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26/07/2018 | FRANCE | N°17/01034

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 26 juillet 2018, 17/01034


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



6e chambre







ARRÊT N° 00431



CONTRADICTOIRE



DU 26 JUILLET 2018



N° RG 17/01034



N° Portalis DBV3-V-B7B-RKXZ







AFFAIRE :



Christine X...



C/



SASU COMPAGNIE IBM FRANCE



DÉFENSEUR DES DROITS venant aux droits de la HALDE









Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 17 Décembre 2013

par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° RG : 10/04086







Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées le 27 Juillet 2018 à :

- Me Martine Y...

- Me Agnès T...

-Me Julie Z...







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRÊT N° 00431

CONTRADICTOIRE

DU 26 JUILLET 2018

N° RG 17/01034

N° Portalis DBV3-V-B7B-RKXZ

AFFAIRE :

Christine X...

C/

SASU COMPAGNIE IBM FRANCE

DÉFENSEUR DES DROITS venant aux droits de la HALDE

Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 17 Décembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° RG : 10/04086

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées le 27 Juillet 2018 à :

- Me Martine Y...

- Me Agnès T...

-Me Julie Z...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX JUILLET DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 14 juin 2018, puis prorogé au 26 juillet 2018, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre:

Madame Christine X...

[...]

Représentée par Me Martine Y... de la SCP COBLENCE ET ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : P0053

APPELANTE

****************

La SASU COMPAGNIE IBM FRANCE

[...]

Représentée par Me Agnès T... de la SELARL REIBELL ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : L0290

INTIMÉE

****************

Le DÉFENSEUR DES DROITS venant aux droits de la HALDE

[...]

Représentée par Me Julie Z..., avocate au barreau de PARIS, vestiaire : C0414

PARTIE INTERVENANTE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 13 Mars 2018, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président,

Madame Sylvie BORREL, Conseiller,

Monsieur Patrice DUSAUSOY, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Nicolas CAMBOLAS

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Madame Christine X... a été embauchée le 5 novembre 2001 par la société IBM France, en contrat durée indéterminée, en qualité de cadre conseiller position III B2, coefficient 225 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Sa rémunération annuelle brute à son embauche était de 45 000 euros.

Sa rémunération est composée d'une partie fixe, la rémunération théorique de référence dite RTR, et une partie variable, en cas d'acceptation d'une lettre d'objectifs dite Quota Letter, proposée chaque semestre à la salariée.

La mission de la salariée consistait à prospecter, sur des territoires commerciaux définis, des clients afin de commercialiser des licences IBM auprès de grands comptes, selon des objectifs consignés dans la lettre d'objectifs par semestre.

La salariée a été placée à diverses reprises en arrêt maladie à la suite d'un accident grave de ski survenu le 7 février 2007 conduisant à obtenir le statut de travailleur handicapé le 12 janvier 2010.

À l'issue de visites de reprise des 26 mars et 11 août 2010, la médecine du travail a conclu à son aptitude sous réserve de certaines restrictions médicales : « travailler à domicile le plus souvent possible car elle dispose d'un poste aménagé; déplacement chez les clients et partenaires limités à une durée de deux heures et au-delà en position semi allongée ; éviter dans la mesure du possible les escaliers à la montée comme à la descente pas de position prolongée (assise, debout, etc.) ».

À la suite d'une chute d'un train survenu en octobre 2010, une visite de reprise le 3 février 2011 a conduit le médecin du travail a prononcé un avis d'aptitude sous réserve de restrictions médicales identiques aux précédentes complétées d'un ajout : impossibilité de rester dans les positions prolongées (debout, assise, etc.).

Des propositions de poste ont été présentées à la salariée qui les a refusées.

Le 15 décembre 2010, Madame X... a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre, soutenant que la société IBM l'avait maintenu dans un emploi incompatible avec les restrictions émises par la médecine du travail et son statut de travailleur handicapé, et a sollicité la condamnation de la société aux sommes suivantes :

- 200 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et exécution déloyale du contrat de travail,

- 200 000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination à raison du handicap,

- 200 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation par l'employeur de l'obligation de sécurité mise à sa charge,

- 110 338 euros à titre de rappels de commissions dues depuis le 1er janvier 2010,

- 11 033 euros à titre de congés payés afférents,

- 124 288,27 euros à titre de rappels de maintien de salaire à compter du 1er mars 2011 jusqu'à décembre 2012,

- 40 795,74 euros à titre de rappels de maintien de salaire de janvier 2013 à septembre 2013,

- 7 396,19 euros à titre de rappels de primes variables annuelles pour les années 2010 et 2011,

- 739,62 euros à titre de congés payés afférents,

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Madame X... a par ailleurs demandé :

- qu'il soit fait injonction à la société de présenter une offre loyale de reclassement sur un emploi non seulement conforme aux restrictions de la médecine du travail mais aussi à son expérience professionnelle et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à compter du prononcé de la décision intervenir,

- de fixer le salaire mensuel brut de base à la somme de 11 448,40 euros,

- de fixer le montant du complément mensuel de salaire au titre de la prévoyance par IBM à hauteur de 7 162,30 euros,

- condamner la société aux dépens,

- ordonner la remise des bulletins rectifiés conformes,

- ordonner l'exécution provisoire et la capitalisation des intérêts.

Le défenseur des droits a fait part de ses observations : les faits invoqués à l'appui du harcèlement moral sont fondés ; l'employeur n'a pas pris les mesures appropriées pour permettre au travailleur handicapé d'exercer son travail et d'être maintenu dans son emploi ; l'employeur a proposé des postes inadaptés, en méconnaissance des restrictions de la médecine du travail ; l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat.

La société a contesté l'ensemble des demandes de la salariée et la position du Défenseur des droits, et a sollicité le débouté de l'ensemble de celles-ci et sa condamnation à une indemnité de procédure de 5000 euros ainsi qu'aux entiers dépens.

Par jugement du 17 décembre 2013, le conseil de prud'hommes a dit que :

- le harcèlement moral n'était pas avéré,

- la discrimination en raison du handicap n'était pas démontrée,

- l'obligation de sécurité de l'employeur n'avait pas été violée,

- le rappel de commissions depuis le 1er janvier 2010 n'était pas dû,,

- il n'y avait pas lieu à rappel au titre du maintien de salaire à compter du 1er mars 2011 jusqu'au mois de septembre 2013,

en conséquence, a débouté la salariée de ses demandes à ces divers titres.

Le conseil de prud'hommes a fait droit néanmoins droit à l'injonction à la société de présenter à la salariée une offre loyale de reclassement, conforme aux préconisations de la médecine du travail sans qu'il y ait lieu de fixer une astreinte, et a débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700du code de procédure civile laissant les parties supporter la charge de leurs propres dépens.

La salariée a régulièrement interjeté appel total de ce jugement reçu par le greffe le 20 janvier 2014.

