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10/04/2018 | FRANCE | N°17/00570

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 10 avril 2018, 17/00570


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



DA

Code nac : 59C



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 10 AVRIL 2018



N° RG 17/00570



AFFAIRE :



[N] [L] agissant en qualité de Mandataire liquidateur de la SA APPLICATIONS ADHESIVES DE L'ARTOIS

...



C/

SA BOSTIK









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 16 Décembre 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 4

Section :

N° RG : 2005F01761



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pierre GUTTIN



Me Christophe DEBRAY





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX AVRIL DEUX MILLE DIX HUIT,

...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

DA

Code nac : 59C

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 AVRIL 2018

N° RG 17/00570

AFFAIRE :

[N] [L] agissant en qualité de Mandataire liquidateur de la SA APPLICATIONS ADHESIVES DE L'ARTOIS

...

C/

SA BOSTIK

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 16 Décembre 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 4

N° Section :

N° RG : 2005F01761

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pierre GUTTIN

Me Christophe DEBRAY

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX AVRIL DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [N] [L] agissant en qualité de Mandataire liquidateur de la SA APPLICATIONS ADHESIVES DE L'ARTOIS

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 17000004

Représentant : Me Bruno SCHRIMPF de l'ASSOCIATION POIRIER SCHRIMPF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R228

Monsieur [M] [S]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Adresse 3]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 5]

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 17000004

Représentant : Me Bruno SCHRIMPF de l'ASSOCIATION POIRIER SCHRIMPF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R228

Monsieur [F] [S]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Adresse 3]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 7]

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 17000004

Représentant : Me Bruno SCHRIMPF de l'ASSOCIATION POIRIER SCHRIMPF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R228

SARL M P H DEVELOPPEMENT

[Adresse 8]

[Adresse 9]

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 17000004

Représentant : Me Bruno SCHRIMPF de l'ASSOCIATION POIRIER SCHRIMPF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R228

APPELANTS

****************

SA BOSTIK

N° SIRET : 332 11 0 0 97

[Adresse 10]

[Adresse 11]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 17269

Représentant : Me Maroussia NETTER ADLER de l'ASSOCIATION LANGER-NETTER-ADLER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R223

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Janvier 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François LEPLAT, Conseiller F.F. Président,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,

FAITS :

La société Applications adhésives de l'Artois (société 3A) - détenue par la société holding MPH développement (société MPH), elle-même détenue à parité par Messieurs [M] et [F] [S] - avait pour activité la fabrication et la commercialisation de sacs fermants et auto-fermants ainsi que des pochettes en plastique auto-adhésives pour les documents de transport, bons de livraison et factures destinés au transport de colis, et dont une partie de la production était sous-traitée à une société Advance Pack Solutions ('APS') basée en Thaïlande que Messieurs [M] et [F] [S] ont créée en 2004 et dont ils sont actionnaires majoritaires.

En relations commerciales depuis 1999 avec la société Bostik, fabricant de colle, la société 3A a déploré à compter de novembre 2004 et début 2005 que la nouvelle formule de colle référencée 'TLH 4119 E' qu'elle lui avait commandée ne présentait pas les qualités adhésives nécessaires à sa destination, plus de treize millions de produits adhésifs ayant été retournés par ses clients, de sorte qu'elle a assigné le 28 avril 2005 la société Bostik en paiement d'une provision de 250 000 euros à valoir sur son préjudice devant le tribunal de commerce de Nanterre, lequel a ordonné le 1er juin 2006 la désignation de Monsieur [J] en qualité d'expert pour déterminer l'origine des désordres, fournir les éléments techniques de nature à établir les responsabilités encourues et à l'évaluation des préjudices.

Le 27 juillet 2005, la société 3A a fait l'objet d'une procédure simplifiée de redressement judiciaire ordonnée par le tribunal de grande instance de Béthune, Maître [L], nommé représentant des créanciers ayant mandaté Monsieur [G], expert agréé, pour l'exécution d'une expertise amiable des préjudices de la société 3A. Le 19 juillet 2006, la société 3A a bénéficié d'un plan de continuation de dix ans avant que, le 17 avril 2009, le tribunal de commerce d'Arras ne prononce sa liquidation judiciaire et nomme Maître [L] mandataire liquidateur.

Sur la base du rapport de Monsieur [J] du 25 mars 2008, le tribunal de commerce de Nanterre a décidé le 20 mars 2009 d'un partage de responsabilité des désordres entre la société Bostik et la société 3A que la cour d'appel de Versailles a infirmé par arrêt du 2 septembre 2010, reconnaissant la société Bostik seule responsable de l'origine de ces désordres sur le fondement de la garantie des vices cachés et la déclarant tenue de réparer l'intégralité des préjudices qui en sont résultés. Le pourvoi contre cette décision par la société Bostik a été déclaré irrecevable par arrêt de la cour de cassation du 22 novembre 2011, puis par jugement du 5 février 2013, le tribunal de commerce de Nanterre a ordonné une seconde expertise pour l'évaluation des préjudices et désigné à cette fin Madame [Y] qui a dressé un pré-rapport le 13 juin 2014,.

Par ailleurs, la société MPH, Monsieur [M] [S] et Monsieur [F] [S] ont assigné le 14 février 2011 la société Bostik devant le tribunal de commerce de Nanterre en paiement des sommes, à parfaire, de 620 000 euros pour la première, de 807 927 euros pour le deuxième et de 792 202 euros pour le troisième.

Enfin, par arrêt du 10 mars 2015, la cour d'appel de Versailles a déclaré prescrit le recours de la société Bostic en rétractation de l'arrêt du 2 septembre 2010.

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 16 décembre 2016 qui a :

- condamné la société Bostik à payer à Maître [L] ès-qualités la somme principale de 512 258 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 28 avril 2005,

- dit que le lien de causalité n'était pas établi entre la défectuosité de la colle TLH4119E de la société Bostik et la liquidation judiciaire de la société 3A,

- fixé la créance de la société Bostik au passif de la société 3A avec intérêts de droit à compter de la date d'émission des factures, sauf à parfaire,

- débouté la société MPH, Messieurs [F] et [M] [S] de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation de dommages et intérêts,

- condamné la société Bostik à payer à Maître [L] ès-qualités la somme de 40 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné la capitalisation des intérêts suivant l'article 1154 du code civil,

- ordonné l'exécution provisoire sans constitution de garantie,

- condamné la société Bostik aux dépens comprenant les frais des expertises confiées à Monsieur [J] et Madame [Y] ;

Vu l'appel interjeté le 19 janvier 2017 par Maître [L] en qualité de mandataire liquidateur de la société Applications adhésive de l'Artois, la société MPH développement, Monsieur [M] [S] et Monsieur [F] [S] ;

* *

Vu les conclusions remises par le RPVA le 8 août 2017 pour Maître [L] en qualité de mandataire liquidateur de la société Applications adhésive de l'Artois, la société MPH développement, Monsieur [M] [S] et Monsieur [F] [S], aux fins de voir, au visa des articles du code civil 1134 ancien et 1103 nouveau, 1146 et suivants anciens, 1231 et suivants nouveaux, 1153,1154 et 1155 anciens,1231-6, 1343-2 et 1343-6 nouveaux,1645, 1351 anciens et 1355 nouveau, 32-1 et 500 du code de procédure civile et L. 110-3 du code du code de commerce :

