COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
5e Chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 07 DECEMBRE 2017
N° RG 15/05050
AFFAIRE :
[T] [Q]
C/
SA SKF FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 20 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES
N° RG : F 13/00328
Copies exécutoires délivrées à :
Me David METIN
la SCP SUTRA CORRE ET ASSOCIES
Copies certifiées conformes délivrées à :
[T] [Q]
SA SKF FRANCE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEPT DECEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [T] [Q]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me David METIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 159
APPELANT
****************
SA SKF FRANCE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Romain SUTRA de la SCP SUTRA CORRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0171 substituée par Me Halima ABBAS TOUAZI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0208
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 28 Septembre 2017, en audience publique, devant la cour composé(e) de :
Monsieur Olivier FOURMY, Président,
Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,
Madame Sylvie CACHET, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Rachida HAMIDI
Faits et procédure
M. [T] [Q] a été engagé par la société Auto Parts, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, à compter du 21 mai 1990, en qualité de technicien développement, niveau III, échelon 3, coefficient 240 pour un appointement mensuel de 7 800 francs sur douze mois.
La convention collective applicable est la convention collective de la métallurgie région parisienne.
A la suite d'une fusion de la société Auto Parts, avec la société filiale SKF France SA, en janvier 1993, le contrat de travail de M. [Q] a été repris par cette dernière.
La société SKF France SA (ci-après, la 'Société' ou 'SKF') développe, fabrique et commercialise des roulements mécaniques. Elle propose en particulier aux constructeurs et équipementiers automobiles une vaste gamme de produits visant à optimiser la rotation par roulement entre des pièces mécaniques.
Elle fait partie du groupe SKF qui est un leader mondial de produits, de solutions et de services, sur les marchés des roulements mécaniques.
Elle a un siège social situé à [Localité 1] et un établissement secondaire situé à [Localité 2], lequel est un site de production.
L'établissement de [Localité 3] sur lequel travaille M. [T] [V] a un effectif d'environ 280 salariés tandis que l'établissement de Saint-Cyr compte environ 1 250 salariés.
La représentation du personnel au sein de SKF est organisée comme suit :
- au niveau de l'établissement de Saint-Cyr : un comité d'établissement, un comité d'hygiène et de sécurité (CHSCT) et des délégués du personnel ;
- au niveau de l'établissement de [Localité 3] : un comité d'établissement, un CHSCT et des délégués du personnel ;
- un comité central d'entreprise.
M. [Q] travaille sur le site de [Localité 1] depuis le 21 mai 1990, d'abord en qualité de technicien développement produit jusqu'au 30 novembre 2011, puis en qualité de technicien analyse concurrence VSM à compter du 1er décembre 2011.
Il a été promu au coefficient 335 en mai 2003 et a exercé divers mandats représentatifs et syndicaux, à compter de l'année 2003.
Le 7 décembre 2007, M. [Q] a adressé à son supérieur hiérarchique direct, un courriel relatif à ses conditions de travail, dont son supérieur a contesté le contenu par courriel le même jour.
Le 19 avril 2011, la société SKF France SA a remis à M. [Q] un descriptif de poste intitulé 'VSM Product Design Specialist' assorti d'une proposition verbale de transfert du poste sur le site de [Localité 2].
Le 21 avril 2011, M. [Q] a adressé à la directrice des ressources humaines un courriel relatif à la modification du contenu du poste faisant l'objet d'un transfert sur le site de [Localité 2] et à ses conditions de travail.
Le 23 mai 2011, M. [Q] a adressé à son responsable hiérarchique direct un courriel relatif à la gestion de la société, à ses condition de travail, au transfert de son poste sur le site de [Localité 2] et à sa promotion au coefficient 365 en contrepartie du transfert.
Le 27 mai 2011, le responsable hiérarchique direct de M. [Q] lui a adressé un courriel aux fins de contester le contenu de son courriel du 23 mai 2011 et de lui proposer de nouvelles conditions d'accompagnement du transfert de son poste sur le site de [Localité 2].
Le même jour, M. [Q] a adressé à son responsable hiérarchique direct un courriel lui confirmant son point de vue et exprimant son refus du transfert de son poste sur le site de [Localité 2].
Le 29 septembre 2011, la société SKF France SA a adressé à M. [Q] un courrier l'informant à titre individuel de la proposition de mutation à [Localité 2] en qualité de technicien développement produit.
Le 4 octobre 2011, M. [Q] a adressé à la Société un courrier, signifiant son refus de la modification de son poste de travail.
Par courrier en date du 13 octobre 2011, suite à la réunion du CHSCT du 11 octobre 2011, l'inspection du travail a envoyé à la société SKF France SA un courrier relatif à l'alerte lancée par ce comité sur les conditions de travail de M. [Q] et lui demandant de l'informer des suites données à la 'plainte pour harcèlement de M. [Q]'.
Le 23 octobre 2011, la Société a annoncé en réunion du comité d'établissement que le poste de technicien développement produit, occupé par M. [Q], serait transféré à la date du 1er novembre et qu'une solution lui serait proposée.
Le 24 octobre 2011, M. [Q] a adressé à SKF un second courrier signifiant son refus de la proposition de mutation à [Localité 2] en qualité de technicien développement produit.
Le 4 novembre 2011, la société SKF a proposé par courrier à M. [Q] le poste de technicien analyse de la concurrence sur le site de [Localité 1].
Le 9 novembre 2011, M. [Q] a donné par courriel son accord à cette proposition.
Le 18 novembre 2011, M. [Q] a signé un avenant à son contrat de travail, en date du 15 novembre 2011 et prenant effet au 1er décembre 2011, stipulant son changement de poste en qualité de 'technicien analyse concurrence VSM'.
Le 20 juillet 2012, suite au contrôle qu'elle a effectué le 16 juillet 2012 sur le site de [Localité 1], l'inspection du travail a adressé à la Société un courrier, faisant état du courrier du 28 juin 2012 reçu de M. [Q] relatif à l'exercice du mandat des représentants du personnel et lui demandant de la tenir informée de l'avancée des travaux menés en coordination 'avec les élus concernés'.
Le 20 août 2012, M. [Q] a notifié, par lettre remise en main propre à la société SKF, qu'il mettait en oeuvre son droit d'alerte au motif d'une discrimination syndicale à son encontre et d'une dégradation de sa situation personnelle.
Le 30 août 2012, une réunion consécutive au droit d'alerte exercé par M. [Q] a eu lieu en sa présence, celle d'un délégué du personnel et de la directrice des ressources humaines.
M. [Q] a été placé en arrêt de travail du 21 décembre 2012 au 9 janvier 2013 (il le sera ensuite : du 28 février au 1er avril 2013 ; du 8 avril 2013 au 13 mai 2013 ; du 30 août 2013 au 15 septembre 2013 ; du 30 octobre 2013 au 10 janvier 2014).
Le 27 décembre 2012, l'inspection du travail a adressé à la société SKF un courrier faisant référence à un autre courrier de M. [Q] en date du 13 septembre 2012 ainsi que de l'entretien organisé le 30 août 2012 et lui demandant de la tenir informée des suites données à cet entretien.
C'est dans ces conditions, qu'en date du 5 mars 2013, M. [Q] a saisi le conseil de prud'hommes de : demandes de dommages intérêts pour harcèlement moral ainsi que pour discrimination syndicale et délit d'entrave ; pour revendication du statut cadre et rappel de salaire y afférent ; pour annulation de l'avenant relatif au changement de poste et de fonction, constituant une rétrogradation injustifiée, et dommages intérêts y afférents ; rappel de salaire (dernier avenant) et congés payés y afférents ; intérêts au taux légal et article 700 du code de procédure civile. Des demandes provisionnelles étaient en outre formées devant le bureau de conciliation.
L'affaire a été enrôlée au bureau de conciliation du 9 avril 2013 puis renvoyée au bureau de conciliation du 28 mai 2013 puis du 10 septembre 2013, lequel a ordonné à la société SKF France SA de remettre à M. [Q] ' le tableau récapitulatif de l'évolution des classifications et qualifications, ancienneté, niveau et échelon et salaires des vingt techniciens de développement étudiés par la direction, cette comparaison est nominative et sera faite entre les 2003 et 2011 '.
L'entretien préalable à un éventuel licenciement de M. [Q] s'est déroulé le 2 septembre 2013.
Le 12 septembre 2013, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a fait un 'point sur la situation professionnelle' de M. [Q].
Le 7 octobre 2013, la société SKF a demandé à l'inspection du travail l'autorisation de procéder au licenciement de M. [Q] pour faute grave.
Le 6 novembre 2013, le comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail a décidé de recourir à un expert aux fins d'enquêter sur le risque professionnel auquel M. [Q] était exposé. La société a contesté en justice cette délibération.
Le 4 décembre 2013, l'inspection du travail a notifié par courrier à la Société son refus d'autoriser le licenciement de M. [Q].
Le bureau de jugement du 8 avril 2014 a renvoyé l'affaire au bureau de jugement du 18 novembre 2014, lequel a renvoyé l'affaire au bureau de jugement du 5 mai 2015.
Entre temps, le 8 août 2014, M. [Q] avait saisi le tribunal correctionnel de Versailles aux fins de voir condamner la société SKF France SA pour délit d'entrave et pour délit de discrimination syndicale à son encontre (M. [Q] se désistera ensuite de son action devant le juge pénal).
