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25/01/2018 | FRANCE | N°17/00092

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 25 janvier 2018, 17/00092


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80H

5e Chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 JANVIER 2018



N° RG 17/00092



AFFAIRE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES





C/

[M] [K]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Novembre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES

N° RG : 14-00561





Copies exécutoires déliv

rées à :



Me Julie AUBIN



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES





Copies certifiées conformes délivrées à :



[M] [K]







le :

REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT,...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80H

5e Chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 JANVIER 2018

N° RG 17/00092

AFFAIRE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

C/

[M] [K]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Novembre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES

N° RG : 14-00561

Copies exécutoires délivrées à :

Me Julie AUBIN

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

Copies certifiées conformes délivrées à :

[M] [K]

le :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par M. [B] [R] en vertu d'un pouvoir général

APPELANTE

****************

Monsieur [M] [K]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Julie AUBIN, avocat au barreau de PARIS

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 30 Novembre 2017, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,

Madame Sylvie CACHET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Adrien CROUZET

M. [M] [K] est docteur en médecine depuis 1989. Médecin généraliste, il s'est installé, en janvier 1991, à [Localité 1], dans l'agglomération mantaise, dans le département des Yvelines.

Compte tenu de la situation médicale dans son secteur telle qu'il l'appréciait, M. [K] a décidé d'ouvrir son cabinet les samedis, y compris les samedis après-midi, facturant, pour les consultations de l'après-midi, des majorations dites 'majorations F', correspondant aux dimanches et jours fériés (également applicables, sous certaines conditions, le samedi après-midi pour des actes réalisés par un médecin généraliste s'il est de garde).

La caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines (ci-après, la 'CPAM' ou la 'caisse'), ayant relevé cette pratique et la considérant comme irrégulière, en a fait part à M. [K].

Puis, le 12 juin 2009, la caisse a envoyé à M. [K] une lettre d'explications, suite aux interrogations de ce praticien.

Le 29 septembre 2011, la caisse a adressé à M. [K] une notification d'indu pour un montant de 29 058,70 euros, motif pris d'une méconnaissance des dispositions des avenants 4 et 27 à la convention médicale nationale de 2005, dont les dispositions ont été reconduites par règlement arbitral du 03 mai 2010.

Il était reproché au médecin d'avoir facturé des majorations 'F' le samedi après-midi, sans avoir adhéré à la permanence des soins, conformément à l'article R.730 du code de la santé publique.

Le 08 novembre 2011, M. [K] est entendu dans ses explications.

Le 14 décembre 2011, la caisse a adressé à M. [K] une mise en demeure d'un montant de 31 964,57 euros, incluant 10% de majorations de retard, accompagnée du compte rendu de l'entretien du 08 novembre 2011.

Le 05 janvier 2012, la caisse lui a adressé un accord pour la remise gracieuse de la majoration de retard suite à l'engagement du 19 décembre 2011 de M. [K] de rembourser sa dette en six mensualités.

Le 21 mars 2012, la caisse lui a adressé une proposition de règlement amiable de l'indu pour un montant de 23 827 euros, après réduction de 18%, suite à une concertation avec les représentants de la profession et à titre dérogatoire. Cette proportion de 18% correspondait au pourcentage de la patientèle pour laquelle le Docteur [K] n'était pas médecin traitant, pendant la période concernée.

Le courrier invitait également M. [K] à respecter les avenants 4 et 27 à la convention médicale nationale, ainsi que l'article 14 de la nomenclature générale des actes professionnels (ci-après 'NGAP').

Le 05 juin 2012, une nouvelle notification de l'indu initial de 29 058,70 euros lui a été adressée, compte tenu de l'absence de réponse à la proposition de règlement amiable de la dette.

Le 23 juillet 2012, une mise en demeure du règlement de la somme de 29 058,70 euros lui a été envoyée, avec application de la majoration de retard de 10%, à défaut de paiement dans le délai d'un mois.

M. [K], contestant cette créance dans son principe et son montant, a saisi la commission de recours amiable, le 02 août 2012.

Le 18 janvier 2013, la décision de la commission de recours amiable de la caisse lui a été notifiée, maintenant la créance à la somme principale de 29 058,70 euros.