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

* limité le montant de la condamnation principale prononcée contre la société Bostik au profit de Maître [L] ès-qualités à la somme de 512 258 euros à titre de dommages et intérêts, déboutant pour le surplus des demandes,

* dit que le lien de causalité de causalité n'est pas établi entre la défectuosité de la colle TLH4119E de la société Bostik et la liquidation judiciaire de la société 3A,

* débouté en conséquence la société MPH et Messieurs [F] et [M] [S] de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation,

* limité le montant de la condamnation prononcée contre la société Bostik au profit de Maître [L] ès-qualités à la somme de 40 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté Maître [L] ès-qualité du surplus de sa demande,

* ordonné l'exécution provisoire sans constitution de garantie,

* fixé à la somme de 58 590,56 euros outre intérêts le montant de la créance de la société Bostik au passif de la société 3A,

statuant, à nouveau,

- condamner la société Bostik à payer à Maître [L] ès-qualité de mandataire liquidateur de la société 3A, en supplément du montant de 512 258 euros alloué à titre principal en première instance, les sommes suivantes :

* 163 704 euros en réparation du préjudice au titre des produits finis et des encours,

* 714 628 euros en réparation complémentaire des préjudices subis du fait de la perte de clientèle, s'ajoutant au montant de 89 034 euros alloué en première instance,

* 253 815,07 euros en réparation du préjudice au titre de la perte de chance de réaliser une marge sur la vente de sacs auto-fermants à la société La Redoute,

* 200 720 euros en réparation du préjudice subi au titre de la perte de chance de réaliser une marge sur la vente de pochettes adhésives à la société Prodinger,

* 145 300 euros en réparation du préjudice de perte de valeur de la machine devenue inutilisable,

* 234 055 euros en réparation complémentaire des préjudices subis au titre de l'effort commercial consenti à l'ensemble des clients impactés par le litige, s'ajoutant au montant de 14 012 euros alloué en première instance,

* 27 914 euros en réparation des préjudices subis au titre de la gâche de matières premières,

* 62 600 euros en réparation complémentaire des préjudices subis au titre des surcoûts bancaires, s'ajoutant au montant de 19 418 euros alloué en première instance,

* 100 000 euros au titre du préjudice moral,

* 101 862 euros au titre des frais induits par la procédure de redressement judiciaire,

- condamner la société Bostik à payer à Maître [L] ès-qualité de mandataire liquidateur de la société 3A les intérêts au taux légal sur les sommes allouées à compter du 28 avril 2005, outre capitalisation des intérêts,

- dire le lien de causalité établi entre la défectuosité de la colle TLH4119E vendue par la société Bostik et le redressement puis la liquidation judiciaire prononcées à l'égard de la société 3A,

- dire la société MPH ainsi que Messieurs [M] et [F] [S] recevables et bien fondés en leurs demandes d'indemnisation de leurs préjudices personnels,

- condamner en conséquence la société Bostik à payer à société MPH la somme de 734 595 euros en réparation des préjudices subis, outre intérêts au taux légal à compter du 14 février 2011 outre capitalisation des intérêts,

- condamner la société Bostik à payer la somme de 1 439 187,35 euros à Monsieur [M] [S] et la somme de 1 208 171,15 euros à Monsieur [F] [S] au titre de leurs préjudices respectifs, outre intérêts au taux légal à compter du 14 février 2011 outre capitalisation des intérêts,

- dire irrecevable et à défaut mal fondée la société Bostik en sa demande de fixation de créance au passif de la société 3A,

- débouter la société Bostik en toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile la société Bostik au paiement des sommes de 80 000 euros à Maître [L], es qualité ainsi qu'à Messieurs [F] et [M] [S],

- condamner la société Bostik aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais des expertises ;

* *

Vu les conclusions remises par le RPVA le 9 juin 2017 pour la société Bostik aux fins de voir, au visa des articles 1382 et suivants anciens du code civil :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* dit que le lien de causalité n'était pas établi entre la défectuosité de la colle TLH4119E de la société Bostik et la liquidation judiciaire de la société 3A,

* mis hors de cause la société Bostik à l'égard de la société MPH et de Messieurs [F] et [M] [S],

* fixé la créance de la société Bostik au passif de la société 3A avec intérêts de droit à compter de la date d'émission des factures sauf à parfaire (soit 58 590,56 euros),

* débouté la société MPH et Messieurs [S] de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation de dommages et intérêts,

* condamné la société Bostik à payer au titre des avoirs et frais annexes : 19 761 euros, au titre de la 'refabrication' des articles défectueux : 118 669 euros, au titre des frais de personnel : 5 696 euros et au titre de l'effort commercial 14 012 euros,

* rejeté les demandes au titre de la perte de chance sur les clients La Redoute et Prodinger, au titre de la machine devenue soi-disant inutilisable, au titre de la gâche matière, au titre du préjudice moral ainsi que des coûts de procédure du redressement et de la liquidation judiciaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Bostik à payer à Maître [L] es qualités au titre des stocks de produits finis et d'encours : 200 039 euros, au titre des frais de lieu de stockage : 26 145 euros, au titre des frais de mise au rebut : 19 484 euros, et au titre de la Perte de clientèle : 89 034 euros,

statuant à nouveau,

- condamner la société Bostik à régler les sommes suivantes au titre des stocks de produits finis et d'encours : 36.335 euros, au titre des frais de lieu de stockage : 2 166 euros, au titre des frais de mise au rebut : 3 539 euros, au titre de la perte de clientèle : 44 517 euros et au titre du surcoût bancaire : 3,94 % du montant total,

subsidiairement,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Bostik à verser au titre de la dépréciation des stocks : 200 039 euros au titre de la perte de clientèle 89 034 euros (soit deux années), au titre des frais de lieu de stockage la somme de 26 145 euros, au titre des frais de mise au rebut la somme de 19 484 euros,

plus subsidiairement, si la cour considérait que la liquidation judiciaire de 3A était directement liée aux désordres,

- fixer la perte de valeur de la société 3A à la somme de 497 000 euros à fin 2005 selon estimation de l'expert [Y],

en tout état de cause,

- débouter Maître [L] es qualités de liquidateur de la société 3A de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

- fixer la créance de la société Bostik au passif de la société 3A à la somme de 58 590,56 euros avec intérêts de droit à compter de la date d'émission des factures, sauf à parfaire.

