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31/01/2018 | FRANCE | N°16/01307

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 31 janvier 2018, 16/01307


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



contradictoire



DU 31 JANVIER 2018



N° RG 16/01307



AFFAIRE :



[R] [N]





C/

SAS DEGETEL









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

Section : Encadrement

N° RG :





Copies ex

écutoires délivrées à :



Me Juliette RENAULT



Me Lamiel BARRET KRIEGEL





Copies certifiées conformes délivrées à :



[R] [N]



SAS DEGETEL







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE TRENTE ET UN JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT,

La cou...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 31 JANVIER 2018

N° RG 16/01307

AFFAIRE :

[R] [N]

C/

SAS DEGETEL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

Section : Encadrement

N° RG :

Copies exécutoires délivrées à :

Me Juliette RENAULT

Me Lamiel BARRET KRIEGEL

Copies certifiées conformes délivrées à :

[R] [N]

SAS DEGETEL

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRENTE ET UN JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [R] [N]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Assisté de Me Juliette RENAULT, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

SAS DEGETEL

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Lamiel BARRET KRIEGEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2099

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Décembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claire GIRARD, président chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Claire GIRARD, Président,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Gaëlle POIRIER,

FAITS ET PROCÉDURE :

M. [R] [N] a été embauché par la société Neotilus devenue la société Degetel selon contrat à durée indéterminée à temps complet du 30 janvier 2006 en qualité de consultant moyennant une rémunération brute mensuelle s'élevant en dernier lieu à 3 972,69 euros selon le salarié et à 3 858,92 euros selon l'employeur.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques dite Syntec. La société Degetel employait habituellement au moins onze salariés au moment de la rupture du contrat de travail.

S'estimant victime de harcèlement moral, M. [R] [N] a saisi le 25 juillet 2014 le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt (section encadrement) qui a, par jugement du 11 février 2016 auquel il y a lieu de se reporter pour l'exposé des faits, prétentions et moyens antérieurs des parties :

- dit et jugé que M. [R] [N] n'a fait l'objet d'aucun harcèlement moral et que la société Degetel n'a pas manqué à son obligation de sécurité,

- débouté M. [R] [N] de l'intégralité de ses demandes,

- débouté la société Degetel de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [R] [N] aux entiers dépens.

M. [R] [N] a régulièrement relevé appel de la décision le 28 mars 2016.

M. [R] [N] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 22 décembre 2016 par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 décembre 2016 et a été licencié sous la même forme le 26 décembre 2016 pour faute simple.

Aux termes de ses conclusions du 5 décembre 2017, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens, M. [R] [N] demande à la cour de :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt,

- condamner la société Degetel à lui verser les sommes suivantes :

* 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

* 73 556,34 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul à titre principal et, subsidiairement, 61 296,95 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 993,17 euros au titre de son treizième mois,

* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que toutes ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la demande de convocation portée devant le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt,

- condamner la société Degetel aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions du 5 décembre 2017, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens, la société Degetel demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes,

- débouter M. [R] [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [R] [N] au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [R] [N] aux entiers dépens.

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 5 décembre 2017,

Vu la lettre de licenciement,

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, interprété à la lumière de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié présente des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. [R] [N], qui a saisi le conseil de prud'hommes aux fins d'obtenir des dommages-intérêts mais sans solliciter la résolution judiciaire de son contrat de travail, aux termes de ses conclusions, se plaint :

d'agissements de harcèlement moral antérieurs au bureau de jugement :

- le recours à la CNIL aurait été nécessaire pour avoir accès à son dossier personnel,

- il n'aurait pas été augmenté,

- ses heures de droit individuel à la formation (DIF) ne lui auraient pas été payées,

- il aurait subi des propos dénigrants de ses supérieurs hiérarchiques,

- il aurait rencontré des problèmes de chauffage dans son bureau ainsi que de poussière,

- son employeur lui a demandé la justification de ses frais de téléphone pour leur prise en charge,

- son employeur aurait déclaré tardivement un accident de trajet,

d'agissements postérieurs au bureau de jugement :

- il se plaint d'une mise à l'écart pour être resté plusieurs mois en intermission,

- il prétend avoir été affecté sur un projet interne fictif dans un bureau vide et insalubre, la poussière lui ayant causé une violente quinte de toux lui occasionnant un arrêt de travail de deux jours,

- il lui aurait été proposé une mission au sein de la société Orange à [Localité 3], loin de chez lui.

