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28/06/2018 | FRANCE | N°17/00010

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 28 juin 2018, 17/00010


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89E



5e Chambre











ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 28 JUIN 2018



N° RG 17/00010



AFFAIRE :



SA LAFARGE CIMENTS





C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE









Décision déférée à la cour: Jugement rendu(e) le 07 Novembre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE

N° RG : 12-01103/N





Copies exécutoires délivrées à :



la SCP LA GARANDERIE

Me Maher X...





Copies certifiées conformes délivrées à :



SA LAFARGE CIMENTS



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE







le :

REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89E

5e Chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 28 JUIN 2018

N° RG 17/00010

AFFAIRE :

SA LAFARGE CIMENTS

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

Décision déférée à la cour: Jugement rendu(e) le 07 Novembre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE

N° RG : 12-01103/N

Copies exécutoires délivrées à :

la SCP LA GARANDERIE

Me Maher X...

Copies certifiées conformes délivrées à :

SA LAFARGE CIMENTS

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

le :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT HUIT JUIN DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:

SA LAFARGE CIMENTS

[...]

représentée par Me Bertrand Y... de la SCP LA GARANDERIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0487 substituée par MeNadiaZ..., avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0487

APPELANTE

****************

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

Servicze 782- Contentieux Général

CS 60007

[...]

représentée par Me Maher X..., avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R295

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Mai 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,

Madame Sylvie CACHET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Florence PURTAS,

M. Pierre A... a travaillé au sein de la société Lafarge Ciments du 2 août 1962 au 1erjuillet1996, date à laquelle il a fait valoir ses droits à la retraite.

Le 21 septembre 2011, il a établi une déclaration de maladie professionnelle qui a été reçue par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône (ci-après désignée 'la Caisse' ou 'la CPAM') le 27 septembre 2011 accompagnée d'un certificat médical initial du 18 juillet 2011 mentionnant «épaississement pleural bilatéral, calcification pleurale, pleurésie asbestosique ».

Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 15 novembre 2011 (N LP : 2C [...]), distribuée le 18 novembre 2011, la Caisse a informé la Société qu'elle procédait à l'instruction sous le n°110718135 de la maladie professionnelle déclarée par son salarié au titre d'une «pleurésie asbestosique». (Souligné par la cour)

Par deux autres lettre recommandées avec avis de réception du 15 novembre 2011 (NLP : 2C [...] et NLP : 2C [...]), la Caisse a également informé la Société de l'instruction d'un dossier sous le n°110718137 au titre d'un «épaississement pleural » (Souligné par la cour). Cette pathologie a fait l'objet d'un recours distinct.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 janvier 2012, reçue par la Société le 18janvier suivant, la Caisse a informé celle-ci de la clôture de la procédure d'instruction enregistrée sous le n°110718135. (Souligné par la cour)

Le 3 février 2012, la Caisse a reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée par M.A... au titre d'une «pleurésie exsudative».

Le 26 mars 2012, la Société a saisi la commission de recours amiable de la Caisse d'un recours tendant à ce que la décision de prise en charge lui soit déclarée inopposable.

Par lettre recommandée du 1er juin 2012, la société Lafarge Ciments a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts-de-Seine d'un recours contre la décision de rejet implicite de la CRA, devenue explicite le 21 août 2012, confirmant la prise en charge de la maladie déclarée par M.A... pour «pleurésie exsudative».

Par jugement du 7 novembre 2016, le tribunal a dit opposable à la société Lafarge Ciments la décision du 3 février 2012 de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, l'affection déclarée par M.A..., le 21 septembre 2011, qu'il a qualifié par erreur de« pleurésie asbestosique».

La société Lafarge Ciments a interjeté appel de cette décision le 2 janvier 2016 et les parties ont été convoquées à l'audience du 17 octobre 2017, laquelle a été reportée au 15 mai 2018 à leur demande conjointe, la Cour de cassation devant se prononcer sur un litige les opposant au sujet d'une problématique identique.

A l'audience, reprenant oralement ses conclusions, la Société demande à la cour de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge par la CPAM de la maladie de M. A... au titre de la législation professionnelle.

La Caisse, reprenant oralement les conclusions qu'elle avait adressées en recommandé au greffe le 4 mai 2018, demande au contraire à la cour de rejeter les prétentions de la société Lafarge Ciments et de lui déclarer opposable la décision de prise en charge, au titre du tableau 30 des maladies professionnelles (pleurésie exsudative), de l'affection présentée par son salarié, M.A....

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.

MOTIFS DE LA COUR

Sur l'absence de respect des délais d'instruction de l'affection déclarée :

La société Lafarge Ciments soutient que la décision du 3 février 2012 par laquelle la Caisse a pris en charge au titre des risques professionnels la maladie déclarée par M.Pierre A... pour pleurésie lui serait inopposable, au motif que l'organisme a manifestement eu recours à un délai complémentaire d'instruction sans l'en avoir informée.