Par jugement rendu en date du 20 octobre 2015, le conseil de Prud'hommes de Versailles, section industrie, a :
- dit que l'affaire était recevable ;
- dit que la demande de rappel de salaires et congés payés afférents au titre du complément annuel des 13e et 14e mois de salaire n'était pas fondée ;
- dit que la discrimination syndicale à l'encontre de M. [Q] n'était pas caractérisée ;
- dit que le harcèlement moral à l'encontre de M. [Q] n'était pas caractérisé ;
- débouté M. [Q] de l'intégralité de ses demandes ;
- débouté la société SKF France SA de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- mis les dépens y compris les frais éventuels d'exécution à la charge respective des parties.
Par acte en date du 12 novembre 2015, M. [Q] a interjeté appel du jugement susvisé.
Par acte en date du 6 septembre 2017, le syndicat CGT SKF de Montigny (ci-après, la 'CGT') est intervenu volontairement dans la procédure pour solliciter la condamnation de la société au versement de la somme de 500 euros en raison de l'atteinte commise à l'intérêt collectif de la profession.
Par leurs conclusions écrites communes, M. [Q] et la CGT demandent à la cour de :
- recevoir M. [Q] dans ses demandes et l'y déclarer bien fondé ;
- recevoir le syndicat CGT SKF dans ses demandes et l'y déclarer bien fondé ;
- ordonner à la société SKF de remettre à M. [Q], sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document dans les deux mois qui suivent la notification de l'arrêt à intervenir :
. la photocopie des bulletins de paie des mois de décembre de chaque année des salariés listés dans les conclusions (au dispositif) et des salariés qui ont été et qui sont technicien développement produit inscrits comme tels sur le registre du personnel, le cas échéant de façon anonyme mais vérifiable par la cour, et ce depuis leur embauche jusqu'à l'année 2017 ;
. un tableau récapitulant, pour chacun des salariés listés dans les conclusions (page 13), la date d'embauche, les postes occupés, la classification, la qualification, la date de naissance, les diplômes et le salaire de base mensuel pour 151,67 heures, et ce depuis leur embauche jusqu'à l'année 2017 ;
. la classification CRC du poste 'Technicien analyse de la concurrence VSM' ;
. se faire remettre les justificatifs des raisons objectives pouvant expliquer les éventuelles disparités pouvant être mises en évidence et notamment les formations qualifiantes ou diplômantes suivies au cours du parcours professionnel des salariés listés au dispositif des conclusions ;
- ordonner à la société SKF la mise à jour des registres uniques du personnel des deux établissements de la société SKF ;
- ordonner à la société SKF de remettre à M. [Q], sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document dans les deux mois qui suivent la notification de l'arrêt à intervenir les registres du personnel mis à jour des deux établissements de la société SKF ;
- condamner la société SKF à payer des dommages intérêts d'un montant de 500 euros au syndicat CGT de SKF pour l'atteinte commise à l'intérêt collectif de la profession ;
- ordonner le renvoi de l'affaire à une date d'audience ultérieure pour que le dossier soit jugé sur le fond.
M. [Q] estime en effet que le panel transmis en première instance par la direction de la société ne répond à la demande de production de pièces qu'il a formée, qu'il doit pouvoir, pour les besoins de sa défense, disposer des documents en question, notamment du registre d'entrée et de sortie du personnel à jour. Il a fait l'objet de discrimination syndicale et celle-ci se poursuit encore à ce jour.
Par ses conclusions écrites, la société SKF France SA demande à la cour de :
S'agissant de l'action de M. [Q] :
- constater que la société SKF a transmis les pièces et informations demandées démontrant l'absence de discrimination syndicale à l'encontre de M. [Q] ;
- confirmer le jugement dont appel ;
- débouter M. [Q] de l'intégralité de ses demandes ;
- le condamner à payer la société SKF la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
S'agissant de l'action du syndicat :
- dire et juger irrecevable l'intervention du syndicat CGT SKF Montigny ;
- le débouter de ses demandes formulées à l'encontre de SKF.
Par courrier électronique, le président de la chambre a informé les conseils des parties de la possibilité que l'affaire soit examinée au fond.
Le conseil de M. [Q] a exprimé le souhait de voir ses demandes avant-dire droit satisfaites avant que le fond ne puisse être abordée, tandis que le conseil de la Société a sollicité que le litige soit tranché au fond.
A l'audience, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur ce point.
Chacune a maintenu sa position.
Le conseil de M. [Q], rappelant qu'il n'était pas possible à ce dernier d'engager une procédure distincte des mêmes chefs postérieurement à la période initialement visée dans sa saisine du conseil de prud'hommes, a présenté des 'conclusions additives', par lesquelles il a maintenu que 'pour justifier la discrimination dont il fait l'objet (M. [Q]) doit notamment disposer d'éléments de comparaison sollicités et jamais communiqués et ce pour chiffrer son préjudice' ; qu'il est victime de discrimination liée à ses mandats depuis 2003 ; qu'en l'état, il sollicitait :
. une somme de 100 000 euros à titre de dommages intérêts pour discrimination syndicale.
. une somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral.
. la condamnation de la Société à payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Les parties ont ensuite été entendues en leurs plaidoiries.
Compte tenu de ces explications, la cour a sollicité la production d'une note, circonscrite (rapport remis par le cabinet spécialisé Stimulus ; procès-verbal de la réunion du CHSCT du 1er juillet 2004 discutant ce rapport ; candidature de M. [Q] sur un poste de 'technicien développement produit' sur le site de [Localité 4]), en délibéré.
Par courrier en date du 9 octobre 2007, reçu au greffe de la cour le 10 octobre 2007, le conseil de M. [Q] a adressé une note sur trois points (à laquelle étaient jointes sept pièces), à laquelle la cour renvoie expressément :
. sur l'enquête du CHSCT : M. [Q] était à l'époque membre du CHSCT, et Mme [W], responsable des ressources humaines, en était la présidente ; une 'délégation spécifique', dont faisait partie M. V, représentant la direction, a donc été mise en place ; elle a rendu ses conclusions le 2 juillet 2017 ; cela permet de constater que M. [Q] n'a pas pu vraiment exercer les tâches du métier de technicien analyste concurrence dès lors qu'il n'a jamais eu les moyens et outils nécessaires pour le faire : la Société elle-même écrivait qu'il devait 'compter des pièces' ou que les moyens de mesure se trouvaient sur le site de Saint-Cyr ;
. sur la candidature de M. [Q] au poste de 'technicien développement produit' à [Localité 4] : M. [Q] a postulé le 1er octobre 2014 ; le 13 novembre 2014, la Société lui répondait que le poste ne pouvait lui être attribué ' sous prétexte que celui-ci était coté au coefficient 305 ' et il était attribué à M. [S] avec le coefficient 365, en mars 2015, après avoir été occupé précédemment par M. P. coefficient 365 depuis 2001.
. sur le panel de salariés présentés par la société SKF : M. [Q] soutient qu'il n'avait pas défini de panel devant le conseil de prud'hommes, tandis que le panel présenté par SKF, contrairement à la demande du conseil, était ' loin de ne comporter que des salariés exerçant le métier de 'technicien développement produit' '. De plus, la totalité des salariés du panel de SKF se trouve sur le site de Saint-Cyr alors que l'accord GPEC 2008/2012 indique qu'il y a 25 salariés exerçant le métier de technicien développement sur le site de [Localité 3].
Par courrier en date du 20 octobre 2017, reçue au greffe de la cour le 23 octobre 2017, le conseil de la société SKF a répondu sur ces trois points :
. l'enquête demandée par le CHSCT a été menée par le cabinet Stimulus, dont le rapport a été discutée lors de la séance du CHSCT du 1er juillet 2014 ; le rapport recommandait, entre autres, de donner du sens en clarifiant le contenu des missions de M. [Q] et de recourir à une médiation ; la direction s'y est déclarée favorable mais M. [Q] n'a pas donné suite ; la Société a par ailleurs mis en oeuvre les préconisations du rapport mais M. [Q] 'oppose systématiquement une fin de non-recevoir ' ; par ailleurs, selon les pièces produites par M. [Q], ce serait la délégation unique du personnel (DU) qui aurait fait état de ce qu'il n'aurait pas pu vraiment exercer les tâches de 'technicien analyse de la concurrence', alors qu'elle s'était limitée à demander la transmission des pièces dont la production avait été ordonnée par le conseil de prud'hommes ; enfin, M. [Q] tentait de dévaloriser son travail pour 'tenter de justifier son refus persistant d'effectuer les missions lui incombant', alors qu'il y avait des attentes réelles de sa hiérarchie, outre qu'il dispose des éléments nécessaires pour travailler sur [Localité 3] ;
. s'agissant du poste de Saint-Cyr, c'est M. [Q] qui l'avait refusé, ce poste étant à un niveau inférieur (305), alors que la Société lui avait écrit que son coefficient individuel et sa rémunération 'restent inchangés' ; par ailleurs, M. P. avait atteint le coefficient 365 en 2012 et non en 2001 ; quant à M. [S], il était passé à ce coefficient au 1er mai 2011 et, lorsqu'il a pris le poste de Saint-Cyr, il l'a conservé ;
. s'agissant du panel, il résulte des conclusions de première instance de M. [Q] que c'est lui-même qui a indiqué les personnes auxquelles il voulait se comparer ; par ailleurs, les 19 (et non 25) autres 'techniciens produit' étaient tous partis de [Localité 3] à Saint-Cyr, M. [Q] étant le dernier à être resté puisqu'il avait refusé le transfert de son poste puis accepté, sur [Localité 3], celui de 'technicien analyse de la concurrence'.