M. [R] [N], pour justifier de ses allégations de harcèlement moral, verse notamment aux débats :

' son contrat de travail,

' une plainte adressée par son avocat au procureur de la République de Paris le 19 février 2013,

l'avis de classement du procureur de la République de Nanterre et un procès-verbal d'audition devant les services de police,

' la réponse de la CNIL à la plainte déposée par M. [R] [N],

' un certificat médical du 24 janvier 2012 de l'association médicale interentreprises mentionnant une 'symptomatologie ulcéreuse persistante, des troubles du sommeil et une fatigabilité, symptôme que le patient relie avec des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie',

' les certificats médicaux et prescriptions de son médecin traitant concernant un 'syndrome dépressif en raison de problèmes familiaux et de travail',

' son dossier médical établi par le médecin du travail,

' la photocopie totalement illisible d'une fiche d'aptitude médicale,

' l'arrêt de travail du 5 au 7 octobre 2016,

' le certificat médical du 24 mars 2011 de l'association médicale interentreprises mentionnant l'accident de trajet,

' un courrier du 6 décembre 2010 aux termes duquel l'employeur accepte de prendre en charge des frais de réparation du véhicule en précisant qu'il appartient normalement à l'assureur personnel de les prendre en charge,

' différents échanges de courriels relatifs à des sujets divers : accident de trajet de novembre 2010, organisation du travail, heures de DIF, problèmes de chauffage, frais téléphoniques, présentation de l'équipe commerciale, livre blanc, etc,

' des photographies envoyées par courriel à la direction de la société Degetel le 5 octobre 2016,

' ses bilans annuels de performance,

' ses bulletins de paie,

' le procès-verbal de la réunion du CHSCT du 19 janvier 2017.

S'agissant en premier lieu du défaut d'augmentation de M. [R] [N], les pièces versées aux débats attestent qu'il a bénéficié d'augmentations, y compris en 2015 alors qu'il prétendait être au placard à cette époque, tandis que ses évaluations et bilans annuels de performance démontrent que son travail est très apprécié par son employeur tout au long de ces années. Les échanges avec la CNIL ne révèlent par ailleurs aucun agissement répréhensible de la part de l'entreprise et le dossier a été clos auprès de la CNIL.

Les propos dénigrants que M. [R] [N] attribue à ses supérieurs hiérarchiques ne résultent d'aucune des pièces communiquées, particulièrement des nombreux courriels d'échanges entre M. [R] [N] et ses supérieurs dont la cour a pris connaissance avec la plus grande attention et desquels il ressort que le salarié adopte en revanche une attitude particulièrement procédurière et un ton parfois irrévérencieux. Il sera par ailleurs précisé qu'il résulte des échanges par courriels d'octobre 2016 versés aux débats que le supérieur hiérarchique de M. [R] [N] a accepté, à la demande de celui-ci, la présence d'un délégué du personnel aux réunions du travail du salarié avec son supérieur hiérarchique, alors même que rien ne l'y obligeait.

