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09/02/2018 | FRANCE | N°16/085411

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1a, 09 février 2018, 16/085411


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 34C

1ère chambre
1ère section

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 09 FEVRIER 2018

No RG 16/08541

AFFAIRE :

Association FRONT NATIONAL
C/
Y... I...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Novembre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
POLE CIVIL
No chambre : 1
No RG : 15/12885

Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
Me Claire RICARD 

SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

PROCUREUR GENERAL

REP

UBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Association FR...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 34C

1ère chambre
1ère section

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 09 FEVRIER 2018

No RG 16/08541

AFFAIRE :

Association FRONT NATIONAL
C/
Y... I...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Novembre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
POLE CIVIL
No chambre : 1
No RG : 15/12885

Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
Me Claire RICARD 

SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

PROCUREUR GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Association FRONT NATIONAL, représentée par sa présidente Madame K... I...
[...]                           

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - No du dossier 2016379 - Représentant : Me Georges SAUVEUR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE
****************

Monsieur Y... I...
né le [...]        à LA TRINITE SUR MER (56470)
de nationalité Française
[...]                                    

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - No du dossier 1656885 - Représentant : Me Frédéric JOACHIM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIME
****************

LE PROCUREUR GENERAL
COUR D'APPEL DE VERSAILLES
[...]                       

Comparant en la personne de Monsieur Jacques CHOLET, avocat général

PARTIE INTERVENANTE
****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 décembre 2017, Monsieur Alain PALAU, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Alain PALAU, président,
Madame Anne LELIEVRE, conseiller,
Madame Nathalie LAUER, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE Vu le jugement en date du 17 novembre 2016 du tribunal de grande instance de Nanterre qui a statué ainsi :

- déboute M. Y... I... de sa demande de nullité de la décision d'exclusion prise par le bureau exécutif réuni en formation disciplinaire à son encontre le 20 août 2015, notifiée le 28 août 2015,

- rejette sa demande de réintégration parmi les membres de l'association Front national,

- le déboute de sa demande d'enquête civile,

- constate que l'exclusion du Front national de M. Y... I... en tant que membre n'a pas d'effet sur la qualité de président d'honneur dont il demeure investi,

- en conséquence, dit que M. Y... I... devra être convoqué en qualité de membre de droit de toutes les instances énumérées à l'article 11 bis alinéa 2 des statuts et pourra participer à toutes ces instances, sous astreinte de 2 000 euros par infraction constatée passée le délai de 8 jours de la signification de la présente décision,

- se réserve la liquidation de l'astreinte,

- condamne l'association Front national à payer à M. Y... I... la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts,

- rejette le surplus des demandes,

- condamne l'association Front national à payer à M. Y... I... une indemnité de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne l'association Front national aux dépens qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonne l'exécution provisoire.

Vu la déclaration d'appel de l'association Front national en date du 2 décembre 2016.

Vu les dernières conclusions en date du 25 octobre 2017 de l'association Front national qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté « M. Y... I... de sa demande de nullité de la décision d'exclusion prise par le bureau exécutif réuni en formation disciplinaire à son encontre le 20 août 2015, notifiée le 28 août 2015 » et rejeté « sa demande de réintégration parmi les membres de l'association Front national »,

En conséquence,
- infirmer le jugement en ce qu'il :
* « dit que M. Y... I... devra être convoqué en qualité de membre de droit de toutes les instances énumérées à l'article 11 bis alinéa 2 des statuts et pourra participer à toutes ces instances, sous astreinte de 2 000 euros par infraction constatée passé le délai de 8 jours de la signification de la présente décision, Se réserve la liquidation de l'astreinte,

* condamne l'association Front national à payer à M. Y... I... une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts,

* condamne l'association Front national à payer à M. Y... I... une indemnité de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamne l'association Front national aux dépens qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile »,

- constater que le président d'honneur du Front national est nécessairement membre du Front national,

- constater que le membre de droit de toutes les instances énumérées à l'article 11 bis alinéa 2 des statuts du Front national, est nécessairement membre du Front national,

En conséquence,
- dire et juger que l'exclusion de M. Y... I... du Front national a nécessairement pour conséquence la perte de la qualité de président d'honneur et son exclusion de toutes les instances énumérées à l'article 11 bis alinéa 2 des statuts,

- condamner M. Y... I... à payer à l'association Front national la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions en date du 16 octobre 2017 de M. Y... I... qui demande à la cour de :

- infirmer pro parte le jugement, sauf en ce qu'il a constaté « que l'exclusion du Front national de M. Y... I... en tant que membre n'a pas d'effet sur la qualité de président d'honneur dont il demeure investi »,

Statuant à nouveau :
- déclarer nulle et de nul effet la décision dite « du Bureau exécutif du Front national » publiquement annoncée le 20 août 2015, portant la date manuscrite du 28 août 2015 et notifiée ce même jour à M. Y... I... , comme entachée d'irrégularités de forme et de fond, ayant été prise par un organe incompétent à prononcer dans de telles conditions une telle sanction visant en réalité les droits et devoirs attachés à la présidence d'honneur, au mépris du principe d'impartialité qui s'impose à tout juge, fût-il disciplinaire, du principe de légalité et de la règle non bis in idem et comme constituant une décision prise d'avance et prononcée avant d'être motivée,

- dire et juger en tant que de besoin que la sanction prononcée le 20 août 2015, portant la date du 28 août 2015 et notifiée ce même 28 août, n'est pas justifiée par les faits qui étaient l'objet de la convocation du 4 août 2015 délivrée par huissier de justice à M. Y... I... et la déclarer nulle et de nul effet,

- si la cour devait encore douter de l'irrégularité de la délibération des membres de la « formation » qui s'est réunie le 20 août 2015, ordonner une enquête civile sur le fondement des articles 204 et suivants du code de procédure civile,

- entendre dans ce cadre tous les membres du bureau exécutif qui ont composé la « formation » réunie le 20 août 2015 au sujet des conditions dans lesquelles a été prise le 20 août au soir, puis rédigée et motivée, cette décision, ainsi que sur le lien de subordination juridique qui est susceptible de les unir au Front national en enjoignant au Front national de produire les contrats de travail ou tous contrats pouvant les unir aux membres de la formation qui s'est réunie le 20 août 2015,

- ordonner la réintégration de M. Y... I... parmi les membres de l'association loi 1901 Front national,

- confirmer cependant ledit jugement en ce qu'il a constaté que l'exclusion prononcée ne saurait avoir pour effet de remettre en question la qualité de président d'honneur dont est investi M. Y... I... et de le priver des droits et des devoirs statutaires attachés à cette qualité,

- constater pour ce faire qu'aucune disposition des statuts du Front national, fût-ce la combinaison de divers articles, n'établit que le président d'honneur doive nécessairement être membre du Front national, au sens d'adhérent au mouvement,

- constater également que, s'agissant de deux qualités qui ne sont pas liées entre elles, tenant leur existence de deux sources de droit distinctes - l'adhésion matérielle au contrat d'association pour la première et le vote souverain de l'assemblée des adhérents pour la seconde - la perte quelle qu'en soit la raison de la qualité de membre du Front national est sans incidence sur la qualité de titulaire de la présidence d'honneur,

- dire enfin en tout état de cause et de façon surabondante que la cour d'appel n'a pas compétence pour remettre en question le vote des adhérents du Front national exprimé lors de l'assemblée générale extraordinaire de Tours le 15 janvier 2011 qui, après avoir ajouté aux statuts un article 11 bis instituant une présidence d'honneur, a décidé souverainement de confier celle-ci à Y... I... , et ce à l'évidence de façon viagère,

- faire en conséquence de ce qui précède interdiction à tous dirigeants et employés du Front National d'empêcher le libre exercice des droits attachés en vertu des statuts à la qualité de président d'honneur, sous astreinte de 50 000 euros par infraction constatée, l'infraction étant constituée par le défaut de convocation ou le refus, quelles qu'en soient l'expression ou la manifestation, de voir M. I... participer à toutes les instances dont il est membre en qualité de président d'honneur, et par le défaut de rétablissement dans tous les droits dont bénéficiait la présidence d'honneur avant la suspension décidée le 4 mai 2015,

- dire notamment en tant que de besoin que Monsieur Y... I... pourra de nouveau siéger à toutes les instances visées à l'article 11 bis des statuts du Front national et bénéficier de tous les frais et services inhérents à la fonction dans les mêmes conditions qu'avant la décision disciplinaire du 4 mai 2015 déclarée nulle et de nul effet par jugement du 2 juillet 2016 aujourd'hui définitif du tribunal de grande instance de Nanterre,

- désigner tel huissier de justice aux fins de venir constater, à première demande de Monsieur Y... I... , toute infraction à cette interdiction et fixer le montant de la provision à verser à cet huissier à valoir sur sa rémunération,

- se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte, par application de l'article L.131-3 du code des procédures civiles d'exécution,

- constatant l'inexécution du jugement rendu par le tribunal de céans le 2 juillet 2015 pourtant assorti de l'exécution provisoire, l'inexécution de la décision dont appel, le rejet de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire qui y est attachée, et que, depuis le 4 mai 2015, le Front national s'est livré à un grand nombre de voies de fait envers le président d'honneur du mouvement, le condamner à verser à M. Y... I... , à titre de réparation du très grave préjudice ainsi porté à la fonction de président d'honneur telle qu'elle a été définie par l'article 11 bis des statuts et confiée par le congrès à sa personne, préjudice également porté à sa dignité, à son honneur, à sa notoriété et à son action politique, la somme de 2 000 000 euros,

- condamner le Front national à verser à M. Y... I... la somme de 30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Front national aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction au profit de Maître Martine Dupuis, du cabinet Lexavoué Paris Versailles, avocat aux offres de droit, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 2 novembre 2017.

**************************

Par courrier du 4 août 2015 de la présidente de l'association Front national, M. Y... I... a été invité à se présenter le 20 août 2015 devant le bureau exécutif statuant en formation disciplinaire sur le fondement des articles 6, 8 (60) et 19 (3ème alinéa) des statuts.

Cette convocation énumère les griefs dont l'association considère qu'ils sont susceptibles « de constituer des fautes graves, sanctionnées par les statuts et les principes du FN ».

Il est ainsi reproché à M. I... :
- d'avoir tenu publiquement entre le 2 avril 2015 et le 22 juillet 2015, auprès de différents médias ou qui ont été reproduits par ceux-ci, différents propos retranscrits dans la convocation :
* sur RMC-BFMTV le 2 avril,
* dans Rivarol le 9 avril,
* sur RTL les 9 et 10 avril et le 12 mai,
* sur Europe 1 le 5 mai,
* sur BFM le 13 mai,
* sur I-télé le 2 juillet,
* à l'AFP le 20 juillet,
* sur France bleu Provence le 20 juillet,
* au Parisien le 22 juillet,

- d'avoir publié un communiqué le 29 juillet 2015 et dans un journal de bord diffusé par le réseau Youtube le 3 juin 2015 des écrits reproduits dans la convocation,

- d'avoir fait une intrusion sur la scène, place de 1'Opéra le 1er mai 2015.

