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04/04/2018 | FRANCE | N°16/01673

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 04 avril 2018, 16/01673


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 04 AVRIL 2018



N° RG 16/01673



AFFAIRE :



[Y] [I]





C/

SA COMPAGNIE PARISIENNE DU NETTOYAGE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

Section : Commerce

N° RG : 15/00315




>Copies exécutoires délivrées à :



Me Abdelaziz MIMOUN



Me Guillaume BRET





Copies certifiées conformes délivrées à :



[Y] [I]



SA COMPAGNIE PARISIENNE DU NETTOYAGE







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATRE AVRIL DEUX MI...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 04 AVRIL 2018

N° RG 16/01673

AFFAIRE :

[Y] [I]

C/

SA COMPAGNIE PARISIENNE DU NETTOYAGE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

Section : Commerce

N° RG : 15/00315

Copies exécutoires délivrées à :

Me Abdelaziz MIMOUN

Me Guillaume BRET

Copies certifiées conformes délivrées à :

[Y] [I]

SA COMPAGNIE PARISIENNE DU NETTOYAGE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE AVRIL DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [Y] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Assistée de Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 89

APPELANTE

****************

SA COMPAGNIE PARISIENNE DU NETTOYAGE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Guillaume BRET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0639

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Janvier 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine HERVIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Luc LEBLANC, Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat à durée indéterminée du 1er mars 2011 avec reprise d'ancienneté au 14 mai 2001, Mme [Y] [I] a été engagée par la société Compagnie parisienne du nettoyage (ci-après société CPN) en qualité d'agent de service AS2 de la convention collective nationale des entreprises de propreté applicable à la relation de travail, moyennant une rémunération conduisant à une moyenne de salaire de 1 559,09 euros sur laquelle les paties s'accordent pour une durée mensuelle de travail de 151,67 heures.

Antérieurement au transfert de son contrat de travail au profit de la société CPN, Mme [I] a présenté une maladie professionnelle, contractée le 3 décembre 2010 alors qu'elle était salariée d'une autre société.

Le 1er juin 2011, Mme [I] a été victime d'un accident de travail à la suite duquel plusieurs arrêts de travail se sont succédés jusqu'au 29 février 2012.

Dans le même temps, à compter du 12 décembre 2011, Mme [I] a présenté des certificats médicaux d'arrêts de travail consécutifs à sa maladie professionnelle du 3 décembre 2010 qui se sont succédés jusqu'au 23 mai 2014.

Parallèlement, à compter du 2 mars 2012, Mme [I] a présenté des certificats médicaux de prolongation consécutifs à son accident du travail du 1er juin 2011 prescrivant des soins jusqu'au 31 mai 2012, sans arrêt de travail, mentionnant qu'elle était en arrêt de travail pour autre pathologie en cours, puis des certificats médicaux de rechute (20 juin 2012) et de prolongation des soins jusqu'au 2 septembre 2012 visant l'accident du travail du 1er juin 2011, puis de nouveau de rechute à compter du 26 juillet 2012 et prescrivant des soins jusqu'au 15 décembre 2012.

La première visite médicale de reprise s'est tenue le 11 juin 2014 et le médecin du travail a constaté l'inaptitude définitive de la salariée à son poste de travail, en une seule visite.

Par courrier recommandé du 16 juin 2014, Mme [I] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 23 juin 2014 puis s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement par courrier adressé sous la même forme le 24 juin 2014.

Par courrier du 21 juillet 2014, Mme [I] a contesté le montant du solde de tout compte et revendiqué l'application des dispositions relatives au régime des risques professionnels. Par courrier en réponse du 25 juillet 2014, la société CPN a indiqué à la salariée qu'elle ne lui appliquait pas la législation sur les risques professionnels dès lors que sa maladie professionnelle, à l'origine de l'inaptitude médicale, était survenue alors qu'elle était au service d'un autre employeur.

La société CPN employait au moins 11 salariés au moment de la rupture du contrat de travail.

Contestant son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy le 8 juillet 2015 afin d'obtenir diverses indemnités au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 10 mars 2016 auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, prétentions et moyens antérieurs des parties, le conseil de prud'hommes de Poissy, section commerce, a :

- condamné la société CPN à verser à Mme [Y] [I] la somme de 889,72 euros à titre de complément d'indemnité légale de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2015,

- rappelé l'exécution provisoire de droit,

- fixé la moyenne mensuelle des salaires à la somme de 1 559,09 euros,

- condamné la société CPN à verser à Mme [I] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [I] du surplus de ses demandes,

- condamné la société CPN aux dépens en ce compris les frais d'exécution.