En ce qui concerne la non déclaration d'accident de trajet, M. [R] [N] ne justifie pas avoir déclaré à son employeur l'existence d'un quelconque dommage corporel sitôt après son accident de trajet du 23 décembre 2010, le premier élément à ce sujet étant un courrier du 6 décembre 2010 ne mentionnant que des dommages matériels, étant précisé que lorsqu'en mars 2011, le salarié s'est plaint par mail de la dégradation de ses conditions de travail, notamment en raison de douleurs qui seraient consécutives à son accident de trajet, la déclaration a aussitôt été effectuée. Le seul certificat médical par ailleurs versé aux débats, s'agissant de cet accident de trajet, est daté du 24 mars 2011, le médecin du travail précisant qu'il voit le salarié pour la première fois à ce sujet.

Le non-paiement reproché des heures de DIF est insuffisamment caractérisé au vu des pièces versées aux débats par M. [R] [N]. Quant aux frais téléphoniques, le fait que l'employeur ne prenne en charge que les appels professionnels de ses salariés, à l'exclusion de leurs appels personnels, ne relève que d'un souci de bonne et saine gestion et ne peut s'apparenter à du harcèlement moral, la mise à disposition d'une ligne téléphonique avec carte prépayée ne s'expliquant en outre que par le refus de M. [R] [N] de communiquer ses relevés téléphoniques personnels permettant la ventilation des appels et ne constitue en aucun cas une mesure vexatoire.

À compter d'octobre 2015, M. [R] [N] se plaint d'avoir été « mis au placard ». La situation d'intercontrat est inhérente à la profession de consultant dans une SSII et M. [R] [N] qui a, au surplus, assisté à plusieurs réunions, reconnaît toutefois avoir refusé une mission, notamment en juillet 2016, qui l'aurait contraint à voyager en Europe, bien qu'étant en conformité avec les stipulations de son contrat de travail. Alors affecté à la rédaction d'un livre blanc sur les objets connectés, M. [R] [N] s'est plaint, à la fois du caractère fictif de ce projet dont il rapporte nullement la preuve ainsi que de l'insalubrité de son lieu de travail qui ne résulte toutefois que de ses propres affirmations puisque les trois photos envoyées par courriel à la direction sont particulièrement floues et peu probantes. L'insalubrité des lieux n'est pas démontrée, pas plus que leur imputabilité aux conséquences alléguées (crise de toux, irritation des bronches, troubles gastro-intestinaux et cardiaques) l'ayant conduit à être deux jours en arrêt de travail puis à consulter le médecin du travail. Les problèmes de chauffage ne sont pas davantage avérés.

S'agissant de la mission au sein de la société Orange basée à [Localité 3] et à [Localité 4], fin novembre 2016, celle-ci est compatible avec le lieu d'activité mentionné dans le contrat de travail de M. [R] [N]. Si celui-ci affirme n'être pas apte à travailler à plus de 45 minutes de chez lui, la pièce 27 qu'il produit pour en justifier est illisible et ne peut en outre être retenue par la cour. Si M. [R] [N] s'est toutefois rendu à [Localité 3] pour faire sa présentation clientèle, ainsi qu'il résulte des échanges de courriels, la mission n'a toutefois pas été poursuivie par l'employeur compte tenu des multiples difficultés soulevées par le salarié dont attestent ses courriels qu'il verse aux débats.

Enfin, les documents médicaux produits établissent l'existence d'un 'syndrome dépressif imputable à des problèmes familiaux et de travail', étant toutefois observé que ces mentions ne procèdent que des dires du salarié à son médecin, rapportés par l'homme de l'art et non de constatations médicales effectuées par le praticien.

En conséquence de l'ensemble des éléments ci-dessus énoncés, la cour ne retient pas que les éléments présentés par M. [R] [N] sont de nature à constituer des agissements répétés qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, étant précisé que sa plainte pénale a par ailleurs fait l'objet d'un classement sans suite. La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Sur le licenciement

La cour n'ayant pas retenu le harcèlement moral, M. [R] [N] sera débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement nul. Invoquant l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, il sollicite à titre subsidiaire une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Aux termes des dispositions de l'article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article L. 1235-1 du code du travail précise qu'en cas de litige et à défaut d'accord, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Il est ajouté que, si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi, l'administration de la preuve du caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis, objectifs imputables au salarié et matériellement vérifiables.