- condamner Maître [L] es qualité de liquidateur de la société 3A ainsi que solidairement, Messieurs [F] et [M] [S] et la société MPH, à payer la somme de 50 000 euros, ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Debray conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

* *

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré, aux écritures des parties ainsi qu'aux rapports d'expertise '[J]' et '[Y]' comme cela est prescrit à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

1. Sur l'indemnisation des conséquences directes du sinistre

Pour condamner la société Bostik à payer au liquidateur de la société 3A la somme de 512 258 euros au titre des conséquences directes du vice caché des colles fournies par la société Bostik sur l'activité de l'entreprise avant sa liquidation, le tribunal a reconnu l'indemnisation des 'avoirs et frais annexes' pour 19 761 euros, la 'refabrication des articles défectueux' pour 118 669 euros, la 'provision sur stock' pour 200 039 euros, les 'frais de personnel' pour 5 696 euros, la location de lieu de stockage pour 26 145 euros, les 'frais de mise au rebut' pour 19 484 euros, la 'perte de clientèle' pour 89 034 euros, 'l'effort commercial' consenti sur les prix pour 14 012 euros, soit un sous-total de 492 840 euros auquel a été ajoutée l'indemnisation du surcoût sur les frais bancaires de 19 418 euros - et déterminés par rapport au sous-total précité .

Au terme de son pré-rapport page 117, l'expert [Y] a évalué le montant total de ce préjudice à un minimum de 865 054 euros et un maximum de 924 949 euros, outre 101 862 euros au titre des frais de procédure liés à la procédure de redressement judiciaire.

Devant la cour, les parties limitent leurs contestations aux neuf chefs de préjudice qui suivent.

1.1. quant à la dépréciation du stock de pochettes adhésives fabriquées par la société APS basée en Thaïlande

Le tribunal a retenu la valeur de dépréciation du stock de 200 039 euros enregistrée au bilan de la société 3A de 2005 et acceptée par l'expert [Y].

La société Bostik prétend voir limiter l'indemnisation de ce préjudice à la somme de 36 335 euros représentant la différence entre la dépréciation du stock retenue par le tribunal, et le stock de produits issu de la filiale thaïlandaise invoqué par la société 3A, et conteste tout autre montant en soutenant, d'une part, que le stock de pochettes importé de Thaïlande et affecté des vices cachés n'est pas déterminable ni dissociable de celui de la société basée en France, que l'expertise contradictoire de Monsieur [J] n'a pas été saisie de cette demande, qu'il est constant que la société 3A ne disposait pas de moyens de traçabilité de ses productions et qu'en outre, des contradictions comptables existent entre les valeurs de stocks de produit fini, de marchandises en cours, et de marchandises enregistrées sur le compte de stock, avec les valeurs de stocks de l'inventaire auquel le commissaire aux comptes n'a pas assisté, et enfin, que l'enregistrement comptable de ce stock en produit exceptionnel est incohérent. La société Bostik se prévaut, subsidiairement, de l'expertise [Y] selon laquelle les échantillons ont révélé que seulement 58 % du stock de pochettes était enduit de la colle viciée pour prétendre à un abattement sur la valeur retenue par le tribunal dans ces mêmes proportions.

La société 3A revendique la majoration de la somme reconnue par le tribunal (200 039 euros), de celle de 163 704 euros représentant le stock de pochettes fabriquées par sa filiale et qu'elle a extraite de la facture détaillée que celle-ci a émise au titre des marchandises achetées en 2005. Elle se prévaut de la preuve complémentaire tirée des observations du commissaire aux comptes de la société 3A dans son rapport du 12 juin 2006 constatant un produit exceptionnel de 359 998 euros constitué du 'montant minimum estimé du préjudice considérant les matières semi-finies (papier enduit) et les produits finis en stock, sans tenir compte du préjudice subi en matière de coût de transport, financiers, juridiques'.

Sur ce, la cour confirmera le jugement qui s'est fondé sur la valeur du stock de 200 039 euros enregistrée au bilan qui est au plus proche de la constatation de l'impact sur la matière détenue par la société 3A, de la valeur des l'inventaire physique de 610 000 euros bruts et de 409 970 euros valeur nette déclarée par la société 3A, et devant être rapporté à la moyenne des productions affectées par la colle viciée, valeur par ailleurs confirmée par le commissaire aux comptes dans une attestation du 25 juin 2008 et confirmée enfin par l'analyse de l'expert [Y] des contradictions et des anomalies dans les affectations comptables des achats et des ventes de produits entre la société 3A et la société APS en 2004 et 2005 (pages 25 à 50 du rapport).

1.2. quant à la perte de huit clients

Le tribunal a écarté le lien de causalité entre le sinistre et la perte des trois clients Criteria, Crown, et La Redoute, et condamné la société Bostik à indemniser la perte des cinq clients AA Polistene, Aid Pack, Antalis, Charpentier et Isoband pour la somme de 89 034 euros établie d'après la perte de chiffre d'affaires moyen réalisé avec ces derniers en 2003 et 2004 de 119 992 euros, et après avoir retenu un taux de marge de 37,1 % auquel a été appliqué un coefficient de 2.

La société Bostik conclut à l'infirmation de l'indemnisation du client Isoband, alors qu'il a à nouveau passé des commandes à la société 3A en 2007 pour un chiffre d'affaires comparable à celui réalisé en 2004. Au demeurant, l'interruption des relations commerciales en lien avec la défection des pochettes adhésives et son retentissement sur la permanence de l'activité de la société 3A pendant deux ans est constante, de sorte que le jugement sera confirmé de ce chef.

Pour s'opposer à la demande de la société 3A qui prétend à la somme complémentaire de 714 628 euros, la société Bostik soutient que le lien de causalité n'est pas rapporté entre le vice caché affectant la colle qu'elle a fournie, et la rupture des relations contractuelles avec ces clients, et reprend les motifs du tribunal considérant que les attestations communiquées étaient tardives, et qu'en ce qui concerne le client Criteria, il résultait de la déclaration en langue anglaise de son représentant que suite des désordres intervenus fin 2004 et 2005, les commandes ont été maintenues jusqu'en 2007, que s'agissant du client La Redoute, le lien entre la défaillance de la colle des produits et la rupture des relations commerciales n'était pas établie, cela d'autant moins que la société 3A avait été retenue à l'appel d'offres de La redoute pour la fourniture de sacs auto-fermants. Que pour ce qui concerne le client Crown, les déclarations sur sa défection commerciale étaient faites sans que son auteur ne justifie de sa qualité. La société Bostik conteste subsidiairement le taux de marge de 38,6 % revendiqué par la société 3A pour la détermination du préjudice.

Au demeurant, et en premier lieu, l'ancienneté des attestations n'est pas de nature à remettre en cause la sincérité des déclarations qu'elles contiennent.

En deuxième lieu, il est manifeste que la défaillance des pochettes adhésives dont l'utilité dépend de la qualité de leur colle jette une suspicion sur son fournisseur, particulièrement lorsque leur commercialisation concerne de très grandes quantités de faible valeur unitaire.