M. I... s'est présenté le 20 août devant le bureau exécutif statuant en formation disciplinaire assisté de son conseil.

Il a notamment, par conclusions :
- sollicité la publicité des débats,

- soulevé l'incompétence du bureau exécutif pour prononcer des sanctions disciplinaires envers le président d'honneur,

- sollicité la récusation des membres du bureau exécutif,

- soutenu l'impossibilité de le juger pour les propos tenus sur RMC le 2 avril 2015 et ceux publiés dans Rivarol le 9 avril 2015, déjà poursuivis lors de la précédente instance disciplinaire, en vertu de la règle non bis in idem,

- estimé que les faits antérieurs au 4 mai 2015 étaient "purgés" par la précédente procédure disciplinaire,

- contesté le caractère fautif des faits postérieurs en arguant de la liberté de ton et de paroles qui lui sont propres, estimant n'avoir fait que répondre à l'hostilité manifestée à son encontre et invoqué une provocation de nature à constituer une excuse absolutoire.

Le Front national a publié dans la soirée du 20 août 2015 un communiqué de presse dans les termes suivants :
« A l'issue de la réunion qui s'est tenue ce jour, le bureau exécutif du Front national, réuni en formation disciplinaire, a délibéré et a décidé, à la majorité requise, l'exclusion de M. Y... I... comme membre du Front national. La décision complète et motivée sera notifiée prochainement à M. I... ».

Le 25 août 2015, M. I... a fait sommation par voie d'huissier de justice au Front national de lui remettre la décision motivée.

La décision d'exclusion motivée, datée du 28 août 2015, et signée du président de la formation, M. Z..., a été signifiée par huissier de justice le même jour à M. I... .

Son dispositif est rédigé ainsi :
« Vu les statuts du Front national,
Le bureau exécutif du Front national réuni en formation disciplinaire décide de
- Avant dire droit (lors d'une suspension de séance le 20 août 2015), le Bureau
Exécutif du Front National réuni en formation disciplinaire a décidé à la majorité absolue de 5 voix sur 6 de rejeter la demande de publicité de Monsieur Y... I... ,

- Rejeter la demande sur l'incompétence du bureau exécutif à la majorité absolue de 4 voix sur 5,

- Déclarer irrecevables et en tout cas mal fondées les demandes de récusation, à l'unanimité de 5 voix sur 5,

- Rejeter la demande fondée sur la règle « non bis in idem », à la majorité absolue de 4 voix sur 5,

- Rejeter la demande fondée sur le principe de légalité à la majorité absolue de 4 voix sur 5,

- Exclure Monsieur Y... I... du Front national, à la majorité absolue de 4 voix sur 5 ».

Aux termes de l'examen de chacun des griefs, la décision énonce :
« Sur les 15 griefs adressés à Monsieur Y... I... , tous sont considérés comme des fautes graves. En tout état de cause, la multiplication des fautes précitées caractérise le motif grave justifiant une décision d'exclusion ».

Par jugement du 2 juillet 2015, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Nanterre avait déclaré nulle une délibération du bureau exécutif de l'association réuni le 4 mai 2015 en formation disciplinaire.

Par jugement du 8 juillet 2015, le tribunal de grande instance de Nanterre statuant en référé avait ordonné la suspension de l'assemblée générale du Front national organisée par voie postale.

Par ordonnance du 18 septembre 2015, le juge des requêtes du tribunal de grande instance de Nanterre, saisi par M. I... , a commis une société d'huissiers de justice, aux fins de se faire remettre par le Front national l'intégralité du dossier interne de la procédure disciplinaire, en prendre connaissance et en faire copier tous les éléments et notamment le procès-verbal de la réunion du bureau exécutif, ou toute note manuscrite en tenant lieu, ainsi que l'original de la décision d'exclusion datée du 28 août 2015.

L'huissier de justice a dressé un procès-verbal le 25 septembre 2015 constatant le refus de lui communiquer sur le champ les pièces sollicitées.

Le Front national, par la suite, a fait parvenir à l'huissier de justice les notes manuscrites de M. A... prises lors de la séance du 20 août.

Par acte du 14 octobre 2015, M. I... a fait assigner l'association Front national devant le tribunal de grande instance de Nanterre qui a prononcé le jugement déféré.

Aux termes de ses écritures précitées, l'association Front national rappelle qu'aux termes de l'article 4 de la Constitution du 4 octobre 1958, les partis politiques « se forment et exercent leur action librement ».

En ce qui concerne la demande de nullité de la décision d'exclusion, elle relève qu'aucune plainte n'a été déposée et affirme que la décision est régulière.

Sur la demande de M. I... de participer au délibéré, elle estime que, compte tenu de l'objet de la procédure, il était impossible que M. I... puisse participer au délibéré tant sur sa demande de publicité et que sur ses autres demandes et qualifie sa demande de fantaisiste.

Sur la demande de publicité des débats, elle déclare que, lorsque la Cour européenne des droits de l'homme et le Conseil d'Etat ont appliqué l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (et donc la publicité des débats) aux contentieux disciplinaires, ils ont statué dans le cadre de contentieux ordinaux dans lesquels les personnes mises en cause encourraient des conséquences professionnelles à la suite de manquements déontologiques.

Elle relève que le débat, au sein de la formation disciplinaire du bureau exécutif du 20 août 2015, n'a porté ni sur le droit de propriété, ni sur le droit d'exploiter une entreprise, ni sur le droit d'exercer une profession et souligne que cette formation disciplinaire n'est pas un tribunal au sens de l'article 6 de la Convention.

Elle ajoute que le Front national n'est ni un ordre professionnel ni placé sous la tutelle de l'Etat.

Enfin, elle se prévaut d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 21 novembre 2006, concernant une association ayant exclu l'un de ses membres, qui a jugé cet article inapplicable « aux organes des groupements examinant la violation d'engagements contractuels ».

Elle rappelle qu'il est reproché à l'intimé des fautes graves sanctionnées par les statuts qui constituent un contrat entre les membres d'une association et cite l'article 1 de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations.

Elle en conclut que l'article 6 de la Convention n'est pas applicable à la formation disciplinaire du bureau exécutif du 20 août 2015 du Front national qui a le droit de se réunir à huis clos.

Elle observe que, dans le passé, toutes les formations statuant en matière disciplinaire ont siégé à huis clos sans que l'intimé ne le conteste.

Sur l'incompétence du bureau exécutif, elle relève que celui-ci a statué sur le cas de M. I... en sa qualité de « membre » de l'association et ajoute que les statuts n'indiquent pas que le président d'honneur (qui n'est pas un organe associatif) relèverait d'une autre formation disciplinaire.

Sur les demandes de récusation, elle fait valoir que les dispositions du code de procédure civile et du code de procédure pénale ne s'appliquent pas à une procédure disciplinaire au sein d'une association, qu'aucune stipulation statutaire ne prévoit la faculté de récusation et qu'elles auraient dû être présentées aux personnes physiques visées et avant celles relatives à la publicité et à la compétence.

Elle affirme qu'elles étaient mal fondées aux motifs qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les cas de Mme I... et de M. B... qui n'ont pas siégé, que M. C... n'est ni parent, ni allié, ni héritier réservataire de M. I... , qu'aucun membre de la formation n'avait un « intérêt personnel » à la contestation et que M. J...          n'a pas « conseillé » M. I... dans une ou des affaires disciplinaires, son travail d'avocat auprès de celui-ci étant totalement indépendant de cette procédure, aucun élément relatif au secret professionnel ne pouvant être utilisé et sa qualité d'avocat de M. I... ne suffisant pas à supposer que celui-ci ne pouvait être jugé avec impartialité dans le cadre du contentieux disciplinaire.

Elle ajoute qu'aucun membre de la formation disciplinaire n'était « en situation de dépendance » vis-à-vis d'une des parties, qu'il n'y avait pas « d'inimitié notoire » envers la personne de M. I... et que celui-ci n'a produit aucune pièce au soutien de son moyen de récusations.

Elle estime non transposable l'arrêt du Conseil d'Etat du 27 octobre 1999, le retrait d'une licence de dirigeant de club sportif interdisant à la personne concernée d'exercer une activité ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Sur la règle « Non bis in idem », elle considère que la décision du bureau exécutif du 4 mai 2015 ayant prononcé une sanction disciplinaire « n'avait pas à être prise en considération ».

Sur la règle « nullus crimen, nulla poena, sine lege », elle fait valoir qu'il s'agit d'une règle de droit pénal qui ne s'applique donc pas au bureau exécutif du 20 août 2015.

Elle soutient également que le pouvoir des associations de sanctionner elles-mêmes les manquements de leurs membres aux engagements souscrits par eux est admis, que tout fait quelconque peut être justiciable d'une sanction disciplinaire, l'instance disciplinaire devant constater s'il est contraire aux règles et les tribunaux n'ayant pas à examiner le bien-fondé des griefs invoqués par l'association contre ce membre mais seulement leur correspondance à un motif de sanction prévu par les statuts.

Elle estime que tel est le cas, l'exclusion devant être prononcée pour motif grave et ce caractère de gravité ayant fait l'objet d'un débat contradictoire devant la formation disciplinaire du bureau exécutif du 20 août 2015.

Concernant le fond, elle considère que le principe de libre administration des associations leur permet de juger du caractère fautif des comportements et propos de ses membres.

