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07/12/2017 | FRANCE | N°16/02476

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 07 décembre 2017, 16/02476


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53B



16e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 DECEMBRE 2017



R.G. N° 16/02476



AFFAIRE :



SCP [F] [H] [R] [Y] [X] [I] [K] [H] [E] [C] ET [N] [D]



C/



[T] [P]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Février 2016 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 13/08237>


Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Michel RONZEAU de la SCP SCP INTERBARREAUX RONZEAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de VAL D'OISE



Me Eric AZOULAY de la SCP FINKELSTEIN/DAREL/AZOULAY/ROLLAND/CISSE, avoc...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53B

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 DECEMBRE 2017

R.G. N° 16/02476

AFFAIRE :

SCP [F] [H] [R] [Y] [X] [I] [K] [H] [E] [C] ET [N] [D]

C/

[T] [P]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Février 2016 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 13/08237

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Michel RONZEAU de la SCP SCP INTERBARREAUX RONZEAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de VAL D'OISE

Me Eric AZOULAY de la SCP FINKELSTEIN/DAREL/AZOULAY/ROLLAND/CISSE, avocat au barreau de VAL D'OISE

Me Charles-henri DE GAUDEMONT de la SELARL MCH AVOCATS, avocat au barreau de VAL D'OISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT DECEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SCP [F] [H] [R] [Y] [X] [I] [K] [H] [E] [C] ET [N] [D]

N° SIRET : D 3 21 609 778

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentant : Me Michel RONZEAU de la SCP SCP INTERBARREAUX RONZEAU ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 9 - N° du dossier 1323210

APPELANTE

****************

Monsieur [T] [P]

né le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentant : Me Eric AZOULAY de la SCP FINKELSTEIN/DAREL/AZOULAY/ROLLAND/CISSE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 10 - N° du dossier 2131016

Monsieur [H] [P]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentant : Me Eric AZOULAY de la SCP FINKELSTEIN/DAREL/AZOULAY/ROLLAND/CISSE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 10 - N° du dossier 2131016

Madame [W] [X]

née le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 6]

[Adresse 7]

Représentant : Me Eric AZOULAY de la SCP FINKELSTEIN/DAREL/AZOULAY/ROLLAND/CISSE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 10 - N° du dossier 2131016

Société civile GROUPE PZ

N° SIRET : 522 139 146

[Adresse 8]

[Adresse 9]

Représentant : Me Charles-henri DE GAUDEMONT de la SELARL MCH AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 21 - N° du dossier 13002

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Novembre 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia GRASSO, Président chargé du rapport et Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Patricia GRASSO, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO,

FAITS ET PROCEDURE,

Un pacte d'associés a été signé le 9 novembre 2010 entre les associés de la société Groupe PZ et les associés de la société G-mobility. Le même jour, les parties signaient un acte de reconnaissance de dette portant sur la somme globale de 150.000 euros prêtée par la société groupe PZ à la société G-mobility.

Cet acte de reconnaissance de dettes comportait plusieurs garanties, dont le cautionnement personnel de Mme [W] [X], de M. [H] [P], et de son fils M. [T] [P], associés de la société G-mobility.

Par jugement en date du 15 avril 2013, la société G-Mobility a été déclarée en liquidation judiciaire.

La société Groupe PZ a déclaré auprès du liquidateur une créance de 170.305,36 euros.

Par actes signifiés les 31 octobre 2013 et 5 novembre 2013, la société Groupe PZ a assigné messieurs [T] et [H] [P] et Mme [X], d'une part, la société civile professionnelle «[F] [H] [R] [B] [X] [I] [I] [H] [E] [K] et [N] [D]»(la SCP) d'autre part, devant le tribunal de grande instance de Pontoise.

Par ordonnance d'incident en date du 26 juin 2014, le juge de la mise en état s'est déclaré incompétent pour connaître de la fin de non-recevoir soulevée par M. [T] [P], M. [H] [P], et Mme [X].