Par courrier en date du 25 octobre 2017, le conseil de M; [V] répondait 'succintement' en trois points, soulignant notamment que le poste de 'technicien analyse de la concurrence' est un poste unique non côté.
MOTIFS
Sur la demande avant dire droit de M. [Q]
M. [Q] demande à la cour d'ordonner, avant toute décision au fond, la communication de plusieurs documents permettant à la cour de vérifier que son argumentation est fondée. Il souligne en particulier que sa situation peut être comparée :
. aux salariés qui occupent à ce jour le poste de 'technicien développement produit' (3 salariés) ;
. aux salariés qui ont été embauchés en qualité de 'techniciens développement produit' et qui occupent à ce jour un autre poste (2 salariés) ;
. aux salariés qui occupent les postes de 'techniciens amélioration qualité', de 'techniciens laboratoire', de 'techniciens retour garantie' (7 salariés, 'dont les données n'ont pas été communiquées en première instance par la société') ;
. aux salariés occupant le poste de 'technicien projet' et de 'technicien méthode' (6 salariés) ;
soit un total de 18 salariés.
M. [Q] dresse toutefois une liste de 28 noms de salariés au total, dont il sollicite les bulletins de paie et données relatives à la date d'embauche, les postes occupés, la classification, la qualification, la date de naissance, les diplômes et le salaire de base mensuel pour 151,67 heures et ce, depuis leur embauche jusqu'à l'année 2017.
M. [Q] ajoute que les pièces communiquées initialement par la Société sont devenues obsolètes compte tenu de l'évolution de la classification et de la qualification des salariés auxquelles il entend se comparer. Il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir fait appel de l'ordonnance de production de pièces rendue par le bureau de conciliation dans la mesure où elle est insusceptible de recours.
La société SKF réplique, notamment, que :
- la demande de documents a déjà été formulée par M. [Q] par voie de conclusions devant le bureau de conciliation ;
- la société y a répondu par voie de conclusions en indiquant qu'elle produirait les éléments concernant les 19 salariés occupant le même poste que M. [Q], à savoir 'technicien développements produits' ;
- la société s'opposait de façon tout à fait légitime à la demande de production d'éléments concernant des salariés occupant un emploi différent de M. [Q] et ayant une qualification supérieure à la sienne.
La société ajoute que, au vu des arguments développés, le bureau de conciliation n'a pas laissé à la discrétion de la société le choix d'un certain panel de salariés mais a simplement limité la production des éléments aux seuls salariés occupant le même poste que M. [Q].
La société souligne que M. [Q] n'a pas interjeté appel de cette ordonnance et n'a pas réitéré dans le cadre de l'instance au fond la communication d'autres pièces.
La société constate que, M. [Q] demande en cause d'appel la production d'éléments concernant des salariés occupant divers postes ne correspondant pas à ceux occupés par l'intéressé.
La société ajoute que le salarié fait fi, de par ses demandes, de plusieurs éléments, notamment de :
- la prescription quinquennale en matière de discrimination syndicale ;
- l'obligation légale de l'employeur en matière de conservation des bulletins de paie des salariés de cinq ans ;
- l'absence de mention obligatoire sur les registres du personnel de la classification conventionnelle et des coefficients des salariés, seuls les changements d'emploi ou de qualification étant portés sur ces registres conformément aux dispositions légales (l'ensemble de ces éléments étant établis par les documents produits aux débats par SKF sans qu'il y ait besoin de produire les registres du personnel sur lesquels il n'y a effectivement pas la mention du coefficient des salariés).
Enfin, la société explique également que le salarié sollicite la production notamment de 'la classification CRC du poste de technicien analyse de la concurrence' ; que ce document n'existe pas.
Sur ce
La cour doit tout d'abord observer que le recours de M. [Q] porte, en fait, quasi exclusivement sur la discrimination pour motif syndical dont il estime être victime et que, d'ailleurs, la CGT s'est associée à ses conclusions sur ce point.
La totalité de la discussion sur la demande avant-dire droit présentée par M. [Q] porte ainsi sur la production de pièces qui permettent, selon lui, de vérifier l'existence de cette discrimination, laquelle perdure selon lui.
La cour doit dès lors prendre en considération les dispositions particulières qui régissent le système probatoire en matière de discrimination.
Aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
Selon l'article 1er de la loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses mesures d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations :
- constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation sexuelle ou de son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable,
- constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés, la discrimination inclut tout agissement lié à l'un des motifs précités et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant.
L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Pour apprécier la demande faite par M. [Q] devant la cour, il convient de se reporter aux demandes de production qu'il avait formées devant le premier juge (il était alors assisté par un autre conseil).
Aux termes des ses conclusions, il sollicitait, sous astreinte, la poursuite de l'enquête qu'il avait sollicitée et la production des documents suivants :
. bulletins de salaires depuis 2003 'des 19 salariés ayant occupé ou occupant le poste de Technicien Développement Produit' ;
. tableau récapitulatif de l'évolution des classifications et qualifications, date de naissance, ancienneté, niveau et échelon de ces 19 salariés ;
. description du poste actuel de chacun des 19 salariés ;
. justificatifs des formations qualifiantes ou 'diplômantes' suivies au cours du parcours professionnel pour ces 19 salariés ;
. lettre d'embauche (ou contrat à l'embauche) ce M. [O] au poste de 'technical center manager du 27 août 2010 ;
. contrats de travail des salariés ayant occupé le poste d'ingénieur développement produit VKMA à partir de 1996.
Par ordonnance en date du 10 septembre 2013, le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes a :
. ordonné à la société SKF de délivrer à M. [Q] le tableau récapitulatif de l'évolution des classifications et qualifications, ancienneté, niveau et échelon et salaires 'des 20 techniciens de développement étudiés par la direction, cette comparaison est nominative et sera faite entre les années 2003 et 2011';
. débouté M. [Q] de ses autres demandes.
La société SKF a produit un tableau comparatif.
Dès les conclusions déposées pour l'audience devant le conseil de prud'hommes du 5 mai 2015, M. [Q] a fait observer au conseil que les tableaux comparatifs dressés par SKF étaient 'dénués de pertinence', notamment parce que un seul salarié, M. P., pouvait être considéré comme placé dans une situation comparable à la sienne, étant souligné qu'un autre salarié, M. G., avait été promu au même coefficient 335 après seulement trois ans d'ancienneté. De plus, 'la quasi-totalité des techniciens figurant sur ces tableaux est basée à SAINT-CYR-SUR-LOIRE alors que d'autres techniciens développement produit travaillent sur le même site que (lui) à MONTIGNY mais ne figurent pas dans ce tableau'.
Par voie de conséquence, si la société SKF refuse de produire d'autres éléments que ceux produits, elle s'expose, dès lors que M. [Q] aurait présenté des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, à ce que toutes conséquence puisse être tirée de ce refus, puisque que M. [Q] n'a pas à prouver la discrimination qu'il invoque, en vertu du mécanisme ci-dessus décrit.
Certes, M. [Q] insiste pour que la cour considère que la discrimination dont il estime avoir été victime a perduré et qu'il est toujours victime de discrimination.
Mais, de façon similaire, à supposer que M. [Q] présente les éléments de fait permettant de le laisser supposer, la cour devrait tirer toute conséquence du refus de la Société de produire tel ou tel élément sollicité par ce salarié.
Encore la cour doit-elle souligner que, pour apprécier la portée du refus de la Société, il convient de vérifier si M. [Q] présente des arguments suffisants pour que la cour doive surmonter ce refus ou si, à l'inverse, M. [Q] cherche à se lancer dans une expédition de pêche d'informations qui ne sont pas nécessairement pertinentes, pour lui.
Dans le cas d'espèce, la cour considère que M. [Q], compte tenu de ses demandes, d'une part, des décisions du bureau de conciliation puis du conseil de prud'hommes, des pièces produites par lui comme par la Société, d'autre part, ne démontre pas la nécessité pour la cour d'ordonner une mesure d'instruction afin d'assurer le respect de ses droits, légitimes, à se défendre. En particulier, M. [Q] ne présente aucun argument de nature à démontrer l'opportunité d'obtenir communication d'éléments relatifs à des salariés qui n'occupent pas le même poste que lui, n'ont pas la même ancienneté, n'ont pas le même coefficient ou échelon, bref, ne se trouvent pas dans une situation dont il aurait établi qu'elle serait, en quoi que ce soit, comparable.
Encore une fois, la cour tirera toute conséquence éventuelle de ce que la Société n'aurait pas produit une pièce dont la pertinence serait, finalement, avérée.
Ce qui constitue une question de fond.
Sur la recevabilité de l'intervention du syndicat CGT
La société SKF soutient que la CGT est irrecevable à défaut d'intérêt à agir, d'une part en ce que 'on voit mal comment la situation professionnelle personnelle de Monsieur [Q] a pu porter préjudice à l'ensemble des salariés travaillant au sein de la Société SKF' et, d'autre part, la CGT n'est pas fondée à invoquer le refus de la direction de SKF d'appliquer un accord d'entreprise sur le dialogue social signé en 2005, dès lors que cet accord ne concerne que le site de Saint-Cyr.