En troisième lieu, l'attestation du représentant de la société Criteria indique : 'si la relation commerciale s'est poursuivie jusqu'en 2007, c'est en raison du temps qu'il a fallu à la société CRITERIA pour trouver une solution alternative, soit un autre fournisseur au détriment de la société 3 A. Ainsi, le tribunal de commerce de NANTERRE se méprend quant à la raison du maintien obligé mais à titre précaire de la relation commerciale, deux ans après la réalisation du sinistre'. L'attestation du manager du client Crown, dûment justifiée devant la cour, rapporte que : 'L'activité pochettes adhésives pour AS CROWN était principalement concernée par la Poste Danoise pour qui nous assurions la logistique de toute la gamme des emballages pour chacune des agences à travers le Danemark. 3A a livré à la société AS CROWN des produits défectueux qui n'étaient pas adhésifs. Cela a occasionné de nombreux problèmes dans notre relation de long terme avec la Poste ; ainsi nous avons décidé de nous approvisionner auprès d'un autre fournisseur pour livrer la poste danoise'. Enfin, l'attestation délivrée par le représentant des achats à La Redoute énonce que : 'Depuis 1981 la société 3A était fournisseur de pochettes adhésives à la Redoute et autres entités du groupe Redcats... C'est à cette époque qu'une livraison de pochettes adhésives s'est avérée défectueuse et a causé de graves problèmes logistiques au sein de nos ateliers de préparation de commande : en effet les pochettes n'adhéraient pas sur les cartons d'expédition. La société 3 A a alors remplacé les produits en question, toutefois l'impact sur nos livraisons était tel, que nos services logistiques, par mon intermédiaire, n'ont pas souhaité poursuivre, dès 2005, les relations avec 3A'.

Il résulte de ces trois déclarations, la preuve manifeste que ces trois clients ont été perdus en raison d'un lien direct avec la suspicion qui a atteint les fournitures de produits de la société 3A avec ces clients historiques, de sorte que le jugement sera infirmé en ce qu'il a écarté ces les indemnisations à ces titres.

La prétention de la société 3A à déterminer son préjudice sur la moyenne de l'ensemble du chiffre d'affaires sur les quatre années ayant précédé le préjudice et pour un taux de marge de 38,6 % sera écartée au profit de la règle d'indemnisation du tribunal rapportée ci-dessus. Sur la base des chiffres d'affaires communiqués pour la société 3A, la société Bostik sera condamnée à verser la somme de 381 752,02 euros [représentant pour Criteria : 56 754,66 euros (moyenne de 104 713*0.371*2), pour Crown : 171 786,18 euros (moyenne de 231 517,76*0.371*2) et pour la Redoute : 153 211,18 euros (moyenne de 206 484,08*0.371*2)], cette somme s'ajoutant à celle de 89 034 euros reconnue par le tribunal au titre des clients AA Polistene, Aid Pack, Antalis, Charpentier et Isoband.

1.3. quant à la perte de chance sur les clients La Redoute et Prodinger

Le tribunal a rejeté les demandes d'indemnisation des pertes de chance par la société 3A, en premier lieu, pour l'appel d'offres du client La Redoute au motif, repris par la société Bostik, que ce marché pour des sacs auto-fermants (mail-bags) ne portait pas sur des produits enduits avec la colle incriminée et qu'en outre, la société 3A a été retenue pour ce marché le 26 mai 2005 après que La Redoute a été informée des désordres qui atteignaient les pochettes adhésives qui lui étaient fournies.

Cependant, et ainsi que cela s'évince de l'attestation du responsable achat de La Redoute ci-dessus, il se déduit que la perte de ce marché pourtant emporté par la société 3A a été rompu sans autre lien de causalité que celui du sinistre et de l'interruption dans la fourniture de pochettes adhésives.

Pour l'indemnisation de ce préjudice, la cour retiendra le calcul de l'indemnisation de la perte de chance proposé par l'expert [Y] pages 91-94 de son rapport d'après le chiffre d'affaires potentiel évalué selon l'offre de prix de la société 3A, révisé, les abattements et le taux de marge fixé à 16,5 % ainsi que la réalisation de 30 % du marché, et condamnera la société Bostik à verser la somme de 135 620 euros.

En second lieu, le tribunal a rejeté, à la suite de l'avis de l'expert, la perte de chance de la société 3A de conclure un contrat avec la société Prodinger au motif, que dans une lettre du 30 mai 2005, ce client avait indiqué : 'suite aux litiges que nous avons eus concernant vos pochettes qui ne collent pas lors de notre commande d'essai de décembre 04 et qui nous ont occasionné de nombreux problèmes auprès de nos clients nous avons décidé de mettre un terme à nos relations commerciales. Nous vous avions passé cette commande d'essai afin de vous évaluer et de vous confier éventuellement la majorité de nos approvisionnements en pochettes adhésives, ce qui représente un montant d'achat d'environ 1 300 000 €', le tribunal soutenant que l'expression 'éventuellement' traduisait le caractère hypothétique de l'intention de la société Prodinger.

Cependant, l'adverbe 'éventuellement' ne peut être compris indépendamment de l'essai des produits satisfaisant auquel la société Prodinger s'était livré en réponse à l'offre de la société 3A et qui traduit une intention assimilable à une chance dont la perte est irrémédiablement constatée par ce client dans sa lettre.

Le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef, et la prétention du liquidateur de la société 3A de fixer la réparation de cette perte de chance de voir déboucher ce marché à 193 000 euros sera ramenée à la somme de 20 000 euros.

1.4. quant à la perte d'investissement sur une machine

La société 3A entend voir infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'indemnisation pour 145 300 euros correspondant à la perte de valeur de la machine devenue inutilisable en soutenant que cette machine qu'elle avait acquise en 2003 était dédiée à la seule production de mail-bags et destinée à son seul client La Redoute.

Toutefois, cette perte n'est pas en relation directe avec le vice qui a affecté la colle destinée aux pochettes adhésives, alors que cette machine n'a pu être acquise pour l'opportunité d'un marché qui s'est présenté plus d'un an et demi après son acquisition de sorte que par ce motif, le jugement sera confirmé.

1.5. quant aux frais de lieu de stockage et de mise au rebut

Le jugement a retenu une indemnité de 26 145 euros au titre des frais de location pendant 49 mois d'un entrepôt pour le stockage des retours et de rétention des produits défectueux ainsi qu'une indemnité de 19 484 euros au titre des frais pour leur mise au rebut.

La société Bostik est mal fondée à prétendre, à nouveau en appel, restreindre voir appliquer le taux de 58 % du stock de pochettes discuté sur le volume des productions atteintes par la colle défectueuse, alors que l'affirmation qu'elle sous-tend n'est pas démontrée en particulier pour ce chef d'indemnisation.

1.6. quant à l'effort commercial sur les prix consentis aux clients

Le tribunal a suivi celle des deux hypothèses de l'expert [Y] limitant à 14 012 euros, l'indemnisation du préjudice lié à l'effort prix que la société 3A a consenti pour conserver ses clients au motif qu'elle ne justifiait d'une demande à ce titre que pour le client Binpac à l'exception de tous les autres, alors que la société 3A réclame la somme de 234 055 euros.