Par jugement rendu le 9 février 2016, le tribunal de grande instance de Pontoise a:

-déclaré la demande recevable,

-prononcé la nullité du cautionnement de M. [T] [P],

-condamné M. [H] [P] et Mme [X] à payer à la société Groupe PZ la somme de 100.000 euros, outre les intérêts à compter de la signification du jugement, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,

-condamné la SCP à garantir M. [H] [P] et Mme [X] des présentes condamnations à hauteur de 80.000 euros, outre les intérêts sur cette somme à compter de la signification du jugement, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,

-condamné la SCP à payer à la société Groupe PZ la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice,

-condamné la SCP à payer à la société Groupe PZ la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la SCP à payer à M. [T] [P], M. [H] [P] et Mme [X] la somme de 1.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la SCP aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le 5 avril 2016, la société civile professionnelle «[F] [H] [R] [B] [X] [I] [I] [H] [E] [K] et [N] [D]» a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions transmises le 20 octobre 2017, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société civile professionnelle «[F] [H] [R] [B] [X] [I] [I] [H] [E] [K] et [N] [D]», appelante, demande à la cour de:

-déclarer la SCP recevable et bien fondée en son appel,

Y faisant droit,

-infirmer le jugement du 9 février 2016 en ses dispositions condamnant le notaire au titre de sa responsabilité civile professionnelle,

En tout état de cause,

-dire que le préjudice allégué ne peut être constitué que d'une perte de chance,

-dire et juger cette perte de chance très faible au regard des engagements de caution de Mme [X] et de M. [H] [P].

-débouter la société Groupe PZ et toute autre partie de ses demandes fins et conclusions dirigées à l'encontre de la SCP,

-condamner la société Groupe PZ et toute autre partie succombante à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner toute partie succombante aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la société civile professionnelle «[F] [H] [R] [B] [X] [I] [I] [H] [E] [K] et [N] [D]» fait valoir:

-que la reconnaissance de dette notariée en date du 9 novembre 2010 était parfaitement valide; que dans le cadre de la procédure en première instance, M. [T] [P] a expressément reconnu, dans ses conclusions d'incident, s'être porté caution au même titre que M. [H] [P] et Mme [X];

-que la société Groupe PZ ne peut soutenir que chacune des parties devait s'engager personnellement en qualité de caution pour 100.000 euros et qu'il appartenait au notaire de veiller lors de la rédaction de l'acte à ce que les engagements de caution garantissent l'intégralité de la dette et non une seule fraction de celle-ci; que ce moyen est nouveau et dès lors irrecevable; que l'ensemble des pièces versées aux débats démontre bien que le cautionnement ne portait que sur la somme de 100.000 euros;

-que le notaire n'a pas commis de faute; que les parties ont décidé que le cautionnement serait globalement limité à 100.000 euros, d'une part, et que le nantissement du fonds de commerce de la société G-mobility porterait sur 180.000 euros d'autre part; qu'il est de jurisprudence constante que la responsabilité du professionnel du droit ne peut être retenue s'il n'est pas intervenu dans les négociations ayant précédé la conclusion du contrat; qu'il est également de jurisprudence constante que le notaire n'a pas à se faire juge de l'opportunité économique d'une opération;

-que pour mettre en cause la responsabilité professionnelle d'un notaire, la partie demanderesse doit rapporter la preuve d'un préjudice direct, actuel, et certain; qu'en l'espèce le préjudice n'est pas certain car il est incontestable que les parties, au titre de la reconnaissance de dette, ont reconnu que les conditions particulières avaient été «négociées directement entre les parties sans le concours ni la participation du notaire soussigné qui n'en est que le rédacteur»; que le préjudice invoqué par la société Groupe PZ ne peut s'analyser que comme une perte de chance; que le tribunal n'a pas fait une juste appréciation de la situation dans laquelle les parties pourraient se trouver en l'absence du cautionnement de M. [T] [P]; qu'il n'est pas établi que la société Groupe PZ n'est pas en mesure de recouvrer la somme de 100.000 euros auprès des deux cautions que sont Mme [X] et M. [H] [P]; que le tribunal ne s'explique pas sur la garantie que le notaire est tenu de fournir à l'égard de M. [P] et Mme [X];

