COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53J
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 16 NOVEMBRE 2017
R.G. N° 16/01657
AFFAIRE :
[T] [V]
...
C/
SA CREDIT LOGEMENT
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Janvier 2016 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 13/03610
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Jean NGAFAOUNAIN, avocat au barreau de VERSAILLES
Me François PETIT de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON ET ASSOCIES, avocat au barreau de VAL D'OISE,
Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE NOVEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [T] [V]
né le [Date naissance 2] 1978 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Jean NGAFAOUNAIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 434
Madame [G], [C] [I] épouse [V]
née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 2]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Jean NGAFAOUNAIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 434
APPELANTS
****************
SA CREDIT LOGEMENT
N° SIRET : 302 493 275
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentant : Me François PETIT de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 100 - N° du dossier 1300413
SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 382 900 942
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20160206
Représentant : Me Valérie DESFORGES de la SELARL GENESIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0225
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Octobre 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia GRASSO, Président chargé du rapport et Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Patricia GRASSO, Président,
Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,
Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO,
FAITS ET PROCEDURE,
Le 9 mars 2008, Mr et Mme [V] ont obtenu un prêt de 325.000 euros auprès de la Caisse d'Epargne en vue de l'acquisition d'un bien immobilier en VEFA, qui devait être remboursé en 360 mensualités au taux d'intérêt de 6,21 %. Le prêt a été garanti par le Crédit Logement qui s'en est porté caution. Le 9 janvier 2012, les époux [V] ont vendu le bien immobilier pour un montant de 355.000 euros. La Caisse d'Epargne a prélevé la somme de 315.161,75 euros disponible sur le compte support du prêt, et a demandé le solde de la somme due au Crédit Logement. Une quittance subrogative a été établie, le 27 février 2013, correspondant au paiement de la somme de 44.914,04 euros. Malgré de nombreuses mises en demeures, les époux [V] n'ont pas remboursé le Crédit Logement.
Par acte d'huissier de justice en date du 16 mai 2013, la société Crédit Logement a fait assigner Mr et Mme [V] en paiement.
Par jugement rendu le 15 janvier 2016, le tribunal de grande instance de Pontoise a :
-déclaré l'action des époux [V] recevable;
-condamné solidairement les époux [V] à payer à la société Crédit Logement les sommes de:
*44.928,89 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2013,
*1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
-condamné la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à payer aux époux [V]:
*12.214 euros au titre des interêts trop perçus,
*1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
-débouté les parties de leurs autres demandes,
-fait masse des dépens et dit qu'ils seraient partagés par moitié entre la Caisse d'Epargne et les époux [V].
Le 3 mars 2016, la SA Crédit Logement et la SA Caisse d'épargne et de prévoyance Ile de France ont formé appel de la décision.
Dans leurs dernières conclusions transmises le 9 septembre 2017, Mr et Mme [V], appelants, demandent à la cour de:
-dire et juger recevable leur appel;
-confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que leur action contre la Caisse d'épargne n'est pas prescrite;
-confirmer sur le principe le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Caisse d'épargne et de prévoyance Ile de France à leur payer les intérêts trop perçus, outre la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
-infirmer le jugement pour le surplus;
Statuant à nouveau:
-débouter le Crédit Logement de ses demandes dirigées contre les époux [V];
-dire et juger que les créances suivantes ne sont pas dues:
* 25.152 euros correspondant à l'indemnité de déchéance du terme;
* 757,81 euros correspondant aux interêts courus et accessoires de la dette;
* 757,81 euros correspondant aux pénalites de retard DECH DEC;
- condamner la Caisse d'épargne à payer aux époux [V] les sommes de:
* 23.380,66 euros correspondant aux interêts dus sur la période de prolongation unilatérale du préfinancement;
* 15.000 euros correspondant ux interêts liés à la capitalisation des interêts;
* 25.000 euros en réparation de leurs préjudices financiers,
* 40.000 euros en réparation de leur préjudice moral;
En tout état de cause:
-condamner in solidum le Crédit Logement et la Caisse d'épargne à payer la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
-allouer à Maître Ngafaounain le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de leurs demandes, Mr et Mme [V] font valoir :
-que, dès lors que le tribunal a retenu que la banque ne pouvait prélever les interêts intercalaires sur 45 mois au lieu des 24 mois contractuellement prévus, il devait en déduire en toute logique que l'intégralité du trop-perçu sur toute la période indue devait être remboursé; qu'en réalité le montant des interêts indus s'élève à 23.380,66 euros; que cette demande est recevable au titre de l'article 565 du code de procédure civile;
-que le Crédit Logement doit être débouté de son recours sur le fondement de l'article 2308 alinéa 2 du code civil; que le Crédit Logement a payé sans avoir averti les époux [V], débiteurs principaux et sans avoir été poursuivi, et alors que les époux avaient d'importants moyens à faire valoir contre le créancier;
-que la déchéance du terme prononcée par la Caisse d'épargne fut abusive car, si l'article 13 du contrat de prêt prévoit l'éxigibilité immédiate des sommes en cas de vente amiable, rien n'interdit aux parties de déroger à cette stipulation contractuelle; que la Caisse d'épargne a fait preuve de mauvaise foi en ce qu'elle était parfaitement au courant du projet de vente du bien;
-que la Caisse d'épargne a manqué à son obligation de bonne foi découlant de l'article 1134 alinéa 3 du code civil dans sa version applicable à l'espèce, à son obligation d'information, et à son devoir de conseil.