Le 31 mars 1014, les parties ainsi que le Défenseur des droits ont été convoqués à l'audience collégiale fixée au 13 janvier 2015.

Le Défenseur des droits a présenté des observations sous forme de lettre adressée à la cour le 17décembre 2014, reçue par le greffe social le 19 décembre 2014, aux termes de laquelle il constate que les mesures prises à l'égard de la salariée sont constitutives d'une discrimination et d'un harcèlement discriminatoire et que le conseil de prud'hommes ne semble pas avoir tiré toutes les conséquences légales des faits portés à sa connaissance.

Un renvoi été accordé au 23 juin 2015, à peine de radiation, le conseil de la société faisant valoir le 24décembre 2014 qu'il n'avait toujours pas reçu les conclusions de l'appelante. Le conseil de cette dernière faisant valoir la complexité du dossier et les problèmes de santé de Madame X....

La cour a été informée le 19 mars 2015 que le conseil de Madame X... n'intervenait plus aux côtés de celle-ci. Par lettre du 16 juin 2015, le nouveau conseil de la salariée a sollicité un renvoi afin de se mettre en état.

À l'audience du 23 juin 2015 la radiation été prononcée.

Par lettre du 13 janvier 2017, le conseil de la salariée a sollicité la réinscription de l'affaire, joignant ses conclusions et ses pièces ainsi qu'une sommation de communiquer.

Aux termes de ses conclusions, la salariée sollicite l'infirmation du jugement entrepris et que soit ordonnée une expertise médicale afin de chiffrer le préjudice de Madame X..., en tout état de cause, condamner la société à lui payer les sommes suivantes :

- 200 000 euros nets pour harcèlement moral,

- 200 000 euros nets pour discrimination en raison du handicap,

- 400 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité,

- 150 000 euros à titre de rappels de commissions 2008 ainsi que 15 000 euros à titre de congés payés afférents et, à titre subsidiaire , 49 682,47 euros et 4 968,24 euros à titre de congés payés afférents,

- 150 000 euros à titre de rappels de commissions 2009 ainsi que 15 000 euros à titre de congés payés afférents,

- 300 000 euros à titre de rappels de commissions pour les années 2010 et 2011 avec 30000euros de congés payés afférents,

à titre subsidiaire :

- ordonner une expertise comptable afin de chiffrer les commissions revenant à la salariée,

- ordonner à l'employeur de faire rectifier pour l'avenir par l'organisme assureur, la Mutualité Française, l'assiette de calcul des prestations de la salariée, ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à défaut en cas de refus de l'organisme assureur, condamner la société à assurer à la salariée le niveau de rente invalidité auxquelles il s'est engagé correspondant à la différence entre le montant de la rente calculée en tenant compte de l'assiette rectifiée et le montant de la rente effectivement servie par l'organisme assureur,

- ordonner une expertise comptable afin de chiffrer l'indemnité revenant à la salariée, à titre subsidiaire condamner la société au paiement de 500 000 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de chance,

- condamner la société à une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'à la remise des bulletins de paie conformes à la décision à intervenir et la capitalisation des intérêts.

Par conclusions signifiées par RPVA le 15 février 2018, la société sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et prie la cour de constater l'absence de tout harcèlement moral, de toute violation de l'obligation de sécurité de résultat, de toute discrimination en raison du handicap, l'absence de droit à commissions pour les années 2008 à 2011, l'absence de perte de chance de travailler jusqu'à l'âge de la retraite et la débouter de sa demande de dommages-intérêts à cet égard ainsi que de sa demande revalorisation de sa rente ; la débouter également de ses demandes de nomination d'expert médical et comptable ; subsidiairement, l'employeur invite la cour à ne pas faire droit aux demandes d'indemnité pour harcèlement discriminatoire et manquement à l'obligation de sécurité de résultats qui font double emploi ; en tout état de cause l'employeur demande à la cour de débouter la salariée de sa demande d'indemnité de procédure et la condamner à cet égard à la somme de 5 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens.

Le défenseur des droits présent dans la cause verse aux débats sa décision du 17 décembre 2014 sous le numéro MLD/2014-140, en guise d'écritures aux termes desquelles il considère que l'employeur n'a pas respecté les préconisations de la médecine du travail, ni pris les mesures appropriées pour permettre à la salariée d'être maintenue dans son emploi au sens de l'article L.5213-6 du code du travail ; que ces faits sont constitutifs d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat au visa de l'article L.4121-1 du code du travail et du « 8 ième accord d'entreprise sur l'emploi des personnes handicapées 2010'2012 » ; que les mesures prises à l'égard de la salariée sont constitutifs d'une discrimination et d'un harcèlement discriminatoire au sens de la directive 2000/78/C des articles L.1132-1 et 5213-6 du code du travail.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

A la date de l'audience, Mme X... faisait toujours partie des effectifs de la société.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'expertise médicale

Il n'apparaît pas au vu des éléments dont dispose la cour, que cette demande doive être satisfaite.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, deformation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Il résulte des articles L.1152-1 et L.1254-1 du code du travail, que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral; dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, la salariée invoque un certains nombres de faits émaillant les années 2008, 2009, 2010 et 2011, qu'elle considère comme des éléments laissant présumer des agissements de harcèlement moral (relations difficiles avec son supérieur hiérarchique Monsieur A... ; discussion sur le contenu des lettres d'objectifs ; discussion sur les frais engagés ; sur le périmètre des objectifs : sur l'étendue des territoires à prospecter et le nombre de clients ; difficultés relationnelles avec ses collègues ; absence de propositions de poste). Elle fait valoir qu'elle s'en est ouverte à Monsieur Bertrand B... représentant du personnel, conduisant à une demande d'audit dans le courant de l'année 2009.

Elle considère au regard des éléments énoncés avoir été victime de harcèlement moral dès lors qu'elle a rencontré de graves problèmes de santé, que son handicap était devenu évident dès la mi année 2008 et que le harcèlement s'est accentué fin 2008 quand elle a dénoncé des actes de gestion qu'elle considère comme anormaux de la part de son supérieur hiérarchique.

Pour soutenir ses affirmations, Mme X... produit les éléments suivants :

pour l'année 2008 :

- un extrait d'un courriel de M. A... du 27 août : « je souhaiterais que l'on trouve au plus vite une solution avant que je sois obligé de répondre à une demande qui m'a souvent été faite de te changer de compte ce qui, pour moi, serait préjudiciable au business IBM ». Elle en tire la conclusion que son supérieur souhaitait l'évincer d'un grand compte qu'elle suivait depuis longtemps (BP2I, filiale informatique de la BNP). Toutefois, il s'agit d'un extrait choisi par la salariée car le courriel est d'abord un constat de ce que «chacune de tes interventions '. m'est reportée comme inadmissible voir pire, ton comportement à Malaga a très peu été apprécié de l'équipe EMEA comme tu le sais déjà. Tout ceci mis bout à bout ne nous permet pas de travailler dans la sérénité qu'il est nécessaire pour signer de grosses affaires j'espère que tu vas enfin admettre que ce n'est pas IBM qui s'est ligué contre toi et que tu vas prendre conscience qu'un petit changement de comportement nous permettra de travailler beaucoup plus efficacement '.. j'ai confiance en toi et je serai présent à ton côté, comme toujours, pour que tu réussisses ».

