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04/07/2018 | FRANCE | N°15/00079

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 04 juillet 2018, 15/00079


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 4 juillet 2018



N° RG 15/00079



AFFAIRE :



B... C...





C/

SOCIÉTÉ ANONYME D'HABITATIONS A LOYER MODÉRÉ LOGEMENT ET GESTION IMMOBILIÈRE POUR LA RÉGION PARISIENNE - LOGIREP

...





Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 12 Décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire

de MANTES LA JOLIE

Section : Commerce

N° RG : 14/00053



Copies certifiées conformes

Copies exécutoires



délivrées à :





X...



Alain Y... (délégué syndical ouvrier)







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE F...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 4 juillet 2018

N° RG 15/00079

AFFAIRE :

B... C...

C/

SOCIÉTÉ ANONYME D'HABITATIONS A LOYER MODÉRÉ LOGEMENT ET GESTION IMMOBILIÈRE POUR LA RÉGION PARISIENNE - LOGIREP

...

Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 12 Décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

Section : Commerce

N° RG : 14/00053

Copies certifiées conformes

Copies exécutoires

délivrées à :

X...

Alain Y... (délégué syndical ouvrier)

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 27 juin 2018 puis prorogé au 4 juillet 2018, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre:

Monsieur B... C...

[...]

Assisté de M. Alain Y... (délégué syndical ouvrier)

APPELANT

****************

SOCIÉTÉ ANONYME D'HABITATIONS A LOYER MODÉRÉ LOGEMENT ET GESTION IMMOBILIÈRE POUR LA RÉGION PARISIENNE - LOGIREP

[...]

Représentée par Me Christian Z... de la X..., avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0159

L'UNION DES SYNDICATS ANTI-PRÉCARITÉ

[...]

Représentée par M. Alain Y... (délégué syndical ouvrier)

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 4 mai 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc A..., président et Monsieur Stéphane BOUCHARD, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Luc A..., Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,

FAITS ET PROCÉDURE :

M. B... C... a été embauché à compter du 1er mars 2010 selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'agent polyvalent par la société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep).

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale des personnels des sociétés anonymes et fondations d'HLM.

Par lettre présentée le 6 décembre 2011, l'Union des syndicats anti-précarité a désigné M. C... en tant que représentant de section syndicale.

Des échanges ont ensuite eu lieu entre la société LogiRep et l'Union des syndicats anti-précarité sur la régularité de cette désignation.

De février 2012 jusqu'au 11 février 2013, M. C... a été placé en arrêt de travail consécutif à un accident du travail.

Une visite médicale de reprise est intervenue le 15 février 2013.

Le 28 février 2013, M. C... et la société LogiRep ont signé une convention de rupture à effet au 12 avril 2013, prévoyant le versement d'une indemnité spécifique de rupture d'un montant de 43'500 euros.

Le 12 avril 2013, la société LogiRep a remis à M. C... un certificat de travail.

Le 4 février 2014, M. C... a saisi le conseil de prud'hommes de Mantes-La-Jolie pour essentiellement demander la nullité de la rupture de son contrat de travail du 12 avril 2013 pour défaut d'autorisation de l'inspecteur du travail, sa réintégration et diverses sommes.

L'Union des syndicats anti-précarité est intervenue volontairement à l'instance.

Par un jugement du 12 décembre 2014, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, moyens et prétentions des parties, le conseil de prud'hommes (section commerce) a :

- annulé la rupture conventionnelle signée le 28 février 2013 entre M. C... et la société LogiRep;

- requalifié la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- fixé la moyenne des salaires à 1 956,87 euros ;

- condamné la société LogiRep à payer à M. C... les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2013, date de réception de la convocation par l'employeur devant le bureau de conciliation :

* 3 913,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 391,37 euros au titre des congés payés afférents ;

- condamné la société LogiRep à payer à M. C... les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision :

* 1 206 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

* 23'482 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- ordonné à la société LogiRep de rembourser à Pôle emploi le montant des allocations chômage perçues par M. C... dans la limite de six mois en application de l'article L. 1235-4 du code du travail ;

- ordonné à la société LogiRep d'établir les bulletins de paie et une attestation pour Pôle emploi rectificatifs conformes au jugement ;

- condamné la société LogiRep à payer à M. C... une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. C... de ses autres demandes ;

- ordonné à M. C... de rembourser à la société LogiRep la somme de 43'500 euros perçue à titre d'indemnité spécifique de rupture conventionnelle ;

- débouté l'Union des syndicats anti-précarité de ses demandes ;

- dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties.

