La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2018 | FRANCE | N°16/05901

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 2e section, 12 juin 2018, 16/05901


COUR D'APPEL


DE


VERSAILLES








Code nac : 53B





1re chambre 2e section





ARRET N°





CONTRADICTOIRE





DU 12 JUIN 2018





N° RG 16/05901





AFFAIRE :





C... X... épouse Y...








C/


SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE














Décision déférée à la cour: Jugement rendu(e) le 22 Juillet 2016 par le Tribunal

d'Instance de Mantes-la-Jolie


N° Chambre :


N° Section :


N° RG : 11-15-0025





Expéditions exécutoires


Expéditions


Copies


délivrées le : 12/06/18


à :








Me Florence Z...








Me Jack A...











REPUBLIQUE FRANCAISE





AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





LE DOUZE JUIN DEUX MILLE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53B

1re chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 JUIN 2018

N° RG 16/05901

AFFAIRE :

C... X... épouse Y...

C/

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Décision déférée à la cour: Jugement rendu(e) le 22 Juillet 2016 par le Tribunal d'Instance de Mantes-la-Jolie

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 11-15-0025

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 12/06/18

à :

Me Florence Z...

Me Jack A...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DOUZE JUIN DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:

Madame C... X... épouse Y...

née le [...] à MANTES-LA-JOLIE (78200)

de nationalité Française

[...]

Représentant : Me Thibault B..., Avocat plaidant, au Barreau de PARIS (P 0161) - Me Florence Z..., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 649

APPELANTE

****************

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

N° SIRET : 542 097 902

[...]

Représentant : Me Jack A... de la SCP RIBEYRE-A... & A..., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 187 - N° du dossier 201625 - Représentant : Me Christofer C... & SARKOZY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R175

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Avril 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Delphine BONNET, conseiller, chargée du rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Serge PORTELLI, Président,

Madame Isabelle BROGLY, Président,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Catherine SPECHT,

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 15 mai 2013, la société BNP Paribas Personal Finance (sous l'enseigne Cetelem) a consenti à Mme C... Y... un prêt dit de 'regroupement de crédits' d'un montant de 33.000 euros, au taux annuel de 7,40 %, remboursable au moyen de 84 mensualités de 500,64 euros chacune. M. Karim Y... figure sur l'offre de crédit en qualité de co-emprunteur.

Plusieurs échéances sont demeurées impayées ; la société BNP Paribas Personal Finance a prononcé la déchéance du terme du prêt et mis en demeure M. et Mme Y... de s'acquitter des sommes restant dues par lettre recommandée réceptionnée le 27 décembre 2014.

Puis, par acte d'huissier du 13 mai 2015, la banque a assigné M. et Mme Y... en paiement du solde du prêt devant le tribunal d'instance de Mantes la Jolie qui, par jugement contradictoire du 22 juillet 2016, a :

- débouté M. Karim Y... et Mme C... Y... de leur demande de production forcée d'enregistrements de conversations téléphoniques,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de ses demandes à l'encontre de M. Karim Y...,

- débouté M. Karim Y... et Mme C... Y... de leurs demandes de déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

- condamné Mme C... Y... à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 35.376,68 euros avec intérêts à compter du 27 décembre 2014, date de réception de la mise en demeure, au taux conventionnel de 7,16 % sur la somme de 35.176,68 euros et au taux légal sur le surplus,

- débouté M. Karim Y... et Mme C... Y... de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts,

- débouté Mme C... Y... de sa demande de réduction de son engagement,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de capitalisation des intérêts,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. Karim Y... et Mme C... Y... de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

- condamné Mme C... Y... aux dépens.

Par déclaration en date du 28 juillet 2016, Mme C... Y..., assistée de son curateur, a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions transmises le 6 décembre 2017, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

à titre principal,

- réduire ses engagements en totalité ou dans les proportions que la cour jugera appropriées, en relevant notamment qu'elle était atteinte d'un trouble mental lors de la souscription des crédits auprès de la société BNP Paribas Personal Finance, que cette souscription est intervenue deux années avant l'ouverture de la curatelle renforcée et que s'agissant d'un trouble mental, la condition de notoriété n'est pas requise,

- ordonner la déchéance des intérêts conventionnels et l'imputation de toutes les sommes versées sur le principal de la créance,