- Un courriel de M. A... du 18 septembre : « Christine j'ai une carte comme la tienne et je me déplace 10 fois plus souvent que toi. IBM n'est pas à 10 € près mais j'ai l'impression que tu te focalises sur des « broutilles ». Ce courriel venait en réponse à celui de Madame X... qui demandait à passer en frais la connection ADSL facturé éventuellement par l'hôtel au cas où il lui faudrait passer du temps sur son ordinateur.

- Son courriel du 22 novembre duquel elle semble induire que M. A... lui reprocherait d'avoir pris deux semaines de congés. Toutefois elle ne produit pas le mail de ce dernier.

- Un courriel du 1er décembre de M. A... : « '''' Désolé de te dire mais je suis TOUJOURS à l'heure quand je m'engage !!!! », répondant à celui du même jour de Madame X... « Essayons d'être à l'heure pour avoir toute l'info !!! ». Il sera rappelé que cette dernière est la subordonnée du premier.

- Un courriel du 30 décembre de M. A... : « tu réfléchis avant ou après avoir envoyé un message '''' ». Cependant Madame X... ne produit pas le message provoquant cette réponse de son supérieur hiérarchique.

Pour l'année 2009 :

-un courriel de Monsieur A... du 9 janvier : « deuxième recommandation de l'année : intéresse toi aux outils IBM cela te permettra d'éviter de les trouver trop compliqués », répondant à un courriel de la salariée : « j'ai vérifié le challenge dans FMS et il est offert donc indépendant du montant donc a priori je n'ai rien à faire sauf erreur de ma part ».

- un courriel du même auteur du 29 janvier adressé à la salariée : « tu es maintenant sur la liste rouge management SWG pour les QL [quota letter]mais aussi pour les PBCs.[outil d'évaluation de l'année] Tu envoies des messages mais tu ne trouves pas deux minutes pour entrer dans les outils je ne comprends pas », envoyé à la suite d'un courriel qui lui avait été adressé par un membre du management SWG ( software group) : « Bonjour Laurent, il reste Christine qui n'a toujours pas accepté sa quota letter ». La salariée expose qu'elle était en droit de discuter de sa lettre d'objectifs (Quota Letter) ce qui ne peut lui être reproché alors qu'elle n'avait pas perçu, selon elle, l'intégralité de ses commissions et que le territoire qui lui était confié était plus large entraînant une surcharge de travail dans un contexte où son supérieur hiérarchique n'ignorait pas son état de santé.

- son courriel du 30 janvier reprochant à A... de lui avoir envoyé huit messages alors qu'elle est en vacances. Des pièces du dossier il apparaît que le vendredi 30 janvier était la date ultime de l'acceptation des lettres d'objectifs ainsi qu'il résulte d'un courriel du 28 janvier de relance de MmeC... à M. A... lequel a lui-même relancé cinq membres de son équipe qui n'avaient pas encore répondu, y compris Mme X..., les 27 et 28 janvier à cet effet : « Team, merci d'approuver vos quota letters ou de me dire ce qui ne va pas ».

- son courriel du 27 février répondant à une critique de son supérieur hiérarchique exprimé dans un courriel du même jour « Christine tu es la seule à avoir toutes les invitations à 100 € ou plus. Invité des clients OUI mais cela n'empêche pas de faire attention. Comment font les autres ' ». Ce sujet était à nouveau abordé dans un échange de courriels du 27 mars. La salariée sollicitant un montant de dépenses « ... que je ne dépasserai pas... », son supérieur hiérarchique lui répondant : « je répète qu'il n'y aura pas de montant mais une demande de budget... ».

- son échange de courriels du 25 mai avec un représentant du personnel, Monsieur B..., où elle l'exprime sa crainte de son éviction rapide par son supérieur hiérarchique et ce pour de fausses raisons. Le représentant du personnel répercute la situation dans un courriel du même jour appelant l'attention de son destinataire sur la situation de la salariée : « ... c'est visiblement un conflit personnel (c-à-d conflit qui n'a rien à voir avec la qualité de l'activité commerciale) qui demande une réflexion objective, ce qui semble n'être absolument pas le cas. En outre c'est un exemple flagrant de climat de STRESS à combattre ».

- son courriel du 4 juin 2009 à la directrice des relations sociales et de l'emploi (Madame U...), la remerciant de son accueil et de son écoute et lui demandant de diligenter une enquête RH sur le management de MM. A... et D... (équipe Blue), constatant qu'il était préférable pour elle-même qu'elle quitte cette équipe à condition de retrouver un emploi qui ne soit pas un « placard»

- son échange de courriels des 10 et 11 juin avec Mme Marie-Laure E... (ressources humaines) acceptant la méthodologie proposée par cette dernière, à savoir laisser se dérouler l'enquête (audit «corp ») menée par Mme Chantal F... sur le non respect des process IBM par M. A... dénoncé par Mme X... puis ensuite mener l'enquête « RH » sur le management de ce dernier. Du dossier, il résulte qu'une enquête pour harcèlement moral a été diligentée au sein d'IBM par M. G... entre le 31 juillet et le 16 octobre 2009 à la suite de la plainte pour harcèlement moral de la salariée. Cette enquête a conclu à l'absence de « comportement anormal du management de caractère fréquent et durable » à l'égard de la salariée même si le rapporteur relève que les actions de sa hiérarchie ont été souvent maladroites parfois déplacées mais jamais « outrageuses, brutales ou dénigrantes ». Par ailleurs, il se déduit des pièces versées aux débats que l'enquête menée par Mme Chantal F... (non produite aux débats) a conduit au licenciement de M. A... le 25 mars 2010, pour grave dysfonctionnement des process IBM à l'avantage d'une salariée de l'équipe Blue (il s'infère des pièces qu'il s'agit de Mme Pascale V...) et pour détournement de notes de frais.

- son courriel du 6 juillet destiné à M. A... : « Je te remercie de me communiquer par retour : les chiffres par deal H2 2008 ... sur le secteur public apparemment je perds l'Industrie et FSS hors BP2I alors que j'ai récupéré ce territoire en H1 2009 donc c'est un investissement perdu qui devra être refait et une nouvelle déstabilisation des clients. '. Je sais que tu m'en veux terriblement suite à ma demande d'audit et que tu souhaites me chasser de ton équipe mais je ne suis pas sûr que cette réorganisation du territoire soit le plus productif pour IBM. ». Du dossier il résulte que ce courriel est envoyé par la salariée à la suite de la demande de son supérieur hiérarchique de se positionner sur la lettre d'objectifs pour le second semestre 2009.