Sans qu'il soit besoin d'aborder le second point, la cour doit relever que, par définition s'agissant de discrimination syndicale, quand bien même un seul salarié en aurait été victime, un syndicat a un intérêt manifeste à agir puisqu'une telle discrimination porte nécessairement et directement atteinte aux intérêts qu'un syndicat, fût-il d'ailleurs différent de celui dont le salarié concerné est membre, doit défendre.
La cour déboutera donc la Société sur ce point et dira la CGT recevable en son intervention.
Sur le fond
A titre préliminaire, il convient d'indiquer que M. [Q] a exercé les mandats suivants :
. de 2003 à 2012 : membre du comité d'établissement de [Localité 3] ;
. de 2003 à aujourd'hui : membre puis secrétaire du CHSCT ;
. de 2003 au 2 octobre 2012 : délégué du personnel ;
. du 3 mai 2010 au 2 octobre 2012 : délégué syndical CFTC.
La cour estime également utile de considérer ici que, si les faits éventuels de discrimination se prescrivent par cinq ans, comme le soulève la société SKF, encore faut-il retenir que, dès lors que la discrimination se serait poursuivie sans interruption, rien n'interdit au salarié concerné de faire référence à des éléments antérieurs pour établir la discrimination dont il estime continuer de faire l'objet. La prescription des faits fautifs aurait seulement pour effet que ce salarié ne puisse être indemnisé a due concurrence pour la période prescrite.
Ceci étant précisé, selon le mécanisme décrit ci-dessus, la cour doit d'abord vérifier si M. [Q] établit des faits de nature à laisser supposer qu'il a été victime de discrimination.
M. [Q] fait notamment valoir, sur le fond, que la Société n'a pas respecté les dispositions de l'accord d'entreprise relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences 2009/2012 en ne lui versant pas son complément annuel de salaire tel que stipulé, selon lui, par l'avenant à son contrat de travail en date du 15 novembre 2011, et consistant en un treizième et un quatorzième mois de salaire en 2012 et en 2013.
Plus généralement, M. [Q] estime être victime de discrimination syndicale, depuis 2003 et jusqu'à aujourd'hui, et, par voie de conséquence, de harcèlement moral.
M. [Q] souligne qu'il a été maintenu au coefficient 335 depuis l'année 2003, lorsqu'il a commencé à exercer des mandats de représentation du personnel ou syndicaux, alors qu'il avait gravi trois niveaux de classification de la convention collective entre les années 1990 et 2003 ; puis qu'il lui a été proposé d'être transféré sur le site de [Localité 2] en 2010 alors qu'il exerçait ses mandats sur le site de [Localité 1], et qu'aucun des six postes disponibles lors de ce transfert ne lui a été attribué.
M. [Q] ajoute qu'il ressort ainsi de la comparaison avec six salariés que ceux-ci ont continué à évoluer après l'année 2003 quand lui a stagné ; et de la lecture du bilan social de 2012, des comptes rendus de comités d'entreprise 22 novembre 2013 et du procès-verbal de la réunion des délégués du personnel du 17 décembre 2013, que des salariés ont été promus au coefficient 365 sur les deux sites de l'entreprise.
De plus, contrairement aux engagements pris par la société dans le cadre de l'accord d'entreprise relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences 2009/2012, M. [Q] indique n'avoir eu que trois entretiens d'évaluation entre les années 1990 et 2012 et qu'aucun 'bilan professionnel annuel prévu pour les titulaires de mandat électif et syndicaux' n'a été effectué.
M. [Q] rappelle que, pourtant, il a été à l'origine de six inventions dont cinq brevetées et s'est vu décerner le prix de l'excellence en 2006, qu'il est un technicien de haut niveau alors que le poste de 'technicien développement produits VSM' est éligible au coefficient 365 pour un technicien supérieur expérimenté ou peut être occupé par un ingénieur.
Pourtant, suite à son refus du transfert sur le site de [Localité 2] en 2001, les promesses d'évolution qui lui avaient été faites n'ont pas été tenues et le poste de 'technicien analyse concurrence VSM' qui lui a été attribué ne correspond pas aux dispositions conventionnelles d'un agent de maîtrise niveau V.
Il résulte des pièces produites par M. [Q] et des éléments communiqués par la société SKF à la demande du conseil de prud'hommes les éléments suivants.
M. [Q] a été embauché en qualité de 'technicien développement' niveau III échelon 3, coefficient 240, le 21 mai 1990, poste dans lequel le salarié 'réalise la conception complète du produit : plans, validation des produits et interface technique entre clients (constructeur automobile ou équipementier) et fournisseurs ; il participe ou anime des revues de conception avec les services concernés par le projet ('méthodes', 'production', 'assurance qualité', prototypes'), anime ou participe aux projets clients ou projets internes, doit motiver ses collègues sur les objectifs fixés, adhérer et participer aux objectifs ; il anime son équipe, suit le travail de ses membres, gère les priorités en cas de charge très importante.
M. [Q] est passé : au coefficient 255 en septembre 1992 ; 270 en octobre 1992 ; 285 en octobre 1997.
En septembre 1999, M. [Q] atteint le niveau V, 1er échelon, coefficient 305 (il est 'technicien développement produit 2').
En mai 2003, M. [Q] est classé au niveau V, 2ème échelon, coefficient 335.
En 2006, M. [Q] se voit décerner le 'SKF Excellence Award'.
Par avenant en date du 15 novembre 2011, M. [Q] devient 'Technicien Analyse concurrence VSM', niveau V, 2ème échelon, coefficient 335, poste sis à [Localité 3] le Bretonneux, avenant signé par M. [Q] avec la mention manuscrite 'lu et approuvé'.
Le titulaire de ce poste est responsable de l'analyse de contenu des kits concurrents de la gamme VSN : composition et design (massif, modulaire...) ; responsable de documenter et de communiquer à son hiérarchique ainsi qu'au responsable Produit correspondant toutes les différences et points importants relevés lors des analyses faites sur les produits concurrents ; il apporte son expertise produit aux équipes produit et prépare de la documentation technique suite aux analyses de la concurrence effectuées, en vue de supporter les équipes de vente (le vocabulaire utilisé ici est celui de la description du poste).
Il apparaît ainsi que M. [Q] n'a connu aucune progression d'échelon entre 2003 et 2011 et pas davantage depuis.
S'agissant de l'évaluation '360°' de l'année 2007, contrairement à ce que M. [Q] indique, elle n'est pas particulièrement satisfaisante : si l'évaluation qu'il fait de sa performance rejoint celle faite par les tiers, les points à améliorer sont nombreux et importants (travail d'équipe, motivation et engagement personnel, être attentif aux comportements et retours des collègues, établir, vérifier et mesure régulièrement les objectifs et priorités, améliorer la clarté et l'efficacité de la communication, entre autres).
Une telle évaluation ne saurait justifier, du point de vue de la cour, une promotion ni même un changement d'échelon.
Les tableaux du nombre de salariés promus dans l'année dans une catégorie supérieure indiquent que :
Sur le site de [Localité 3] le Bretonneux :
. en 2011, deux salariés sont passés du coefficient 335 au coefficient 365 ; un de 365 à 395 ; trois sont passés cadre ;
. en 2012, ces chiffres sont, respectivement de : 1, zéro et trois ;
. en 2013 : 6, zéro, zéro ;
. en 2014 : 5, zéro, 3 ;
. en 2015 : 2, zéro, 6 ;
Sur le site de Saint-Cyr :
. en 2011, neuf salariés sont passés du coefficient 335 au coefficient 365 ; zéro de 365 à 395 ; trois sont passés cadre ;
. en 2012, ces chiffres sont, respectivement de : 4, un et deux ;
. en 2013 : 8, zéro, zéro ;
. en 2014 : 4, zéro, 5 ;
. en 2015, 5, zéro, 3.
La cour considère que ces tableaux ne permettent pas de comparaison utile, dès lors que, d'une part, le nombre total de salariés promus n'apparaît que dans les tableaux concernant le site de Saint-Cyr, sur lequel ont été regroupées la totalité des activités du type de celles auxquelles M. [Q] participait et que, d'autre part, les effectifs globaux de chacun des sites ne sont pas précisés.
M. [Q] produit par ailleurs un courriel, en date du 21 avril 2011, dans lequel il évoque son 'nouveau poste' et adresse, à une destinataire dont la qualité n'est pas précisée, son 'descriptif de poste avant (la) réunion de 5 janvier 2010 et le nouveau après ladite réunion'.
Mais, ces descriptifs ne sont pas soumis par M. [Q] à la cour, qui ne peut donc apprécier.
De plus, il résulte de ce courriel que M. [Q] déplore que le nouveau descriptif lui retire la partie 'la plus intéressante' (gestion de projet, communication, travail en équipe, conduite de réunion, contact extérieur, gestion du personnel...). Mais M. [Q] n'est pas fondé à déplorer cette circonstance, sans doute exacte, puisqu'aussi bien il a refusé le transfert sur le site de Saint-Cyr, tandis que toutes les activités de sa compétence y ont été transférées : par définition, ses tâches ne pouvaient plus être les mêmes.