Elle rappelle que M. I... était convoqué pour :

- avoir tenu publiquement le 2 avril 2015 sur RMC-BFMTV, les propos suivants :
« Ce que j'ai dit correspondait à ma pensée, que les chambres à gaz étaient un détail de l'histoire de la guerre, à moins d'admettre que ça ne soit la guerre qui soit un détail des chambres à gaz »,

- avoir publié dans un communiqué du 29 juillet 2015 les écrits suivants :
« (... ) A l'effondrement du nombre de nos adhérents (de 83 000 en octobre 2014 à 51 000 en mai 2015), les multiples défaites dans les urnes et aux partielles depuis mai dernier, ont suivi ... »,

- avoir tenu publiquement les propos suivants reproduits le 9 avril 2015 dans Rivarol :
« (...) Pour ma part, comme je l'ai déjà dit, je n'ai jamais considéré le maréchal Pétain comme un traitre. L'on a été très sévère avec lui à la Libération. Et je n'ai jamais considéré comme de mauvais français ou des gens infréquentables ceux qui ont conservé de l'estime pour le Maréchal » ; (Homosexuels) : « Comme de surcroît ils ont le sentiment d'être un peu en marge de la société, ils ont tendance à se regrouper, même s'ils se détestent les uns les autres. Ils forment une communauté »,

- avoir tenu publiquement le 9 avril 2015 sur RTL, les propos suivants :
« K... I... souhaite ma mort, Peut-être, c'est possible, mais elle ne doit pas compter sur ma collaboration »,

- avoir tenu publiquement le 10 avril 2015 sur RTL, les propos suivants :
« K... I... est en train de dynamiter sa propre formation » ; (B...) : « Une pièce rapportée, relativement récente au FN » ; « Je cherche ce qui justifie cet assaut généralisé, qui me paraît faire partie d'une manœoeuvre d'ensemble (... ) un projet extérieur au Front national destiné à faire rentrer le FN dans le troupeau »,

- avoir fait intrusion sur la scène, place de l'Opéra, le 1er mai 2015,

- avoir tenu publiquement le 5 mai 2015 sur Europe 1, les propos suivants :
« Je pense que c'est une félonie, j'ai honte que la présidente du FN porte mon nom », « Je souhaiterais qu'elle le perde le plus rapidement possible, soit en se mariant avec son concubin, soit peut-être avec M... B... ou avec quelqu'un d'autre (...). » ; « Répudiez-vous votre fille ? » « Tout à fait ! Je ne reconnais pas de lien avec quelqu'un qui me trahit de manière aussi scandaleuse » ; (Souhait de victoire de MLP en 2017) : « Oh maintenant non (...) Si de tels principes moraux devaient présider à l'Etat français, ça serait scandaleux » ; (UMPS) : « Elle est même un peu pire parce qu'un adversaire vous combat de face. Là, elle me combat de dos »,

- avoir tenu publiquement le 12 mai 2015 sur RTL, les propos suivants :
« On voit très bien que Monsieur B... s'empare des leviers de commandes, place ses hommes, ses mignons partout et il fait une pression constante évidemment sur K... I... et le pauvre bureau politique » ; « On n'a pas forcément raison parce qu'on est un jeune con »,

- avoir tenu publiquement le 13 mai 2015 sur BFM, les propos suivants :
« Le mouvement est en train de dérailler sous l'influence, il faut le dire, de M... B... et de ses amis qui procèdent à la véritable colonisation du mouvement, sinon à l'insu de K... I... , au moins sans qu'elle soit en mesure de s'y opposer », « Je ne condamne pas les homosexuels sur le plan individuel mais quand ils chassent en meute oui » ; « M. B... et ses amis recrutent plutôt dans leur milieu socio-culturel, si j'ose dire, et ont sur leurs amis une influence d'un type différent de celui qui gouverne généralement les relations entre les hommes ordinaires »,

- avoir tenu publiquement le 3 juin 2015 dans le journal de bord diffusé par le réseau You Tube, les propos suivants :
« On sait aussi que Monsieur B... a de la communication une notion particulière, très discutable. C'est ainsi qu'un certain nombre de ses préposés sont chargés d'espionner en interne les échanges entre dirigeants ou militants, surveillent le net d'une façon permanente, les tweets, etc ..., les mauvaises langues les ont même appelés les gestapettes »,

- avoir tenu publiquement le 2 juillet 2015 sur I-Télé, les propos suivants :
« Vous feriez mieux que L...  D...   -I...   aux régionales ? » ; « Honnêtement oui » ; « Elle est jeune », « Elle n'a ni l'expérience ni le gabarit pour diriger la PACA »,

- avoir tenu publiquement le 20 juillet 2015 à l'AFP, les propos suivants :
« Je vois des amis, je les consulte, nous échangeons des idées, nous imaginons des perspectives pour arracher notre pays au sort qui lui est promis », « Je suis dans une phase d'information et d'exploration. On me sollicite pour que je me présente aux élections, je n'ai donné aucune réponse »,

- avoir tenu publiquement le 20 juillet 2015, les propos suivants reproduits sur le site de France Bleu Provence :
« Probablement, il y des gens qui ne sont pas satisfaits par la proposition de L... D... »,

- avoir tenu publiquement les propos suivants reproduit le 22 juillet 2015 dans Le Parisien :
« Je suis le président du groupe, celui qui a la plus grande expérience dans cette assemblée. Le fait qu'elle n'ait pas daigné me consulter a minima sur la constitution des listes est une faute de méthode » ; « Il faut des jeunes, bien sûr. Mais de là à prétendre pouvoir diriger une région de cette envergure ... ça me paraît discutable, (...) C'est une fonction qui requiert de la pratique et une grande compétence technique. N... E... me semble avoir ces qualités-là. » ; « C'est une erreur politique de faire des listes d'union dès le premier tour, car l'effet est négatif, attaque le patriarche. Mais L... a une excuse : elle n'a pas une grande expérience de ces choses-là ... »,

- avoir tenu publiquement les propos suivants reproduits le 22 juillet 2015 dans Le Parisien :
« Quel est son objectif ? Pourquoi est-il là ? Il pourrait être parfaitement un agent double envoyé en mission », échafaude-t-il en suspectant le jeune énarque d'être envoyé par la droite, pour « saboter le Front national de l'intérieur », dit-il.

Elle qualifie chacun de ces 15 griefs et relève que tous ont été considérés comme des fautes graves.

Elle estime qu'en tout état de cause, la multiplication de ces fautes caractérise le motif grave justifiant l'exclusion.

L'appelante soutient que M. I... n'est plus président d'honneur depuis le 20 août 2015.

Elle reproche au tribunal d'avoir ajouté aux statuts et d'avoir dénaturé ceux-ci.

Elle soutient que l'article 6 des statuts sur la « qualité de membre » n'exclut pas de son champ d'application le président d'honneur.

Elle souligne que l'article 11 bis des statuts précise que le président d'honneur est membre de droit de toutes les instances du mouvement et en infère qu'il est nécessairement membre du Front national.

Elle se prévaut des statuts et de la loi du 1er juillet 1901.

Elle cite l'article 6 des statuts qui stipule :
« L'Association se compose de membres bienfaiteurs et de membres actifs. Sont dits membres actifs et adhérents toutes personnes physiques et morales intéressées à la réalisation des buts de l'Association qui adhèrents aux présents statuts et versent une cotisation ».

Elle en conclut que l'association est composée de membres quelles que soient leurs autres qualités et que M. I... qui n'a jamais contesté qu'il adhérait aux statuts et versait une cotisation en était membre.

Elle cite l'article 11 bis des statuts relatif à la présidence d'honneur qui précise que « Pour pouvoir être nommé, il devra avoir accompli deux mandats comme Président du Front national ».

Elle fait donc valoir que, quel que soit le mode de désignation d'un président d'honneur d'une association, celui-ci, une fois désigné président d'honneur en devient nécessairement membre, ne serait-ce que parce que la qualité de président d'honneur est prévue par les statuts et parce que les statuts sont justement destinés à régir les rapports entre les membres d'une association.

Elle cite également l'article 1 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.

Elle en conclut qu'en prévoyant, dans ses statuts, la possibilité de « nommer un président d'honneur », le Front national a fait de ce dernier un membre de l'association.

Elle souligne que le contrat d'association régit les rapports entre les membres de cette association et qu'un contrat régit les rapports entre les parties à ce contrat.

Elle réitère qu'il est prévu qu'un membre est nécessairement adhérent aux statuts et que c'est parce que le président d'honneur du Front national en est un membre qu'il devient, après avoir été nommé, « membre de droit de toutes les instances du mouvement (Conseil national, Comité central, Bureau Politique, Bureau exécutif, Commission nationale d'investitures) ».

Elle estime que, « dans la mesure où :
- la composition des instances dirigeantes est régie par les statuts,

- les statuts régissent les rapports entre membres du Front national,

- les statuts n'ont jamais envisagé la possibilité d'intégrer une instance dirigeante quelle qu'elle soit, sans être membre du Front national,

- les statuts n'ont jamais envisagé la possibilité d'être nommé président d'honneur, sans être membre du Front national,

- l'exclusion d'un membre du Front national a nécessairement une portée générale ; c'est-à-dire qu'un membre exclu de l'association l'est forcément de toutes les autres qualités qui découlent de la qualité de membre ».

Elle rappelle en outre que la décision d'exclusion contestée n'indique pas que M. I... est exclu de telle ou telle instance dirigeante ou de la présidence d'honneur mais précise qu'il est exclu du Front National.

Elle en conclut que l'exclusion est générale et non particulière et qu'en réduisant le champ de cette exclusion, le tribunal a méconnu ses statuts et la décision d'exclusion.

Elle fait valoir qu'il n'était nul besoin de se « prononcer sur les conséquences d'une telle mesure à l'égard de la présidence d'honneur car l'exclusion d'un membre de l'association a nécessairement pour conséquence la perte des qualités accessoires qui peuvent être ajoutées à la qualité principale de membre, l'accessoire suivant le principal ».

Elle estime qu'à l'extrême, le raisonnement du tribunal revient à considérer que le président d'honneur a plus de prérogatives que le président lui-même.

Elle ajoute qu'il est impossible que M. I... puisse continuer à être président d'honneur du Front national et à siéger dans toutes les instances.

Elle se prévaut de la création par lui des « Comités Jeanne » qui sont des formations politiques puisqu'ils ont présenté des candidats aux élections législatives de 2017 et de la création de l'Union des Patriotes qui réunit plusieurs formations politiques comme les « Comités Jeanne ».

Elle en conclut qu'il a, ainsi, reconnu son exclusion du Front national et toutes ses conséquences, l'article 8 des statuts du Front national prévoyant que la qualité de membre se perd par l'adhésion à une autre formation politique.

Elle considère a fortiori que, s'il pensait qu'il était toujours membre du Front national (et notamment président d'honneur), il n'aurait pas présenté des candidats aux élections législatives contre les candidats du Front national comme dans la 12 ème circonscription des Bouches du Rhône où il a soutenu un candidat face au candidat du Front national, empêchant celui-ci d'accéder au second tour, et en déclarant avoir été exclu de celui-ci.

Elle cite d'autres cas dans lesquels M. I... a soutenu des candidats qui ont dénigré le Front national.

Elle en conclut qu'il se prétend président d'honneur d'un parti mais qu'il met tout en oeœuvre contre ce même parti.

Elle en conclut également que prétendre qu'il serait président d'honneur et membre des organes directeurs, malgré son exclusion, reviendrait à accepter qu'un opposant politique participe aux réunions des commissions d'investiture des candidats du Front national.

Elle demande, compte tenu de cette infirmation, celle des autres chefs du jugement la condamnant.

Aux termes de ses dernières écritures précitées, M. I... rappelle les procédures l'ayant opposé au Front national et lui reproche de chercher à se débarrasser de lui par tous moyens.

Il soutient que la décision des 20-28 août 2015 est nulle.

Il fait état d'un « contexte général d'irrespect par le Front national des décisions de justice rendues dans cette affaire ».

Il lui fait grief d'avoir refusé d'exécuter spontanément l'ordonnance sur requête, de ne pas l'avoir convoqué aux instances dont il est président d'honneur, de ne pas avoir convoqué un congrès réunissant physiquement les adhérents nonobstant un arrêt de la cour d'appel de Versailles, d'avoir rendu publics les résultats prétendus de la consultation suspendue et d'avoir présenté Mme G... comme s'étant abstenue lors de la réunion du bureau exécutif disciplinaire du 4 mai 2015 alors qu'elle avait voté contre sa suspension.