Puis une contrainte a été délivrée par la CPAM, en date du 25 mars 2014, en vue du recouvrement de la somme de 29 058,70 euros, augmentée d'une somme de 2 905,87 euros, pour les majorations de retard, relative à la facturation indue de majorations d'honoraires pour jours fériés, concernant des actes médicaux effectués du 04 avril 2009 au 27 août 2011.

M. [K] a fait opposition à cette contrainte, signifiée le 27 mars 2014 devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines (ci-après, le 'TASS') en lui demandant de :

- annuler la décision du directeur de la CPAM des Yvelines du 25 mars 2014 portant une contrainte d'un montant de 29 058,70 euros à son encontre, ainsi que la notification d'indu du 05 juin 2012 et la mise en demeure du 23 juillet 2012 auxquelles elle se rapporte ; subsidiairement,

- réduire la somme concernée du fait de l'intervention de la prescription triennale et de la décision du directeur accordant une réduction de 18% ;

En tout état de cause,

- condamner la CPAM des Yvelines à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la CPAM aux entiers dépens.

La CPAM demandait au tribunal de :

- valider la contrainte délivrée à M. [K] en date du 25 mars 2014 ;

- condamner M. [K] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 29 novembre 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines a considéré que la fin de non-recevoir soulevée par M. [K] et tirée de la prescription devait être rejetée ; que la CPAM justifiait de la nature et du montant de l'indu qu'elle réclamait en produisant le tableau des actes correspondants ; que toutefois, la permanence de soins telle que prévue par les avenants numéros 4 et 27 à la convention médicale nationale n'était pas organisée dans le secteur de M. [K], ainsi qu'en fait foi le cahier des charges régional de la permanence des soins ambulatoires faisant apparaître que le territoire de permanence 78-1 'le mantois' n'est pas pourvu le samedi pour la période de 12 heures à 20 heures et qu'en conséquence, M. [K] ne pouvait à l'évidence pas adhérer à une permanence de soins pour le samedi après-midi, inexistante dans la région, et dont l'organisation n'est, selon les textes, qu'une simple possibilité à mettre en oeuvre en fonction des besoins ; qu'il appartenait à la CPAM, en l'absence d'organisation d'une permanence telle que prévue par les textes susvisés, de chercher et de préciser le fondement juridique, lui permettant de soutenir que, dans ce cas, les médecins libéraux ne pouvaient organiser une réponse aux besoins exprimés localement, en termes de santé notamment par une garde le samedi après-midi sans régulation et dont le non respect par le médecin aurait légitimé la procédure en recouvrement de la somme de 29 058,70 euros.

Le TASS a reproché à la caisse de ne pas avoir tenu compte de la situation particulière sur la région du mantois, dans laquelle le système de permanence des soins n'était pas organisé et de ne pas avoir considéré que des actes d'urgence pouvaient également avoir lieu le samedi ; que la CPAM des Yvelines ne justifiait pas juridiquement du bien fondé de sa créance à l'encontre de M. [K] ; qu'en évoquant l'article 14 de la NGAP, elle occultait que des soins en urgence puissent être donnés le samedi.

C'est ainsi que le TASS a :

- déclaré non prescrite l'action en recouvrement de la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines ;

- déclaré régulières les notifications d'indu des 29 septembre 2011 et 05 juin 2012 ainsi que la mise en demeure du 23 juillet 2012 ;

- annulé, comme non fondée en droit, la contrainte émise le 25 mars 2014, par la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines pour avoir paiement d'une somme de 29 058,70 euros représentant un indu au titre de prestations dont la prise en charge par l'assurance maladie demeure subordonnée à des conditions particulières non satisfaites en l'espèce, dont une somme de 2 905,87 euros à titre de majorations de retard ;

- débouté la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines à payer à M. [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que la décision est exécutoire de droit à titre provisoire ;

- dit que tout appel de la présente décision doit être interjeté dans le mois de sa notification, à peine de forclusion.

Par déclaration du 09 janvier 2017, la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines a interjeté appel du jugement susvisé.