-que le tribunal ne pouvait pas condamner l'appelante au paiement d'une somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts au profit de la société Groupe PZ; que l'action engagée par la société Groupe PZ ne pouvait porter sur une condamnation à hauteur de 170.305,36 euros, montant de sa créance déclarée à la liquidation judiciaire de la société G-mobility, dès lors que l'acte de reconnaissance de dette portant cautionnement limitait le cautionnement à 100.000 euros pour une durée de cinq ans; que le tribunal ne pouvait dès lors pas faire référence au montant de la créance de 170.305,36 euros pour évaluer une perte de chance;

-que le lien de causalité entre la faute invoquée par la société Groupe PZ et son préjudice est inexistant; qu'à la date où le notaire a reçu les actes, la société Groupe PZ avait d'ores et déjà décidé du transfert de la somme de 100.000 euros sur le compte de la société G-mobility;

Dans leurs conclusions transmises le 7 février 2017, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, Messieurs [T] et [H] [P] et Mme [X], intimés, demandent à la cour de :

-confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Pontoise le 9 février 2016,

En conséquence,

-débouter la société appelante de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

-débouter la société appelante de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions formées à l'encontre de Mme [X], de M. [H] [P] et de M. [T] [P],

-condamner la société appelante et la société Groupe PZ à payer chacune à M. [T] [P], M. [H] [P] et Mme [X] la somme de 3.000 euros chacun.

Au soutien de leurs demandes, Messieurs [T] et [H] [P] et Mme [X] font valoir:

-que M. [T] [P] avait donné une procuration pour la signature d'un pacte d'associés, et non pour une reconnaissance de dette ou un cautionnement;

-que, contrairement à ce que tente de faire croire la société Groupe PZ, le terme «LA CAUTION» est employé dans l'acte authentique pour désigner l'ensemble des cautions;

-que Maître [I] a manqué à son obligation de conseil; que ce dernier n'a jamais pris la peine d'expliquer ou d'avertir Messieurs [P] et Mme [X] de la teneur de leur engagement; qu'aucun délai de réflexion ne leur a été accordé; que l'acte est affecté de plusieurs irrégularités qui ont porté préjudice à Messieurs [P] et à Mme [X], qui n'ont pas conclu en connaissance de cause; qu'il n'est fait dans l'acte aucune mention relative à l'absence de M. [T] [P]; qu'il s'intitule «reconnaissance de dette» tout en organisant un remboursement précis du prêt et un cautionnement; que l'acte ne comprend pas de lexique définissant les termes techniques employés; qu'il ne comprend aucune clause aux termes de laquelle chaque caution reconnaît avoir conscience de son engagement.

Dans ses conclusions transmises le 6 octobre 2017, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Groupe PZ, intimée, demande à la cour de :

-débouter la société appelante de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-accueillir l'appel incident de la société Groupe PZ;

-confirmer le jugement rendu le 9 février 2016 par le tribunal de grande instance de Pontoise, en ce qu'il a validé les actes de cautionnement de Mme [X] et M. [H] [P],

Statuant à nouveau,

-dire et juger que les cautions sont tenues chacune dans la limite de la somme de 100.000 euros,

En conséquence et sous réserve de ce plafond d'engagement,

-condamner solidairement Mme [X] et M. [H] [P] à payer à la société Groupe PZ la somme totale de 170.305,36 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'acte introductif d'instance et ordonner la capitalisation desdits intérêts,

À défaut, confirmer la condamnation de Mme [X] et M. [H] [P] à payer à la société Groupe PZ la somme de 100.000 euros plus intérêts à compter de la signification du jugement avec capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

Dans l'hypothèse où il serait fait droit à l'argumentation de la société appelante et que l'acte de caution de M. [T] [P] serait considéré comme valide,

-condamner alors solidairement Mme [X], M. [T] [P] et M. [H] [P] à payer à la société Groupe PZ la somme totale de 170.305,36 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'acte introductif d'instance et d'ordonner la capitalisation desdits intérêts,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que la responsabilité du notaire était engagée du fait de ses manquements à ses obligations,

En conséquence,

-condamner in solidum la société appelante, avec Mme [X] et M. [H] [P], à payer à la concluante la somme de 80.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'acte introductif d'instance, outre capitalisation desdits intérêts,

À défaut, confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné le notaire à garantir les cautions à hauteur de 80.000 euros de ce chef,