Il rappelle les règles disciplinaires du Front national.

Il cite l'article 19 des statuts intitulé « les pouvoirs du conseil d'administration », notamment visé par la convocation à la réunion du 20 août et par la décision, qui énonce :
« En cas de faute grave, le Bureau du Conseil d'Administration peut, sur proposition de son président et à la majorité, suspendre provisoirement ou même exclure un de ses membres ».

Il en conclut que le bureau exécutif ne peut, en formation disciplinaire, prononcer la suspension ou l'exclusion que d'un des membres du bureau, c'est à dire le démettre de ses fonctions au bureau exécutif, ou peut-être au bureau politique mais pas lui faire perdre sa qualité d'adhérent, cela n'étant pas précisé par cet article.

Il soutient donc qu'il n'est pas question, dans cet article, de la qualité de membre de l'association, qui ne peut être perdue qu'au terme d'une procédure de portée générale instituée par l'article 8 et excipe du jugement prononcé le 2 juillet 2015 par le tribunal de grande instance de Nanterre.

Il cite l'article 8 qui prévoit que la qualité de membre de l'association se perd, outre par décès, démission ou encore défaut de paiement de la cotisation, par « radiation ou exclusion pour motif grave, prononcée par le Conseil d'Administration, par son bureau, ou par le Président, le membre intéressé ayant été appelé auparavant à fournir toutes explications - soit devant la Commission de discipline si celle-ci a été saisie, soit devant le président ou le(s) membre(s) du Conseil d'administration ou du Bureau mandatés à cet effet par le président, dans le cas contraire ».

Il en infère que la procédure disciplinaire pouvant conduire à l'exclusion d'un « simple » membre, pour motif ou faute grave, doit être instruite par la commission de discipline si celle-ci a été saisie et précise que c'est sur cet article que se fondaient les décisions disciplinaires sous sa présidence.

Il ajoute que l'article 9 du règlement intérieur indique « que l'article 8 des statuts définit les conditions et modalités de la perte de la qualité de membre ».

Il en conclut que la formation qui a statué les 20-28 août 2015 a visé à tort les articles 8 et 19, seul l'article 8 devant s'appliquer.

Il souligne qu'il incombe, en l'absence de recours interne, à la juridiction de contrôler la régularité de la sanction prononcée par rapport aux statuts et au règlement intérieur.

Il fait valoir l'existence d'irrégularités lors de la réunion du 20 août 2015.

Il invoque le défaut de qualité de la « formation » réunie le 20 août 2015 pour juger en matière disciplinaire.

Il indique que le bureau exécutif comprend 8 membres mais rappelle qu'en qualité de président d'honneur, et conformément à l'article 11 bis des statuts, il est membre de droit de toutes les instances du mouvement, (conseil national, comité central, bureau politique, bureau exécutif, commission nationale d'investitures) et ce, avec voix délibérative.

Il relève que seules 5 personnes ont voté, la décision de l'exclure ayant été prise par 4 voix.

Il soutient que l'organe composé de 5 personnes ayant délibéré n'avait pas qualité pour l'exclure dans la mesure où on a refusé qu'il participe à la délibération, où Mme I... et M. B... se sont abstenus de siéger et où M. C... a quitté la réunion et n'a pas participé à la délibération sur le fond.

Il en conclut que ce n'est pas le bureau exécutif disciplinaire, composé de 9 personnes, qui a prononcé la décision de sanction, mais seulement quatre personnes.

Il relève que la réunion est qualifiée, dans la décision, de « formation » et non de « bureau exécutif ».

Il considère qu'aucune clause des statuts ne permet à quelques membres seulement du bureau exécutif en exercice de s'arroger le pouvoir de juger.

Il fait valoir qu'il n'est pas démontré qu'ils aient été mandatés à cet effet.

Il reproche au tribunal d'avoir rejeté ce moyen en l'absence de quorum, estime qu'alors la décision prise par un seul membre aurait été considérée comme valablement rendue et invoque une question de légitimité et de bon sens allant au-delà du strict droit associatif.

Il invoque l'interdiction qui lui a été faite de participer au délibéré en sa qualité de président d'honneur.

Il déclare que ce refus a été formulé par le président, Monsieur Z..., avant même que les membres du bureau n'aient délibéré sur cette question, ceux-ci se retirant ensuite pour statuer sur la publicité des débats, mais hors sa présence.

Il infère des notes de M. A... qu'il n'y a pas eu de délibération sur sa demande de participer à la prise de décision sur la publicité des débats.

Il considère qu'il suffit qu'il ait été empêché, alors qu'il est membre de droit de la formation, de participer à la délibération - d'abord par une voie de fait lors de la délibération sur la demande de publicité des débats, puis par une prétendue mise aux voix censée rétrospectivement justifier cette voie de fait - pour que cette délibération soit annulée pour non conformité aux statuts.

Il estime qu'il n'appartenait qu'à lui de décider si, en conscience, il entendait ou non participer à la délibération.

Il ajoute qu'il aurait dû être convoqué à la réunion du « bureau exécutif » qui s'est tenue le 28 août 2015 pour « rédiger et avaliser » la décision détaillée d'exclusion, lui-même ne faisant pas l'objet d'une suspension à titre provisoire et l'exclusion ne pouvant courir qu'à compter de sa notification.

Il souligne que cette non participation n'est pas prévue par les statuts.

Il souligne également que c'est le président de séance qui l'a décidé, sans avoir consulté les autres membres sur ce point.

Il invoque des interrogations sur les auteurs de son exclusion et les circonstances de celle-ci.

Il cite des articles et déclarations à la presse sur le vote de M. C... qui a indiqué avoir remis une procuration pour voter contre son exclusion ce qui n'a pas été pris en compte.

Il affirme que les modalités de la délibération de la formation établissent que la décision était prise d'avance sans motivation, celle-ci ayant été rédigée a posteriori pour essayer de la justifier.

Il indique qu'au vu d'un communiqué de M. Z..., elle semble avoir été rédigée à l'issue de la délibération et qu'on a refusé que Mme G..., opposante, participe à sa rédaction.

Il estime également qu'au vu de son contenu détaillé, elle a pu être rédigée avant même la tenue de l'audience, ses moyens de défense ayant été portés à la connaissance de la formation la veille.

Il s'étonne alors qu'elle n'ait été notifiée que le 28 août et en infère qu'elle a peut-être été motivée après qu'elle a été prise.

Il considère que, dans les deux cas, le principe de son exclusion avait été décidé à l'avance.

Il ajoute que la décision a été rendue publique le 20 août soit avant sa signature, datée du 28 août, et déduit de cette différence de date que la nullité est encourue.

Il ajoute enfin qu'elle n'a pas été signée par le secrétaire général, alors que, selon l'article 17 des statuts, c'est lui qui « rédige les procès-verbaux des réunions ou assemblées et, en général, toutes les écritures concernant le fonctionnement de l'Association ... » et qu'il a signé avec la présidente le procès-verbal de la réunion du bureau exécutif disciplinaire du 4 mai 2015.

Il sollicite, à défaut d'annuler la décision en raison de ces irrégularités, le prononcé, sur le fondement des articles 204 et suivants du code de procédure civile, d'une enquête civile dans laquelle chacun des membres de la « formation » réunie le 20 août 2015 serait entendu en qualité de témoin.

Il considère que les éléments qu'il produit constituent pour le moins un « commencement de preuve » des graves irrégularités, qu'il y a lieu d'approfondir en interrogeant les membres du bureau qui ont - ou pas - statué.

Il souligne que la teneur des articles n'a pas été remise en cause par le Front national au moyen de poursuites en diffamation ou même de l'exercice d'un simple droit de réponse.

Il invoque la partialité des juges disciplinaires et une exécution programmée et décidée d'avance.

Il estime que s'il est considéré que les personnes réunies les 20 et 28 août 2015 formaient le bureau exécutif, ce bureau réuni en formation disciplinaire s'assimile à une juridiction, dans la mesure où il est statutairement habilité à rendre des décisions de nature à produire des effets juridiques.

Il affirme donc qu'il s'agit d'une juridiction d'exception, en tant que telle soumise aux principes généraux du droit et aux règles qui gouvernent l'ordre public.

Il infère des termes processuels employés que les membres de la formation se sentent investis du pouvoir de juger et de l'abstention de Mme I... et de M. B... une soumission à des règles qui gouvernent la procédure de récusation d'un juge.

Il conclut que ces personnes ont accompli un acte de jugement et qu'elles étaient, comme juges, soumises au respect de règles de procédure d'ordre public et à quelques principes généraux du droit sans lesquels il n'y aurait qu'arbitraire.
Il sollicite donc son annulation aux motifs qu'elles l'avaient déjà jugé et condamné, qu'elles avaient publiquement, avant et après cette condamnation, manifesté une forte hostilité envers lui et qu'elles auraient dû se récuser, chacune étant concernée par une des causes de récusation de droit commun.

Sur l'existence de cette condamnation préalable, il estime qu'il importe peu que l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme ne s'applique pas aux instances disciplinaires des associations, dans la mesure où l'impartialité était déjà de règle dans toute instance destinée à juger.

Il rappelle le fondement de l'impartialité soit l'absence de préjugé et relève que chacun des membres ayant statué le 20 août 2015 l'avait déjà condamné, pour des faits identiques, lors de la réunion du bureau exécutif disciplinaire du 4 mai 2015.

Il en conclut à la manifestation d'un préjugé justifiant l'annulation de la décision.

Sur l'existence d'une hostilité publiquement manifestée, il excipe de propos tenus par MM A..., C... et H... J...  , membres du bureau, et par Mme I... .

Il rappelle une décision du Conseil d'Etat et soutient que ceux qui avaient pris publiquement parti contre lui n'auraient pas dû statuer.

Sur l'absence de récusation malgré ses demandes, il indique qu'il a demandé aux membres de la « formation » de tirer les conséquences des principes qui découlent des dispositions du code de procédure civile et du code de procédure pénale.

Il estime qu'au moins cinq des huit cas prévus concernaient les membres du bureau exécutif.

Il cite M. C..., compagnon de Mme I... , l'intégralité des membres qui ont statué le 4 mai 2015 sur deux des griefs émis et M. H... J...          qui a manifesté publiquement son hostilité et qui a été son avocat.

Il rappelle les devoirs généraux de « dignité, conscience, indépendance, humanité et probité », ainsi que de délicatesse, tact et modération imposés à l'avocat, même honoraire.

Il estime qu'une telle récusation est la sanction nécessaire du droit à un tribunal impartial, ce principe général du droit étant dans toute procédure la manifestation d'un ordre public qui, en tant que tel, est d'essence supérieure aux statuts ou à leur silence.