Le 7 janvier 2015, M. C... a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

À l'audience du 10 juin 2016, l'affaire a été renvoyée au 4 mai 2018, à raison du dépôt tardif de ses conclusions par l'appelant.

Par ordonnance de référé du 21 juillet 2016, le conseil de prud'hommes Mantes-La-Jolie a rejeté la demande de réintégration au sein de la société LogiRep et de paiement à titre provisionnel d'une somme au titre des salaires pendant la période d'éviction.

Par un arrêt du 7 novembre 2017, la cour d'appel de Versailles (6ème chambre) a confirmé cette ordonnance.

Aux termes de ses conclusions du 4 mai 2018 soutenues oralement à l'audience, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. C... demande à la cour d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a condamné la société LogiRep à payer une somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, de :

1°) dire que la rupture intervenue le 12 avril 2013 est nulle faute d'autorisation de l'inspecteur du travail et dire que l'indemnité spécifique de rupture lui reste acquise, la convention de rupture en date du 28 février 2013 n'étant pas nulle ;

2°) - ordonner la réintégration à compter du 13 avril 2013, avec remise en état du contrat de travail, reconstitution complète de carrière (exempte de toute discrimination) y compris en ce qui concerne les primes d'intéressement et paiement de la totalité des salaires à compter de la même date, sans aucune déduction autre que les sommes liées strictement à la rupture du 12 avril 2013, le tout sous astreinte journalière de 500 euros en se réservant le pouvoir de liquider l'astreinte ;

- ordonner à la société LogiRep de solliciter l'autorisation administrative de rompre le contrat de travail, sous astreinte journalière de 500 euros en se réservant le pouvoir de liquider l'astreinte;

3°) - condamner la société LogiRep à lui verser, à titre de provision, une somme de 55'000 euros net à titre de salaire pour la période couverte par la nullité de la rupture et dire que la société LogiRep ne pourra exiger qu'il reprenne son emploi qu'après remise en état complet et satisfactoire du contrat de travail dont paiement de la totalité des condamnations y compris intérêts légaux et proposition d'un salaire réactualisé et d'une position professionnelle (emploi, qualification, statuts, coefficient) acceptés par le salarié ou validés par la cour et après un examen médical pratiqué par le médecin du travail permettant de vérifier l'aptitude du salarié à occuper son emploi, sauf à nommer tout expert qu'il plaira à la cour, avec mission de procéder au calcul des salaires dus, et mettre la provision de frais d'expertise à charge de la société ;

- dire qu'il pourra, s'il le désire, bénéficier de la totalité des congés payés qu'il n'a pas pu utiliser du fait de son exclusion de l'entreprise, après qu'il a été déclaré apte à la reprise du travail par le médecin du travail ;

- condamner la société LogiRep à délivrer les fiches de salaire depuis le 13 avril 2013, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte, sauf à nommer tout expert qu'il plaira la cour avec mission de procéder au calcul des salaires dû, et mettre la provision des frais d'expertise à la charge de la société ;

- dire que la société devra justifier de ses décomptes et éléments de preuve auprès du salarié sous trois mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et se réserver le pouvoir de liquider cette astreinte, sauf à nommer tout expert qu'il plaira à la cour, avec mission de procéder au calcul des salaires dus, et mettre la provision des frais d'expertise à la charge de la société ;

- fixer une date de réouverture des débats pour liquider éventuellement les sommes dues au salarié en cas de désaccord entre les parties ;

- subsidiairement, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a alloué une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et infirmer le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau, condamner la société LogiRep à lui verser une somme de 1272 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement et 50'000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul;

4°) condamner la société LogiRep à lui payer les sommes suivantes :

- 554,40 euros brut à titre d'heures de délégation pour les mois de novembre 2011 à avril 2013 hors période accident du travail et 54,54 euros bruts au titre des congés payés afférents;

- 15'000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de rupture conventionnelle d'un salarié protégé ;