Elle verse aux débats un arrêt de la Cour de cassation (celui en l'attente duquel la présente affaire avait été renvoyée), qui, le 21 décembre 2017, a rejeté le pourvoi formé par la Caisse contre une décision de cette cour qui avait déclarée inopposable à l'employeur la prise en charge d'une maladie professionnelle faute pour l'organisme d'avoir informé celui-ci du recours à une instruction complémentaire.

En réplique, la Caisse maintient que l'éventuelle carence dans cette information n'entraîne nullement l'inopposabilité de sa décision de prise en charge à l'employeur mais est sanctionnée exclusivement par la prise en charge implicite de la maladie au titre des risques professionnels au profit de l'assuré. Elle estime qu'il importe donc peu qu'elle n'ait pas adressé de courrier à la Société pour l'informer du recours à un délai complémentaire ou que celle-ci ne l'ait pas reçu.

Aux termes de l'article R. 441-10 du code de la sécurité socialedans sa version applicable :

La caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie.

Il en est de même lorsque, sans préjudice de l'application des dispositions du chapitre Ier du titre IV du livre Ier et de l'article L.432-6, il est fait état pour la première fois d'une lésion ou maladie présentée comme se rattachant à un accident du travail ou maladie professionnelle.

Sous réserve des dispositions de l'article R. 441-14, en l'absence de décision de la caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

L'article R. 441-14 dispose pour sa part

Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (souligné par la cour). A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

En cas de saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 461-1, le délai imparti à ce comité pour donner son avis s'impute sur les délais prévus à l'alinéa qui précède.

Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

La décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief.

Le médecin traitant est informé de cette décision.

En l'espèce, la Caisse a accusé réception de la déclaration de maladie professionnelle souscrite par M. A..., salarié de la société Lafarge Ciments, le 27 septembre 2011. Le délai de trois mois durant lequel elle devait prendre sa décision expirait donc le 27 décembre 2011. Or, la Caisse a avisé la société de la clôture de la procédure d'instruction le 13 janvier 2012, alors que le délai précité était expiré et qu'elle avait manifestement eu recours à un délai complémentaire.

Elle aurait donc dû, en application des dispositions précitées, informer la Société du prolongement du délai d'instruction ce qu'elle avait d'ailleurs expressément rappelé dans le courrier qu'elle lui avait adressé le 15 novembre 2011 pour l'informer de la déclaration de maladie professionnelle de M. A....

La cour constate que pour la première fois en cause d'appel, la Caisse ne conteste pas avoir eu recours à ce délai complémentaire, la cour relevant au demeurant que la fiche colloque en faisait expressément mention. Si elle produit désormais un courrier daté du 20décembre 2011 aux termes duquel elle informait l'employeur du recours à un délai supplémentaire, elle n'est cependant pas en mesure de justifier de son envoi et de sa réception.

La cour considère donc que la Caisse ne justifie pas avoir avisé la Société, préalablement au 27décembre 2011, de la prolongation de l'instruction, ce qui est un manquement à son obligation d'information et à celle d'instruire de manière contradictoire les procédures de reconnaissance de maladies professionnelles.

Par ailleurs, la cour ne peut que constater que la Caisse, dans le cadre de l'instruction de la pathologie litigieuse, a adressé à la Société divers courriers mentionnant soit une « pleurésie asbestosique» soit une «pleurésie exsudative» et que le courrier l'informant de la fin de l'instruction et de la possibilité de venir consulter les pièces du dossier ne faisait plus aucune référence à la pathologie concernée mais uniquement à un numéro de dossier. Ces imprécisions ne permettaient donc pas à l'employeur de connaître précisément la maladie concernée, d'autant plus que la Caisse l'informait, dans le même temps, pour le même salarié, de la fin de l'instruction d'un dossier concernant un «épaississement pleural» instruit à partir de la même déclaration de maladie professionnelle et du même certificat médical initial.

Pour l'ensemble de ces raisons, la décision de la Caisse doit être déclarée inopposable à la sociétéLafarge Ciments.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant par décision contradictoire,

Infirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts de Seine le 7 novembre 2016 relativement au recours 12-01103/N ;

Dit la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône de prendre en charge la maladie déclarée par M. A... le 21 septembre 2011 au titre d'une «pleurésie exsudative» inopposable à la société Lafarge Ciments SA;

Déboute les parties de toute demande autre plus ample ou contraire;

Rappelle que la présente procédure est exempte de dépens;

Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président et par Madame Florence Purtas, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 17/00010
Date de la décision : 28/06/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°17/00010 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-28;17.00010 ?
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