S'agissant de la question de la rémunération et de son évolution, M. [Q] soumet les listes remises par la Société, concernant les 'techniciens développement niveau 2' (ci-après, TD2).
Il en résulte que (rémunération annuelle ou annualisée) :
. M. [Q] : en 2003, niveau 5, à l'échelon 2, coefficient 335, il percevait 30 260,44 euros ;
En 2007 : 36 179,28 euros ;
En 2011 : coefficient 335 : 39 575,40 euros. M. [Q] a alors 21 ans d'ancienneté.
M. A. B. : en 2003, à l'échelon 1, coefficient 305 : 25 263,04 euros ;
En 2007, à l'échelon 2, coefficient 335 : 29 681,76 euros ;
En 2011 : 32 941,24 euros.
La rémunération de M. [N], qui a sensiblement le même âge que M. [Q], si elle a connue une progression rapide grâce à un changement d'échelon, reste très inférieure à celle de M. [Q].
. M. B. X. : est entré en 2006, au niveau 4, échelon 2 : 21 600 euros
en 2011, il est passé à l'échelon 5 échelon 1 : 28 394,78 euros.
La comparaison avec ce salarié est sans pertinence.
. Mme [S] [S] : est technicienne de laboratoire de 2004 à 2010, avant de devenir technicienne développement niveau 2 en 2011, et elle est nettement plus jeune que M. [Q] ; la cour considère que cet élément de comparaison n'est pas pertinent. En tout état de cause, elle est classée au coefficient 305 et sa rémunération est de 28 146,24 euros en 2011.
. Mme Ch. [S] : entrée comme technicienne développement produit niveau 1 coefficient 270 en 2012 ; la comparaison ne peut pas être pertinente.
. M. F. [S] : entré comme TD2 coefficient 335 en 2011, il est plus jeune de six années que M. [Q] ; sa rémunération correspond à la somme de 30 900 euros annuellement.
La comparaison n'est donc pas pertinente et en tout cas pas en défaveur de M. [Q].
. M. [K] : en 2006, entré comme TD2, coefficient 305: 26 400 euros
en 2011 : 29 776 euros.
La comparaison n'est donc pas pertinente et en tout cas pas en défaveur de M. [Q].
. M. B. [S] : en 2003, TD2, coefficient 305 : 28 047,55 euros
en 2007, coefficient 335 (obtenu en 2006) : 33 078,36 euros
en 2011, coefficient 335 : 36 286, 56 euros.
Ce salarié a quasiment le même âge que M. [Q]. Il a 23 ans d'ancienneté.
La circonstance que M. B. [S] aurait obtenu le coefficient 335 un an avant M. [Q] n'est ainsi en rien significative en l'absence de tout autre élément fourni par M. [Q] et, en tout état de cause, en 2011, la comparaison est en faveur de ce dernier.
. M. J. D. : c'est un TD1, coefficient 255 en 2007, puis 270 en 2011 ; il est beaucoup plus jeune que M. [Q].
La comparaison n'est donc pas pertinente et en tout cas pas en défaveur de M. [Q].
. M. [W] G. : il n'occupe pas un emploi qualifié de la même manière que M. [Q], ce qui fausse d'ores et déjà la comparaison, d'autant qu'il est plus jeune.
Il a 13 ans d'ancienneté.
Si l'on se réfère aux seuls 'coefficients', ce n'est pas davantage pertinent, dans la mesure où M. [V] est passé niveau 3 dès 2006, coefficient 335, puis est devenu employé, coefficient 365 en 2011. A cette date, sa rémunération est de 32 157,92 euros.
La comparaison n'est donc pas pertinente et en tout cas, pas en défaveur de M. [Q] qui, plus ancien, perçoit davantage en ayant un niveau inférieur (même si le même coefficient).
. M. [M]. G. : 2003, TD2 coefficient 305 : 26 948,06 euros
2007 : coefficient 225 : 32 320,92 euros
2011 : coefficient 335 : 35 627 euros.
M. [M]. G. est à peine plus âgé que M. [Q].
Il a 13 ans d'ancienneté.
Alors qu'ils se trouvent dans une situation voisine, la comparaison, en tenant compte de l'ancienneté, reste finalement en faveur de M. [Q].
. M. [S] G. : il est plus jeune que M. [Q] d'une dizaine d'années et a 11 ans d'ancienneté en 2011.
2003, TD2 coefficient 285 : 23 411,60 euros
2005, TD2 coefficient 305 : 25 487,98 euros
2007, TD3, coefficient 335 : 29 020,02 euros
2011, TD3, coefficient 335 : 32 576 euros.
La cour ne peut que constater que M. [Q] ne soumet aucun autre élément concernant M. [S] G., dont la rapidité de la promotion au regard de son relativement jeune âge suggère qu'il avait un niveau de qualification ou de diplôme supérieur.
En tout état de cause, la comparaison n'est finalement pas en défaveur de M. [Q], qui gagne plus de 7 000 euros de plus en 2011.
. M. G. H. : il n'est pas du même niveau (niveau 1, coefficient 225 en 2003, 255 en 2011), la comparaison n'est aucunement pertinente.
. M. R. L. : il a 12 ans d'ancienneté en 2011 et est âgé de sept ans de moins.
2003, TD1, coefficient 285 : 22 963,19 euros
2008, TD2, coefficient 305 : 27 231,96 euros
2011, TD2, coefficient 305 : 29 085,04 euros.
La progression rapide de M. R. L. le laisse néanmoins loin derrière M. [Q] en termes de rémunération.
. M. J. M. : il est beaucoup plus jeune et n'occupe pas les mêmes fonctions que M. [Q].
Quand bien même il doit être noté qu'il est passé du coefficient 215 au coefficient 305 entre 2005 et 2011, pour une rémunération de 25 675,28 euros, la comparaison ne peut rien avoir de pertinente.
. M. B. M : 2003, TD1, coefficient 285 : 23 207,48 euros
2009, TD2, coefficient 305 : 28 400 euros
2011, TD2, coefficient 305 30 084,38 euros.
Plus jeune que M. [Q] de près de neuf années, il a 11 ans d'ancienneté.
La comparaison des deux situations ne fait apparaître aucune discrimination en défaveur de M. [Q].
. M. L. P. : il a 20 ans de moins et 17 ans d'ancienneté de moins que M. [Q].
La comparaison n'est pas pertinente et en tout cas pas en défaveur de M. [Q].
. M. T. P. : 2004, TD1, coefficient 285 : 22 800 euros
2005, TD2, coefficient 305 : 23 975 euros
2008, TD2, coefficient 335 : 28 112,04 euros
2011, TD2, coefficient 335 : 30 035,48 euros.
Ce salarié a 26 ans de moins que M. [Q] et 14 ans d'ancienneté en moins.
La comparaison n'est pas pertinente et, finalement, en tout cas pas en défaveur de M. [Q].
. Mme L. P. : c'est une TD1, la comparaison avec M. [Q], alors qu'elle n'a pas dépassé le coefficient 285, est dénuée de toute pertinence.
. M. [F]. P. : du même âge que M. [Q], il a la même ancienneté.
2003, TD2, coefficient 335 : 27 536,70 euros
2007, même situation : 32 049 euros
2011, même situation : 35 490,12 euros.
La comparaison entre M. [F]. P. et M. [Q] est particulièrement intéressante, en ce que M. T. P. n'a pas changé de coefficient sur toute la période de 2003 à 2011, tout comme M. [Q], et que leurs situations sont donc très comparables.
M. [Q] précise que, à la différence de M. [F]. P., il possède un diplôme quand ce dernier n'en dispose pas.
Cette affirmation est inexacte (voir ci-après).
De plus, force est de constater, outre que, après 21 ans d'ancienneté, en l'absence de démonstration que l'on a suivi une formation particulière, la circonstance que, à la prise d'emploi, on disposait ou non d'un diplôme perd quelque peu de sa pertinence, il est constant que, dans une situation par ailleurs identique, M. [Q] perçoit une rémunération très sensiblement supérieure à celle de M. [F]. P. (pour plus ample discussion, voir ci-après).
. M. [W] V. : 2003, TD1 coefficient 270, il devient TD2 en 2009 coefficient 305 puis, coefficient 335 en 2010, 365 en 2013, puis cadre en 2015.
Mais sa situation n'est en rien comparable, s'agissant d'un salarié beaucoup plus jeune ayant beaucoup moins d'ancienneté.
La Société justifie que la performance de M. [W] V. qui a été évaluée par une autre hiérarchie, est, de meilleure qualité, qu'il s'agisse de ses compétences à l'international ou de sa qualité de leadership.
En tout état de cause, la rémunération de M. [G] en 2011 est de 30 473,64 euros et se compare donc défavorablement à celle de M. [Q]. La comparaison reste défavorable en 2015.
La différence de traitement, en termes de coefficient, apparaît ainsi justifiée.
La cour souligne que la société SKF a indiqué, sans être aucunement démenti de quelque manière que ce soit, que M. [Q] est le salarié le mieux payé de la société dans sa catégorie. La comparaison avec M. [W] V. montre qu'il peut même être mieux payé que des salariés bénéficiant d'un coefficient supérieur.
Au total, le panel de comparaison présenté par M. [Q], sur la base des éléments fournis par la société SKF en réponse à la demande du conseil de prud'hommes, s'il contient des références dénuées de toute pertinence, comme la cour vient de l'indiquer, ne permet pas de relever, pour les salariés dont la situation pourrait être comparée à celle de M. [Q], une quelconque situation de discrimination.