Cette restriction dans la détermination de ce préjudice sera infirmée, alors que le retraitement comptable par l'expert [Y] met en évidence le recul de la marge brute réelle de la société 3A en 2005, corrigée par les valeurs d'achat de matières premières ainsi que du coût de refabrication des pochettes adhésives, et qui, au terme des expertises, ne trouve pas d'autre cause que dans celle de l'effort prix que la société 3A justifie par ailleurs pour partie avoir consentie par des avoirs ainsi que sur des réductions de prix unitaire précises, particulièrement pour son client Raja.

En suite des analyses comptables que la société 3A a successivement soumises à l'expert [Y] pour appréhender le ratio de l'effort commercial qu'elle a dû consentir pour conserver ses clients, la cour suivra l'expert en ce qu'il a retenu un ratio de 11,20 % sur le chiffre d'affaires. La cour suivra aussi l'expert en ce qu'il a écarté l'application de ce ratio à l'assiette du chiffre d'affaires réalisé avec les clients perdus, en particulier les clients Aid Pack, Crown, Isoband et La Redoute, et dont l'indemnisation ne peut se cumuler avec celle retenue ci-dessus. L'avis de l'expert excluant de cette assiette le chiffre d'affaires réalisé sur la production de 'mailbag' sera aussi retenu, alors que celle-ci n'entre pas dans la relation directe avec les défauts des autres produits, et que la preuve d'un effort prix extérieure à l'analyse des résultats de 2005 n'est pas offerte. En revanche, l'avis de l'expert d'écarter l'effort consenti sur le plus important client Raja au motif que le chiffre d'affaires avec celui-ci était en augmentation ne sera pas suivi, alors que la conservation de ce client compte tenu de son poids dans l'activité de l'entreprise était déterminant dans la poursuite de celle-ci, et que d'autre part, la société 3A justifie de la diminution du prix de la pochette référencée RLT 05, impression neutre, passé de 26,21 euros HT en janvier 2005 au prix de 24,90 euros HT facturé le 7 mars 2005.

En conséquence, et sur la base des chiffres d'affaires justifiés par la société 3A (pièces n°220), il convient de condamner la société Bostik à payer pour ce préjudice la somme de 168 701,36 euros (résultant du ratio de 11,20 % appliqué à la somme des chiffres d'affaires réalisés avec les clients de pochettes adhésives hors clients perdus d'après le tableau récapitulatif page 40 des conclusions du liquidateur).

1.7. quant à la perte de matières premières

Le tribunal a rejeté la demande de la société 3A d'indemnisation du coût d'achat de matière première reconditionnée, notamment en film et en papier, qu'elle a dû exposer pour 27 914 euros afin de substituer les pochettes, dans l'urgence, à celles qui étaient atteintes de la colle défectueuse.

Le tribunal sera confirmé de ce chef, alors que la société 3A n'établit pas que ce coût est distinctement entraîné de celui exposé pour la refabrication des produits et dûment réparé à hauteur de 118 669 euros.

1.8. quant aux frais inhérents à la procédure collective

Le tribunal a écarté à tort cette demande après l'avoir discutée dans l'appréciation du lien de causalité entre le sinistre et la liquidation de la société 3A, alors qu'il s'agit d'une charge qui a pesé sur ses comptes dès la dénonciation judiciaire du sinistre jusqu'au moment qui a précédé sa liquidation.

A ce stade de la discussion, il est incontestable que ces frais ont été exposés en suite des procédures que la société 3A a dû engager en raison du refus de la société Bostik de la dédommager et de la nécessité qu'elle a aussi provoquée d'ouvrir la procédure collective, et pour la société 3A de contribuer au financement de celle-ci.

La société Bostic sera en conséquence condamnée à payer la valeur de 101 861 euros retenue par l'expert et réclamée par la société 3A.

1.9. quant aux surcoûts bancaires

Pour l'indemnisation des surcoûts de frais financiers que la société 3A a supportés par l'affacturage auquel elle a recouru après l'ouverture de la procédure collective en suite de la dénonciation entre le 26 mai et le 4 juillet 2005 par les banques de leur concours qu'elles consentaient au taux moyen de 1,61 %, le tribunal a retenu le taux de financement de 3,94 % de l'affactureur Transfact proposé par l'expert [Y], et l'a appliqué au montant total des préjudices éprouvés par la société 3A fixé dans son jugement à 492 840 euros pour limiter ce chef de préjudice à 19 418 euros.

La société 3A réclame la somme complémentaire de 62 600 euros en contestant la décision qui, pour l'écarter, a pris en considération la sous-capitalisation de l'entreprise en 2004, retenu qu'elle avait consenti des conditions tarifaires avantageuses à sa filiale thaïlandaise et refusé d'appliquer l'écart de taux de financement à l'ensemble de ses charges. Elle prétend déterminer le surcoût de financement sur la base d'un ratio qu'elle établit entre les montants de sa production, et ceux de ses charges financières - qu'elle fixe à 1,95 pour 2005, 2,41 pour 2006, 2,23 pour 2007 et 2,43 pour 2008 -, et dont elle rapporte l'écart au taux moyen de 1,61 % au montant total de sa production annuelle.

Au demeurant, il est constant que les besoins de financement de la société 3A et les difficultés de trésorerie qu'elle connaissait avant le sinistre ont contribué à la défection du concours de ses banques, la société 3A ne peut concevoir un ratio dans le surcoût de ses frais financiers qui exclut le poids de son besoin de financement avant le sinistre et qui comprend la totalité de sa production, de sorte que le jugement sera confirmé dans son mode de calcul.

En suite de ce qui est décidé aux points 1.1 à 1.8 ci-dessus, le préjudice reconnu par le tribunal de 492 840 euros (hors frais bancaires) est révisé à la somme de 1 286 762,38 euros. Il en résulte que, sur la base du calcul de l'indemnisation des surcoûts financier adoptée ci-dessus, celle-ci peut être fixée à la somme de 50 698,43 euros (1 286 762,38 euros*3,94 %).

1.10. Quant au préjudice moral

Pour prétendre à la réparation d'un préjudice moral que le tribunal lui a refusée, et au titre duquel elle réclame 100 000 euros de dommages intérêts, la société 3A se prévaut de la mauvaise foi avec laquelle la société Bostik a d'abord augmenté le prix de la colle lorsqu'elle est devenue son unique fournisseur, puis a dénié la réalité du vice de la colle fournie et lui imputant en mars 2005 un mauvais procédé de fabrication. Elle invoque les réticences répétées de la société Bostik à communiquer les justificatifs de l'homologation de sa colle comme la fiche de sa composition que l'expert [J] a réclamés, ainsi que celui-ci l'a déploré dans son rapport. Elle met enfin en avant le comportement dilatoire de la société Bostik dans le pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt reconnaissant sa responsabilité puis dans son action en rétractation de ce même arrêt.

Toutefois, la dénégation de toute responsabilité au début du litige ne constitue pas, dans ce premier intervale de temps, la preuve d'un manquement à l'origine d'un préjudice moral, le tribunal de commerce n'ayant au surplus pas accueilli la demande de provision, et tandis que chacun des autres griefs à l'occasion des procédures qui se sont succédé ouvrait le droit de la société 3A de demander, au fur et à mesure de leur survenance, la réparation de ce préjudice moral que ces procédures pouvaient provoquer, le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté cette demande.