à titre subsidiaire,

- ordonner la déchéance des intérêts conventionnels et l'imputation de toutes les sommes versées sur le principal de la créance,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à verser des dommages et intérêts à hauteur des sommes qu'elle réclame sur le fondement de l'article L. 312-27 du code de la consommation, en relevant notamment que les multiples manquements en phase précontractuelle sont à l'origine du préjudice financier subi par une personne faible, atteinte d'un trouble mental,

en toute hypothèse,

- rejeter toutes les demandes de la société BNP Paribas Personal Finance au titre de la capitalisation des intérêts et des indemnités contractuelles,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens et à 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la société BNP Paribas Personal Finance de toutes ses demandes, fins et prétentions.

Aux termes de ses conclusions transmises le 16 novembre 2016, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :

- à titre principal, confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- en conséquence, débouter Mme C... Y... de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour de céans était amenée à prononcer la déchéance du droit aux intérêts,

- condamner Mme C... Y... à lui payer la somme de 30.894,30 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2014 et jusqu'à parfait paiement,

en tout état de cause,

- condamner Mme C... Y... au paiement de la somme de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme C... Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel par application de l'article 696 du code de procédure civile, dont le recouvrement sera effectué par Me A..., avocat au Barreau de Versailles, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 février 2018.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les dispositions non critiquées de la décision seront confirmées.

1 ) sur la réduction des engagements de Mme Y...

Le tribunal a écarté l'application de l'article 464 du code civil au motif que Mme Y... n'établissait pas que l'altération de ses facultés personnelles étaient notoire ou connue de l'établissement de crédit.

Mme Y... expose qu'elle a été placée sous le régime de la curatelle le 29 octobre 2014. Après avoir expliqué qu'elle est atteinte de la maladie de Parkinson depuis 2009 et décrit les effets secondaires, dont des troubles de comportement, liés au traitement qu'elle prend, elle invoque les dispositions de l'article 464 du code civil et poursuit l'infirmation du jugement en ce que le tribunal a fait une mauvaise application de ce texte. Elle rappelle qu'il n'est pas nécessaire d'établir la notoriété du trouble, ni sa connaissance par le cocontractant, dès lors que le majeur était sous l'empire d'un trouble mental.

Elle précise que son trouble mental s'est manifesté par des crises de paranoïa, des hallucinations et des accès de colère, accompagnés de dépenses compulsives, et que ce trouble a atteint son paroxysme entre février 2013 et avril 2014, période au cours de laquelle elle a souscrit deux emprunts consécutifs auprès de BNP Paribas. Elle estime que les conditions de l'article 464 sont bien réunies de sorte que ses engagements doivent intégralement réduits ou dans des proportions appréciées par la cour.

La banque répond que, conformément à la jurisprudence constante, il appartient au demandeur qui se prévaut des dispositions de l'article 464 du code civil, de prouver que l'altération des facultés personnelles du majeur, à l'époque de la conclusion du contrat, était connue de tous ou tout au moins du cocontractant. La banque fait valoir que la preuve qu'elle avait connaissance de l'altération des facultés personnelles de Madame Y... à l'époque de la conclusion du contrat de crédit en date du 15 mai 2013 n'est pas rapportée, le seul jugement de mise sous curatelle plus d'un an et demi après la signature du contrat ne permettant pas de rapporter cette preuve.

sur ce

L'article 464 du code civil prévoit que les obligations résultant des actes accomplis par la personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d'ouverture de la mesure de protection peuvent être réduites sur la seule preuve que son inaptitude à défendre ses intérêts, par suite de l'altération de ses facultés personnelles, était notoire ou connue du cocontractant à l'époque où les actes ont été passés.

Contrairement à ce que soutient Mme Y..., qui n'agit pas en nullité de l'acte sur le fondement de l'article 414-1 du code civil, mais en réduction de ses obligations en application de l'article 464 du code civil, la condition de notoriété ou de connaissance du cocontractant de l'altération des facultés est exigée.

Mme Y... a été placée sous curatelle renforcée le 29 octobre 2014 ; aucun des éléments de son dossier ne permet d'établir que l'altération de ses facultés personnelles était connue de la banque à la date de la conclusion du contrat de crédit le 15 mai 2013. Et elle ne peut sérieusement soutenir que ce sont les prétendus manquements de la banque à son devoir de conseil qui lui ont permis d'ignorer le trouble mental dont elle souffrait. Cet argument est dénué de pertinence dès lors que la banque n'avait pas à interroger la future emprunteuse sur son état de santé.