-condamner la société appelante, en réparation de son préjudice subi du fait des manquements du notaire à son devoir de conseil, au paiement d'une somme qui ne saurait être inférieure à 50 % de son préjudice subi (170.305,36 euros), soit a minima la somme de 90.000 euros,

À défaut, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné le notaire à payer à la concluante la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice,

Dans l'hypothèse où la cour ferait droit aux moyens de nullité allégués par les cautions affectant selon elles l'intégralité de la reconnaissance de dette,

-condamner alors la société appelante à payer à la société Groupe PZ la somme de 170.305,36 euros en réparation de son entier préjudice,

En tout état de cause,

-confirmer que le montant des condamnations prononcées portera intérêts au taux légal à compter de la signification de l'acte introductif d'instance,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la capitalisation desdits intérêts et a condamné la société appelante au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

Y ajoutant,

-condamner in solidum l'ensemble des parties succombantes à payer à la société Groupe PZ une somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner in solidum l'ensemble des parties succombantes aux entiers dépens, dont distraction au profit de maître de Gaudemont, avocat aux offres de droit.

Au soutien de ses demandes, la société Groupe PZ fait valoir:

-que la société Groupe PZ a bien qualité à agir; que l'acte notarié en date du 9 novembre 2010 a été reçu entre Messieurs [J] et [A] «intervenant tous deux aux présentes tant en leurs qualités de seuls associés de la société Groupe PZ,(...) que de cogérants nommés à cette fonction sans limitation de durée et habilités aux fins des présentes»;

-que la reconnaissance de dette est valide; que la créance de la société Groupe PZ est certaine, liquide, et exigible, et s'élève à un montant total de 170.305,36 euros;

-qu'il semble difficilement contestable que M. [T] [P] a donné procuration à M. [H] [P] afin de conclure un pacte d'associés et non un cautionnement; que Mme  [X] et M. [H] [P] se sont en revanche bien engagés en qualités de cautions solidaires de la société G-mobility au profit de la société Groupe PZ;

-que chacune des personnes se portant caution s'est engagée personnellement dans une limite de 100.000 euros, et non dans la limite globale de 100.000 euros; que la société Groupe PZ est donc bien fondée à réclamer le paiement de l'intégralité de sa créance auprès des deux cautions;

-que ni Mme [X] ni M. [P] ne communiquent aux débats la moindre pièce à l'appui de leur demande de délais de paiement; que ce litige est ancien, ce dont il résulte que les cautions ont déjà bénéficié, de fait, de larges délais de paiements;

-que la société Groupe PZ a prouvé que les conditions d'engagement de la responsabilité civile du notaire étaient réunies; que le notaire a clairement été informé par la société Groupe PZ de difficultés de trésorerie rencontrées par la société G-mobility; que toute l'opération s'est faite sous le contrôle du notaire; qu'il incombait au notaire de prévoir toutes garanties utiles afin de garantir les sommes versées par la société Groupe PZ; que les conditions particulières négociées entre les parties sans le concours du notaire sont afférentes aux modalités de remboursement de la dette en principal, mais certainement pas aux garanties et à leurs modalités; que Maître [I] a failli à ses obligations, d'une part en ne vérifiant pas et en ne sollicitant pas de M. [T] [P] une procuration en bonne et due forme pour la régularisation de son cautionnement, d'autre part en ne s'assurant pas que l'engagement des cautions garantissait bien l'intégralité de la dette; que l'argumentation présentée ne constitue pas une nouvelle demande présentée pour la première fois en cause d'appel, dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge;

-que pour la société Groupe PZ l'engagement de M. [T] [P] était déterminant, dans la mesure où il était le seul détenteur d'un patrimoine immobilier pouvant le cas échéant répondre de la dette;

-que la perte de chance de recouvrer son entière créance ne saurait être évaluée à moins de 50 % de son montant total; que s'il s'avérait que toute la reconnaissance de dette était entachée de nullité en raison des erreurs et manquements du notaire, cela résulterait de sa seule faute, et il lui incomberait de réparer l'entier préjudice subi par la société Groupe PZ;

-qu'il n'est pas fondé de faire grief à la société Groupe PZ de n'avoir pas mis en oeuvre de mesures d'exécution forcée à l'encontre des cautions condamnées en première instance, dans la mesure où le jugement entrepris ne se trouve pas assorti de l'exécution provisoire, et s'est trouvé frappé d'appel.