La cour rappelle également la discussion ci-dessus, qui établit que, contrairement à ce qu'il suggère, la performance de M. [Q] est devenue moyenne et n'imposait pas qu'il bénéficiât d'un changement rapide de coefficient.
Encore faut-il rappeler ici que M. [Q] a obtenu un diplôme ('Award') d'excellence en 2006.
Par ailleurs, l'arrêt de la cour d'appel de Paris, en date du 30 mai 2017, relatif aux compléments de prime que M. [Q] estimait lui être dus du chef des brevets déposés sur la base de ses inventions, permet de retenir que cinq inventions méritaient d'être davantage récompensées, dont les brevets ont été délivrés, successivement : le 27 août 1999 ; le 26 août 2005 ; le 16 décembre 2005 ; le 10 décembre 2010 et le 20 janvier 2012 mais, éventuellement, sur d'autres listes.
Dès lors, il appartient à la cour de vérifier si M. [Q] aurait pu être moins bien traité, compte tenu de tous ces éléments, que d'autres susceptibles de se trouver dans une situation similaire et qui ne figureraient pas dans la liste ci-dessus.
S'agissant de l'enquête du CHSCT, menée suite à une réunion de ce comité, du 19 septembre 2012, au cours de laquelle M. [Q] avait déclaré faire l'objet de discrimination syndicale, elle a donné lieu à l'établissement d'un rapport par le cabinet Stimulus, examiné lors de la réunion du comité du 1er juillet 2014.
La cour note que le cabinet Stimulus a pu déplorer 'un manque de disponibilité et de coopération (de la Société) sur certains sujets spécifiques, entravant le bon déroulement de l'enquête', notamment la non communication de documents tels que ceux 'visant l'explication de l'attribution des coefficients' ou même 'les entretiens individuels de Monsieur [T] [V]'.
Le rapport fait état de liens 'entre la situation professionnelle vécue comme difficile par (M. [Q]) et un certain mode de fonctionnement général au sein (de la Société)'.
Le rapport souligne, selon le comité, que les 'avis techniques que peut formuler (M. [Q], qui sont constitutifs de son 'intérêt au travail') et qui constituent pour lui la partie la plus intéressante de ce nouveau poste, n'apparaît donc peu voire pas valorisée par l'entreprise.'.
Le rapport fait également état, dit le comité, d'une 'quasi-absence des entretiens annuels, ce qui rajoute à la complexité 'de gérer une carrière professionnelle en seulement trois entretiens annuels, et ce que ce soit pour les R.H. ou pour P.W.', (et de ce que le) coefficient de (M. [Q]) n'a pas évolué depuis 2003 (...)'.
Selon le cabinet Stimulus , 'la relation entre poste et convention collective est d'autant plus floue que le coefficient associé à un poste n'est pas inscrit sur la fiche de poste'.
Le cabinet Stimulus constate, enfin, des 'relations interpersonnelles parfois complexes. Relations interpersonnelles qui pourraient impacter le travail et sa réalisation'.
Le rapport du cabinet Stimulus va, en réalité, aboutir à des conclusions générales, qui dépassent le cas de M. [Q] : l'évolution de l'entreprise SKF et l'impact sur l'intérêt du travail ; la politique de gestion de carrière au sein de l'entreprise SKF, et l'impact sur le sentiment de rétrogradation ; la place de la variable comportementale dans l'évolution professionnelle au sein de l'entreprise SKF, et l'impact sur la perception d'une mise au placard.
Le CHSCT ne conclut pas, d'ailleurs, lors de la réunion précitée, à une discrimination mais recommande, notamment, une valorisation du poste de technicien d'analyse de la concurrence occupé par M. [Q], une médiation pour débloquer la situation entre ce dernier et son supérieur hiérarchique / les 'RH', un suivi, par un groupe de travail, de la mise en place d'actions définies par le CHSCT. Le comité demande que 'tous les acteurs impliqués' soient partie prenante du plan d'actions et demande à la Société de fournir les éléments concernant 10 salariés embauchés comme 'techniciens produit' à Montigny, ainsi que le registre unique du personnel pour les années 1989, 1990 et 1991 'afin d'y choisir les salariés à des postes similaires à celui de Monsieur [Q]'.
Sur ce dernier point, à l'occasion d'une réunion du CHSCT du 28 septembre 2015, la Société, après que M. [Q] a fait observer qu'elle a 'attribué les coefficients à la tête du client', indiquera que les registres du personnel des années 1989, 1990, 1991 ou 2011 ne font pas apparaître les changements de poste ou de coefficient. Si différents participants à la réunion le déplorent, ils ne contestent pas que cela soit. L'argument de la Société devant la cour sur ce point apparaît donc fondé.
La cour note, au demeurant, que l'autre salarié membre du syndicat CGT, lorsqu'il réclamera la classification en catégorie 'cadres' de quatre salariés, ne fera pas mention de M. [Q].
La cour doit s'étonner quelque peu de cette discussion sur les 'coefficients', dès lors que rien, dans les éléments soumis par M. [Q], ne permet de remettre en cause l'accord du 18 juillet 2002 relatif à la gestion prévisionnelle des emplois, au développement des compétences des salariés et à leur adaptation à l'évolution de leur emploi. Cet accord indique en effet qu'un 'système de classification des postes existe au sein de 'SKF' (...). Il permet d'identifier, évaluer et coter tous les postes existants ou en devenir tant sur l'aspect des process que de l'organisation (...) Tous les postes sont décrits selon une méthodologie unique (...) Depuis 1997, ce système valorise également la polyvalence'.
En revanche, cet accord prévoit que tous les salariés doivent avoir un plan de développement et qu'un entretien individuel 'doit avoir lieu au minimum tous les 2 ans'.
M. [Q] est donc fondé à déplorer ne pas avoir bénéficié d'un tel plan ni d'entretiens réguliers.
Toutefois, il n'apporte aucun élément permettant de considérer que son cas aurait été différent de celui des autres salariés, syndiqués ou non, et il ne peut en être déduit aucune discrimination à son encontre.
Contrairement à ce que soutient M. [Q], l'absence d'entretiens réguliers ne permet de présumer l'existence d'une discrimination que si le salarié concerné se trouve, à cet égard, dans une situation différente, particulière, de celle des autres salariés.
Il en va de même en ce qui concerne les dispositions du plan relatives au développement des compétences et aux formations : aucun élément apporté par M. [Q] ne permet de considérer qu'il a été traité différemment des autres salariés, syndiqués ou non.
La prétention de M. [Q] qu'il aurait pu être nommé dans les fonctions de 'business coordinator' doit être écartée, dès lors que les évaluations produites montrent que les deux domaines dans lesquels M. [Q] pêche particulièrement sont les relations avec les tiers et le travail en équipe.
Faute d'éléments en sens contraire produits par M. [Q], la cour considère en outre que, comme le soutient la Société, M. [Q] avait des missions techniques (et la cour a indiqué plus haut que M. [Q] a pu se montrer ingénieux en ce domaine et permettre le dépôt de brevets) qui ne relevaient pas du statut cadre mais plutôt de la catégorie des administratifs et techniciens et que le fait qu'il ait pu être amené à collaborer en binôme sur certains projets avec un ingénieur développement ne lui permet pas de prétendre que ses fonctions étaient celles d'un ingénieur.
Cela étant, pour apprécier la situation au regard des autres fonctions/des mêmes fonctions sur le même site ou sur celui de Saint-Cyr, que M. [Q] aurait pu occupées, et l'évolution de cette situation depuis 2011, la cour dispose des tableaux, produits par M. [Q], que constituent : la liste des électeurs du site de Saint-Cyr, telle que dressée par la Société au 1er octobre 2015 ; et la liste de l'effectif du site de [Localité 3] 'Election CE/DP - du 11 juin 2014 au 10 juin 2015', ces deux documents permettant d'apprécier la situation de M. [Q] postérieurement à la demande qu'il a introduite devant le conseil de prud'hommes.
A titre préliminaire, comme la Société l'y invite expressément, la cour observe que, dans ses écritures et explications devant elle, M. [Q] sollicite de voir sa situation comparée à des salariés qu'il avait, en première instance, expressément exclus, s'agissant notamment de salariés ayant moins de dix ans d'ancienneté en 2003. Si cette circonstance peut s'expliquer par le changement de conseil, elle rend nécessairement plus incertaine la position exacte dans laquelle M. [Q] se place.
La cour va donc se placer sur des éléments stables et non contestés en eux-mêmes (la discussion sur la composition des collèges n'étant pas pertinente au regard du litige en cause ici) : les listes des électeurs à la représentation des salariés sur les sites de [Localité 3] et de Saint-Cyr.
Ainsi :
Sur le site de [Localité 3] : la cour a recherché les salariés figurant sur la liste dont le coefficient est 335 ou 365 au niveau V ; il en résulte que la quasi totalité des salariés dont le coefficient est 365 occupent une position dans laquelle ils sont, à la lecture de leur 'emploi bulletin de paie', 'responsables' ; la cour observe, certes, que plusieurs salariés occupent des fonctions de 'responsable' qui sont au coefficient 335 (Mme [J], responsable compte client ; M. [S] [S], responsable qualité ; Mme [K], responsable client ; M. [C], 'product information coordinator'),
mais d'autres, au coefficient 365, ne présentent pas cette particularité (M. J. dC., technicien maintenance conditionnelle ; M. [M], technico commercial interne ; Mme [E], chargé de communication) ;
aucune conclusion ne peut ainsi être tirée de cette liste, la situation de M. [Q] ne présentant aucun caractère particulier au regard des personnes y figurant.