- ses courriels des 6 et 8 juillet destinés à Mme U... (directrice des relations sociales et de l'emploi), dans lequel elle se plaint d'une modification de son territoire (ajout au grand compte BNP2I des PME) imposé par sa hiérarchie dans le cadre de la cadre de la lettre d'objectif pour le second semestre (H2 2009) qui occasionnerait un surcroit de travail avec un objectif multiplié par trois. Elle considère cette modification comme du harcèlement moral à la suite de sa dénonciation.

- le courriel du 16 juillet d'un directeur des ventes de son employeur (Christian H..., supérieur hiérarchique de M. A...) indiquant à la salariée avoir pris la décision de la maintenir au second trimestre sur le même territoire que celui du premier trimestre, indiquant avoir demandé à Monsieur A... de modifier en ce sens sa lettre d'objectifs du second trimestre, et priant la salariée d'approuver cette lettre d'objectifs modifiée. La salariée y voit le désaveu de son supérieur hiérarchique par la direction et, implicitement, la reconnaissance de sa revendication au titre du harcèlement moral.

- son courriel du 28 juillet contestant cette fois la lettre d'objectifs modifiée (retour sur le territoire précédent) et sollicitant des réponses sur des points techniques, adressé à Christian H... en réponse au courriel du 27 juillet de ce dernier rappelant la modification intervenue sur la lettre d'objectifs, l'existence d'une enquête sur les éléments qu'elle a remontés, lui reprochant des envois de mails longs et répétés nuisant à l'efficacité des actions engagées, susceptibles par ailleurs de minimiser la pertinence de ses arguments l'invitant à approuver la lettre d'objectifs modifiée et à cesser la formede communication qu'elle a adoptée (très longs courriels) afin d'émettre sereinement les recommandations qui s'imposeront.

- Son courriel du 18 septembre adressé à son employeur où elle se plaint d'un climat glacial entretenu par son homologue Caroline I... à qui elle avait demandé de participer à une réunion « Fortis ». Mme I... lui avait répondu qu'y étaient invités les sachants sur les « workload pricers » pour effectuer des exercices théoriques ne présentant pas d'intérêt. Auparavant Caroline I... avait envoyé un courriel à Madame X... : « Christine, lorsque je te mets dans la boucle cela ne semble pas te plaire, quand tu n'y es pas cela ne te plais pas non plus ! Merci de me donner le mode d'emploi ».

- son courriel du 1er octobre destiné à Christian H... se plaignant d'une rétention d'informations à son égard à propos du calcul de ses commissions, voulue dit-elle par son supérieur hiérarchique et Léo D....

- sa demande de médiation début novembre à propos d'un harcèlement moral sans toutefois se référer à un document contemporain à cette demande.

- son courriel 23 décembre adressé à Christian H... se plaignant d'être écartée de la gestion de son client BP21 et du refus de Caroline J... de lui communiquer les propositions destinées à ce client alors qu'elle est responsable dudit client et qu'elle a signé la lettre d'objectif l'intégrant. Elle reproche l'attitude « inadmissible » de Caroline J... mais également celle de Chantal K... relevant qu'elles sont directement impliquées dans la demande d'audit qu'elle a sollicité consécutivement à la violation par M. A... de principes de conduite dans les affaires à l'avantage de l'une de ses collègues. Cette demande serait la cause de son exclusion. Par courriel du même jour M. H... lui a répondu : «Christine, je te recommande et demande d'arrêter d'envoyer des longs mails aux collaborateurs d'IBM qu'il soit SWG, GTS ou Secteur. Des meetings ont lieu chez le client au plus haut niveau d'IBM France dans le cadre de la relation IBM-BNPP, et ne concerne pas que le logiciel, ni le logiciel Blue. Je te demande de ne plus écrire sur tes soupçons quant à ses meetings et à leur contenu, car tu mettrais en cause des personnes qui font leur travail à tous niveaux. Merci de te rapprocher de ton management pour savoir précisément ce qui est attendu de toi, dans le cadre du jeu de l'équipe IBM au service de BNPP. Rien de moins rien de plus comme tout autre collaborateur d'IBM. Merci ».

Sur l'année 2010 :

- son courriel du 5 janvier destiné à Léo D... avec notamment copie à Christian H..., où elle rappelle avoir été exclue de facto au fin 2009 du compte BP2I par Chantal (K...), Béatrice (') et Caroline (J...). Elle exprime son souhait de gérer d'autres grands comptes que celui-là. À défaut elle poursuivrait la gestion de ce compte à condition d'obtenir le support de son management afin que la situation de 2009 ne se reproduise pas. Chritian H... lui répond par courriel du même jour lui rappelant qu'elle n'a pas été évincée de ce dossier et qu'elle reconnaît elle-même que tout s'est bien terminé le 31 décembre. Il lui fait part de l'opportunité d'un emploi dans le secteur des ventes (secteur Information Management ou Tivoli) dont il valorise l'importance et lui assure revenir vers elle très rapidement sur ce point. Par courriel en réponse, la salariée soutient avoir néanmoins été évincée. Elle indique ne rien avoir contre un changement de poste sous réserve qu'il soit porteur de comptes intéressants. Elle rappelle qu'elle ne veut pas quitter son poste actuel ou dit-elle, elle n'a jamais démérité, sans aucune autre proposition. Elle ajoute être en phase avec lui. Elle l'informe par ailleurs être suivie de près par un service de pathologie professionnelle, indiquant devoir entrer en clinique en février suite « au « sympathique » traitement subi depuis plus d'un an au sein de l'équipe Blue et cela fera plusieurs semaines d'absence... merci de ton support ». Elle ne produit pas d'éléments sur cette hospitalisation. Il résulte du dossier que la salariée a bénéficié du statut d'handicapé à compter du 10janvier 2010.

- son courriel du 13 janvier adressé à Christian H..., regrettant que deux postes dont celui de Tivoli ne lui aient pas été attribués, rappelant qu'il lui faut trouver un poste correspondant à son profil qu'elle n'a pas démérité et qu'elle n'est pas responsable de ce qui s'est passé au sein de l'équipe Blue et chez BP2I elle souhaite un entretien rapide avec son interlocuteur.

- Un courriel du 14 janvier émis par Léo D... informant la salariée de l'étendue de son territoire pour le premier semestre de l'année lequel ne comprend pas le compte BP2I.

- son courriel du 14 janvier destiné à Madame Marie-Laure E... (ressources humaines) l'informant de ce qu'elle a été réaffectée à l'équipe Blue, elle fait part de sa déception en dénonçant les agissements de son supérieur hiérarchique et de ses collègues, toujours en place, malgré les demandes d'audit. Elle ne remet pas en cause la sincérité de la démarche de Monsieur Christian H... dans la recherche d'un emploi pour elle mais regrette que l'on ne lui ait pas recherché « un point de chute convenable avant que tous les postes ne soient pris ».