*****

La clôture de l'instruction a été prononcée le 24 octobre 2017.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 8 novembre 2017 et le délibéré au 7 décembre suivant.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'engagement de caution de M. [T] [P]

Il résulte de l'article l'article 2292 code civil que « Le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ».

Il n'est pas contesté que M. [T] [P] a donné, le 4 novembre 2010, à son père [H], procuration « dans le cadre de la signature d'un pacte d'associés concernant la société G-MOBILITY SARL », sans qu'il soit fait mention d'un engagement de caution au profit de la société Groupe CZ.

La SCP de notaires tente vainement de faire valoir qu'il résulte des éléments du dossier que M. [T] [P] s'est néanmoins toujours considéré comme engagé en qualité de caution aux côtés de son père et de Mme [X] et le jugement ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du cautionnement de M. [T] [P] qui n'était pas présent à l'acte et n'avait pas valablement donné procuration à M. [H] [P].

Sur le montant de l'engagement

La société GROUPE PZ a régulièrement déclaré sa créance à titre privilégié au passif de la société G-MOBILITY le 30 avril 2013 pour une somme totale de 170.305,36 € selon détail suivant :

- 150.000,00 € au titre du principal dû,

- 9.000,00 € au titre des intérêts échus année 2012,

- 4.770,00 € au titre de l'indemnité prévue à l'article « Exigibilité anticipée - Déchéance du Terme » de l'acte notarié,

- 169,03 € au titre des frais du commande de payer du 17/01/2013,

- 6.366,33 € au titre des frais d'actes notariés.

Elle soutient donc que chaque caution ne pouvait qu'être engagée à hauteur de 100 000 € puisque sa créance était forcément supérieure à cette somme ainsi qu'en atteste le montant des autres garanties prises et notamment le nantissement du fonds de commerce .

L'engagement de caution de M. [H] [P] et de Mme [X] est ainsi rédigé : « La CAUTION accepte de se porter caution personnelle solidaire de l'Emprunteur, au profit du PRETEUR à concurrence de CENT MILLE EUROS (100.000 €) et pour une durée de 5 ans. »

C'est à juste titre que le premier juge a estimé que la rédaction de l'acte qui énonce d'abord l'identité des trois cautions solidaires puis les nomme ensemble « LA CAUTION » ne peut conduire qu'à conclure que les deux cautions dont l'engagement est valable ne peuvent être tenues qu'ensemble à hauteur de la somme de 100 000 €, et non chacune à cette somme.

En outre, même si le paragraphe suivant indique que la dette à cautionner est constituée par « toutes sommes dues en capital, intérêts, commissions, frais et accessoires » l'engagement ne précise pas que la caution s'engage à 100 000 € plus les intérêts, commissions, frais et accessoires, de sorte que l'engagement se limite à 100 000 € tout compris et le jugement sera confirmé sur ce point .

Sur la responsabilité du notaire

Le notaire est tenu à une obligation de conseil et de résultat quant à l'efficacité juridique des conventions qu'il régularise.

Premièrement, en ne respectant pas la portée de la procuration donnée par M. [T] [P] à M. [H] [P], ce qui a conduit à la nullité de l'engagement de caution de M. [T] [P], il a, en sa qualité de professionnel commis une faute et a causé un préjudice à la société Groupe CZ en ce qu'il l'a privée du bénéfice de la caution qu'elle croyait détenir de la part de M. [T] [P] alors que ce dernier était le seul à détenir un patrimoine.

Cette faute a en outre causé un déséquilibre dans les droits et obligations des parties en faisant porter sur M. [H] [P] et Mme [X] l'intégralité de l'engagement.

Secondement, ainsi que l'a justement souligné le premier juge, il ressort de l'économie des conventions, soit le pacte de société et la reconnaissance de dette assorties de plusieurs garanties (caution, nantissement de fonds de commerce pour 180 000€ et nantissement des parts sociales à hauteur du capital de la société G Mobility), que la société Groupe CZ espérait être garantie pour une somme supérieure à 100 000 € et donc à hauteur de 100.000 € par chacune des cautions.