Il convient enfin de rappeler que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les limites du litige. En l'espèce, les termes en sont les suivants :

« Nous faisons suite à notre entretien préalable de licenciement du 22 décembre 2016 au cours duquel nous vous avons exposé les raisons pour lesquelles nous envisagions votre licenciement.

Nous sommes aujourd'hui contraint de vous notifier ce licenciement pour les motifs suivants.

Le 13 septembre dernier, vous avez été affecté à une mission de gestion de projet technico-fonctionnel dans les locaux de notre client Objenious. Cette mission devait durer jusqu'au 31 décembre 2016 et était ensuite renouvelable.

Cette mission a pris fin prématurément le lendemain. Quand nous vous avions interrogé sur les raisons de cette interruption de mission, vous nous aviez fait part de votre ignorance quant à ces raisons puisque, de votre point de vue, tout s'était déroulé normalement.

Or nous venons d'apprendre par courrier du 9 décembre dernier de notre client, que votre attitude a, bien au contraire, été inadmissible et nous ne pouvions imaginer que votre sortie prématurée de ce projet reposait sur des motifs aussi graves.

En effet, le client vient de nous informer que vous avez catégoriquement refusé d'arriver avant l0 h au travail y compris pour la réunion de lancement du projet (réunion de kick-off) avec le client final d'Objenious qui devait se tenir le 20 septembre 2016.

Conformément à la lettre que nous vous avons lue et montrée lors de l'entretien préalable, le client nous a écrit : « devant un tel manque d'implication et un tel refus, nous avons pris la décision le 14/9 d'interrompre prématurément sa mission et nous vous avons demandé son remplacement ; afin d'avoir un intervenant faisant preuve de la motivation attendue ».

Votre attitude et la dissimulation que vous avez tenté de faire de la situation est tout simplement inadmissible. Nous vous rappelons que votre contrat de travail prévoit en son article 10 :

« le Salarié devra bien sûr s'efforcer de donner aux Clients la plus entière satisfaction et d'éviter, par son action, toute plainte contre la Société. [...]

Toute action du Salarié auprès d'un Client, sans accord préalable, ayant pour but ou pour effet une rupture anticipée du Contrat liant le Client à Neotilus, sera susceptible d'être qualifiée de faute lourde. »

En votre qualité de cadre et Consultant depuis plus de 10 ans dans notre société, vous n'êtes pas sans savoir les conséquences d'une telle attitude.

Nous avons dû accorder la gratuite de votre intervention auprès de notre client Objenious et notre relation commerciale a été fragilisée par votre comportement qui a porté atteinte à l'image de notre société.

Votre attitude, qui nous cause un important préjudice, est totalement inacceptable et rend impossible la poursuite de notre relation contractuelle.

Les explications que vous nous avez fournies lors de notre entretien préalable ne nous permettent pas de modifier notre appréciation à cet égard.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, nous sommes dans l'obligation de rompre votre contrat de travail et nous vous notifions par la présente votre licenciement.

Vous bénéficiez d'un préavis d'une durée de trois mois qui débute à la date de première présentation de la présente à votre domicile. Nous vous dispensons de toute activité pour la durée totale du préavis. Vous continuerez bien évidemment à percevoir votre rémunération aux échéances habituelles. [...] »

En l'espèce, il est ainsi reproché à M. [R] [N] d'avoir refusé de se rendre sur le lieu de sa mission à l'heure demandée par le client de la société Degetel, la société Objenious, ayant conduit celle-ci à mettre un terme à la mission du salarié au vu du manque de motivation de M. [R] [N] et de son opposition à l'organisation souhaitée.