- son courriel du 15 janvier également adressé à Christian H... et Marie-Laure E... sollicitant une médiation à la fois pour examiner le passé notamment son éviction puis sa réintégration forcée au sein de l'équipe Blue et les possibilités de poursuivre son activité au sein de cette équipe en obtenant l'assurance d'être traitée de façon équitable.

- Son courriel du 17 janvier adressé à Mme Chantal F... (en charge de l'enquête sur le non respect des process par M. A...) lui faisant part de ce que le management IBM avait jugé « bon » de la réaffecter à l'équipe Blue alors qu'elle en avait été écartée de facto et qui la réintègre par « charité » et sur ordre de Christian H..., en l'humiliant néanmoins puisqu'elle se voit confier des comptes moins importants.

- Son courriel du 9 avril adressé aux ressources humaines (Marie-Laure E...) sollicitant la restitution de l'enquête menée par Chantal F... mais écartant celle menée par Jean-Yves G....

- son courriel du 17 avril au responsable du secteur IBM Tivoli relevant que le territoire du secteur proposé est énorme avec des procédures de marchés publics contraignantes, qu'il y a donc des priorités à définir en fonction du temps disponible. Elle en tire la conclusion qu'on lui propose un poste pour lequel elle n'est pas formée et pour des objectifs qu'elle considère irréalisables.

- ses courriels des 28 et 30 septembre aux termes desquels la salariée interroge Patrizio L... (statut non identifié ) sur la quantification des objectifs et la possibilité de les réaliser et qu'en l'absence de réponse elle ne peut signer sa lettre d'objectifs. Elle sollicite une adaptation de sa rémunération afin de tenir compte de son handicap. Elle déplore qu'il n'en soit pas tenu compte dans la fixation de ses objectifs.

- son courriel du 4 octobre adressé à son employeur (Patrizio L... (statut non identifié ), reprenant certains éléments déjà évoqués dans ses courriels précédents, l'informant de son statut de travailleur handicapé par la MDPH conduisant à un aménagement de poste. Elle rappelle et critique les deux propositions de poste qui lui ont été faites ainsi que les objectifs qui lui ont été assignés. Elle indique n'avoir reçu aucun plan de commissionnement pour le premier semestre 2010 et que le plan pour le second semestre n'est pas très motivant. Ces courriel semblent répondre à des courriels adressés par le destinataire mais dont elle ne fournit pas la copie.

Sur l'année 2011 :

- une lettre de son employeur du 1er mars formant proposition d'emploi en tant que Sales Specialist Software présentée comme temporaire et tenant compte de la recommandation médicale qui lui a été notifiée : mise en place d'un poste adapté à son état de santé avec les aménagements de poste suivant : travail à domicile plus souvent possible car elle dispose d'un poste aménagé ; déplacement chez les clients et les partenaires limités à une durée allaient de deux heures et au-delà en position semi allongée ; éviter dans la mesure du possible, les escaliers à la montée comme à la descente ; impossibilité de rester dans des positions prolongées (debout, assise, etc.). La salariée estime que ce poste est dévalorisant alors qu'elle attendait, compte tenu de ses compétences un poste équivalent à celui qu'elle occupait avec maintien de sa rémunération et compatible avec son état de santé. Elle estime qu'il s'agit d'une rétrogradation incompatible de plus avec son état de santé.

*****

Il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il est constant que le 7 février 2007 la salariée a été victime d'un grave accident de ski qui a entraîné un arrêt maladie jusqu'au 22 avril 2007, puis un autre du 8 juillet au 10 août 2008 pour une deuxième opération qui selon les dires de la salariée n'a pas eu le succès espéré, qu'elle a repris son emploi à compter du 24 septembre 2008, ayant été déclarée apte. En 2009, la salariée sera absente pour syndromes dépressifs du 9 au 24 juin. La salariée bénéficiera du statut de travailleur handicapé à compter du 12 janvier 2010. Cette même année, elle sera placée en arrêt maladie pendant 111 jours répartis sur l'ensemble de l'année (janvier ; février-mars ; avril-mai ; octobre ; novembre- décembre). Le médecin du travail la considérera le 3 février 2011 apte au poste de commercial software avec aménagement de poste. Il ne peut être fait abstraction de la dégradation regrettable de l'état de santé de Madame X... due, à l'origine, à un accident de ski en 2007, dans l'appréciation d'éléments susceptibles de laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral sur la période 2008 à 2011 revendiquée par l'appelante comme la période pendant laquelle elle aurait subi un harcèlement moral.

Dans ce contexte particulier de fragilité physique et sans doute psychique éprouvée par la salariée, Il convient de distinguer d'une part les éléments fournis par la salariée qui expriment sa perception d'une situation qu'elle considère relever du harcèlement, et d'autre part les éléments objectifs, précis et concordants, laissant présumer une situation de harcèlement moral. À cet égard, il sera relevé que les éléments fournis par la salariée susceptibles de présumer un harcèlement moral se fondent pour l'essentiel sur des courriels rédigés par elle-même. Ainsi, la seule saisine d'un représentant du personnel par la salariée, fondée sur un harcèlement moral ne saurait constituer en soi un élément laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, de même que la qualification par la salariée d'une atmosphère « glaciale », d'une attitude soi-disant « inadmissible » de ses collègues, d'une volonté soit disant délibérée de ses collègues de ne pas lui communiquer certaines informations, l'expression de sa crainte d'une éviction de l'équipe Blue ou encore son regret de l'absence, selon elle, de suite donnée à sa dénonciation du non respect par ses collègues des process internes en termes d'objectifs.

Il convient également de distinguer les éléments fournis par la salariée qui relèvent de la seule organisation de l'entreprise, de ceux qui laissent présumer un harcèlement. Les premiers résultent de discussions sur le contenu de la lettre d'objectifs et de son absence d'approbation par la salariée, sur l'étendue du territoire à prospecter, sur un refus par l'employeur de participation à une réunion, sur une proposition de poste, ou un changement d'affectation, sur les avantages indûment accordés par son supérieur hiérarchique à l'une de ses collègues au préjudice de l'ensemble de l'équipe et non pas seulement à celui de Madame X..., sur un changement de compte client ou sur la prise en charge de frais qui peuvent engendrer des échanges vifs ou des désaccords auxquels l'appelante n'est pas nécessairement étrangère par son mode de communication et le ton qu'elle y adopte, sans pour autant que ces échanges laissent présumer un harcèlement moral. A défaut le pouvoir de direction de l'employeur pourrait être systématiquement remis en cause.