Par ses conclusions écrites, la CPAM demande à la cour de :

- réformer le jugement du TASS de Versailles en ce qu'il dit mal fondée la créance de la caisse de 29 058,70 euros et valider par voie de conséquence la contrainte délivrée le 25 mars 2014 ;

- condamner le Docteur [K] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions écrites, M. [K] demande à la cour de :

- supprimer 'les termes outrageants contenus à la pièce n°11 de la CPAM des Yvelines intitulée 'Extrait du JO permettant de clarifier cet imbroglio intentionnel rédigé par la société de Enfumeurs Nationaux Associés (ENA)'' (la partie entre guillemets en gras dans l'original des conclusions) ;

- allouer une somme symbolique d'un 'montant de 1 euros' au titre du préjudice moral subi par M. [K] du fait du mépris affiché tant à l'égard des rédacteurs qu'envers la nomenclature qui fait partie intégrante de l'exercice professionnel quotidien du médecin ;

- rejeter les conclusions formées en appel par la CPAM ;

- faire droit aux demandes de M. [K] ;

- confirmer le bien fondé de l'opposition à contrainte formée par M. [K] et la nullité de la contrainte d'un montant de 29 058,70 euros ainsi que la notification et mise en demeure auxquelles elle se rapporte ;

Subsidiairement,

- réduire la somme concernée du fait de l'intervention de la prescription triennale et de la décision du directeur accordant une réduction de 18% ;

En tout état de cause,

- condamner la CPAM à payer à M. [K] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la CPAM aux entiers dépens

Vu les conclusions déposées tant pour la CPAM que pour M. [K], ainsi que les pièces y afférentes respectivement, auxquelles la cour se réfère expressément, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties,

Vu les explications et les observations orales des parties à l'audience collégiale du 30 novembre 2017,

MOTIFS

A l'appui de son appel, la CPAM écarte la prescription soulevée par M. [K], rappelant que c'est dès le 29 septembre 2011 qu'elle a réclamé à ce dernier, pour la première fois, la somme de 29 058,70 euros.

Sur le fond, la CPAM fait notamment valoir que les majorations ne sont possibles que dans le cas où le médecin a adhéré au dispositif de la permanence des soins issu du décret numéro 2006-1686 du 22 décembre 2006 et des avenants numéros 4 et 27 de la convention nationale des médecins libéraux et l'assurance maladie, ou lorsque, bien que non adhérent au dispositif susvisé, il a été appelé par le médecin régulateur en remplacement du médecin de permanence indisponible.

La CPAM souligne qu'elle a fait référence, dans ses différents courriers, aux deux avenants susvisés, afin d'expliquer à M. [K] qu'il ne pouvait non seulement pas faire application de la majoration de ses honoraires pour jours fériés tels que prévue à l'article 14 de la NGAP (c'est à tort que la défense de M. [K] reprochait à la caisse d'invoquer l'article 14-3, certes abrogé mais que la caisse n'avait jamais cité), mais pas davantage dans le cadre du système de la permanence des soins mis en place à la suite de l'arrêté du 03 mars 2005, auquel le praticien n'était pas adhérent ; que les majorations effectuées ne sont applicables que pour les actes effectués la nuit ou les jours fériés dans le cadre de l'urgence justifiée par l'état du malade ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, puisque les consultations avaient lieu le samedi après-midi, aux heures habituelles de consultations comme l'indique le praticien lui-même, dans sa déclaration à l'agent assermenté de la caisse, en date du 08 novembre 2011.

La CPAM explique ainsi que les dispositions de l'article 14 de la NGAP ne prévoient l'application de la majoration que pour les seuls dimanches et jours fériés et que, si l'arrêté du 03 mars 2005 ouvre la possibilité de l'appliquer dès le samedi midi, cela est toutefois réservé aux seuls praticiens agissant en tant que médecin de garde ; or M. [K], à la date des faits n'était inscrit sur aucune liste de médecin de garde dans le cadre de la permanence des soins issue des arrêtés des 26 mais 2005 et 21 décembre 2007.

M. [K] peut d'autant moins ignorer les raisons de la réclamation de la caisse qu'un débat contradictoire a eu lieu entre lui, un agent assermenté de la caisse et le directeur de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

La CPAM conclut que ce médecin 'a voulu contourner l'impossibilité pour lui de bénéficier du système de permanence des soins, mieux rémunéré, en faisant supporter à l'assurance maladie des majorations tarifaires indues'.

La circonstance que la permanence de soins n'était pas organisée dans la région du Mantois ne peut permettre de s'affranchir des textes pertinents.