Il conteste la prétendue obligation de présenter la demande aux personnes physiques.

Il ajoute l'existence d'une dépendance des membres de la « formation » envers sa présidente, tous étant candidats à des investitures.

Il soutient que le bureau exécutif est soumis, du fait du simple bon sens, à un principe général d'impartialité, sauf à considérer comme inutile et artificiel tout le dispositif de protection des droits de la personne jugée et le droit de recourir à un juge.

Il invoque, au vu du constat dressé le 25 septembre 2015, une « justice » disciplinaire aux ordres.

Il rappelle les réponses adressées à l'huissier et les déclarations à la presse de MM. Z... et J...          dont il conclut que la décision de l'exclure vient de Mme I... .

Il considère que, compte tenu de cette partialité et de sa condamnation antérieure, le bureau politique (conseil d'administration) aurait dû être saisi comme juridiction de substitution.

Il relève que l'article 8 des statuts prévoit une exclusion prononcée par « le Conseil d'administration, par son Bureau, ou par le Président » le conseil d'administration étant même désigné au premier chef et le bureau exécutif n'en étant que l'émanation, délégataire de certains de ses pouvoirs.

Il déclare qu'il suffisait, pour éviter de faire encourir à la décision qui aurait été prise, le grief de partialité, que tous les membres de la formation qui se sont réunis le 20 août 2015, s'abstiennent de siéger au bureau politique disciplinaire, composé de 43 membres.

Il invoque, en tout état de cause, l'incompétence du bureau exécutif et a fortiori de la « formation », à juger un adhérent également investi de la qualité de président d'honneur.

Il rappelle qu'à l'issue du congrès du 15 janvier 2011, a été ajouté aux statuts un article 11 bis ainsi rédigé :
« L'assemblée générale ordinaire (Congrès) peut nommer un président d'honneur sur proposition du Conseil d'administration (Bureau politique).
Il est membre de droit de toutes les instances du mouvement (Conseil national, Comité central, Bureau politique, Bureau exécutif, Commission nationale d'investiture).
Pour pouvoir être nommé, il devra avoir accompli deux mandats comme Président du Front national, et ce pendant une durée d'au moins cinq ans ».

Il déclare que, par les droits y attachés et les devoirs qu'elle fait peser sur celui qui en est investi, la qualité de président d'honneur constitue une véritable fonction, son titulaire bénéficiant de fait d'un cabinet, d'une secrétaire, etc ..., d'un véhicule de fonction et d'une indemnité mensuelle.

Il ajoute que la durée de la fonction du président d'honneur n'est pas limitée.

Il soutient que le président d'honneur relève, en droit des associations, de la catégorie des membres d'honneur et qu'il n'a pas besoin d'être membre adhérent, les deux qualités étant parfaitement indépendantes l'une de l'autre et rappelle qu'il a voix délibérative, et pas seulement consultative, aux diverses instances dont il est membre de droit en vertu du 2ème alinéa de l'article 11 bis.
Il affirme que, sous le prétexte de décider d'une sanction disciplinaire tendant à suspendre ou le radier en tant que membre, c'est cette qualité de président d'honneur qui est visée et que l'on cherche à supprimer ou à réduire à l'impuissance.

Il estime prouver ce lien par la suspension décidée le 4 mai 2015 dans l'attente d'une assemblée générale extraordinaire censée se prononcer sur la suppression des statuts de leur article 11 bis, par l'inexécution, malgré son exécution provisoire, du jugement du 2 juillet 2015 qui le rétablit « dans tous les droits attachés à sa qualité d'adhérent et le cas échéant à celle de président d'honneur en ce qu'ils ont été affectés par la délibération annulée » et par la publication au mépris de la décision de justice intervenue entre-temps des « résultats » de la consultation des adhérents sur le projet de statuts destiné à supprimer la notion de présidence d'honneur.

Il fait valoir que le bureau exécutif (ou certains de ses membres réunis en « formation ») n'a, selon les statuts, aucune qualité pour décider d'une quelconque mesure visant le président d'honneur.

Il fait ainsi état d'un détournement de procédure et, donc, de l'incompétence du bureau exécutif à traiter de poursuites disciplinaires le concernant en tant que membre, puisque la sanction qu'on lui a infligée en cette qualité visait en réalité à atteindre sa présidence d'honneur.

Il ajoute qu'il avait demandé que si la formation s'estimait compétente à juger un adhérent également président d'honneur, elle précise que la présidence d'honneur ne serait pas affectée par la sanction éventuelle.

Il soutient qu'il résulte des statuts du Front national que le président d'honneur, tout comme le président du mouvement, bénéficie d'une sorte d'immunité disciplinaire.

Il estime que seule une assemblée générale extraordinaire, en dehors des assemblées ordinaires, pourrait en application de l'article 24 des statuts le révoquer.

Il invoque la règle non bis in idem interdisant de le juger à nouveau pour les mêmes faits.

Il rappelle qu'il avait été sanctionné par une mesure de suspension le 4 mai 2015 au titre de ses propos tenus sur RMC le 2 avril 2015 et de ceux publiés dans Rivarol le 9 avril 2015.

Il estime cette règle applicable et considère que l'appelante ne le conteste pas.

Il affirme que l'annulation de la décision prononcée le 4 mai 2015 ne remet pas en cause cette impossibilité et que le Front national ne peut puiser dans les mêmes faits pour fonder une nouvelle sanction.

Il déclare que l'appelante se prévaut de l'exécution provisoire du jugement qui a annulé sa suspension alors qu'il n'en a pas tenu compte en ne le rétablissant pas dans ses droits de président d'honneur.

Il rappelle également que la question de la résiliation du contrat d'association aux torts exclusifs de M. I... avait été soumise au tribunal à titre infiniment subsidiaire et reconventionnel et qu'en conséquence de l'appel, cette demande se trouvait dévolue à la cour d'appel.

Il ajoute qu'il convient de se placer pour juger de la validité de la sanction intervenue en l'état des procédures au moment où elle est intervenue.

Il affirme que les autres griefs sont secondaires et déclare, en tout état de cause, que c'est l'ensemble des griefs qui, selon la décision caractérise le « motif grave » exigé par l'article 8 des statuts.

Il affirme également que l'ensemble des griefs relève d'une appréciation indivise, de sorte que, si l'un ou l'autre d'entre eux venait à être censuré, c'est l'ensemble de la motivation ainsi rédigée qui serait ipso facto frappée de nullité.

Il s'étonne que le tribunal ait contesté cette indivisibilité.

L'intimé conteste au fond les griefs formulés.

Il invoque l'absence de référence à une ligne politique à laquelle il aurait porté atteinte.

Il se réfère au procès-verbal de la réunion du 4 mai 2015 et à la convocation qui lui reprochent d'avoir porté atteinte à la « ligne politique » et soutient que faute de référence à celle-ci, il existe une atteinte au principe de légalité qui relève d'un ordre supérieur aux statuts.

Il affirme avoir vainement demandé en quoi ses propos étaient contraires à cette ligne.

Il ajoute que le « motif grave » ou la « faute grave » ne sont pas précisés, se heurtant au principe de légalité.

Il invoque l'absence de proportionnalité de la sanction aux faits reprochés.

Il estime qu'il appartient à la cour de vérifier cette proportionnalité.

Il excipe d'un entretien de Mme I... en janvier 2008 définissant le « socle idéologique » du parti.

Il réfute chacun des griefs invoqués.

Il ajoute que le comportement des personnes visées par ces propos serait de nature à constituer une excuse absolutoire et, en tout cas, à les justifier ce qui doit conduire à annuler la sanction.

Il fait également état de la « structure particulière » de la motivation qui démontre le préjugé des membres de la formation, la motivation venant après l'affirmation selon laquelle chacun de ces propos constitue une faute grave et de la différence de corps de caractères d'imprimerie entre l'ensemble du texte et les décisions elles-mêmes.

Il invoque des voies de fait perpétrées envers le président d'honneur.

Il soutient que les droits et devoirs attachés à la présidence d'honneur ne peuvent être remis en cause par des décisions disciplinaires visant la qualité de membre.

Il réitère que le but poursuivi était de le priver de tout rôle au sein des instances dirigeantes et de l'éliminer du mouvement ce qui supposait de mettre en cause sa qualité de président d'honneur.

Il fait valoir que celle-ci est indépendante de la qualité de membre, puisque, en droit des associations, il n'est aucunement nécessaire d'être adhérent pour se voir confier une mission au sein des instances dirigeantes. Il excipe d'un arrêt.

Il affirme que cette indépendance des deux qualités a pour effet de priver une instance disciplinaire du pouvoir de remettre en cause la présidence d'honneur et se prévaut d'une déclaration de M. C....

Il en infère que toute mesure portant atteinte aux droits statutaires attachés à la présidence d'honneur est une voie de fait, constitutive d'une faute.
Il réfute tout lien de causalité entre la suspension de la qualité d'adhérent et celle de la présidence d'honneur, aucune disposition des statuts ne l'établissant.

Il ajoute que le président d'honneur est membre de droit de toutes les instances car il y a été porté directement par l'assemblée générale lors de son élection, et non pas, comme tous les autres membres des diverses instances, été désigné par la présidente, le bureau politique ou le comité central.

Il conclut que la personne physique investie de la fonction de président d'honneur échappe par nature à la juridiction disciplinaire ordinaire, bénéficie d'une sorte d'immunité et du parallélisme des formes pour la création et la suppression de la fonction et que, quand bien même elle pourrait valablement être déchue ou suspendue de sa qualité d'adhérent, elle conserverait toujours celle de président d'honneur.

Il estime également que cette qualité lui appartient à vie, aucune durée ne venant statutairement la limiter.

Il affirme qu'une fois qu'il est nommé, aucune disposition ne permet à un quelconque organe de le défaire ni de le suspendre.

Il fait valoir que la qualité de membre relève d'une adhésion au contrat d'association que constituent les statuts mais que la présidence d'honneur trouve son fondement dans une élection démocratique qu'aucun pouvoir disciplinaire ne peut remettre en question.

Il considère que seul un congrès extraordinaire pourrait supprimer des statuts toute référence à la présidence d'honneur, ce qui ne le priverait pas de cette qualité puisque cette modification statutaire ne pourrait être rétroactive.

Il fait état de la multiplication des voies de fait commises par l'appelante envers son président d'honneur.

Il cite le défaut de convocation, depuis le 4 mai 2015, aux diverses instances du mouvement malgré ses protestations, l'interdiction d'accéder au siège du Front national et à l'université d'été, la suppression de son image et de toute évocation officielle de son nom, l'empêchement du fonctionnement matériel du cabinet du président d'honneur, la publication des résultats de la consultation postale des adhérents malgré sa suspension par la justice.

Il fait état d'un « assassinat politique ».