* *

En suite de ce qui est décidé au point 1. ci-dessus, la cour révise le montant de 512 258 euros reconnu par le tribunal pour l'indemnisation au titre des conséquences directes du vice caché sur l'activité de l'entreprise à la somme de 1 337 460,82 euros que la société Bostik sera condamnée à payer au liquidateur de la société 3A.

classe d'indemnisations

décision du tribunal

décision de la cour

avoirs frais

19 761

19 761

refabrication

118 669

118 669

provision stock

200 039

200 039

frais de personnel

5 696

5 696

frais de stockage

26 145

26 145

mis au rebut

19 484

19 484

perte de clientèle

89 034

381 752,02 + 89 034

effort prix

14 012

168 701

perte à venir La Redoute

0

135 620

perte client Prodinger

0

20 000

frais de procédure

0

101 861

frais bancaires

19 418

50 698,43

préjudice moral

0

0

total

512 258

1 337 460,82

2. Sur la fixation au passif de la société 3A des factures de la société Bostik

La société 3A ne verse pas plus devant la cour, que devant les premiers juges, des éléments de preuve comptable contraires à ceux recueillis par l'expert [Y] d'après lesquels elle restait redevable à la société Bostik de factures impayées pour 58 590,56 euros, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qui les a admises au passif.

3. Sur la responsabilité de la société Bostik dans la liquidation judiciaire

Pour écarter le lien de causalité entre la fourniture de la colle défectueuse par la société Bostik, et la liquidation de la société 3A, et débouter la société MPH et Messieurs [S] de leur différents chefs de préjudice, les premiers juges ont retenu que, avant les désordres liés à la colle, le chiffre d'affaires de la société 3A était en déclin constant de 2001 et 2004, que le niveau global d'endettement de la société 3A s'est dégradé entre 2003 et 2004, passant de 203 K€ à 371 K€, que de 2000 à 2004, les stocks représentaient environ 3 mois de chiffre d'affaires et que plus de quatre ans se sont écoulés entre les désordres et la décision de liquidation. Le tribunal a repris en substance les fruits de l'analyse de l'expert [Y] qui a conclu, page 62 de son pré-rapport que :

- 'la société 3A présentait déjà fin 2004 une sous-capitalisation et qu'elle était en perte après retraitement du profit exceptionnel réalisé sur la vente de son siège social [102 294 euros],

- le fait que la société bostik n'ait pas procédé à une indemnisation rapide de la société 3A a certainement aggravé les conséquences financières du litige,

- ce litige ne peut expliquer à lui seul la liquidation de la société 3A, d'autant que la société 3A avait renoué avec les profits en 2008,

- l'analyse des marges sur ventes de marchandises montre des incohérences qui n'ont toujours pas été expliquées de manière satisfaisante,

- une partie des stocks litigieux (entre 36 et 56 % selon l'interprétation faite des explications de Messieurs [S] sur la comptabilisation d'un des éléments constitutifs du produit exceptionnel de 359 K€ relative aux stocks de pochettes adhésives APS) a été fabriquée par la société APS, société thaïlandaise dans laquelle Messieurs [S] étaient (ou sont toujours) associés majoritaires,

- le stock de 164 K€ en provenance d'APS a été vraisemblablement fabriqué uniquement avec du papier enduit par la société 3A en France et expédié à la société APS en Thaïlande,

- la comptabilisation des stocks en provenance d'APS n'a toujours pas été clairement expliquée par Messieurs [S],

- la société 3A a accordé à la société APS des conditions de règlement particulièrement avantageuses [solde de 255 k€ dû par APS à la société 3A au 31 décembre 2004] qui ont contribué à accroître ses difficultés de trésorerie'.

Le tribunal a enfin relevé que les achats d'actions de la société 3A par la famille [S] a été financé essentiellement par l'emprunt porté par leur société holding MPH contribuant à la fragilité financière de la société 3A.

La société Bostik reprend à son compte les motifs du tribunal ainsi que les diagnostics de l'expert [Y] et conclut que la cessation des paiements de la société 3A est imputable à l'effondrement des marges sur les ventes de polybags, au financement des opérations avec la société APS, à la hausse des prix d'achat de matières premières ainsi qu'à la hausse des consommations de matières premières, estimant que l'impact des désordres sur les enveloppes adhésives était secondaire.

Au demeurant, et en premier lieu, la cour relève que la probabilité de faillite de la société 3A d'après ses résultats de 2004 n'est pas avérée, alors qu'elle est exclue des scores que Monsieur [G] a proposés - communément pratiqué par la profession et que l'expert a écarté de la discussion -, que le commissaire aux comptes ne l'a pas relevée dans son rapport de juin 2015 sur l'exercice de 2004, alors que le produit exceptionnel de 102 294 euros lié à la vente du siège social n'a pu lui échapper, et qu'enfin, la Banque de France avait attribué en juillet 2005 à la société 3A une cotation favorable sur sa capacité à honorer ses engagements financiers à un horizon de trois ans.

En deuxième lieu, l'initiation d'une stratégie de délocalisation d'une partie de la production en 2004 vers les opérateurs APS et Golden et les débouchés sur l'Asie ne peut être reprochée en elle-même. Et cela d'autant moins qu'elle s'est matérialisée par l'élan enregistré de 2005 à 2008 donné à la distribution de la production de sachets fermants de toute nature vers l'Asie, croissance de 138 % qui a tout juste équilibré, en volume, la chute continue des productions des pochettes adhésives de 17 % sur la même période.

Enfin et en troisième lieu, Monsieur [G] n'est pas contesté en ce que dans la version définitive de son rapport du 2 juillet 2013, il justifie que, au 31 décembre 2004, la société 3A disposait de 484 k€ de capitaux, d'un fonds de roulement de 374 k€ et d'un excédent brut d'exploitation de 47 k€.

Il en résulte que les quelques valeurs comptables précitées, prises isolément ou ensemble sur la situation financière de la société 3A avant le sinistre n'établissent pas les causes sous-jacentes d'une cessation de paiement à venir de la société 3A, alors qu'en revanche, le préjudice direct reconnu par la cour de 1 337 460,82 euros a affecté les trois années d'activité de l'entreprise en 2005, 2006 et 2007, dont plus de la moitié dès la première année, le refus de la société Bostik de reconnaître sa responsabilité autrement que par les voies judiciaires ayant placé la société 3A dans l'impossibilité de répondre du passif exigible tel que la liquidation judiciaire l'a sanctionnée.

Le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef, et la société Bostik condamnée à réparer les préjudices qui sont résultés de la liquidation judiciaire de la société 3A.

4. Sur les préjudices de la société MPH et de Messieurs [M] et [F] [S]

4.1. Le préjudice de la société MPH d'après la valorisation de la société 3A

La société MPH constituée en mars 2000 par Messieurs [S] avec pour objet la prise de participation de toutes sociétés ou entreprises a racheté 12.595 des 12.600 actions composant le capital social de la société 3A, au prix de 335 388 euros (2 200 000 francs) intégralement financé par deux emprunts bancaires souscrits auprès des deux banques CIC-BSD et Crédit agricole.

