COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 70D
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 MARS 2018
N° RG 16/07141
AFFAIRE :
[L], [V] [S] dit [N] [X]
C/
[C] [I]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Juin 2016 par le Tribunal d'Instance de RAMBOUILLET
N° RG : 1114000185
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 27/03/18
à :
Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA
Me Pascale REGRETTIER-GERMAIN de la SCP HADENGUE & ASSOCIES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT MARS DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [L], [V] [S] dit [N] [X]
né le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 619 - N° du dossier 20160369
Assisté de Me Marcel ALORO de la SELARL ALORO TESSIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0613
APPELANT
****************
Monsieur [C] [I]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Madame [A] [R]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentés par Me Pascale REGRETTIER-GERMAIN de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 - N° du dossier 1600951
Assistés de Me BARADEZ, Plaidant, Avocat au Barreau de L'ESSONNE,
INTIMES ayan
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Février 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Delphine BONNET, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Serge PORTELLI, Président,
Madame Isabelle BROGLY, Président,
Madame Delphine BONNET, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Catherine SPECHT,
FAITS ET PROCÉDURE,
M. [I] et Mme [R], propriétaires de parcelles sises à Chevreuse, contiguës de parcelles appartenant à M. [S] dit [G], ont saisi le tribunal d'instance de Rambouillet d'une demande de bornage. Une expertise aux fins de bornage a été ordonnée par jugement du 28 octobre 2014. L'expert a déposé son rapport en avril 2015.
M. [I] et Mme [R] ont demandé l'homologation du rapport ; M. [S] dit [N] s'y est opposé.
Par jugement contradictoire du 28 juin 2016, le tribunal d'instance de Rambouillet a :
- fixé la limite séparative des propriétés de M. [S] dit [N] d'une part et de M. [I] et Mme [R] d'autre part, sises à [Localité 2] et cadastrées respectivement section A n° [Cadastre 1]et [Cadastre 2] d'une part et section A n° [Cadastre 3] et [Cadastre 4] d'autre part, conformément au plan établi par M. [V], expert, en annexe 3 de son rapport déposé le 24 avril 2015 dont l'original restera annexé à la décision,
- invité si besoin, la partie la plus diligente à faire publier la décision au bureau des hypothèques de la situation des immeubles,
- ordonné en conséquence que des bornes soient implantées à frais commun par les soins de l'expert sur les lignes séparatives des propriétés des parties, telles que ces lignes sont figurées au plan contenu dans le rapport et aux endroits indiqués par les points A, B, C, D, E, F, G, H, I, J, K entre les parties cadastrées,
- dit que l'expert dressera de cette opération un procès-verbal qui sera déposé au secrétariat-greffe de ce tribunal,
- débouté les parties de leurs demandes respectives formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- fait masse des dépens, y compris les frais d'expertise et condamné chaque partie à les supporter pour moitié.
Par déclaration du 3 octobre 2016, M. [S] dit [G] a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions transmises le 13 décembre 2016, il demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a reconnu sa compétence,
- infirmer le jugement en toutes ses autres dispositions et statuant à nouveau,
- dire qu'il a acquis la propriété du terrain complémentaire de 2.000 m²,
- désigner un géomètre à l'effet de fixer la limite séparative des propriétés [S] Dit [G] d'une part et [I]/[R] d'autre part et effectuer le bornage,
- dire que les frais d'expertise du géomètre désigné sera à la charge partagée des parties,
- condamner M. [I] et Mme [R] aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Patricia Minault agissant par Maître Minault avocat et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Après avoir fait un rappel des différentes procédures précédemment intervenues concernant l'acquisition de son bien immobilier situé à [Localité 2], M. [S] dit [N] critique la décision entreprise qui a retenu la limite séparative fixée par l'expert alors que celui-ci a émis des suppositions sur la limite de sa propriété considérant ne pas avoir de pièces ou d'éléments qui fassent état d'une acquisition complémentaire.