Il conclut que le défaut de mise à exécution du jugement du 2 juillet 2015 qui le rétablit dans tous ses droits d'adhérent et en tant que de besoin, dans ceux de président d'honneur pour le cas où ils auraient été affectés par la suspension annulée est une faute civile commise envers lui.

Il invoque son préjudice.

Il déclare que chaque voie de fait commise envers lui est constitutive d'une faute qui ouvre droit à indemnisation, ce sur le fondement de l'article 1147 du code civil en raison de l'inexécution fautive des statuts au mépris du principe d'exécution de bonne foi des conventions - et aussi des décisions de justice déjà rendues -, ou sur celui de l'article 1382 du même code pour le cas où la demande d'annulation de l'exclusion serait rejetée.

Il fait valoir que ce n'est pas le préjudice résultant de la sanction disciplinaire dont il demande réparation mais celui découlant des atteintes à la présidence d'honneur qu'en a fait indûment résulter le Front national.

Il fait également valoir que la gravité de ces atteintes « est à la mesure de la notoriété et de l'exemplarité du parcours historique à la fois national et international de celui envers qui elles sont perpétrées ».

Il décrit ce parcours, rappelle les propos tenus sur lui par Mme I... après le congrès de janvier 2011 et cite sa biographie figurant sur le site internet du Front national.

Il fait également état de la dégradation de son état de santé, en rapport avec ces agissements.

Il réclame donc le paiement d'une somme de 2 millions d'euros à titre de réparation.

Il estime que la cour, indépendamment de sa décision sur la nullité de la mesure d'exclusion, ne pourra que constater que cette mesure disciplinaire ne saurait avoir pour effet de remettre en question sa qualité de président d'honneur et de le priver des droits et devoirs statutaires attachés à cette qualité.

Il excipe de la commune intention des parties lors de l'adoption de l'article créant la fonction de président d'honneur et de la volonté des militants de l'honorer.

Il excipe également des termes du jugement.

En réponse au Front national, il lui reproche de mélanger volontairement des qualités qui sont d'essence différente et qui trouvent leur fondement dans deux sources juridiques distinctes soit la qualité de membre au sens de l'article 6 des statuts, qui relève du paiement d'une cotisation et de l'adhésion au pacte associatif, cette qualité pouvant se perdre notamment par l'exclusion prononcée par les instances compétentes, et la qualité de président d'honneur, qui n'est pas contractuelle au sens statutaire du terme mais résulte d'un vote souverain des adhérents que le juge n'aurait pas pouvoir de remettre en cause.

Il lui fait donc grief de demander au pouvoir judiciaire de réaliser une ingérence dans son fonctionnement.

Il fait également valoir que l'article 11 bis ne prévoit pas que le président d'honneur est membre de droit du Front national - au sens où membre est synonyme d'adhérent de l'association - mais qu'il est membre de droit des instances énumérées.

Il considère que s'il n'avait plus réglé sa cotisation, il aurait perdu la qualité de membre mais pas celle de président d'honneur.

Il conteste que la présidence d'honneur soit un accessoire de la qualité de membre et rappelle ses prérogatives et la décision souveraine de l'assemblée.

Il relève, en ce qui concerne son soutien à des candidats non investis par le Front national, que seuls les faits antérieurs à la décision litigieuse peuvent lui être opposés et réitère ses reproches sur le comportement envers lui de l'appelante. Il affirme donc qu'il n'a pu manifester son point de vue dans la vie politique française qu'en soutenant tel ou tel candidat aux élections législatives au moyen du « label » des Comités Jeanne étant précisé que ceux-ci ne sont pas un parti politique concurrent du Front national.

Afin d'empêcher toute nouvelle voie de fait et compte tenu de l'inexécution par le Front national du jugement, il réclame le prononcé d'une astreinte.

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Sur les moyens tirés de l'irrégularité de la décision du 20 août 2015

Considérant que tout membre d'une association peut exercer un recours juridictionnel à l'encontre d'une sanction prononcée contre lui ; qu'il appartient à la juridiction saisie d'examiner la régularité de la sanction prononcée ;

Sur le défaut de qualité de la formation réunie le 20 août 2015

Considérant que la sanction a été prononcée par « le bureau exécutif réuni en formation disciplinaire » ;

Considérant que l'article 6 des statuts du Front national énonce que son conseil d'administration, son bureau ou son président statuent sur les exclusions ;

Considérant que l'article 8 prévoit que la qualité de membre se perd, notamment, par l'exclusion « prononcée par son conseil d'administration, par son bureau ou par son président » ... « mandatés à cet effet par le président » de l'association ;

Considérant que l'article 12 définit la composition des membres du bureau exécutif ;

Considérant qu'il résulte donc des articles 6 et 8 que le bureau exécutif est compétent pour se prononcer sur une demande d'exclusion s'il a été saisi à cet effet par le président de l'association ;

Considérant que M. I... a été convoqué, par lettre datée du 4 août 2015 de la présidente du Front national, devant le bureau exécutif réuni en formation disciplinaire, le 20 août 2015 ; que ce courrier démontre l'existence du mandat donné à ce bureau conformément à l'article 8 des statuts aucune condition de forme n'étant exigée par les statuts et l'existence d'un mandat pouvant se prouver par tout moyen ;

Considérant que, sous réserve des autres moyens, le bureau exécutif était donc compétent en application de l'article 8 des statuts ; que celui-ci a été visé dans la convocation ; que la décision est régulière de ce chef, peu important qu'un autre article - non applicable - ait également été visé ;

Considérant que les statuts ne prévoient aucun quorum ; que la décision prise par un nombre réduit de membres du bureau est donc régulière de ce chef ;

Considérant que le bureau exécutif a siégé « en formation disciplinaire » comme indiqué dans la convocation ; que cet intitulé est sans incidence dès lors que l'organe ayant statué est effectivement le bureau exécutif comme tel est le cas ; qu'il sera observé qu'un procès-verbal du bureau exécutif du 24 décembre 1998 produit par l'intimé emploie la formule « siégeant en instance disciplinaire » ;

Considérant que le bureau exécutif était donc compétent ;

Sur l'interdiction faite à M. I... de participer au délibéré

Considérant que M. I... est membre de droit, en qualité de président d'honneur, du bureau exécutif ; qu'il a été empêché de participer aux délibérations ;

Considérant, d'une part, qu'il n'est pas contraire aux statuts que l'organe appelé à examiner des propos susceptibles de constituer des fautes graves à l'égard d'un de ses membres décide de ne pas permettre à ce dernier de participer aux délibérations qui le visent personnellement, y compris précisément celle statuant sur sa demande de participation au délibéré ;

Considérant, d'autre part, qu'aucun principe général du droit ne prévoit que la personne appelée à s'expliquer sur des griefs formulés à son encontre puisse - compte tenu de sa qualité de membre de cette instance - participer à la formation statuant sur ceux-ci ou sur les modalités d'organisation de la réunion consacrée à leur examen ; que cette exclusion ne se heurte donc pas à un tel principe ;

Considérant que cette exclusion est dès lors justifiée ;

Considérant, d'une part, que la décision mentionne qu'il a été refusé à M. I... de participer au délibéré puisque sa demande a été rejetée à la majorité absolue de 5 voix sur 6 ; que cette mention n'est pas utilement contredite par les notes de M. A... ; qu'un vote a donc été organisé sur sa demande de participer aux délibérés ;

Considérant d'autre part que le président de séance était, compte tenu des développements ci-dessus, en droit de refuser la participation de M. I... à la formation statuant sur sa demande de participation ;

Considérant que le grief n'est pas fondé ;

Sur la publicité des débats

Considérant qu'aucune disposition statutaire ne prévoit la publicité des débats ; que les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas applicables aux organes de groupements examinant la violation d'engagements contractuels ;

Considérant que le bureau exécutif a donc valablement rejeté la demande de publicité des débats ;

Sur le vote

Considérant que le procès-verbal de la décision du bureau exécutif retrace le déroulement de la réunion ;

Considérant qu'il en résulte qu'en début de séance, le bureau était composé des six membres dont le nom est précisé dans la décision, que M. I... a soumis des conclusions comportant la demande liminaire de publicité des débats et qu'il a manifesté sa volonté de participer à la délibération, ce qui lui a été refusé, que les membres de la formation disciplinaire se sont alors retirés pour délibérer sans lui, que les 6 membres présents de la formation disciplinaire ont délibéré sur ses demandes de participer au délibéré et de publicité ;

Considérant qu'il en ressort également qu'après cette suspension, M. I... a été informé du rejet de sa demande de publicité des débats, que les débats ont repris et que le dossier a ensuite été examiné au fond, que le président de séance a indiqué qu'il serait répondu à tous les moyens présentés par la défense dans sa décision à intervenir, que la parole a été donnée à M. I... , à son avocat et à M. E..., membre de l'association, que M. I... a eu la parole en dernier et que M. C... a quitté la séance à 16h45 ;

Considérant que le procès-verbal relate qu'après les prises de parole, le président a déclaré la séance close, indiqué que la formation disciplinaire se retirait pour délibérer, précisé que la décision serait rendue prochainement et que la décision motivée serait, par la suite, notifiée à M. I...  ;

Considérant qu'il mentionne qu'il a délibéré sur les questions soumises à la discussion et expose la décision qui est motivée et qui répond à chacun des moyens soulevés par M. I...  ;

Considérant que, dans la soirée du 20 août 2015, le communiqué de presse précité a été publié par le Front national ;

Considérant que la décision motivée datée du 28 août 2015, signée par le président de séance, a été signifiée à M. I... ce même jour ;

Considérant que, comme l'a jugé le tribunal il résulte de ces éléments :

- que M. I... a été appelé préalablement à toute décision, à fournir toutes explications, conformément à l'article 8 des statuts, qu'il a pu s'exprimer et faire valoir tous les moyens qu'il souhaitait pour s'opposer à son exclusion devant la formation disciplinaire, qu'il a été assisté par un avocat et d'un membre de l'association, librement choisis,

- que la formation disciplinaire a examiné les griefs notifiés précisément à M. I... dans sa convocation à l'exception de tout autre et qu'elle a répondu à tous les moyens soutenus par M. I... par une décision motivée,

- que sur les points de "fond" qui ont été examinés après la reprise des débats lors de la réunion du 20 août, alors qu'elle n'était plus composée que de cinq personnes après le départ de M. C... au moment où elle s'est retirée pour délibérer, ses délibérations ont alors été prises, soit à l'unanimité de 5 voix sur 5, soit à la majorité de 4 voix sur 5, de sorte que les voix comptabilisées correspondent exactement au nombre de membres présents lorsqu'elle s'est retirée pour délibérer,

- qu'enfin, le président de séance a indiqué d'une part que la décision serait rendue prochainement, ce qui a été fait dès le 20 août au soir, et, d'autre part, que la décision motivée serait par la suite notifiée à M. I... , ce qui a été fait le 28 août 2015, conformément à l'information donnée à l'issue des débats ;