- 10'000 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de mise à disposition d'un panneau syndical et défaut de paiement des heures de délégation au titre du mandat de représentant de section syndicale ;

5°) rejeter la demande de la société LogiRep tendant au remboursement de la somme de 43'500 euros à titre d'indemnité spécifique de rupture, sauf à condamner la société à payer la même somme au titre du préjudice subi pour le non-respect de son obligation de solliciter l'homologation de la convention et ordonner la compensation des sommes ;

6°) ordonner l'anatocisme ;

7°) condamner la société LogiRep à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes des mêmes conclusions soutenues oralement à l'audience, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'Union des syndicats anti-précarité, partie intervenante, demande à la cour de condamner la société LogiRep à lui verser :

- une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi par la collectivité des salariés à raison du non-respect du mandat et du statut de représentant de section syndicale, pour le défaut de paiement des heures de délégation et le défaut de mise en place d'un panneau syndical, avec anatocisme ;

- 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions du 20 avril 2018, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société LogiRep demande à la cour de :

1°) sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail :

- à titre principal, infirmer le jugement attaqué et débouter M. C... de l'ensemble de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, en cas de confirmation de l'annulation de la rupture conventionnelle et de l'existence d'un licenciement sans cause réelle sérieuse :

* infirmer le jugement sur le quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et limiter le montant de cette indemnité à six mois de salaire, soit la somme de 11'751 euros ou alternativement, débouter l'appelant de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

* ordonner à M. C... de rembourser la somme de 43'500 euros perçue à titre d'indemnité spécifique de rupture ;

* débouter M. C... du surplus de ses demandes et notamment de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 15'000 euros pour non-respect de la procédure de rupture conventionnelle d'un salarié protégé ;

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de prononcé du nullité de la rupture et de la réintégration de M. C... :

* ordonner à ce dernier, sous astreinte journalière de 100 euros de justifier des revenus de remplacement éventuellement perçus par lui au cours de la période courant du 13 avril 2013 jusqu'à la date de l'arrêt ;

* déduire des sommes qu'elle devrait verser à l'appelant à titre de salaires et accessoires au titre de sa réintégration à compter du 13 avril 2013, les sommes perçues à titre de revenus de remplacement depuis cette date ainsi que les sommes perçues au titre de la rupture du contrat de travail telles qu'elle figure sur le bulletin de salaire établi pour la période du 1er au 2 avril 2013 et notamment déduire l'indemnité de rupture conventionnelle de 43'500 euros et toutes autres sommes quelles qu'en soit la nature à laquelle elle serait condamnée ;

* en tout état de cause, ordonner, dans l'hypothèse où le montant total des sommes mises à sa charge serait inférieur au montant total des sommes perçues par M. C... à titre de revenus d'activité de revenus de remplacement depuis le 13 avril 2013 et au titre de la rupture de son contrat de travail, le remboursement par M. C... à la société de la différence entre ces deux montants, sous astreinte journalière de 100 euros ;

* débouter M. C... du surplus de ses demandes et notamment de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 15'000 euros pour non-respect de la procédure de rupture conventionnelle d'un salarié protégé ;

2°) débouter M. C... de ses demandes formées au titre du mandat de représentant de section syndicale et au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

3°) débouter l'Union des syndicats anti-précarité de ses demandes ;

4°) condamner M. C... à lui verser une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience :

SUR CE :

Sur la validité de la rupture du contrat de travail et de la convention de rupture :

Considérant que M. C... soutient que, eu égard à son mandat de représentant de section syndicale alors en cours, la société LogiRep ne pouvait rompre le contrat de travail le 12 avril 2013 à la suite de la signature de la convention de rupture sans autorisation de l'inspection du travail ; qu'il en déduit que cette rupture intervenue le 12 avril 2013 est entachée de nullité, sans toutefois que la convention de rupture signée le 28 février 2013 ne soit nulle ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1237-13 du code du travail, la convention de rupture définit les conditions de celle-ci et notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle et fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation ; qu'aux termes de l'article L. 1237-14 du même code : 'à l'issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture. (...) / La validité de la convention est subordonnée à son homologation. / L'homologation ne peut faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la convention. Tout litige concernant la convention, l'homologation ou le refus d'homologation relève de la compétence du conseil des prud'hommes, à l'exclusion de tout autre recours contentieux ou administratif (...)' ; qu'aux termes de l'article L. 1237-15 du même code : 'les salariés bénéficiant d'une protection mentionnée aux articles L. 2411-1 et L. 2411-2 peuvent bénéficier des dispositions de la présente section. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 1237-14, la rupture conventionnelle est soumise à l'autorisation de l'inspecteur du travail (...). Dans ce cas, et par dérogation aux dispositions de l'article L. 1237-13, la rupture du contrat de travail ne peut intervenir que le lendemain du jour de l'autorisation';

Qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 2142-1-1 du code du travail, le représentant de la section syndicale bénéficie des mêmes prérogatives que le délégué syndical, à l'exception du pouvoir de négocier des accords collectifs ; qu'aux termes de l'article L. 2411-1 du code du travail, le délégué syndical bénéficie de la protection contre le licenciement, qui ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ;

Que les dispositions législatives soumettant à l'autorisation de l'inspecteur du travail le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, ont institué, au profit de tels salariés, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, une protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun qui interdit par suite à l'employeur de poursuivre par d'autres moyens la résiliation du contrat de travail ;

Qu'en l'espèce, la société LogiRep n'établit pas que M. C... a expressément renoncé au mandat de représentant de section syndicale confié par l'Union des syndicats anti-précarité ; qu'elle ne peut par ailleurs utilement soutenir, pour dénier le statut de salarié protégé, que M. C... s'est désintéressé de son mandat ; qu'il s'ensuit que M. C... bénéficiait bien de la qualité de salarié protégé au moment de la signature de la convention de rupture du contrat de travail intervenue le 28 février 2013 et au moment de la rupture de ce contrat intervenue le 12 avril suivant ;

Qu'en outre, il est constant qu'aucune autorisation de l'inspecteur du travail n'a été sollicitée préalablement à la rupture du contrat de travail ;

Qu'il s'ensuit que la rupture du contrat de travail intervenue le 12 avril 2013 est nulle de même que la convention de rupture, contrairement à ce que soutiennent les deux parties, puisque par application des dispositions d'ordre public de l'article L. 1237-15 combinées avec celles de l'article L. 1237-14, la validité de la convention de rupture est subordonnée à l'autorisation de l'inspecteur du travail ; que le jugement attaqué sera donc confirmé en ce qu'il dit que la convention de rupture signée le 28 février 2013 est entaché de nullité et infirmé en ce qu'il dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamne la société LogiRep à verser une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ainsi qu'une indemnité de licenciement et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur la réintégration dans l'entreprise :

Considérant que M. C... demande :

- sa réintégration dans l'entreprise à compter du 13 avril 2013 avec remise en état du contrat de travail et reconstitution complète de carrière, sous astreinte ;

- d'ordonner à la société LogiRep de solliciter l'autorisation administrative de rompre le contrat de travail sous astreinte ;

-de dire que la société LogiRep ne pourra exiger qu'il reprenne son emploi qu'après remise en état complète et satisfactoire du contrat de travail dont paiement de la totalité des condamnations et proposition d'un salaire réactualisé et d'une position professionnelle (emploi, qualification, statuts, coefficient) acceptée par le salarié ou validée par la cour et après un examen médical pratiqué par le médecin du travail ;

- de dire qu'il pourra, si le désire, bénéficier de la totalité des congés payés qui n'a pas pu utiliser du fait de son exclusion de l'entreprise ;

Considérant en premier lieu, qu'eu égard à la nullité de la convention de rupture et de la rupture intervenue le 12 avril 2013, pour défaut d'autorisation de l'inspecteur du travail, ainsi que mentionné ci-dessus, M. C... est fondé à demander sa réintégration au sein de la société LogiRep dans son emploi ou dans un emploi équivalent, et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, le jugement étant infirmé sur ce point, sans pouvoir utilement demander qu'il soit ordonné à l'employeur de solliciter une autorisation administrative de rompre le contrat de travail ; qu'en outre, la demande d'astreinte sur ce point, qui n'est pas nécessaire sera rejetée ;