En revanche, si l'on situe au second trimestre 2009, la dénonciation par Madame X... à la Direction, du comportement managérial de M. A... et de M. D... à la fois sur le non respect des process et sur le harcèlement moral, la modification de son territoire pour le second semestre 2009 avec une charge de travail supplémentaire et un objectif irréaliste, vrai ou supposé, ainsi que son éviction, imposée ou souhaitée, de l'équipe Blue, en décembre de cette même année, puis le retrait du compte BNP2I suivi jusque là par Mme X..., pris dans leur ensemble, peuvent laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

L'employeur réplique que la salariée ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle aurait subi des agissements répétés emportant la qualification juridique de harcèlement moral mais fait plutôt valoir le fait qu'elle se serait sentie dans son parcours professionnel défavorisée par rapport à l'une de ses collègues. La société reprend année par année les éléments présentés par la salariée comme étant des faits laissant présumer des agissements de harcèlement moral et les réfute considérant qu'ils ne caractérisent pas un harcèlement moral. L'employeur soutient qu'il n'y a pas eu d'agissements répétés, ni d'agressions verbales ni de tentatives d'intimidation de la salariée, ni d'exclusion progressive.

L'employeur produit notamment une enquête menée par M. G... concluant à l'absence de harcèlement sur les faits dénoncés par Madame X....

Il y a lieu de relever que dès que la salariée s'est plainte du management de son supérieur hiérarchique qu'il s'agisse des manquements conduisant à favoriser l'une de ses collègues ou de harcèlement moral, l'employeur a reçu la salariée et a mis en 'uvre les deux enquêtes (corporate et harcèlement moral) selon une chronologie ayant recueilli l'assentiment de Madame X....

Il n'y a pas lieu de retenir, au titre du harcèlement moral, l'avantage accordé par M. A... à l'une des collègues de Madame X..., manquement effectué au préjudice de l'ensemble de l'équipe Blue et non spécialement à l'encontre de la salariée.

Le rapport d'enquête établi par M. G..., dans le cadre du harcèlement moral, expose brièvement la méthodologie suivie. À cet égard, après avoir entendu Madame Marie-Laure E... (ressources humaines) le rapporteur a conduit 11 entretiens (p4 du rapport) en commençant par Mme X... (30 juillet 2009) et en terminant par M. M... (16 octobre 2009) seul neuf comptes rendus d'entretien sont produits dont ceux de Mme X..., M. A..., M. D..., Mme V.... Au terme de ceux-ci, il a conclu à l'absence de harcèlement moral.

Le compte rendu d'entretien de Monsieur H... qui selon le rapport de M. G..., se serait tenu le 24 août 2009 et celui de Monsieur Guy N... qui se serait tenu le 8 septembre 2009 ne sont pas produits. L'employeur offre dans ses écritures une curieuse explication à cette absence de communication, en plaidant l'erreur de plume puisque, selon lui, personne n'aurait été au sein d'IBM en mesure de confirmer qu'ils ont été effectivement interrogés dans le cadre de cette enquête.

Il est regrettable que ces entretiens n'aient pas été tenus ou que les comptes-rendus de ces entretiens n'aient pas été communiqués. En effet, il apparaît de l'examen des comptes-rendus effectivement communiqués que Monsieur Guy N..., responsable du compte BP2I, aurait souhaité le départ de MmeX... du compte BNP2I et que la direction aurait souhaité la réduction de l'effectif de l'équipe Blue point sur lequel M. H... directeur commercial logiciel aurait pu fournir des explications utiles.

Des constatations qui précèdent il se déduit que le rapport d'enquête qui a conclu à l'absence de tout harcèlement moral à l'endroit de Mme X... ne peut être tenu comme permettant de justifier objectivement que les décisions de modification du territoire, de suppression du compte BNP2I, de retrait de l'équipe Blue, qui ont été prises à l'égard de la salariée, sont étrangères à tout harcèlement.

L'employeur échoue ainsi à démontrer que les faits matériellement établis par Mme O... sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le harcèlement moral est établi.

Compte tenu des circonstances du harcèlement subi, de sa durée, et des conséquences dommageables qu'il a eu pour Mme X... telles qu'elles ressortent des pièces et des explications fournies, notamment de son état de santé préexistant, sans doute aggravé par le harcèlement, et de son âge, le préjudice en résultant pour la salariée doit être réparé par l'allocation de la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts sans qu'il soit nécessaire de désigner un expert médical pour l'évaluer, la cour s'estimant suffisamment informée par les pièces versées aux débats.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur l'obligation de sécurité

L'employeur doit être sanctionné quand il a conscience ou aurait dû avoir conscience du danger encouru par le salarié et que ce faisant il n'a pas pris les dispositions nécessaires pour le préserver.

La salariée expose qu'elle a été victime de harcèlement moral et que l'employeur n'a jamais cherché à empêcher cette situation la laissant se dégrader.

L'employeur soutient avoir respecté son obligation de sécurité notamment en organisant les visites de reprise sollicitée l'avis de la médecine du travail et suivi au mieux selon elle les recommandations de cette dernière.

L'employeur rappelle que la salariée n'a jamais alerté le CHSCT ni les instances représentatives pour des faits de harcèlement moral. Il rappelle également que la salariée n'a jamais sollicité la résiliation judiciaire de son contrat travail au titre notamment au titre d'un manquement éventuel de l'employeur à cet égard.

La société expose avoir respecté les prescriptions de la médecine du travail et avoir pris en compte le handicap de la salariée rappelant que l'état de santé n'est pas imputable à la société.

L'employeur fait également valoir que la salariée ne démontre pas le préjudice qu'elle prétend avoir subi.

En l'espèce, la cour constate que dès lors que Mme X... s'est plainte du comportement managérial de Monsieur A..., l'employeur a mis en place sans tarder des enquêtes. Par ailleurs, grâce à l'intervention de Monsieur H..., le territoire proposé à la salariée, pour le second semestre 2009 qui avait été augmenté du secteur des PME, élément considéré comme relevant du harcèlement moral, a été réduit à son état antérieur sans le secteur des PME supprimant une charge de travail supplémentaire.

Toutefois, Madame X... a sollicité le 15 janvier 2009 une médiation, proposition à laquelle l'employeur n'a jamais répondu alors que cette médiation aurait pu permettre à l'employeur de constater que réintégrer la salariée au sein de l'équipe Blue avec pour supérieur hiérarchique M. A... conduisait à entretenir une situation difficilement supportable pour la salariée compte tenu de son état de santé et de leur incompatibilité de caractère, comme cela ressort des entretiens menés dans le cadre de l'enquête sur le harcèlement moral.

Il y a lieu de considérer que l'employeur, en rejetant par le silence, sans considération pour sa salariée, la proposition de médiation de cette dernière, a contribué à sa déstabilisation, manquant ainsi à son obligation de sécurité.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

La salariée sollicite la condamnation de son employeur au paiement de la somme de 400 000 euros net au titre de dommages-intérêts à cet égard sans en justifier. La cour s'estime suffisamment informée par les divers échanges et documents produits aux débats, pour fixer le montant de la condamnation à la somme de 5 000 euros.