Mme [I] a régulièrement relevé appel du jugement le 14 avril 2016.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 24 janvier 2018, Mme [I] demande à la cour de :

- fixer le salaire moyen à la somme de 1 559,09 euros,

- condamner la société CPN à lui verser les sommes de :

* 30 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 6 887,69 euros ou, subsidiairement, 2 058,87 euros à titre de complément d'indemnité légale de licenciement,

* 3 118,18 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 311,81 euros au titre des congés payés y afférents,

* 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et d'appel,

- condamner la société CPN aux entiers dépens en ce compris les frais d'exécution.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 24 janvier 2018, la société CPN prie la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle a déjà réglé à Mme [I] la somme de 889,72 euros au titre du rappel sur les indemnités légales de licenciement,

- confirmer le jugement,

- débouter Mme [I] de toutes ses demandes plus amples,

- laisser les dépens d'instance à la charge de Mme [I].

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 24 janvier 2018,

Vu la lettre de licenciement,

SUR CE :

Sur l'origine de l'inaptitude médicale :

Mme [I] soutient que son inaptitude a, au moins partiellement, pour origine l'accident du travail qu'elle a subi le 1er juin 2011 et entend le démontrer en s'appuyant sur le fait que, lors de la visite de reprise, le médecin du travail a coché la case 'accident du travail' et non celle de la 'maladie professionnelle'.

L'employeur soutient au contraire que l'origine de l'inaptitude médicale n'est pas l'accident du travail, survenu le 1er juin 2011, mais la maladie professionnelle contractée par la salariée alors qu'elle travaillait pour son précédent employeur, de sorte qu'il n'avait pas à prendre en charge l'inaptitude d'origine professionnelle.

Il appartient à la salariée d'établir la preuve du lien de causalité entre l'inaptitude médicalement constatée et l'accident du travail du 1er juin 2011. Or, le simple fait que le médecin du travail a coché la case accident du travail et non celle de la maladie professionnelle sur le certificat d'inaptitude ne suffit pas à rapporter cette preuve dès lors que :

- Les arrêts de travail présentés par Mme [I] consécutivement à son accident du travail du 1er juin 2011 (hernie étranglée sur le lieu du travail ayant nécessité une opération d'urgence) se sont succédés jusqu'au 29 février 2012 seulement, soit plus de deux ans avant la constatation de l'inaptitude,

- À partir de cette date, Mme [I] n'a plus présenté d'arrêt de travail consécutif à cet accident du travail. En effet, les différents certificats médicaux qui se sont succédés en faisant référence à cet accident du travail ont prescrit des soins sans arrêt de travail jusqu'au 15 octobre 2012 :

* soit au titre de la prolongation (certificats médicaux du 2 mars 2012 et du 30 mai 2012),

* soit au titre de la rechute (certificats médicaux du 20 juin 2012 et du 26 juillet 2012),

- La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) a notifié le 29 juin 2012 à l'employeur qu'elle refusait de prendre en charge le caractère professionnel (consécutif à l'accident de travail du 1er juin 2011) de la rechute déclarée par la salariée le 20 juin 2012. Il en a été de même concernant la rechute déclarée le 26 juillet 2012 (notification du 27 septembre 2012),

- Les arrêts de travail que Mme [I] a présentés à compter du 12 décembre 2011 jusqu'au 23 mai 2014 faisaient tous référence à sa maladie professionnelle, constatée pour la première fois le 3 décembre 2010,

- Les indemnités perçues par la salariée au titre de l'accident du travail du 1er juin 2011 ont cessé d'être versées à partir du 15 décembre 2011.

La cour considère, en conséquence, que l'inaptitude médicale de Mme [I] n'a pas pour origine, même partielle, l'accident du travail subi le 1er juin 2011, dès lors que les derniers éléments médicaux que la salariée présente relativement à cet accident remontent au 15 octobre 2012, plus de 18 mois avant la constatation de l'inaptitude médicale mais bien la maladie professionnelle constatée le 3 décembre 2010 pour laquelle elle a été arrêtée jusqu'au 23 mai 2014.