En considération de son actif, exclusivement constitué de la détention des titres de la société 3A, et de la responsabilité de la société Bostik dans la liquidation de cette dernière et reconnue au point 3. ci-dessus, il convient de reconnaître son droit à l'indemnisation de perte de valeur qui en est résultée pour elle.

La société MPH prétend à la condamnation de la société Bostik à lui payer la somme de 734 595 euros au titre de la perte de valeur entraînée par la liquidation judiciaire de la société 3A.

En accord avec l'expert [Y] pour la valorisation de la société 3A sur la base du guide pour l'évaluation des entreprises et des titres des sociétés publié par la direction générale des finances publiques en novembre 2006 - la société MPH conteste la valeur de 497 166 euros retenue suivant la méthode de la valeur mathématique des parts calculées d'après la moyenne des valeurs assises sur les bilans et comptes de résultats de 2002, 2003 et 2004 en soutenant que l'expert ne pouvait retenir dans la référence au bilan de 2004, la charge des encours livrés à la société APS, alors que cette donnée intégrait les concessions de la société 3A à la société APS pour l'obtention de bénéfices à venir sur son développement et que la société Bostik a empêchée par sa responsabilité dans la fourniture de la colle défectueuse. La société MPH prétend ainsi déterminer la valeur de la société 3A d'après l'application de la méthode mathématique sur la base des résultats retraités pour l'année 2004, ou sur la moyenne des résultats enregistrés en 2001, 2002 et 2003.

Au demeurant, le principe d'une stratégie de la société 3A ébauchée en 2004 d'orienter les débouchés de production vers les marchés asiatiques et de nouer puis d'intensifier ses relations commerciales avec la société APS n'a pas été quantifié ni justifié pour l'avenir avant que ne survienne le sinistre, de sorte qu'en l'absence de certitude future, l'expert a dûment retenu les valeurs du bilan et des résultats de 2004 de la société 3A pour sa valorisation au plus près de la survenance du sinistre sur les trois années qui l'ont précédé.

La société Bostik sera en conséquence condamnée à payer à la société MPH la somme de 497 166 euros.

4.2. Sur les préjudices personnels de Messieurs [M] et [F] [S]

Messieurs [F] [S] et [M] [S], qui étaient employés de la société 3A depuis 1988 en qualité de cadre commercial et responsable de la production, réclament la réparation des pertes personnelles et des manques à gagner dont ils soutiennent qu'ils ont été directement causés par le sinistre, et qui ont consisté, d'une part dans les dépenses qu'ils ont exposées pour en diminuer les conséquences pendant la période de redressement de la société 3A, d'autre part, de la rupture de leur contrat de travail en suite de la liquidation de la société et enfin, des pertes financières dans leur participation à la société civile immobilière MPH Investissement (Sci).

- quant aux pertes de salaires, d'indemnité de licenciement et des pensions de retraite

Monsieur [F] [S] réclame d'une première part, les sommes de 488 434,55 euros au titre de la perte de salaire pendant la période de redressement, 271 400 euros au titre des pertes de salaires jusqu'à l'âge de la retraite, 11 693,59 euros au titre des indemnités de licenciement dont il a été privé en application des plafonds de l'AGS, 232 862,88 euros au titre de la perte de retraite. Pour déterminer sa perte de salaire pendant la période de redressement puis celle manquée pendant les 118 mois d'activité jusqu'à l'âge de la retraite et réclamer un complément à valoir sur sa pension de retraite, il indique que s'il a reçu de la société 3A un salaire de 4 000 euros brut par mois à compter d'octobre 2004, sa rémunération était auparavant de 6 750 euros et n'a été révisée que dans la perspective d'orienter une partie de la production en Thaïlande et dont il a été privé du bénéfice. Après la liquidation de la société 3A, il justifie avoir reçu d'une autre société Packalpha dont il était le gérant et associé - par ailleurs fournisseur de la société 3A - un salaire de 2 500 euros brut par mois révisé ensuite à 1 000 euros brut.

Monsieur [M] [S] réclame quant à lui, d'une première part, la somme de 493 243,52 euros au titre de la perte de salaire pendant la période de redressement, 324 300 euros au titre des pertes de salaires jusqu'à l'âge de la retraite, 286 916,66 euros au titre de la perte de retraite. Pour déterminer sa perte de salaire pendant la période de redressement puis celle manquée pendant les 141 mois d'activité jusqu'à l'âge de la retraite et réclamer un complément à valoir sur sa pension de retraite, il indique que son salaire brut de 6 750 euros a été révisé à 1 500 euros en juin 2004 en raison de son départ en Thaïlande et de sa rémunération par la société APS, puis avoir traversé une période de chômage entre mars et octobre 2009 avant d'être réembauché par la société Packalpha pour un salaire brut de 4 000 euros et de nouveau été au chômage de décembre 2011 à janvier 2015.

Au demeurant, Messieurs [S] étaient titulaires de mandats d'administrateur de la société 3A et propriétaires de la totalité de ses parts par le truchement de la société MPH, actionnaires d'autres sociétés, dont au moins une en Thaïlande, et tandis qu'ils n'ont communiqué aucune information sur la société APS dont ils sont actionnaires, ils ne peuvent ni prétendre à un autre salaire que celui décidé par la société 3A avant la survenance du sinistre, de sorte que ce chef de demande sera rejeté.

Pour les mêmes motifs, ajoutés aux aléas financiers attachés à la production et à la commercialisation des produits de la société 3A vers l'Asie et envisagées par Messieurs [S], ces derniers ne peuvent prétendre à la compensation arithmétique du salaire dont ils auraient été privés après la liquidation ainsi que d'un complément de retraite à due proportion, alors que ce préjudice correspond à une perte de chance.

D'après les informations mises aux débats, le préjudice sera indemnisé à hauteur de 50 000 euros pour chacun d'eux.

Par ailleurs, l'indemnité de licenciement manquée en application du plafond de l'AGS est objectivement supportée par Monsieur [F] [S] par l'effet de la liquidation judiciaire de la société 3A, de sorte que la société Bostik sera condamnée à verser la perte de 11 693,59 euros.

- quant aux concours de Messieurs [S] pour le remboursement du prêt de la société MPH

Messieurs [F] et [M] [S] réclament l'indemnisation du remboursement du prêt souscrit par la société MPH pour l'acquisition de la société 3A - dont ils se sont portés caution solidaire - et dont cette dernière compensait le paiement par le versement de ses dividendes.

La société Bostik s'y oppose en soutenant que la juridiction consulaire avait intégré dans son plan de continuation de la société 3A le versement des dividendes, en relevant qu'aucun bilan de la société MPH n'a été mis aux débats de sorte que l'affectation des fonds que Messieurs [S] prétendent avoir versés n'est pas établie, et en estimant enfin que 'ce poste de réclamation fait double emploi avec la valeur de la société 3A à l'actif de la société MPH qui a pour contrepartie les capitaux empruntés par MPH'.