Sur la discrimination au titre du handicap

Au visa des articles L. 1132-1, L4121-4, L. 5213-5 et 6 du code du travail, la salariée fait valoir qu'elle a été victime de discrimination en raison de son handicap et ce dès l'années 2008. Elle reproche pour l'essentiel à son employeur de ne pas lui avoir proposé un poste adapté à son statut de travailleur handicapé tenant compte des prescriptions médicales alors que depuis l'échec de son opération en milieu d'année 2008, l'employeur ne pouvait plus ignorer son état.

La société objecte que son statut de travailleur handicapé a été seulement reconnu le 12 janvier 2010 à la suite d'un accident domestique et qu'au cours du deuxième semestre 2009 elle conservait le même territoire et les mêmes produits. Elle fait également valoir que les propositions de poste destinées à Mme X... tenaient compte de son handicap et des prescriptions de la médecine du travail.

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Aux termes de l'article L.5213-6 du code du travail, afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, l'employeur prend, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs, mentionnés au 1° à 4°, et 9° à 11° de l'article L.5212'13, d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soient dispensés. Ces mesures sont prises sous réserve que les charges consécutives à leur mise en 'uvre ne soient pas disproportionnées, compte tenu de l'aide prévue à l'article L.5213'10 qui peuvent compenser en tout ou partie des dépens supportés à ce titre par l'employeur. Le refus de prendre des mesures au sens du premier alinéa peut être constitutif d'une discrimination au sens de l'article L.1133-3.

L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1132-1 du code du travail, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

La salariée fait valoir qu'elle a été victime de discrimination en raison de son handicap et ce dès l'années 2008. Elle reproche pour l'essentiel à son employeur de ne pas lui avoir proposé un poste adapté à son statut de travailleur handicapé tenant compte des prescriptions médicales alors que depuis l'échec de son opération en milieu d'année 2008, l'employeur ne pouvait plus ignorer son état.

En l'espèce, pour soutenir ses affirmations Mme X... produit notamment :

- son courriel du 3 juin 2010 destinée à son employeur (Patrizio L...) faisant part de de sa motivation et de son intérêt pour IBM et son souhait de disposer de plusieurs offres adaptées à ses compétences et à ses contraintes, en liaison avec la médecine du travail (Docteur P...),

- son courriel du 22 juin 2010 sollicitant la liste des postes à pourvoir dans la nouvelle organisation ainsi que le nom des managers à contacter,

- son échange de courriels du 28 septembre 2010 avec Monsieur Marc Q... (département R...) constatant que la salariée n'a pas accepté sa lettre d'objectifs dans ses nouvelles fonctions et qu'il se tient à sa disposition pour éclaircir certains points ce à quoi Mme X... répond en s'interrogeant sur le réalisme de l'objectif qui lui est fixé (300 % de croissance entre le second semestre 2009 et le second semestre 2010), appelant l'attention de son interlocuteur sur la justification du suivi de très nombreux comptes en province pour une personne handicapée qui bénéficie d'un aménagement de poste,

- son courriel du 4 février 2011 à la médecine du travail relatives au poste proposé (spécialiste software) qui ne respecterait pas selon elle les prescriptions médicales au motif qu'il supposerait le suivi de 813 comptes sur la France entière avec un objectif de plus de 300 % par rapport à l'année précédente, obligeant à des déplacements incompatibles avec les mesures d'aménagement de poste.

Madame X... établit ainsi l'existence matérielle de faits pouvant laisser présumer l'existence d'une discrimination à son encontre en ce que son employeur lui aurait proposé un nouvel emploi non conforme aux prescriptions médicales pour la décourager.

L'employeur fait valoir que l'appelante se plaint de discriminations liées au handicap survenues selon elle dès le mois de septembre de l'année 2008 alors que son statut de personne handicapée n'a été établi que le 12 janvier 2010 et que ce n'est que le 8 avril de la même année qu'elle en informera son employeur. L'employeur soutient également que la salariée a été, à de très nombreuses reprises, absente pour maladie dans le courant de l'année 2010 ce qui a compliqué la mise en place de propositions d'emplois et que néanmoins un poste d'ingénieur R... (Solution de gestion de documents) lui a été proposé le 25 août 2010 et qu'elle a en définitive refusé. Ultérieurement, en 2011 un poste de Sales Specialist Software adapté aux prescriptions médicales lui a été également proposé qu'elle a également refusé le considérant comme trop « junior ».

Au soutien de son argumentation l'employeur produit les documents suivants :

- les avis d'arrêt de travail à compter du 15 janvier 2010 jusqu'au 13 juin 2011,

- la fiche médicale d'aptitude sans restrictionà la fonction d'ingénieur commercial établi par la médecine du travail le 26 mars 2010 à la suite d'une visite de reprise,

- la fiche médicale d'aptitude établie le 11 août 2010 mentionnant l'aptitude avec aménagement,

- un courriel du 28 septembre 2010 de Patrizio L... à Mme Marie S... (ressources humaines) faisant part d'une situation intenable au regard des exigences financières de Madame X... se plaignant des 813 comptes à suivre alors que les aménagements (prescriptions médicales) ont été pris en compte. Il conclut que Madame X... est ingérable,

- la liste des postes disponibles.

De ce qui précède, il se déduit que l'employeur avait l'obligation à compter du 11 août 2010 d'intégrer dans sa proposition de poste les aménagements suivants : travail à domicile plus souvent possible (poste aménagé), déplacement chez les clients et partenaires limités à une durée aller de deux heures et au-delà en position semi allongée, éviter dans la mesure du possible les escaliers à la montée comme la descente.

Il résulte du dossier que l'employeur a proposé un poste d'ingénieur en septembre 2010 au sein de l'équipe R... dont il affirme qu'il respectait les préconisations de l'avis d'aptitude du 11 août 2010 sans toutefois fournir la fiche de poste et fournir d'éléments permettant d'établir que la médecine du travail avait été consultée sur l'adéquation de ce poste aux prescriptions médicales.

L'employeur a également proposé un poste de « Sales Specialist Software » en mars 2011, dont l'employeur n'établit pas qu'il correspondait aux préconisations de la médecine du travail et qu' il s'agissait d'un emploi au moins similaire à celui précédemment occupé par l'appelante, puisque l'ancienneté requise n'était que d'une année pour ce nouveau poste, selon les éléments du dossier.

L'employeur échoue ainsi à démontrer que les faits matériellement établis par Mme X... sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La discrimination est établie.

La salariée sollicite la condamnation de son employeur au paiement de la somme de 200 000 euros nets au titre de dommages-intérêts à cet égard sans en justifier.

Compte tenu des circonstances de la discrimination subie, de sa durée, et des conséquences préjudiciables qu'elle a eu pour Mme X..., telles qu'elles ressortent des pièces et des explications fournies par les parties, notamment de la privation de bénéficier d'une rémunération variable pour le second semestre 2010, pendant lequel elle a été néanmoins absente à plusieurs reprises, et pour le premier trimestre de l'année 2011, le préjudice en résultant pour l'appelante doit être réparé par l'allocation de la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la rémunération variable

La salariée sollicite la condamnation de la société à hauteur de 600 000 euros hors congés payés à titre de commissions pour les années 2008 à 2011 et, à titre subsidiaire, une expertise comptable pour en déterminer le quantum.