Il résulte de l'analyse qui précède que M. [Q] n'est pas fondé à invoquer une quelconque discrimination par référence à sa situation sur le site de [Localité 3] en tant que telle.
Sur le site de Saint-Cyr : parmi les électeurs du deuxième collège, se trouvent 127 salariés dont le coefficient est de 335 ou 365, dont 40 au coefficient365. C'est dans ce groupe de 40 salariés que l'on devrait retrouver des salariés qui auraient pu bénéficier, éventuellement, d'un traitement plus favorable que M. [Q].
Parmi l'ensemble des salariés du deuxième collège (celui auquel appartient/aurait appartenu M. [Q]), on retrouve (les salariés dont les initiales sont précédées d'un astérisque semblent présenter un cas à discuter) :
. M. [Z], toujours au coefficient 335 ;
. M. [U], toujours au coefficient 305 ;
. Mme C.[S], toujours au coefficient 305 ;
. M. F.[S], toujours au coefficient 335 ;
. M. [Y], toujours au coefficient 305 ;
. M. B.[S], toujours au coefficient 335 ;
. M. [H], passé au niveau 285 et toujours non pertinent ;
. M. [V], toujours au coefficient 365 ;
. M. [M]. G., toujours au coefficient 335 ;
. M. [S] G., toujours au coefficient 335 ;
. * M. [P], passé au coefficient 335 ; la cour avait noté qu'en 2011, il n'avait que 12 années d'ancienneté ;
. * M. [M], passé au coefficient 365 ; il avait six années d'ancienneté en 2011 et était entré dans la société avec le niveau 215 en 2005 ;
. * M. [R], passé au coefficient 335 ; il avait 11 ans d'ancienneté en 2011 et avait obtenu le coefficient 305 en 2009 ;
. M. [T], toujours au coefficient 335 ;
. Mme [L], toujours au coefficient 285 et non pertinente ;
. * M. [F].P., passé au coefficient 365 ;
ainsi, sur le site de Saint-Cyr, la situation de quatre salariés mérite d'être discuté.
La situation des quatre salariés identifiés ci-dessus par un astérisque montre que, parmi les salariés qui ont accepté le transfert sur ce site, quatre ont bénéficié d'une augmentation de coefficient alors que leur position de départ, au regard de celle de M. [Q], aurait dû conduire, toutes choses égales par ailleurs, à ce que ce dernier puisse, également, profiter d'une telle augmentation.
La cour observe, tout d'abord, que M. [Q] n'est pas fondé à remettre en cause la décision de l'entreprise de déplacer des activités du site de [Localité 3] vers le site de Saint-Cyr : cette décision relève, toutes choses égales par ailleurs, du pouvoir de l'entreprise et, compte tenu des listes auxquelles la cour vient de faire référence, il est manifeste que M. [Q] n'est en rien fondé à suggérer que le transfert de son poste serait lié à une quelconque forme de discrimination.
En réalité, M. [Q] a tenté d'obtenir, en échange de son accord, un avancement au coefficient 365 et c'est le refus de la Société qui a entraîné son refus de changer de site.
Cela étant, la cour considère que la société SKF n'est pas fondée à soutenir que le maintien dans le coefficient 335 n'a généré aucun préjudice sur sa rémunération, puisque celle-ci restait bien supérieure à celle des salariés bénéficiant du coefficient 365, ni sur l'évolution de son statut car le coefficient 335 et le coefficient 365 immédiatement supérieur relèvent du même niveau de la convention collective.
En effet, si, s'agissant de la rémunération, la cour a pu vérifier plus haut que M. [Q] n'était pas plus mal traité qu'un autre salarié, toutes choses égales par ailleurs, il demeure qu'un salarié est nécessairement légitime à souhaiter, quelle que soit la rémunération correspondante, obtenir un coefficient supérieur qui, par définition, à terme, offre une plus grande chance de progression, que ce soit en termes de rémunération ou de statut.
En revanche, l'argument de la société qu'il n'y avait pas de raison de modifier le coefficient au motif que M. [Q] n'aurait pas changé de poste mérite d'être confronté à la situation des quatre salariés mentionnés plus haut.
La société soutient que M. [Q] n'avait pas les compétences et le profil requis pour occuper l'un des postes disponibles lors du transfert sur le site de [Localité 2], car les salariés retenus sont titulaires de diplômes, de niveaux de formations et de qualifications supérieurs qu'il ne possède pas et que même une formation complémentaire se serait révélée insuffisante.
En l'espèce :
M. [M] :
La Société indique que M. J. M. a été embauché en 2005 avec une formation de technicien qualité en alternance. Il a été promu TD2 coefficient 305 en 2012, coefficient 335 en 2012 et coefficient 365 en 2014.
Certes, M. [Q] avait demandé que ce salarié soit exclu du panel de comparaison en première instance mais il apparaît que M. J. M. a bénéficié d'un avancement de coefficient particulièrement rapide sans que la Société justifie en aucune manière (ni par les diplômes, ni par les évaluations ni par les formations) qu'il méritait davantage un avancement au coefficient 365 que M. [Q].
M. B. M. :
Entré dans la société en qualité de TD1 coefficient 270 en mars 2000, il est passé au coefficient 305 en 2009, 335 en 2013.
Si cette progression a été objectivement plus rapide que celle de M. [Q], ce dernier, qui avait au demeurant entendu exclure M. B. M. du panel de comparaison en première instance, ne fournit aucun autre élément de nature à laisser penser qu'il y aurait là matière à considérer qu'il a pu être victime de discrimination, la rémunération de M. B. M. restant sensiblement inférieure à celle de M. [Q].
M. R. L. :
La Société ne fournit aucun élément concernant ce salarié.
Comme indiqué plus haut par la cour, M. R. L. a bénéficié d'un avancement de coefficient plus rapide que M. [Q].
Mais ce dernier ne fournit là non plus aucun autre élément, tandis que la question de la rémunération demeure tranchée en faveur de M. [Q].
M. [F].P. :
La Société précise, en ce qui le concerne, que : ce salarié est entré dans l'entreprise en 1990 ; qu'il était alors titulaire d'un bac F et d'un BTS 'fabrication mécanique' ; qu'il a atteint le coefficient 335 en 2000, soit trois ans avant M. [Q]; qu'il a été promu au coefficient 365 en juin 2012, devenant le référent technique pour l'ensemble de la BU (business unit, suppose la cour) VSM à l'international pour le développement des produits moteurs ; sa rémunération est restée inférieure à celle de M. [Q] (35 490,12 euros contre 39 575,40 euros).
La cour relève que, si M. [Q] demeure dans une situation privilégiée en termes de rémunération, il dispose du même diplôme que M. [F]. P. (BTS) et que la Société ne justifie en rien (par des formations, par des évaluations, par exemple) que ce dernier ait davantage mérité une augmentation de coefficient.
Au total, seule la comparaison avec la situation de deux autres salariés fait apparaître une différence de traitement.
En soi, cette circonstance est insuffisante à établir la discrimination alléguée par M. [Q] puisque rien dans ce qu'il avance ne permet de considérer que la différence constatée objectivement devrait nécessairement résulter de son appartenance syndicale : il n'est pas rare que certains salariés se trouvent mieux traités que d'autres pour des raisons indifférentes à toute forme de discrimination. Et, dans le cas présent, se trouver dans la situation décrite, à savoir avoir eu un avancement moindre mais bénéficier d'une rémunération toujours supérieure, dans un cas, et similaire (en tout cas il n'est pas indiquée qu'elle serait supérieure) dans l'autre, ne milite pas en faveur d'une discrimination.
Cette différence doit donc être appréciée au regard des autres éléments avancés par M. [Q].
La cour a déjà écarté l'argument de M. [Q] qui contestait ne pas s'être vu attribuer le poste de 'business coordinator'.
De même, M. [Q] n'est pas fondé à reprocher à la Société de ne pas lui avoir proposé, sur le site de Saint-Cyr, un poste de TD2 à un coefficient supérieur : il s'agissait d'une mutation, rien n'imposait qu'elle se fît avec une augmentation de coefficient et d'ailleurs, comme indiqué plus haut, les techniciens déplacés n'ont pas de ce seul fait bénéficié d'une telle augmentation.
M. [Q] déplore, par ailleurs, d'avoir été muté sur un poste de technicien analyse de la concurrence, qu'il présente comme une rétrogradation.
Selon lui, en effet, 'ce poste est avant tout un poste administratif sans rapport avec (ses) compétences' et dans lequel aucune évolution n'est possible.
La fiche de description du poste ne permet pas de vérifier si une évolution est ou non possible mais ce n'est pas déterminant dès lors qu'en elle-même, cette fiche n'interdit en rien que M. [Q] puisse voir son coefficient augmenté.
Certes, son libellé suggère un affaiblissement du rôle du titulaire par rapport à un TD2 expérimenté comme l'était M. [Q] : une moindre participation au design ; l'absence de tout subordonné.