Il fait valoir que M. [I] et Mme [R] n'ont pas rapporté la preuve d'un titre de propriété indiscutable délimitant sans contestation possible les contours de leur propre propriété. Il rappelle que l'ensemble du domaine était la propriété de M. [Y] et qu'un accord était intervenu entre ce dernier et lui-même pour étendre la contenance de la propriété vendue de 2.000 m².
Il estime qu'il s'agit là d'un élément déterminant pour apprécier la limite de propriété et ajoute que les bornes qui ont été observées sur sa propriété correspondent bien à la surface qu'il revendique légitimement.
Il se prévaut des dispositions de la prescription acquisitive abrégée de l'article 2272 du code civil et estime remplir les conditions de la possession de bonne foi, conformément aux dispositions de l'article 2261 du code civil. Il indique qu'il se croyait sans nul doute possible propriétaire et disposait d'un juste titre émanant du véritable propriétaire, M. [Y].
Il prétend avoir accompli, régulièrement et sans interruption, des actes de jouissance, d'usage, d'exploitation, d'entretien, de conservation, d'aménagement de son bien, comme l'aurait fait un propriétaire, selon l'usage normal de ce bien compte tenu de sa nature et de sa destination.
Aux termes de leurs conclusions transmises le 16 février 2017, M. [I] et Mme [R] demandent à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
y ajoutant :
- condamner M. [S] dit [G] à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [S] dit [G] aux entiers dépens, qui comprendront les frais d'expertise.
M. [I] et Mme [R] font valoir que l'expert a parfaitement rempli sa mission et que la délimitation qu'il propose ne fait l'objet d'aucune critique sérieuse de la part de l'appelant.
Sur l'usucapion, ils estiment que c'est à juste titre que le tribunal a constaté que M. [S] dit [N] ne réunissait pas les conditions nécessaires à l'acquisition de la propriété par usucapion puisque :
- ne disposant d'aucun titre sur la parcelle complémentaire de 2 000 m², M. [S] dit [N] ne peut en avoir acquis la propriété au visa des dispositions de l'article 2272 du code civil.
- il n'est pas davantage en mesure de démontrer qu'il est possesseur de bonne foi,
- il ne rapporte pas la preuve d'une possession continue et non interrompue, paisible et non équivoque.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 25 janvier 2018.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DECISION
La propriété de M. [S] dit [G] résulte d'un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 octobre 1999 valant vente parfaite entre M. [Y] et M. [S] dit [G] du bien immobilier sis "[Adresse 3] (...) d'un seul ensemble de 45 ares 00 centiare cadastré section A lieu dit '[Adresse 4]' comprenant les parcelles numéros :
- [Cadastre 5] pour 5 ares et 25 centiares
- [Cadastre 6] pour 6 ares et 85 centiares
- 2081 pour 26 ares et 90 centiares, provenant de la division de parcelle cadastrée A n°[Cadastre 7] dont le surplus cadastré A n° [Cadastre 8] reste la propriété du vendeur,
- [Cadastre 2] pour 6 ares, provenant de la division de parcelle cadastrée A n°[Cadastre 9] dont le surplus cadastre A n° [Cadastre 4] reste la propriété du vendeur.
De leur côté, M. [I] et Mme [R] ont acquis, par acte notarié du 5 février 2014, la propriété d'un ensemble de parcelles d'une surface totale de 91 hectares, 23 ares et 73 centiares comprenant la parcelle [Cadastre 4] et les parcelles [Cadastre 10], [Cadastre 3] et [Cadastre 11] provenant de la division de la parcelle cadastrée A n° [Cadastre 8], limitrophes de celles de M. [S] dit [N].
Le géomètre-expert désigné par le tribunal s'est livré à une analyse minutieuse des documents qui lui étaient soumis à savoir le titre de propriété notarié des consorts [I]/[R] du 5 février 2014, l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 octobre 1999, le plan de division de la propriété de M. [Y] par la SCP Nicolas, géomètre-expert à Chevreuse, et le cadastre.