Au demeurant, il se déduit des conditions particulières du contrat de prêt de 2 200 000 francs souscrit par la société MPH au Crédit Agricole qu'il était affecté au financement de l'acquisition des parts sociales de la société 3A, et tandis qu'il est manifeste que le maintien du remboursement de ce prêt par Messieurs [S] a permis la poursuite de la procédure collective que la société Bostik a provoquée, avant que la liquidation ne soit prononcée, il convient de faire droit à la demande.

Messieurs [S] justifiant avoir honoré les traites de ce prêts entre le 17 janvier 2006 et le 9 juillet 2007, la société Bostik sera en condamnée à payer à Monsieur [F] [S], la somme de 78 405,29 euros, et à Monsieur [M] [S] la somme de 25 042 euros.

- quant aux moins-values et aux impôts associés au patrimoine immobilier de Messieurs [S]

Messieurs [F] et [M] [S] se prévalent des difficultés financières auxquelles ils ont dû faire face pendant la période de redressement de la société 3A, en particulier la perte de revenus qu'ils ont éprouvée et de la nécessité dans laquelle ils se sont trouvés de recourir à des prêts, de céder des immeubles, d'acquitter des impôts afférents et de renoncer à des loyers.

Monsieur [F] [S] prétend ainsi à l'indemnisation de la somme de 77 674 euros au titre de la perte sur la vente d'une maison au Touquet, 28 500 euros au titre de la perte dans la cession de Sci et 13 926,50 euros au titre de l'impôt sur la plus-value sur la Sci. Monsieur [M] [S] prétend à l'indemnisation d'un prêt personnel de 50 000 euros, 52 666,67 euros au titre de la perte sur la vente d'un appartement au Touquet, 164 592 euros au titre de la perte de loyers sur une maison à Béthune, 28 500 euros au titre de la perte dans la cession de Sci et 13 926,50 euros au titre de l'impôt sur la plus-value sur la Sci.

Toutefois, l'objet de telles prétentions a déjà été discuté et tranché ci-dessus au titre de l'indemnisation de la perte de chance de revenus ainsi qu'au titre de l'indemnisation dans le remboursement du prêt consenti à la société MPH et ne sont, pour le surplus, pas en lien direct avec la responsabilité de la société Bostik, de sorte que ces chefs d'indemnisation seront rejetés.

- Quant au préjudice moral

En suite de ce qui est reconnu par la cour ci-dessus, il se déduit la preuve des difficultés qui en sont résultées pour Messieurs [S] de résister à la liquidation de leur société entraînée par la responsabilité de la société Bostik au moment du sinistre et pendant la procédure de redressement avant que cette liquidation ne soit irrémédiablement décidée, aussi du fait de la société Bostik, de sorte que cette dernière sera condamnée à leur verser la somme de 20 000 euros chacun en réparation du préjudice moral.

- Quant aux frais non remboursés

La pièce n°311 communiquée par Monsieur [S] ne permet pas d'établir la preuve de la demande présentée au titre de 'justificatifs des frais non remboursés par la société 3A à Monsieur [F] [S]', de sorte qu'elle sera rejetée.

* *

En suite de ce qui est retenu à ce point 4.2 de l'arrêt, la société Bostik est condamnée à payer à Monsieur [F] [S] la somme de 160 098,88 euros (50 000 + 11 693,59 + 78 405,29 + 20 000) et à Monsieur [M] [S] la somme de 95 042 euros (50 000 + 25 042 euros + 20 000).

5. Sur les intérêts et la capitalisation, les frais irrépétibles et les dépens

Les condamnations retenues ci-dessus porteront intérêts au taux légal; et capitalisation des intérêts par année échue au jour du paiement suivant la prévision de l'article 1154 du code civil dans sa version applicable jusqu'au 1er octobre 2006, au profit du liquidateur, à compter du 2 septembre 2010, date de l'arrêt reconnaissant la responsabilité de la société Bostik dans l'origine du sinistre, et au profit de la société MPH et Messieurs [S] à compter du 14 février 2011, date de leur assignation.

Le société Bostik succombe à l'appel qui confirme pour partie les demandes et infirme le jugement en ce qu'il a écarté celle de la société MPH et de Messieurs [S]. Il est équitable de confirmer le jugement en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens, tandis qu'en cause d'appel, la société Bostik sera condamnée à verser au titre des frais irrépétibles, au liquidateur, 20 000 euros, et à Monsieur [F] et [M] [S], chacun, 10 000 euros, outre les dépens.

PAR CES MOTIFS :

Contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

- limité à 512 258 euros euros, le montant de l'indemnisation des préjudices de la société Applications adhésives de l'Artois,

- rejeté le lien de causalité entre la responsabilité de la société Bostik et la liquidation judiciaire de la société Applications adhésives de l'Artois ;

I. Statuant à nouveau sur le premier chef,

Retient la responsabilité de la société Bostik dans les préjudices de la société Applications adhésives de l'Artois pour les sommes de :

- 381 752,02 euros au titre de la perte des clients Criteria, Crown et La Redoute (outre 89 034 euros reconnus par le tribunal),

- 135 620 euros au titre de la perte de chance sur l'appel d'offres de La Redoute,

- 20 000 euros au titre de la perte de chance de contracter avec la société Prodinger,

- 168 701,36 euros au titre de l'effort prix (au lieu de 14 012 euros reconnus par le tribunal),

- 50 698,44 euros au titre du surcoût des frais bancaires (au lieu de 19 418 euros reconnus par le tribunal),

- 101 861 euros au titre des frais inhérents à la procédure collective ;

Condamne la société Bostik à payer à Maître [L] en qualité de mandataire liquidateur de la société Applications adhésives de l'Artois la somme de 1 337 460,82 euros avec application du taux d'intérêt légal à compter du 2 septembre 2010 et capitalisation des intérêts par année échue au jour du paiement ;

II. Statuant à nouveau sur le second chef,

Déclare la société Bostik responsable de la liquidation de la société Applications adhésives de l'Artois détenue par la société MPH développement ;

Condamne la société Bostik à payer, avec application du taux d'intérêt légal à compter du 14 février 2011 et capitalisation des intérêts par année échue au jour du paiement :

- 497 166 euros à la société MPH développement à titre de dommages et intérêt,

- 160 098,88 euros à Monsieur [F] [S] en réparation de son préjudice personnel ;

- 95 042 euros euros à Monsieur [M] [S] en réparation de son préjudice personnel ;

III. Ajoutant au jugement,

Condamne la société Bostik à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :

- 20 000 euros à Maître [L] en qualité de mandataire liquidateur de la société Applications adhésives de l'Artois,

- 10 000 euros à Monsieur [F] [S],

- 10 000 euros à Monsieur [M] [S] ;

Condamne la société Bostik aux dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur François Leplat, Président et Monsieur Alexandre Gavache, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Président Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 17/00570
Date de la décision : 10/04/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 12, arrêt n°17/00570 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-04-10;17.00570 ?
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