Enfin, la caisse relève que la contrainte porte sur une somme certes différente de celle figurant sur la mise en demeure, mais que c'est pour tenir compte de la remise gracieuse des majorations de retard accordée le 5 janvier 2012.

M. [K] explique tout d'abord qu'il n'existe pas de permanence de soins organisées avec régulation dans le secteur du mantois et que le SAMU 'était prévenu de la garde volontairement organisée (par lui) au sein de son cabinet vers lequel les patients, présentant une demande de soins urgents (non programmée et justifiée par l'état de santé du patient), étaient orientés par les professionnels de santé locaux (...)'.

Il fait valoir la prescription triennale et l'absence de précision de la date de paiement des montants réclamés par la caisse.

A cet égard, M. [K] considère que la contrainte ne peut être régulière que si la notification de l'indu et la mise en demeure font état de la date des versements effectués par la caisse.

Il ajoute que, selon la Cour de cassation, la motivation de la mise en demeure ne dispense pas l'organisme social de motiver la contrainte qu'il délivre par la suite.

Au demeurant, 'la décision contestée ne (le) met pas en état de connaître la cause des sommes réclamées', puisque la mise en demeure ne précise pas qu'elles dispositions des avenants 7 et 27 de la convention médicale nationale sont concernées. M. [K] argumente que l'avenant numéro 4 de la convention introduit un cadre réglementaire rénové pour l'organisation de la permanence des soins et l'intervention et la rémunération des médecins libéraux participant ; que l'avenant numéro 27 complète l'avenant numéro 4, en prévoyant notamment que la permanence des soins peut être organisée le samedi après-midi tout en étendant au samedi après-midi le bénéfice pour le médecin libéral des majorations spécifiques prévues à l'avenant numéro 4 ; que l'article 3 précise que le médecin inscrit sur le tableau de permanence du conseil départemental de l'ordre qui intervient dans le cadre de la régulation bénéficie de majorations spécifiques.

M. [K] fait également valoir qu'en l'absence de dispositif de régulation dans son secteur, il ne pouvait adhérer à la permanence des soins pour le samedi après-midi ; qu'il a organisé une garde au sein de son cabinet médical et n'a jamais facturé les majorations prévues par les avenants numéros 4 et 27, étant observé que le SAMU était systématiquement prévenu par lui, de la garde qu'il organisait volontairement au sein de son cabinet vers lequel les patients présentant une demande non programmée et urgente de soins étaient orientés par les professionnels de santé locaux, y compris par les médecins du SAMU eux-mêmes.

En conséquence, le médecin en avait conclut que sur son secteur, il n'existait pas de dispositif de permanence des soins tel qu'il résulte des avenants numéros 4 et 27 ; qu'il était contraint d'assurer cette permanence dans le cadre des dispositions de l'article 14 de la NGAP.

Sur la contrainte

Sur la validité proprement dite de la contrainte

La contestation par M. [K] de la validité de la contrainte, aux motifs, notamment, de l'absence de motivation et de mention des versements effectués par la Caisse, ne saurait être accueillie.

Le libellé de la contrainte, en date du 25 mars 2014, est parfaitement clair, puisqu'il vise, pour la somme principale de 29 058,70 euros, comme acte à l'origine de l'indu : 'majoration 'férié' du 04/04/2009 au 27/08/2011".

Cette somme et ces dates correspondent précisément au courrier adressé par lettre recommandé avec accusé de réception, en date du 18 janvier 2013, par laquelle a été communiquée à M. [K] la décision de la commission de recours amiable de la Caisse, rendue sur contestation par ce dernier de la mise en demeure du 23 juillet 2012.

Cette lettre rappelle notamment le courrier du 23 mars 2012, par lequel le directeur général de la Caisse 'avait décidé - par mesure dérogatoire et à titre tout à fait exceptionnel (compte tenu d'un accord intervenu avec les représentants de votre profession dans le cadre des instances paritaires locales) - de réduire le montant de (la) créance, et de le porter aux seules majorations que vous avez facturées aux assurés dont vous vous trouviez être par ailleurs le médecin traitant'.