La SCP de notaires soutient que la responsabilité du professionnel du droit ne peut être retenue s'il n'est pas intervenu dans les négociations ayant précédé la conclusion du contrat à l'occasion desquelles les conditions économiques de l'opération ont été fixées et qu'en l'espèce les parties ont passé des accords préalablement à la saisine du notaire, accords qu'il a retranscrit au travers des actes, constitués à la fois par la reconnaissance de dette et le pacte d'associés.

Toutefois, le notaire a été clairement informé par la société Groupe CZ des difficultés de trésorerie rencontrées par la société G-Mobility puisqu'elle lui a demandé : « Sous réserves d'analyse du dossier (aspect juridique et fiscal) par vos soins'

Nous aimerions savoir si vous pouvez nous constituer le cadre juridique et fiscal de cette prise de participation et surtout si vous pouvez nous donner un avis sur cette affaire. »

Responsable de la rédaction de son acte, la SCP a incontestablement conduit à ce que l'engagement de caution ne puisse être interprété que comme l'a fait la cour ci-dessus et a manqué à son devoir de conseil à l'égard de la société Groupe CZ.

Compte tenu des conséquences différentes qui en sont induites, il n'existe aucune contradiction entre d'une part l'interprétation de la portée de l'engagement de caution tel qu'il est rédigé qui doit se situer dans les relations entre les parties à l'acte c'est dire le prêteur et la caution, et d'autre part l'analyse de la volonté des parties dans les relations entre la société Groupe CZ et la SCP de notaires tenue de les conseiller et de rédiger un acte efficace.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu ces deux fautes du notaire.

Sur le préjudice

La première faute du notaire ayant conduit à la nullité de l'engagement de cautionnement de M. [T] [P] a causé un préjudice tant à la société groupe CZ qu'à M. [H] [P] et Mme [X].

C'est donc à juste titre que le jugement entrepris a sur ce point condamné la SCP à garantir les deux cautions.

La cour fait sienne la motivation ayant conduit le premier juge à condamner la SCP à garantir M. [H] [P] et Mme [X] à hauteur de 80 % des sommes mises à leur charge qui est une juste appréciation du préjudice à ce titre, eu égard notamment au fait que seul M. [T] [P] avait un patrimoine.

La seconde faute du notaire a causé à la société Groupe CZ une perte de chance de voir mieux garantie sa créance, préjudice qui a été évalué à 30 % de la créance déclarée de 170.305,36 €, ce qui est une juste appréciation que la cour confirme.

Sur la demande de délais de paiement

L'article 1244-1 du code civile dispose que « Toutefois, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

En outre, il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement, par le débiteur, d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux dettes d'aliments.'

M. [H] [P] et Mme [X] ne versent aucune pièce de nature à justifier de leur situation financière et patrimoniale et ont déjà bénéficié de larges délais de fait ;cette demande ne pourra qu'être rejetée.

Sur les demandes accessoires

L'équité commande de faire droit à la demande des intimés, d'une part la société Groupe CZ, d'autre part Mme [W] [X], de M. [H] [P], et de M. [T] [P], présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; l'appelante est condamnée à leur verser à ce titre la somme visée au dispositif de la présente décision,

Partie perdante, l'appelante ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et doit supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [W] [X] et M. [H] [P] de leur demande de délais de paiement ;

Condamne la société civile professionnelle «[F] [H] [R] [B] [X] [I] [I] [H] [E] [K] et [N] [D]» à payer à la société Groupe CZ la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société civile professionnelle «[F] [H] [R] [B] [X] [I] [I] [H] [E] [K] et [N] [D]» à payer à Mme [W] [X], M. [H] [P], et M. [T] [P] la somme de 1.000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société civile professionnelle «[F] [H] [R] [B] [X] [I] [I] [H] [E] [K] et [N] [D]» aux dépens de l'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile à l'égard de l'avocat de la société Groupe CZ qui en a fait la demande.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Patricia GRASSO, Président et par Mademoiselle LANGLOIS, Faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 16/02476
Date de la décision : 07/12/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 16, arrêt n°16/02476 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-12-07;16.02476 ?
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