Mme X... fait valoir qu'elle aurait été privée d'une prime de 150 000 euros outre les congés payés pour l'année 2008, au motif que son supérieur hiérarchique aurait consenti une facilité de paiement sous forme de deux échéances, au lieu d'un paiement comptant, au client BP2I suivi par elle-même. À titre subsidiaire elle réclame la somme de 49 682,47 euros correspondant au montant de la commission qu'elle a perçue au titre de la première échéance et qu'elle n'a pas perçu au titre de seconde échéance.

Au titre de l'année 2009, l'appelante réclame une commission, outre les congés payés, de 150000euros au motif que des commandes sur le client BP2I auraient été annulées.

Au titre de l'année 2010, son employeur ne lui aurait pas proposé de plan commissionnement et l'aurait privée ainsi de toute rémunération variable.

S'agissant de l'année 2011, aucun poste ne lui aurait été proposé correspondant à ses qualifications de sorte qu'elle a été privée de rémunération variable.

Au titre de ces deux années 2010 et 2011, Mme X... sollicite une somme globale de 300000euros, hors les congés payés.

La société fait valoir qu'elle met chaque année en place pour les ingénieurs commerciaux un plan de motivation comportant une part fixe en pourcentage de la rémunération théorique et une part variable définie par lettre d'objectifs et ce pour une durée de six mois. Si le salarié adhère à ce plan de motivation et signe la lettre d'objectifs sa rémunération (fixe et variable) se substitue à sa rémunération fixe. L'employeur rappelle que l'adhésion au plan de motivation et l'acceptation de la lettre d'objectifs est volontaire qu'à défaut le salarié perçoit sa rémunération théorique de référence (RTR) en l'espèce si 6 962 euros par mois.

L'employeur conteste les sommes réclamées par la salariée, rappelant que cette dernière réclamait en première instance une somme de 282 817 euros de commission et ce pour les seules années 2010 à 2013. Il soutient que la salariée ne peut réclamer la rémunération variable pour les années concernées faute d'avoir été convenue et mise en place.

Pour justifier de sa demande de commission au titre de l'année 2008, la salariée produit le plan de motivation pour la même année dont il ne résulte pas un droit pour cette dernière à la somme demandée soit à titre principal soit à titre subsidiaire, de sorte qu'elle sera débouté de sa demande au titre de l'année 2008.

Au titre de l'année 2009, la salariée produit ses deux lettres d'objectifs semestriels sans pour autant établir un lien entre celles-ci et la somme réclamée de 150 000 euros, hors congés payés, ou encore démontrer l'incidence d'annulation de commande justifiant de cette réclamation. La salariée sera déboutée de sa demande.

S'agissant du premier semestre de l'année 2010, il apparaît des éléments du dossier que Mme X... n'a pas accepté la proposition de poste d'ingénieur commercial sur le produit Tivoli secteur Public, qu'elle n'a pas accepté la lettre d'objectifs que verse aux débats son employeur pour le premier semestre 2010, de sorte que sa réclamation de commissions au titre de l'année 2010 ne peut prospérer.

Au titre du second semestre 2010 et de l'année 2011, la salariée réclame également des commissions. Pour en justifier elle fait valoir qu'elle a été privée de toute rémunération variable, son employeur ne lui ayant pas proposé d'emploi similaire à celui qu'elle occupait précédemment et conforme aux préconisations d'aménagement, ce que la cour a reconnu au titre de la discrimination liée au handicap. Ainsi, Mme X... ne peut réclamer le versement de commissions mais une indemnisation pour perte chance d'obtenir une rémunération variable, perte qui est la conséquence de la discrimination pour handicap reconnue et pour laquelle elle a déjà été indemnisée.

La salariée sera déboutée de ses demandes de paiement de commissions. La demande subsidiaire de désignation d'un expert comptable n'ayant pas d'objet au regard de la solution retenue à titre principal et l'expertise n'ayant pas pour objet de suppléer à la carence des parties dans l'administration de la preuve.

Sur la perte de chance

La salariée sollicite la désignation d'un expert comptable pour évaluer l'indemnité pour perte de chance d'avoir été privé de poursuivre sa carrière jusqu'à sa retraite et subsidiairement demande la somme de 500 000 euros à titre de dommages-intérêts.

La société valoir que la salariée ne rapporte pas la preuve d'un manquement caractérisant une perte de chance d'exercer son travail jusqu'à l'âge de la retraite et rappelle que l'état de santé de la salariée n'est pas imputable à la société.

Il ne résulte pas du dossier que Mme X..., qui demeure toujours à l'effectif de son employeur, rapporte la preuve d'avoir été privée, comme elle l'affirme, de poursuivre sa carrière jusqu'à sa retraite du fait de son employeur alors qu'il est constant qu'elle a été victime d'un accident de ski, conduisant à la reconnaissance de son statut d'handicapée, et auquel l'employeur est étranger.

La salariée sera déboutée de sa demande principale de rectification, sous astreinte, par l'organisme de prévoyance de l'assiette de calcul des prestations et d'expertise comptable pour en déterminer le montant.

Mme X..., sera également déboutée de sa demande subsidiaire de dommages et intérêts à hauteur de 500 000 euros, ne justifiant pas de cette somme alors que la cour a constaté que la salariée ne rapportait pas la preuve d'une perte de chance causée par son employeur de poursuivre sa carrière chez IBM juqu'à sa retraite.

Sur les demandes accessoires

Ils ne parait pas inéquitable de condamner la société à payer à la salariée une indemnité de procédure tant en première instance qu'en cause d'appel et de débouter la société de sa demande aux mêmes fins.

Les sommes auxquelles la société est condamnée porteront intérêt légal avec capitalisation à compter de la signification du présent arrêt.

La société qui succombe partiellement supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort ;

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes du 17 décembre 2013 ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la SA COMPAGNIE IBM à verser à Madame Christine X... les sommes suivantes :

- 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

- 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination en raison du handicap ;

- 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de l'obligation sécurité ;

DÉBOUTE Madame Christine X... du surplus de ses demandes ;

DEBOUTE la SA COMPAGNIE IBM de sa demande de condamnation de Madame Christine X... à une indemnité de procédure ;

CONDAMNE la SA COMPAGNIE IBM à verser à Madame Christine X... à la somme de 1000euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et à 2000euros en cause d'appel ;

DIT que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par la SA COMPAGNIE IBM.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président, et par Monsieur Nicolas CAMBOLAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 17/01034
Date de la décision : 26/07/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 06, arrêt n°17/01034 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-26;17.01034 ?
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