Sur le régime applicable au licenciement :

C'est donc à bon droit que la société CPN invoque, sans être contredite par Mme [I] qui ne présente aucune observation sur ce point, les dispositions de l'article L. 1226-6 du code du travail selon lesquelles, 'les dispositions de la présente section [ accident du travail ou maladie professionnelle ] ne sont pas applicables aux rapports entre un employeur et son salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, survenu ou contractée au service d'un autre employeur'.

La cour jugera donc en conséquence que le licenciement de Mme [I] par la société CPN ne relevait pas du régime des risques professionnels.

Sur le bien-fondé du licenciement :

Mme [I], se fondant sur l'application de la législation sur les risques professionnels, invoque l'absence de consultation des délégués du personnel et l'absence de notification par écrit des motifs qui s'opposaient à son reclassement pour soutenir que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse. Cependant, la cour n'a pas retenu que son licenciement relevait du régime applicable aux risques professionnels de sorte que les moyens soulevés à ce titre ne seront pas retenus.

A titre subsidiaire, Mme [I] invoque le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement. La société CPN s'oppose à sa demande en faisant valoir qu'elle ne pouvait proposer à la salariée que des postes d'agent d'entretien pour lesquels elle était inapte et qu'elle n'était pas qualifiée sur les quelques postes administratifs ou d'encadrement de chantier dont elle disposait et qui n'étaient pas vacants, ce dont elle justifie en produisant :

- l'attestation de son expert-comptable démontrant que la quasi-totalité des emplois en son sein sont des emplois d'agents d'entretien pour lesquels Mme [I] était inapte et sans aucune capacité résiduelle, ou des emplois de cadre et de chefs d'équipe pour lesquels Mme [I] n'était pas qualifiée sans le bénéfice d'une formation initiale que l'employeur n'a pas à assurer dans le cadre du reclassement,

- l'édition de la liste du personnel au 22 décembre 2015 et une édition du registre du personnel à jour au 21 octobre 2015 démontrant l'absence de postes vacants suceptibles d'être prorposé à Mme [I] au titre du reclassement.

La cour considère en conséquence que l'employeur démontre avoir respecté son obligation de reclassement de sorte que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les conséquences financières du licenciement :

La cour ayant admis que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, Mme [I] sera déboutée de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le jugement étant confirmé de ce chef.

S'agissant de l'indemnité compensatrice de préavis, la cour n'ayant pas retenu que le licenciement relevait du régime applicable aux risques professionnels, le préavis n'est pas dû en application de l'article L. 1226'4 du code du travail. La demande présentée de ce chef sera donc rejetée.

S'agissant de l'indemnité légale de licenciement, celle-ci s'évalue en application de l'article L. 1234-9 du code du travail sur la base d'un salaire de référence de 1 559,09 euros sur lequel les parties s'accordent et d'une ancienneté de 11 ans, deux mois et 15 jours (préavis inclus en application de l'article L. 1226-4 du code du travail, non prise en compte de la suspension du contrat de travail postérieure au 31 mai 2012) à la somme de 3 746,04 euros de sorte que déduction faite de la somme de 2 769,94 euros versée par l'employeur, celui-ci sera condamné à payer à la salariée la somme de 976,10 euros. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les autres demandes :

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les intérêts au taux légal et les dépens et infirmé en ce qu'il a statué sur l'article 700 du code de procédure civile. En cause d'appel, les dépens seront supportés par la société CPN qui devra en outre indemniser Mme [I] des frais exposés par elle, tant en première instance qu'en cause d'appel et non compris dans les dépens, à hauteur de la somme globale de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par mise à disposition au greffe et contradictoirement,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a statué sur l'indemnité légale de licenciement et l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société Compagnie parisienne du nettoyage à payer à Mme [Y] [I] la somme de 976,10 euros au titre du solde de l'indemnité légale de licenciement,

Déboute Mme [Y] [I] du surplus de ses demandes,

Condamne la société Compagnie parisienne du nettoyage à payer à Mme [Y] [I] la somme globale de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 au titre des frais exposés par elle tant en première instance qu'en cause d'appel,

Condamne la société Compagnie parisienne du nettoyage aux dépens d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Luc LEBLANC, président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 16/01673
Date de la décision : 04/04/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°16/01673 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-04-04;16.01673 ?
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