Mais la fiche de description confie en quelque sorte au titulaire du poste un rôle central, s'agissant de l'analyse de la concurrence, et il ne s'agit aucunement d'un poste 'administratif', comme le soutient M. [Q], puisqu'il requiert une expérience et une expertise techniques. Contrairement à ce qu'il indique, on ne lui demande pas de se limiter à 'compter des pièces' : s'il doit compter, ce sont les composants de certaines pièces. Certes, cela est moins intéressant que de réaliser les pièces elle-même mais, outre qu'il s'agit de comparer la concurrence, ce qui nécessite une maîtrise technique certaine, ce poste permet également à son titulaire de faire des propositions.
Bien plus, si le poste en question a été proposé à M. [Q], c'est parce que ce dernier avait refusé d'être muté sur le site de Saint-Cyr et, encore une fois, son refus était dicté par la seule circonstance que ne lui était pas proposé simultanément de passer au coefficient 365.
La seule obligation pesant sur la société SKF, comme le conseil de prud'hommes l'a justement relevé, était alors de proposer à M. [Q] un poste équivalent, le cas échéant après une formation adéquate. La Société n'avait en aucune manière l'obligation de proposer à M. [Q] une formation lui permettant d'obtenir un poste de qualification supérieure.
M. [Q] a signé, en toute connaissance de cause et sans aucune réserve (dans son courriel du 9 novembre 2011, il écrit : 'Je vous remercie de votre confiance et ferais en sorte que ce soit une nouvelle étape dans ma carrière'), l'avenant à son contrat qui lui était proposé.
Aucune discrimination ne peut ainsi résulter de ce que M. [Q] occupe actuellement le poste qui est le sien.
En outre, lorsqu'une possibilité de poste à Saint-Cyr apparaîtra, en novembre 2014, sur un poste de TD 'Product Insourcing', il s'agira d'un poste au coefficient 305. La Société précisera à M. [Q] qu'il garderait, en tout état de cause, son coefficient 335. La cour comprend que M. [Q] ait néanmoins refusé ce poste, mais il ne peut en tirer aucun argument en terme de discrimination, liée au fait de ne pas obtenir le coefficient 365.
De plus, s'agissant de la possibilité pour M. [Q] de progresser, outre que M. [Q] n'apporte aucun élément permettant de laisser penser qu'on lui aurait refusé une quelconque formation ou autre de nature à lui permettre de développer ses compétences et d'accéder à un coefficient plus élevé, voire de devenir cadre, la cour relève que M. [Q] refuse d'utiliser le système ('People Portal' ; voir le courriel de son responsable, en date du 21 juillet 2016) qui permet à tous les salariés d'y rentrer leur plan de développement.
Au contraire, il résulte d'un courrier en date du 28 octobre 2011 adressé par la direction des ressources humaines à M. [Q], que ce dernier a refusé, à l'époque, de 'faire un Fongecif et de préparer un diplôme d'ingénieur ou toute autre formation'.
En outre M. [Q] ne conteste pas que lorsqu'il lui a été proposé, en février 2017 (courriels de son supérieur en date des 15 et 17 février 2017, laissés sans réponse), de 'retravailler le contenu de son poste et de faire évoluer ses missions, (il) n'y a pas donné suite en raison de son contentieux' avec la Société (il avait déjà refusé une proposition similaire en octobre 2016, au motif que son poste avait été créé de toute pièce et ne reflétait pas ce qui lui avait été promis, outre qu'une responsable des ressources humaines l'aurait 'accusé de harcèlement moral').
Par ailleurs, M. [Q] ne peut en aucune manière prétendre que la Société lui reproche l'exercice de son activité syndicale au détriment de son travail : un seul courriel de son responsable hiérarchique en plus de dix ans de relation de travail est produit et force est de constater que ce courriel ne contient rien de discriminant, puisqu'il se limite à rappeler à M. [Q] l'obligation de 'badger' et de respecter ses heures de délégation, sur un ton particulièrement conciliant.
Aussi, le rapport Stimulus avait fait deux préconisations au 'niveau individuel', donc de M. [Q] : clarification du poste et des attendus ; recours à une médiation.
Comme il vient d'être vu, c'est M. [Q] qui s'est opposé à l'une comme à l'autre.
Enfin, M. [Q], qui avait lui-même souligné lors du CHSCT du 1er juillet 2014, qu'il préférerait, à une médiation qui aurait été conduite par l'assistante sociale (qui a suivi une formation spécifique en la matière), 'travailler avec le médecin du travail' a toujours été déclaré apte et aucun de ses arrêts de travail n'est en relation avec le travail (au vu des éléments soumis à la cour).
De tout ce qui précède, il résulte que, à supposer même que l'on puisse considérer que M. [Q] aurait établi quelques faits permettant de supposer l'existence d'une discrimination à son encontre, l'analyse de l'ensemble des éléments soumis à l'examen de la cour conduit à considérer que M. [Q] n'a pas été victime de discrimination.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur le harcèlement moral
M. [Q] reprend, dans le cadre du harcèlement moral qu'il invoque, les mêmes éléments que ceux invoqués dans le cadre de la discrimination.
Il fait valoir notamment qu'il aurait été victime d'une atteinte à sa vie privée lors d'une réunion de responsables hiérarchiques, d'une mise à l'écart, d'humiliations vis-à-vis de ses collègues pour ne pas avoir été convié à des réunions et se voir confier le comptage de pièces, de l'appréciation portée sur son activité syndicale dans un courriel.
Tout ceci avait eu pour effet d'affecter son état de santé.
La société SKF conteste tout harcèlement et considère que les différents courriers dont M. [Q] allègue qu'ils présentent un caractère harcelant sont justifiés, qu'il s'agisse de répondre aux accusations que lui-même a pu porter (courrier du 8 juillet 2011), d'un entretien pour faire le point sur ses tâches et responsabilités (5 janvier 2010) ou de lui adresser des remarques sur sa performance, enfin, de la procédure de licenciement qui avait été initiée à son encontre (licenciement refusé par l'inspection du travail).
La société justifie tous les éléments factuels en expliquant qu'il ne s'agissait pas de harcèlement, notamment concernant l'entretien du 5 janvier 2010, ayant pour objet de faire un point sur les tâches et responsabilités du salarié, qu'il n'avait pas les compétences et le profil requis pour occuper les postes disponibles lors du transfert car les salariés retenus sont titulaires de diplômes, qu'une formation supplémentaire aurait été insuffisante, qu'elle a respecté les règles relatives à la mutation, qu'il a toujours été convié aux réunions et que parfois il était en arrêt d'où son absence à ces réunions, que les courriels sont justifiés par le fait que M. [Q] n'effectuait pas certaines tâches demandées, que le courrier lui étant adressé le 8 juillet 2011 n'a fait que répondre à ses propres accusations.
La société soutient par ailleurs que, la procédure de licenciement était justifiée en raison du refus de M. [Q] d'effectuer le travail et de faire le retour de son activité à sa hiérarchie malgré les demandes réitérées de celles-ci, ce que d'ailleurs l'inspection du travail avait reconnu dans son courrier de refus en date du 4 décembre 2013.
La société ajoute que, concernant le droit d'alerte, dans la mesure où sa situation ne présentait pas de caractère d'urgence immédiate, l'enquête faisant suite à l'exercice de son droit d'alerte serait entreprise après l'achèvement le 20 avril de celle consécutive au droit d'alerte exercée par une salariée.
La cour considère, comme le soutient la défense de M. [Q], qu'il est loisible à un salarié d'invoquer, à l'appui du harcèlement moral, les mêmes faits que ceux qu'il a invoqués à l'appui de la discrimination dont il estime être victime.
Il résulte cependant de la discussion sur la discrimination qu'il ne peut être considéré que les éléments avancés par M. [Q] sont vérifiés.
S'agissant par ailleurs de demandes faites à M. [Q] par sa hiérarchie, la cour ne peut que constater qu'elles n'ont rien d'illégitimes. Certes, il n'est pas habituel que de telles demandes soient adressées par lettre recommandée avec accusé de réception, comme celle du 28 juin 2013.
Mais la lecture de ce courrier fait état de plusieurs défaillances de M. [Q], qui '(bloquent) tous les benchmarks de VSM pendant plus d'un mois, alors (qu'il lui a été) rappelé l'importance de ces travaux pour l'activité'. Outre que ce courrier démontre, au demeurant, l'importance du poste de M. [Q], contrairement à ce qu'il allègue, il relève du pouvoir de direction et de contrôle de l'employeur de dûment signaler à un salarié ses éventuels manquements. En tout état de cause, M. [Q] n'apporte aucun élément permettant de juger du caractère infondé de ce courrier.
En tout état de cause, comme indiqué plus haut, M. [Q] ne démontre aucune dégradation de son état de santé qui aurait pour origine, même partielle, sa situation au travail.
M. [Q] ne peut donc qu'être débouté de sa demande.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
M. [T] [Q], qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel.
Il sera débouté de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamné à payer à la société SKF, qui sollicite une indemnité d'un montant de 2 500 euros, une somme de 1 500 euros à ce titre, en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, par décision contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne M. [T] [Q] à payer à la société SKF France une indemnité d'un montant de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute M. [T] [Q] de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de toute demande autre, plus ample ou contraire ;
Condamne M. [T] [Q] aux dépens d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Monsieur Adrien Crouzet, Greffier placé, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,