Qu'en deuxième lieu, il n'appartient pas à la cour de soumettre la réintégration de M. C... à des conditions préalables tirées d'une 'remise en état complet et satisfactoire du contrat de travail' ou à un examen médical ;

Qu'en troisième lieu, M. C... n'ayant acquis aucun droit à congés payés depuis la rupture du contrat de travail, faute de travail effectif, il y a lieu de débouter l'appelant de cette demande tendant à bénéficier de congés payés annuels ;

Sur la provision de 'salaire' pour la période d'éviction et les demandes afférentes :

Considérant que M. C... demande de :

- condamner la société LogiRep à lui verser, à titre de provision, une somme de 55'000 euros net à titre de 'salaire pour la période couverte par la nullité de la rupture' ;

- dire que la société devra justifier de ses décomptes et éléments de preuve auprès de lui sous trois mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et se réserver le pouvoir de liquider cette astreinte, sauf à nommer tout expert avec mission de procéder au calcul des salaires dus;

- fixer une date de réouverture des débats pour liquider éventuellement les sommes dues aux salariés en cas de désaccord entre les parties ;

- condamner la société LogiRep à délivrer les fiches de salaire depuis le 13 avril 2013, sous astreinte ;

Considérant que la rupture du contrat de travail d'un salarié protégé, prononcée sans autorisation administrative est nulle et ouvre droit, pour le salarié qui demande sa réintégration pendant la période de protection, au versement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait perçue entre son licenciement et sa réintégration ; qu'il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité forfaitaire les revenus qu'il a pu percevoir de tiers au cours de cette période ; qu'au termes de l'article 146 du code de procédure civile : 'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve' ;

Qu'ainsi, M. C..., qui a demandé sa réintégration pendant la période de protection, ne peut demander le paiement de ses salaires pendant la période d'éviction mais seulement des dommages et intérêts d'un montant égal au montant de la rémunération qu'il aurait perçue entre la rupture et sa réintégration et ce, sans déduction des éventuels revenus perçus de tiers pendant cette période contrairement à ce que soutient la société LogiRep ;

Que M C..., qui explique lui-même que sa rémunération est composée d'un partie fixe, d'une gratification de fin d'année et d'une prime de vacances et que son salaire moyen s'élève à 1956,87 euros brut, ne soutient pas qu'il ne disposait pas d'éléments suffisants pour calculer le montant de l'indemnité d'éviction ; qu'il n'y a donc pas lieu de suppléer sa carence en matière de chiffrage précis de son préjudice par une expertise ; que cette demande sera ainsi rejetée ;

Qu'il n'appartient pas non plus à l'employeur de suppléer la carence du salarié sur cette demande indemnitaire et de calculer le préjudice subi par ce dernier en justifiant 'de ses décomptes et éléments de preuve'; que M. C... sera donc débouté de cette demande et de sa demande de réouverture des débats 'pour liquider éventuellement les sommes dues en cas de désaccord entre les parties' ;

Que dans ces conditions, il sera alloué à M. C... à titre d'indemnité d'éviction la somme de 55 000 euros qu'il sollicite à titre de provision ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point;

Qu'il sera également débouté dans ces conditions de sa demande d'établissement de 'fiches de salaire' pour la période d'éviction ;

Sur la restitution des sommes versées au salarié à l'occasion de la rupture et les dommages-intérêts pour absence d'autorisation de la rupture :

Considérant qu'eu égard à la nullité de la rupture et de la convention de rupture, ainsi que mentionné ci-dessus, la société LogiRep est fondée à demander la restitution par M. C... de la somme de 43'500 euros qu'il a reçue à titre d'indemnité spécifique de rupture ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Que s'agissant des autres indemnités de rupture, la société LogiRep se borne à viser 'certaines sommes' mentionnées sur le bulletin de paie pour la période du 1er au 12 avril 2013, sans préciser les sommes dont elle demande le remboursement ; qu'elle sera donc déboutée du surplus de ses demandes de restitution ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Considérant, sur la demande de dommages-intérêts pour absence d'autorisation de la rupture et la compensation avec l'indemnité spécifique de rupture, que M. C... ne justifie d'aucun préjudice à ce titre ; qu'il sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts d'un montant de 43 500 euros à ce titre et de sa demande subséquente de compensation avec sa dette d'indemnité spécifique de rupture ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;