Le mise en demeure du 23 juillet 2012 explique notamment que M. [K] a 'facturé à tort des majorations 'férié' les samedis, dimanches et jours fériés alors que (il n'(apparaît) pas sur les courriers du Conseil Départemental de l'Ordre des Médecins mentionnant les médecins ayant adhéré à la permanence des soins'. Il est ajouté que, de 'plus, conformément aux dispositions de l'article 14 des Dispositions Générales des Actes Professionnels de la Nomenclature Générale des Actes professionnels, (il peut) facturer un 'férié' en dehors des horaires d'ouverture usuelle de (son) cabinet médical pour une demande de soins urgents non programmés justifiée par l'état de (son) patient'.

Surtout, la mise en demeure puis la contrainte ont été adressées seulement après que de nombreux échanges avaient eu lieu entre M. [K] et la Caisse, notamment après que lui avait été adressé, dès le 29 septembre 2011, le tableau détaillé (48 pages) des anomalies de facturation.

Enfin, par courrier en date du 19 décembre 2011, M. [K] s'était engagé à payer la somme réclamée, en sollicitant 'la possibilité de rembourser (sa) dette sur les six prochains mois, le temps (qu'il) puisse vendre (son) cabinet', demandant également l'annulation de la majoration de 10%.

Bien que la Caisse lui ait accordé la possibilité de payer selon l'échéancier auquel il s'était unilatéralement engagé, M. [K] n'a réglé aucune somme à la Caisse.

M. [K] ne peut en aucune manière soutenir que la contrainte qui lui a été adressée n'était pas valable.

Sur la prescription

Ce n'est pas sans mauvaise foi non plus que M. [K] invoque la prescription d'au moins une partie des sommes réclamées par la caisse.

Certes, aux termes de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, l'action en recouvrement se prescrit par trois ans.

Encore faut-il qu'il n'y ait pas eu fraude.

En tout état de cause, ainsi que la CPAM le fait justement valoir, c'est par une lettre recommandée avec accusé de réception, en date du 29 septembre 2011, que la cour vient de mentionner, que la Caisse a pour la première fois notifié à M. [K] qu'il était redevable d'un indu, en l'espèce pour une somme principale de 29 058,70 euros, pour des actes médicaux effectués du 04 avril 2009 au 27 août 2011.

Par la suite, la CPAM a adressé à M. [K] :

. le 14 décembre 2011, une mise en demeure de payer la somme de 31 964,57 euros (majorations de retard incluses) ;

. le 5 janvier 2012, un accord pour une remise gracieuse des majorations de retard, alors que, le 19 décembre 2011, M. [K] s'était engagé à régler la somme principale demandée en six mensualités, engagement qui démontre, si besoin était, que l'intéressé avait connaissance du montant et de la cause des sommes réclamées ;

. le 21 mars 2012, la caisse a proposé de réduire le montant de l'indu, pour tenir compte de la proportion de patientèle pour laquelle M. [K] n'était pas le médecin traitant ;

. enfin, le 5 juin 2012, une nouvelle mise en demeure a été adressée à M. [K], faute pour lui d'avoir répondu à la proposition amiable de la caisse.

La cour confirmera donc le TASS en ce qu'il a écarté l'exception de prescription.

Sur la réduction de 18%

Comme il vient d'être indiqué, la caisse avait envisagé de faire bénéficier M. [K] d'une réduction du montant de l'indu réclamé, pour tenir compte de ce que, parmi tous les actes médicaux effectués correspondant, 18% concernaient des personnes ne faisant pas partie de la patientèle habituelle de M. [K].

Mais la cour ne peut que constater qu'il s'agissait d'un geste de la caisse destiné à tenir compte de la situation particulière invoquée par M. [K] et non pas d'une décision qui s'imposerait à la caisse en vertu d'un texte quelconque.

M. [K] a refusé de répondre à la proposition de la caisse.

Il est donc malvenu à venir invoquer, aujourd'hui et alors qu'il n'a toujours réglé aucune somme à la CPAM, le droit à une quelconque déduction de 18% des sommes réclamées.

Sur le fond

La cour est consciente de la situation défavorable dans laquelle se trouvent certains territoires en termes d'offre de soins, notamment en cas d'urgence, de ce que peuvent apporter des médecins qui décideraient, malgré l'absence de système ad hoc, de tenir de façon informelle des permanences les samedis après-midi, la nuit ou les jours fériés.