Aux fins d'établir la réalité des faits et l'existence d'une cause réelle et sérieuse au licenciement dont M. [R] [N] a fait l'objet, la société Degetel verse aux débats la lettre de M. [G], CTO de Objenious du 9 décembre 2016, à l'attention de Mme [W] [V], responsable juridique de Degetel, corroborant ses précédentes déclarations orales, selon lesquelles l'intervention du consultant, M. [R] [N], débutée le 13 septembre, a pris fin dès le lendemain puisqu'une réunion de kick-off avec le client final était planifiée le mardi 20 septembre à 10 heures à Vélizy. Ayant demandé à M. [R] [N] de les retrouver à 9h30 dans les locaux de la société Objenious afin de partir ensemble, celui-ci a catégoriquement refusé en indiquant qu'il lui était impossible d'arriver avant 10 heures ni ce jour-là, ni les autres jours, à cause de contraintes personnelles auxquelles il a dit ne pas pouvoir se soustraire, de sorte que ce manque d'implication et ce refus a conduit la société Objenious, le 14 septembre, à interrompre la mission de M. [R] [N] et à solliciter de la société Degetel son remplacement pour avoir un intervenant faisant preuve de motivation, étant en outre précisé que M. [R] [N] a été en arrêt maladie du 15 au 21 septembre. La prescription de la faute alléguée par M. [R] [N] en application des dispositions de l'article L. 1332'4 du code du travail ne sera en outre pas retenue dans la mesure où l'engagement des poursuites disciplinaires a bien eu lieu dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur a eu connaissance des faits fautifs par la lettre du 9 décembre 2016, le salarié ne justifiant pas par ailleurs la connaissance antérieure des faits par l'employeur.

Pour contester la mesure de licenciement dont il a fait l'objet, M. [R] [N] a adressé un courrier le 12 janvier 2017 à la société Degetel aux termes duquel il nie avoir tenu de tels propos et fait valoir qu'il avait au contraire convenu avec M. [T] de se rendre en sa compagnie depuis le site du [Localité 5] à la réunion du 20 septembre. Il conteste par ailleurs la neutralité de M. [G] qui serait un des associés de la société Degetel, étant précisé que la capture d'écran en pièce 67 qu'il verse aux débats à l'appui de ses affirmations est totalement illisible et ne permet pas de conforter ses assertions. La cour relève en outre qu'il ne verse aux débats aucune attestation de M. [X] [T] qu'il cite toutefois comme étant son seul interlocuteur direct au sein de la société Objenious et dont le témoignage aurait pu apporter la preuve de l'absence de tenue des propos reprochés à l'appui de la mesure de licenciement et qu'il conteste.

Dès lors, les propos tenus par M. [R] [N] à un client démontrant son manque de motivation sont établis et sont de nature à ternir l'image de la société, de sorte que le licenciement dont M. [R] [N] a fait l'objet repose sur une cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes pécuniaires

Les agissements de harcèlement moral n'ayant pas été retenus, M. [R] [N] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts à ce titre. La décision attaquée sera confirmée sur ce point.

Le licenciement dont M. [R] [N] a fait l'objet repose sur une cause réelle et sérieuse, celui-ci sera débouté de ses demandes d'indemnité pour licenciement nul et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au vu des stipulations du contrat de travail sur le 13e mois et de son solde de tout compte, il ne sera pas fait droit à la demande de M. [R] [N] à ce titre.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de M. [R] [N].

Seule la demande formée en cause d'appel par la société Degetel au titre des frais irrépétibles sera accueillie, à hauteur de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 11 février 2016 par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt (section encadrement) en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit que le licenciement dont M. [R] [N] a fait l'objet repose sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [R] [N] de l'ensemble de ses demandes,

Condamne M. [R] [N] à payer à la société Degetel la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [R] [N] aux dépens d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claire GIRARD, président et par Madame POIRIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 16/01307
Date de la décision : 31/01/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 19, arrêt n°16/01307 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-31;16.01307 ?
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