Sur les dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de rupture conventionnelle d'un salarié protégé :

Considérant que M. C... a été débouté de sa demande de dommages-intérêts pour absence de demande d'autorisation administrative préalable à la rupture ainsi qu'il a été dit au paragraphe ci-dessus ; qu'il n'allègue aucun autre manquement de l'employeur dans le cadre de la procédure de rupture conventionnelle ; qu'il sera donc débouté de sa demande de dommages-intérêts d'un montant de 15'000 euros à ce titre ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur le paiement d'heures de délégation au titre du mandat de représentant de section syndicale et les dommages-intérêts pour non-respect de ce mandat :

Considérant que M. C... demande l'allocation d'une somme de 545,40 euros brut ' à titre d'heures de délégation non réglées', afférentes à son mandat de représentant de section syndicale, pour la période de novembre 2011 à avril 2013, hors période d'arrêt travail, outre les congés payés afférents ; qu'il réclame également une somme de 10'000 à titre de dommages-intérêts pour ce non-paiement ainsi que pour l'absence de mise à disposition d'un panneau syndical ;

Mais considérant que l'appelant n'allègue pas avoir effectivement utilisé les heures de délégation prévues des dispositions de l'article L. 2142-1-3 du code du travail ; qu'il sera donc débouté de ses demandes de paiement de ces heures et de dommages à ce titre ; que par ailleurs, il ne justifie d'aucun préjudice découlant de l'absence de mise à disposition d'un panneau d'affichage syndical; que le débouté de ses différentes demandes sera donc confirmé ;

Sur la demande de dommages-intérêts de l'Union des syndicats anti-précarité :

Considérant que la rupture du contrat de travail de M. C... en méconnaissance du statut de salarié protégé et le défaut de mise à disposition d'un panneau syndical ont causé un préjudice à la collectivité des salariés, lequel sera réparé par l'allocation à l'Union des syndicats anti-précarité d'une somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur la capitalisation des intérêts :

Considérant que les intérêts sur les dommages-intérêts alloués à M. C... et à l'Union des syndicats anti-précarité seront capitalisés dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Sur l'application de l'article 1235-4 du code du travail :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il n'y a pas lieu d'ordonner à la société LogiRep de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage éventuellement perçues par M. C... depuis la rupture du contrat de travail ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et de l'infirmer en ce qu'il statue sur les dépens ;

Que la société LogiRep, succombante en appel, sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel et sera condamnée à payer à M. C... une somme de 900 euros et à l'Union des syndicats anti-précarité une somme de 100 euros sur ce fondement ; qu'en outre, la société LogiRep sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il annule la convention de rupture signée le 28 février 2013, ordonne le remboursement par M. B... C... à la société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep) de la somme de 43'500 euros reçue à titre d'indemnité spécifique de rupture conventionnelle, statue sur le paiement d'heures de délégation et de congés payés afférents, sur les dommages-intérêts sollicités par B... M. C... pour le non-respect du mandat de représentant de section syndicale, pour absence d'autorisation de la rupture et pour non-respect de la procédure de rupture, sur le surplus des demandes de restitution de sommes sollicitées par la société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep) et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que la rupture du contrat de travail intervenue le 12 avril 2013 est nulle,

Ordonne la réintégration de M. B... C... dans son emploi ou dans un emploi équivalent dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt,

Condamne la société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep) à verser à M. B... C... une somme de 55'000 euros à titre d'indemnité pour la période d'éviction,

Déboute M. B... C... de ses prétentions pour absence d'autorisation de la rupture et la compensation avec l'indemnité spécifique de rupture,

Condamne la société société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep) à verser à l'Union des syndicats anti-précarité une somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour méconnaissance du statut de salarié protégé et défaut de mise à disposition d'un panneau d'affichage syndical,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus sur ces sommes dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep) à verser à M. B... C... une somme de 900 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Condamne la société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep) à verser à l'Union des syndicats anti-précarité une somme de 100 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Condamne la société anonyme d'habitations à loyer modéré logement et gestion immobilière pour la région parisienne (LogiRep) aux dépens de première instance et d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Luc A..., président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 15/00079
Date de la décision : 04/07/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°15/00079 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-04;15.00079 ?
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