Considérant qu'on ne peut déduire de cette chronologie et de ces éléments, confirmés par les notes manuscrites prises par M. A... lors de la séance, qui attestent de l'heure de départ de M. C... et de l'heure à laquelle la séance a été levée, que la décision aurait été prise par la formation disciplinaire avant même sa réunion du 20 août 2015 ;

Considérant que les pièces produites par M. I... consistent en des articles de presse contenant des allégations ou de simples supputations qui ne peuvent contredire utilement le procès-verbal ainsi détaillé, l'absence de poursuite ou de droit de réponse étant insuffisante pour en établir la véracité ;

Considérant que la motivation et la mise en forme de la décision postérieurement à son annonce publique ne sont pas contraires aux statuts et ne démontrent pas que le « principe même de l'exclusion ... avait été décidé à l'avance » ;

Considérant que le fait que la décision ait été annoncée publiquement après la réunion du bureau exécutif et rédigée et notifiée 8 jours plus tard - portant la date du 28 août - n'est ni incohérent ni cause de nullité, ce délai s'expliquant par la nécessité de la mettre en forme et aucune disposition statutaire ne l'interdisant ;

Considérant que l'article 17 des statuts du Front national invoqué par M. I... dispose que le secrétaire général « rédige les procès-verbaux des réunions ou assemblées et, en général, toutes les écritures concernant le fonctionnement de l'Association, à l'exception de celles qui concernent la comptabilité » ;

Considérant que la signature de la décision par le seul président de séance ne constitue donc pas une cause de nullité de celle-ci ;

Considérant, ainsi, d'une part que le déroulement de la procédure démontre qu'ont été respectés par la formation disciplinaire les droits de la défense ;

Considérant, d'autre part, que M. I... ne justifie pas que la décision aurait été prise à son égard dans des conditions déloyales ou en violation des statuts ;

Considérant que la demande d'annulation fondée sur ces violations sera donc rejetée ;

Considérant que les articles de presse produits par M. I... sont insuffisants pour remettre en cause ces pièces et justifier le prononcé d'une enquête civile ;

Sur la partialité des « juges disciplinaires »

Considérant que les reproches adressés à M. I... pour lesquels il a été convoqué devant le bureau exécutif en formation disciplinaire relevaient de manquements au contrat unissant les membres du Front national ;

Considérant que le bureau exécutif chargé d'examiner une telle violation ne constitue pas une « juridiction » ou un « tribunal » ; que les termes processuels employés ou l'absence de Mme K... I... et de M. B... ne lui confèrent pas ce caractère ;

Considérant que la décision d'exclusion d'un adhérent d'un parti politique n'interdit pas à celui-ci d'exercer son activité ; qu'elle n'a pas de conséquence professionnelle ; qu'elle est uniquement fondée sur la violation du contrat liant les membres de l'association ;

Considérant que l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne s'applique donc pas aux instances disciplinaires des associations saisies de tels manquements prétendus ; qu'en effet, ceux qui décident l'exclusion sont également parties au contrat d'association ; que le bureau exécutif n'est pas soumis au principe d'impartialité énoncé par cet article ;

Considérant que le bureau exécutif siégeant en formation disciplinaire n'est pas une juridiction ; que les dispositions procédurales régissant la récusation devant les juridictions civiles ou pénales ne sont donc pas applicables ;

Considérant qu'il ne ressort d'aucun principe général du droit que les membres de la formation disciplinaire d'une association politique chargée d'examiner des manquements au contrat liant ses membres sont soumis aux règles d'impartialité dégagées pour des juridictions ;

Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition légale ou réglementaire une quelconque obligation faite à une association politique de prévoir une faculté de récusation ;

Considérant qu'à défaut de principe général du droit ou de dispositions légales ou règlementaires permettant la récusation de membres de l'instance chargée d'examiner des manquements au « pacte associatif », cette faculté de récusation ne peut résulter que des statuts de l'association elle-même ;

Considérant que, compte tenu de leur liberté statutaire, des associations pourraient décider de prévoir une telle possibilité de récusation ;

Considérant que ni les statuts de l'association Front national ni son règlement interne ne prévoient cette faculté ;

Considérant que les statuts et le règlement régissant les relations entre ses membres n'ont donc pas été violés ;

Considérant que la formation disciplinaire a donc pu valablement décider de ne pas faire droit aux demandes de récusation présentées par M. I...  ;

Sur l'existence d'une « justice aux ordres »

Considérant que ce moyen qui renvoie à la partialité prétendue des membres du comité exécutif - et donc à la récusation de ceux-ci ou de l'instance elle-même - n'est pas fondé au vu des développements précédents ;

Sur l'incompétence du bureau pour juger un adhérent également président d'honneur

Considérant que le bureau exécutif est compétent pour exclure un adhérent ;

Considérant qu'il a statué sur la qualité de « membre » de M. I...  ; qu'il a exclu M. I... en sa qualité d'adhérent sans se prononcer sur sa présidence d'honneur ;

Considérant qu'il est donc compétent de ce chef étant précisé qu'il appartiendra à la cour d'apprécier les conséquences de la décision prise à l'encontre de M. I... en sa qualité de membre sur sa qualité de président d'honneur ;

Sur la règle non bis in idem

Considérant que, par décision du 4 mai 2015, le bureau exécutif a prononcé la suspension de M. I... jusqu'au vote d'une assemblée générale extraordinaire ; que sa suspension a été prononcée en raison de propos tenus par lui sur RMC le 2 avril 2015 et dans Rivarol le 9 avril 2015 ;

Considérant que ces propos figurent parmi les griefs reprochés à M. I... et retenus contre lui dans la décision du 28 août 2015 ;

Mais considérant que cette décision a été annulée par un jugement du 2 juillet 2015 revêtu de l'exécution provisoire au motif que sa durée et son sort dépendaient de la convocation d'une assemblée générale extraordinaire non investie d'un pouvoir disciplinaire ;

Considérant qu'ainsi, la décision prise le 4 mai a été annulée en raison de la durée de la « suspension » prononcée ;

Considérant que le jugement était revêtu de l'exécution provisoire ; que l'appel interjeté par le Front national - dont il s'est à terme désisté - n'a pas suspendu les effets de cette décision ;

Considérant que la sanction au titre des articles en cours était donc annulée - sans examen au fond de la faute commise - lors de la décision du bureau exécutif du 28 août 2015 ; qu'elle n'avait donc pas à être prise en compte ;

Considérant que M. I... ne peut dès lors utilement invoquer la règle précitée ;

Considérant, au surplus, que la décision prise indique que tous les griefs « sont considérés comme des fautes graves » ; que si elle ajoute qu'en « tout état de cause », la multiplication de ces fautes caractérise le motif grave justifiant une décision d'exclusion, le caractère de gravité de chacun des griefs est retenu ;

Considérant que les statuts permettent de prononcer l'exclusion « pour motif grave » ; que la gravité de chacun des 15 griefs a donc été considérée pour prononcer cette décision ;

Sur les griefs

Considérant que les statuts du Front national énoncent que l'exclusion peut être prononcée pour cause grave et précisent la procédure à suivre ;

Considérant, d'une part, que M. I... a été informé, dans sa convocation, des griefs formés à son encontre ; qu'il a pu s'expliquer sur chacun d'eux ;

Considérant, d'autre part, que le bureau exécutif a statué sur chacun d'eux ; qu'il a apprécié leur bien fondé et retenu leur gravité ;

Considérant que le principe de légalité n'a donc pas été enfreint ;

Considérant que, comme l'indique l'intimé, la cour doit apprécier la proportionnalité de la sanction aux faits qui l'ont motivée ;

Considérant que le bureau a considéré que chacun des griefs invoqués était fondé et constituait une faute grave sanctionnée par les statuts estimant que les propos tenus le :
- 2 avril 2015 sur RMC, constituent la réitération de propos anciens, condamnés par la justice, blessants et propres à faire peser sur le parti et sur sa direction l'accusation d'antisémitisme et ajouté que d'autres adhérents ayant tenu des propos de même nature avaient été sévèrement sanctionnés par la commission de discipline,

- 9 avril 2015 sur RTL, imputent à la présidente du Front national la volonté de lui nuire personnellement et de poursuivre un tout autre but que celui de la bonne marche du mouvement politique qu'elle préside,

- 10 avril sur RTL, imputent à la présidente du Front national la volonté de vouloir nuire au parti, jusqu'à sa disparition, que Mme K... I... et M. B... sont accusés de mener une entreprise de déstabilisation et de destruction à l'égard du FN, que ces propos sont encore révélateurs, d'une ferme volonté de faire du tort et d'affaiblir publiquement la direction du FN et le FN (ses militants, ses adhérents, ses électeurs) tout entier, et de se présenter comme une victime innocente,

- 5 mai 2015 sur Europe l, constituent des injures très graves, publiques, à l'égard de la présidente du Front national en tentant, en outre, de l'atteindre dans ses sentiments intimes et que M. I... a tenté d'affaiblir et de saboter l'action politique de la présidente du Front national,

- 12 mai 2015 sur RTL, imputent à M. B... d'agir au détriment des règles du Front national, constituent une injure publique en ce qu'ils affirment que M. B... place, aux leviers de commandes, des personnes pour la seule raison qu'elles sont homosexuelles, manifestent la volonté de rabaisser et humilier publiquement le FN, expriment le mépris visant intentionnellement à contester l'autorité du bureau politique,

- 13 mai 2015 sur BFM, dépeignent M. B... et ceux qui l' entourent sous un jour très défavorable et très péjoratif, en lui imputant de vouloir « coloniser le FN à l'aide de ses amis » à tel point que le FN « déraille dans le but déterminé d'affaiblir la présidente du Front national, de saboter son autorité en interne au FN et sa crédibilité dans sa vie publique,

- 3 juin 2015 dans le journal de bord diffusé sur le réseau Youtube, accusent M. B... « d'espionner en interne les échanges entre les dirigeants et militants » ce qui constitue une infraction pénale grave et qu'il est également proféré à son égard une injure publique grossière,

- 2 juillet 2015 sur I-Télé, sont une tentative d'affaiblir politiquement et humainement Mme L...  D...    -I...   dans le cadre des élections régionales en PACA alors qu'elle a été investie comme la tête de liste, démontrent la volonté de saboter cette campagne, d'autant plus grave que M. I... , président sortant du groupe FN à la région PACA, indique avoir toujours une influence importante au sein de cette région,

- 20 juillet 2015 à l'AFP, sont encore une tentative d'affaiblir politiquement Mme L...  D...     -I...   dans le cadre des élections régionales en PACA alors qu'elle a été investie comme la tête de liste,

- 20 juillet 2015 sur le site de France bleu Provence, sont contraires aux intérêts du FN, constituent à nouveau une tentative publique, dans un important organe de presse en PACA, d'affaiblir politiquement et intentionnellement Mme L...   D...   -I...   et constituent également un encouragement pour une éventuelle dissidence à la candidature présentée par le Front national,