C'est donc à bon droit que le tribunal a débouté Mme Y... de sa demande de réduction de ses engagements. La décision est confirmée de ce chef.

2 ) sur la déchéance du droit aux intérêts

Mme Y... poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a considéré que le prêteur avait satisfait à son obligation de consulter le FICP alors que celui-ci n'a été consulté que le 30 mai 2013, soit bien après la conclusion du contrat en violation de l'article L. 312-16 du code de la consommation (L. 311-9 ancien).

La société BNP Paribas Personal Finance répond que :

- s'il est exact que l'arrêté du 26 octobre 2010 prévoit une obligation de consultation du FICP avant toute décision effective d'octroyer le crédit, c'est sous la condition de l'agrément de l'emprunteur par le prêteur,

- le contrat de crédit devient parfait à la double condition que l'emprunteur n'ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit, dans un délai de 7 jours, étant précisé que la mise à disposition des fonds au-delà de 7 jours vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur,

- c'est donc en parfaite légalité et conformité avec la loi que le prêteur de deniers peut procéder à la consultation du FICP au-delà de la date de la signature de l'offre préalable de crédit et en tout état de cause, jusqu'au jour du déblocage des fonds,

- la consultation a eu lieu le 30 mai 2013 antérieurement au jour du déblocage des fonds en date du 31 mai 2013.

sur ce

Aux termes de l'article L. 311-9 ancien du code de la consommation (devenu L.312-16), avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L. 333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5.

Cette consultation est obligatoire et doit être réalisée lorsque le prêteur décide d'agréer la personne de l'emprunteur en application de l'article L. 311-13 ancien du même code (devenu L. 312-24) qui prévoit que le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que ledit emprunteur n'ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit, dans un délai de sept jours. L'agrément de la personne de l'emprunteur est réputé refusé si, à l'expiration de ce délai, la décision d'accorder le crédit n'a pas été portée à la connaissance de l'intéressé. L'agrément de la personne de l'emprunteur parvenu à sa connaissance après l'expiration de ce délai reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit. La mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l'article L. 311-14 vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur.

En l'espèce, l'emprunteur a accepté l'offre de crédit le 15 mai 2013 ; il n'a pas exercé son droit de rétractation ; il est vrai que la consultation du FICP n'est intervenue que le 30 mai 2013 mais

avant la mise à disposition des fonds le 31 mai 2013 valant agrément de l'emprunteur par le prêteur de sorte que la déchéance du droit aux intérêts pour ce motif n'est pas encourue.

Mme Y... poursuit encore l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de déchéance du droit aux intérêts sur différents fondements. S'agissant de la preuve de la remise de la fiche d'information précontractuelle, de la taille des caractères de l'offre de crédit, de la remise de la notice d'assurance, du devoir de conseil et des explications données à l'emprunteur, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.

Le jugement déféré repose sur des motifs exacts et pertinents que la cour adopte ; en l'absence de moyens nouveaux et de nouvelles preuves, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de déchéance du prêteur du droit aux intérêts conventionnels.

3 ) sur la responsabilité contractuelle de la société BNP Paribas Personal Finance

Là encore, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.

Le jugement déféré repose sur des motifs exacts et pertinents que la cour adopte ; en l'absence de moyens nouveaux et de nouvelles preuves, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mme Y....

4 ) sur les demandes de la banque.

En conclusion de ce qui précède, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme C... Y... à payer à la banque la somme de 35.376,68 euros avec intérêts à compter du 27 décembre 2014 au taux conventionnel de 7,16 % sur la somme de 35.176,68 euros et au taux légal sur le surplus.

5 ) sur les demandes accessoires

La décision doit encore être confirmée en ce qui concerne les dépens mis à la charge de Mme Y... et le rejet des demandes formées au titre des frais irrépétibles.

S'agissant de la procédure d'appel, Mme Y..., partie perdante, en supportera les dépens. Et il ne sera pas fait droit aux demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne Mme Y... aux dépens de la procédure d'appel, lesquels pourront être recouvrés directement par A... conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle BROGLY, Président et par Mme SPECHT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 16/05901
Date de la décision : 12/06/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 1B, arrêt n°16/05901 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-12;16.05901 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award