doit être écartée et le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur les intérêts légaux :

Conformément à l'article 1231-7 du code civil, les indemnités porteront intérêt au taux légal à compter de ce jour. Ces intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive de la société :

L'employeur réclame la condamnation de la salariée au paiement d'une indemnité de 1 000 euros pour procédure abusive.

Mme X... conclut au rejet de cette demande, son action n'étant pas abusive.

Les demandes de la salariée ayant prospéré, au moins partiellement, son action ne saurait être regardée comme abusive. La société doit être déboutée de ses demandes de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

L'employeur et M. Y... qui succombent doivent supporter les dépens.

L'équité commande de condamner l'employeur, et lui seul, au paiement à Mme X..., d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,

Ordonne la jonction des affaires enrôlées sous les no17/574 et 18/2729 et dit qu'elles seront poursuivies sous le no 17/574.

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Chartres en ce qu'il déboute M. Y... de ses demandes au titre du harcèlement moral,

Infirme le jugement déféré pour le surplus,

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail, aux torts de l'employeur et à effet du 31 juillet 2017, date du licenciement,

Condamne la société à payer à Mme X... les sommes de :
- 90 000 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement nul,
- 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination et harcèlement

Déboute Mme X... de ses demandes de rappel de salaire au titre des bonus,

Condamne la société Ono Packaging à remettre à Mme X... un certificat de travail, comprenant les emplois successivement tenus par la salariée, y compris le poste de responsable des ventes, et une attestation Pôle emploi conforme à la présente décision,

Condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

Dit que ces indemnités porteront intérêt au taux légal à compter de ce jour avec capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Condamne la société à verser à Mme X... la somme de 3 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et à régler les dépens, étant précisé que AARPI JRF Avocats est autorisé à recouvrer directement ceux des dépens qu'il aurait avancé sans recevoir provision.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Philippe FLORES, Président et par Madame AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 21
Numéro d'arrêt : 17/005748
Date de la décision : 27/09/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

Arrêt rendu le 27 septembre 2018 par la 21ème chambre de la cour d’appel de Versailles RG 17/00574 Discrimination, intervention volontaire du Défenseur des droits, discrimination en raison de l’état de grossesse et du sexe de la salariée, résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, infirmation. harcèlementau travail,harcèlementmoralau travail (oui),harcèlementmoralentrecollègues, pressions exercées sur la salariée, établissement de faits de nature à présumer unharcèlementmoral(oui), infirmation. Ledéfenseurdesdroitsest intervenu volontairement dans le litige prud'homal opposant la salariée à l'employeur auquel cette dernière reproche unediscrimination. La cour retient que la salariée fait la preuve d'éléments de faits, qui, pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une discrimination liée à sa grossesse, sa maternité et à son sexe. L’employeur ne prouvant pas que les décisions par lui prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts avec effet à la date du licenciement. Sur le harcèlement moral, la cour considère qu’il résulte des éléments du dossier que la salariée a été victime de pressions de la part de son collègue afin de lui imposer, soit de se soumettre au projet que ce dernier mettait en œuvre, soit de démissionner.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2018-09-27;17.005748 ?
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