La cour souhaite également mentionner, par souci d'équilibre, qu'il est acquis qu'un médecin qui facture des majorations 'F' perçoit une rémunération supérieure à celle à laquelle il pourrait normalement prétendre, ce qui lui procure des ressources supérieures.

Mais le débat n'est pas là et, en réalité, il n'existe pas de débat sur le fond, sans qu'il soit besoin de rappeler que M. [K] s'était engagé à régler les sommes indûment perçues sur la période considérée.

En effet, quoi que l'on puisse penser par ailleurs de la circonstance qu'aucun système de garde n'ait été mis en place dans le 'mantois', il est constant qu'il n'existait aucun dispositif de 'permanence de soins' au sens des avenants n°4 (arrêté du 26 mai 2005) et n°27 (arrêté du 21 décembre 2007) de la convention médicale nationale, tandis que M. [K] ne justifie en aucune manière que des patients auraient été re-dirigés vers lui, dans le cadre d'urgences, par les services médicaux d'urgence. M. [K] n'était pas médecin de garde au sens des dispositions précités.

Il est également juste de rappeler ici que la Caisse a tenu compte de la particularité de la situation pour ne réclamer l'indu à M. [K] qu'en ce qui concerne les patients dont il est le médecin traitant alors que, en droit, elle aurait pu le faire pour tous les patients concernés.

Peu importe que, parmi les patients dont il est le médecin traitant, certains se soient trouvés dans une situation d'urgence (ce qui, au demeurant, n'est en rien démontré) : M. [K], pour les raisons expliquées ci-dessus, ne pouvait facturer en ce qui les concerne une majoration'F'.

La cour infirmera donc le jugement entrepris et, validant la contrainte délivrée pour son entier montant, condamnera M. [K] à payer la somme de 25 058,70 euros à la Caisse, étant observé que la Caisse ne réclame pas le paiement de la majoration de retard.

Sur la demande de dommages intérêts

Dans le cadre de la discussion sur le caractère fondé de la contrainte, M. [K] fait valoir que la caisse produit une pièce (n°11) qui est pour partie constituée d'un article tiré d'un blog et qui comprend l'expression 'Extrait du JO permettant de clarifier cet imbroglio intentionnel rédigé par la société de Enfumeurs Nationaux Associés (E.N.A)'. Il considère que la caisse fait ainsi preuve d''audace' et 'n'hésite pas à disqualifier les rédacteurs (de la nomenclature) du fait de leurs liens supposés avec l'Ecole Nationale de l'Administration (ENA)'.

M. [K] s'estime ainsi fondé, sur la base de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 qui permet aux tribunaux de prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, à demander la suppression de cette pièce des débats, tout en indiquant qu'elle est 'insusceptible d'avoir une quelconque influence sur le litige (n'étant pas) applicable à la période concernée'.

Outre que la suppression d'une pièce sans effet sur un litige ne paraît pas s'imposer, la cour ne peut que constater que la disposition de la loi sur la presse visée par le conseil de M. [K] ne peut trouver ici à s'appliquer, qu'en tout état de cause, pour maladroite (c'est le moins que l'on puisse dire) que soit la production par la Caisse de l'article en cause, il n'est ni injurieux, ni outrageant, ni diffamatoire à l'égard de M. [K], dont la demande de dommages intérêts ne peut donc être qu'écartée.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

La cour devra rappeler que la présente procédure est exempte de dépens.

M. [K] sera condamné à payer à la Caisse une somme de 1 500 euros, pour l'ensemble de la procédure, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aucune considération d'équité ne conduit à condamner la Caisse à payer à M. [K] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par décision contradictoire,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté l'exception de prescription soulevée par M. [M] [K] ;

Statuant à nouveau,

Valide la contrainte délivrée à M. [M] [K] le 25 mars 2014 pour son entier montant, soit la somme principale de 29 058,70 euros ;

Condamne M. [M] [K] à payer à la caisse primaire d'assurance des Yvelines la somme de 29 058,70 euros ;

Condamne M. [M] [K] à payer à la caisse primaire d'assurance des Yvelines une indemnité d'un montant de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [K] de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de toute autre demande plus ample ou contraire ;

Rappelle que la présente procédure est exempte de dépens ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Florence Purtas, Greffier e, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 17/00092
Date de la décision : 25/01/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°17/00092 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-25;17.00092 ?
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