- 22 juillet 2015 reproduits dans Le Parisien, sont une nouvelle tentative publique d'affaiblir politiquement Mme L...   D...-I...  dans le cadre des élections régionales en PACA alors qu'elle a été investie comme la tête de liste, qu'en indiquant ainsi dans une presse généralement très peu favorable au FN et à sa présidente et très encline à mettre en exergue tout ce qui peut les défavoriser que Mme L... D... -I...         n'a ni l'envergure ni l'expérience pour diriger la région, M. I... se livre à une tentative de sabotage et d'humiliation publique,

- 22 juillet 2015 reproduits dans Le Parisien, comportent des imputations d'une très grande gravité qui ne font l'objet d'aucun début de preuve, leur expression étant purement gratuite et destinée uniquement à nuire à M. B... et au Front national ;

Considérant que le bureau exécutif considère également que le communiqué publié le 29 juillet 2015 est contraire aux intérêts du Front national, révélateur d'une ferme volonté de faire du tort et d'affaiblir publiquement la direction du Front national et le Front national, en diffusant de fausses informations ;

Considérant qu'il estime en outre que M. I... a, par sa présence le 1er mai 2015 sur la place de l'Opéra, alors que seuls étaient admis à la tribune les nouveaux élus départementaux, dans un contexte de crise entre lui et le FN, de façon délibérée et provocatrice, observé une attitude inadmissible, principalement en ce qu'elle a gêné la présidente du FN et en ce qu'elle était destinée à tenter de l'humilier devant les militants du FN rassemblés et à troubler, nuire, rabaisser et humilier le Front national et sa présidente ;

Considérant, enfin, qu'il a estimé que les propos tenus au journal Rivarol constituent, « concernant le maréchal Pétain » une provocation à l'égard du Front national et, concernant les homosexuels, étaient particulièrement blessants ;

Considérant que, comme l'a jugé le tribunal, il en résulte qu'à de nombreuses reprises entre le mois d'avril et le 4 août 2015, M. I... a tenu des propos, dans des émissions et supports de presse écrites, essentiellement à diffusion nationale dont il ne conteste pas la teneur, et adopté un comportement délibérément et ouvertement outrageant voire injurieux envers des membres dirigeants du Front national et d'autres membres de ce mouvement ; qu'il en résulte également qu'il a mis en doute leur capacité à exercer leurs responsabilités et à assurer un mandat électif portant ainsi atteinte à leur crédibilité publique et nuisant à leurs desseins électoraux et au Front national ;

Considérant que M. I... ne pouvait compte tenu des responsabilités qu'il a exercées et des médias auxquels il s'est adressé méconnaître la portée de ces propos publics réitérés ;

Considérant que le différend l'opposant au Front national et la liberté de ton admise à son égard au sein de ce mouvement ne peuvent minorer l'importance et les conséquences pour l'association de ces propos ;

Considérant qu'il ne justifie d'aucune « excuse absolutoire » ou de circonstance de nature à justifier ces propos ;

Considérant que la formation disciplinaire a justement considéré que chacun des propos ou attitudes précités constituaient des manquements graves au pacte associatif unissant les membres du Front national et a pu décider d'exclure M. I... en qualité de membre du Front national ;

Considérant qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, M. I... sera donc débouté de ses demandes d'annulation de la sanction d'exclusion prononcée à son encontre, d'enquête civile et de réintégration en qualité de membre du Front national ;

Considérant que le jugement sera, en conséquence, confirmé de ces chefs ;

Sur la présidence d'honneur

Considérant que l'assemblée générale extraordinaire du Front national tenue le 15 janvier 2011 à Tours a approuvé la création d'un article 11 bis des statuts du Front national qui dispose :
« L'Assemblée générale ordinaire (Congrès) peut nommer un président d'honneur sur proposition du Conseil d 'administration (Bureau politique).
Il est membre de droit de toutes les instances du mouvement (Conseil national, Comité central, Bureau politique, Bureau exécutif, Commission nationale d'investitures).
Pour pouvoir être nommé, il devra avoir accompli deux mandats comme président du Front national, et cependant une durée d'au moins cinq ans » ;

Considérant que M. I... a été nommé président d'honneur par l'assemblée générale ;

Considérant qu'aucune disposition légale ou règlementaire ne dispose que le président d'honneur d'une association est nécessairement membre de celle-ci ;

Considérant qu'il appartient donc à l'association concernée, si elle entend imposer cette règle, de démontrer qu'il résulte de ses statuts que la qualité de président d'honneur est subordonnée à celle de membre ;

Considérant que le président d'honneur du Front national est nommé par l'assemblée générale ;

Considérant que l'article précité prévoit des conditions à cette nomination mais ne la subordonne pas à la qualité de membre ;

Considérant qu'aucune disposition des statuts n'énonce expressément que le président d'honneur doit être adhérent de l'association ;

Considération que la création de ce poste par les statuts, nécessaire à toute création d'une présidence d'honneur, ne suffit pas à établir que son titulaire doit être membre de l'association ;

Considérant que l'assemblée générale peut donc nommer un président d'honneur non membre du Front national ;

Considérant que le président d'honneur est membre de droit de certaines instances en sa qualité de président d'honneur ; qu'il ne peut donc s'inférer de cette participation qu'il est nécessairement membre de l'association ;

Considérant qu'il n'est nullement mentionné dans les statuts que la nomination d'un président d'honneur suffit à faire de celui-ci un membre de l'association ;

Considérant, en ce qui concerne l'article 6 des statuts aux termes duquel l'association « se compose de membres bienfaiteurs et de membres actifs » que, d'une part, il n'évoque pas la situation du président d'honneur ;

Considérant, d'autre part, qu'il permet aux instances dirigeantes de refuser les demandes d'adhésion ;

Considérant qu'il est donc incompatible avec la nomination par l'assemblée générale d'un président d'honneur dont l'adhésion en tant que membre actif ou bienfaiteur pourrait, statutairement, être refusée par les instances dirigeantes ;

Considérant qu'aucune disposition statutaire ou principe général du droit ne subordonne donc la qualité de président d'honneur à celle de membre de l'association ou ne confère au président d'honneur la qualité de membre de l'association ;

Considérant qu'il appartenait à l'association si elle entendait réserver aux seuls adhérents la qualité de président d'honneur de le prévoir dans ses statuts ; qu'il lui appartenait également de prévoir que l'exclusion du président d'honneur en qualité de membre entraînait la perte de la qualité de président d'honneur ;

Considérant qu'elle ne peut en conséquence, à défaut de toute stipulation, prétendre utilement que l'exclusion prononcée de M. I... lui fait perdre sa qualité de président d'honneur ;

Considérant qu'elle ne peut donc exciper du comportement de M. I... , telle qu'elle l'allègue, pour faire valoir qu'il est « rigoureusement impossible » que celui-ci puisse continuer à être président d'honneur ;

Considérant que l'exclusion de M. I... du Front national en tant que membre n'a donc pas d'effet sur sa qualité de président d'honneur ;

Considérant que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Considérant qu'il sera également confirmé en ce qu'il a jugé, en conséquence, que M. I... devrait être convoqué en qualité de membre de droit des instances énumérées à l'article 11 bis alinéa 2 des statuts et qu'il pourrait y participer ;

Considérant que l'astreinte fixée par le tribunal est justifiée par la nécessité d'assurer l'exécution de cette décision ; que son montant sera, compte tenu du refus du Front national d'exécuter le jugement assorti de l'exécution provisoire, porté à 5 000 euros ; qu'elle courra à l'expiration d'un délai d'un mois après la signification de la présente décision ;

Considérant qu'il n'est toutefois pas justifié que la cour s'en réserve la liquidation ;

Considérant qu'il n'appartient pas à la cour de désigner un huissier chargé de constater les éventuelles infractions, l'intéressé ayant la faculté de requérir l'huissier de son choix ;

Considérant, en ce qui concerne les moyens matériels qui avaient été mis à la disposition de M. I... en sa qualité de président d'honneur, que ceux-ci ne sont pas prévus par les statuts ; que sa demande sera donc rejetée ;

Considérant que l'association Front national a interdit à M. I... d'exercer ses prérogatives de président d'honneur ; que, nonobstant le jugement querellé, elle a continué à lui interdire l'accès aux organes dont il est membre de droit ; qu'elle a diffusé les résultats de la consultation organisée sur la suppression de la présidence d'honneur malgré son annulation par la justice, jetant ainsi un doute sur la légitimité du poste de M. I...  ;

Considérant que ces manquements ont causé un préjudice moral certain à M. I...  en portant atteinte, notamment, à sa dignité et à sa représentativité ;

Considérant que compte tenu de la poursuite de l'empêchement qui lui a été fait d'exercer ses prérogatives, il sera alloué à M. I... une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Sur les autres demandes

Considérant que, compte tenu du sens du présent arrêt, l'équité justifie de rejeter les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que les dépens seront toutefois à la charge de l'association Front national, appelante ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

Confirme le jugement sauf en ce qui concerne le montant de l'astreinte prononcée et sa liquidation et le montant des dommages et intérêts alloués,

Statuant de nouveau de ces chefs :

Fixe à 5 000 euros par infraction constatée l'astreinte prononcée à l'encontre de l'association Front national passé le délai de 1 mois à compter de la signification de la présente décision,

Ne se réserve pas la liquidation de l'astreinte,

Condamne l'association Front national à payer à M. Y... I... la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts,

Y ajoutant :

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne l'association Front national aux dépens,

Autorise Maître Dupuis, du cabinet Lexavoué Paris Versailles, à recouvrer directement à son encontre ceux des dépens qu'elle a exposés sans avoir reçu provision.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1a
Numéro d'arrêt : 16/085411
Date de la décision : 09/02/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

Arrêt rendu le 9 février 2018 par la 1ère chambre 1ère section de la cour d’appel de Versailles RG 16/08541 Parti politique – discipline – exclusion d’un membre – régularité de la procédure (oui) – juste motif d’exclusion ( oui) – propos exprimant de graves accusations, injures, confirmation- exclusion n’ayant aucun effet sur la qualité de président d’honneur du membre évincé. La cour confirme le jugement entrepris en ce qu’il a estimé que le bureau exécutif du Front National, réuni en formation disciplinaire, a considéré que chacun des propos ou attitudes de M. Le Pen constituaient des manquements graves au pacte associatif unissant les membres du Front national et a pu décider ainsi d'exclure M. Le Pen en qualité de membre du Front national. Et pour dire et juger que l’exclusion de M. le Pen du Front national en tant que membre n’a pas d’effet sur sa qualité de président d’honneur, la cour retient qu’aucune disposition statutaire ou principe général du droit ne subordonne la qualité de président d’honneur à celle de membre de l’association ou ne confère au président d’honneur la qualité de membre de l’association qui ne peut donc prétendre utilement que l’exclusion prononcée de M. Le Pen lui fait perdre sa qualité de président d’honneur.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2018-02-09;16.085411 ?
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