Il a proposé une limite séparative entre les propriétés en tenant compte des contenances inscrites dans les actes à savoir pour la propriété de M. [S] dit [G] 4 500 m².
M. [S] dit [N] revendique la propriété d'une parcelle supplémentaire de 2 000 m². C'est l'objet du litige.
L'article 2261 du code civil prévoit que pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.
Selon l'article 2272 du code civil, le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.
Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans.
Le juste titre est celui qui, considéré en soi, serait de nature à transférer la propriété à la partie qui invoque la prescription.
M. [S] dit [G] avait signé avec M. [Y] le 20 septembre 1995 un compromis de vente portant sur le bien immobilier "[Adresse 3] d'une surface d'environ 4500 m² à savoir les parcelles A [Cadastre 7], A [Cadastre 9], A [Cadastre 6] A [Cadastre 5].
Il se prévaut d'un écrit de M. [Y] adressé le 25 septembre 1995 à l'agence immobilière chargée de la vente ainsi rédigé :
« Je vous confirme mon accord téléphonique pour [S] Investissements (aux droits duquel se trouve M. [S] dit [N]).
J'avais refusé « sa demande d'agrandissement pour avoir un terrain rectangulaire jusqu'aux arbres en limite de culture ».
D'après Vallé, cette parcelle représente environ 2.000 mètres, d'ailleurs indispensables puisqu'elle reçoit l'ensemble, fosse septique, canalisations et épandage. Le prix a été fixé à 50.000 francs. Vous remettrez cette lettre d'accord à [S] Investissements que contre l'enveloppe de 50.000 francs.
Faites le nécessaire auprès d'Exbrayat (notaire)et prévenir le Géomètre. ».
M. [S] dit [G] produit également une lettre que lui a adressée l'agence immobilière le 27 septembre 1995 qui indique que le terrain vendu par M. [Y] a une contenance de 6 000 m² environ.
Or, la cour relève qu'aux termes de ses conclusions devant la cour d'appel afin d'obtenir un arrêt valant vente, en raison du défaut de réitération par acte authentique de la vente intervenue le 20 septembre 1995 entre lui et M. [Y], la demande de M. [S] dit [N] portait sur un ensemble de parcelles pour une contenance totale de 4 500 m² correspond à l'assiette des biens définie dans le compromis de vente et ne portait nullement sur les 2 000 m² supplémentaires dont il était question dans l'écrit émanant de M. [Y].
M. [S] dit [N] qui ne s'est nullement prévalu de cet écrit dans l'instance ayant abouti à l'arrêt de la cour d'appel valant vente, ne peut aujourd'hui s'en prévaloir de bonne foi comme un juste titre au sens de l'article 2272 du code civil. Il ne peut donc bénéficier de la prescription abrégée de dix ans.
Il s'ensuit que, comme l'a justement retenu le tribunal, faute de justifier d'une possession de trente ans, il ne peut avoir acquis la parcelle litigieuse par prescription.
C'est donc à bon droit que le tribunal a fixé la limite séparative des propriétés de M. [S] dit [N] et de M. [I] et Mme [R] conformément au plan établi par l'expert.
La décision entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions et M. [S] dit [N] débouté de sa demande tendant à dire qu'il a acquis la propriété du terrain complémentaire de 2.000 m² ainsi que de sa demande de désignation d'un nouvel expert.
3 ) sur les demandes accessoires
Le jugement étant confirmé sur le fond, il le sera également en ce qui concerne les dépens en ce compris les frais d'expertise et le rejet des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
S'agissant de la procédure d'appel, M. [S] dit [N], partie perdante, en supportera les dépens. Et il devra régler à M. [I] et Mme [R] une indemnité de
2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, et contradictoirement,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute M. [S] dit [N] de toutes ses demandes,
Condamne M. [S] dit [G] aux dépens de la procédure d'appel,
Condamne M. [S] dit [G] à payer à M. [I] et Mme [R] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Mme SPECHT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,