Dans ses conclusions récapitulatives transmises le 9 juin 2017, la SA Crédit Logement, intimée, demande à la cour de :
-dire mal fondés en leur appel les époux [V] en ce qu'il est dirigé à l'encontre du Crédit Logement;
-les déclarer mal fondés en toutes leurs demandes;
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les époux [V] à payer au Crédit Logement la somme de 44.928,89 euros outre les interêts au taux légal courant sur cette somme à dater du 15 mars 2016 et 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
Y ajoutant:
-condamner solidairement les époux [V] à payer au Crédit Logement la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts;
-condamner solidairement les époux [V] à payer au Crédit Logement la somme de 4.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
-ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution de tous ces chefs y compris du chef de l'article 700 et des dépens;
-condamner solidairement les époux [V] aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP PMH et associés en application de l'article 699 du code de procédure civile;
Au soutien de ses demandes, la SA Crédit Logement fait valoir :
-que, par lettre recommandée avec accusé de réception, le 29 octobre 2012, la banque mettait en demeure les époux [V] de procéder au remboursement de l'intégralité des sommes prêtées, ce qui montre que la caution a bien été actionnée après que les époux [V] ont été poursuivis, contrairement à ce qu'ils affirment;
-que le Crédit Logement a exercé le recours personnel prévu par l'article 2305 du code civil, qui n'est pas fondé sur les droits du créancier, en sorte qu'il ne peut se voir opposer par le débiteur principal les fautes commises par la banque;
Dans ses conclusions transmises le 4 octobre 2017, la SA Caisse d'épargne et de prévoyance Ile de France, intimée, demande à la cour de :
A titre principal:
-confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a relevé que la Caisse d'épargne était bien fondée d'avoir prononcé la déchéance du terme du prêt, débouté les époux [V] de leur demande en condamnation de la banque au titre des sommes restant dues au Crédit Logement, débouté les époux [V] de leur demande au titre de leur préjudice moral;
-infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a ordonné la condamnation à paiement de la Caisse d'épargne;
-statuant à nouveau, dire et juger que la Caisse d'épargne n'a commis aucune faute à l'égard des époux [V];
-statuant à nouveau dire et juger que les demandes de condamnation de la banque à leur régler les sommes de 23.380,66 euros, 15.000 euros, et 25.000 euros sont irrecevables car nouvelles en cause d'appel.
A titre subsidiaire:
-dire et juger mal fondée la demande des époux [V] à l'encontre de la Caisse d'épargne;
-débouter les époux [V] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
A titre très subsidiaire, si la cour devait faire droit aux demandes de condamnation des époux [V]:
-dire et juger que seule la somme de 26.917,05 euros pourrait être mise à la charge de la Caisse d'épargne, somme correspondant au différentiel entre les intérêts intercalaires payés par les appelants (38.779,95 euros) et ceux qu'ils auraient payés si la période de préfinancement avait duré 24 mois (11.862,90 euros).
En tout état de cause:
-condamner in solidum les époux [V] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de maître Rol, avocat.
Au soutien de ses demandes, la SA Caisse d'épargne fait valoir :
-que les époux [V] n'ignoraient nullement que la période de préfinancement avait été allongée au-delà d'octobre 2010, et ne l'ont en aucun cas contestée pendant les 21 mois supplémentaires qui ont suivi; que l'allongement de la période de préfinancement était d'ailleurs dans l'interêt du couple qui, si la période avait duré seulement 24 mois, n'auraient bénéficier que de 250.751,51 euros de débloqués, et n'auraient pas pu achever leur projet immobilier;
-que la demande des époux [V] tendant à ce que la banque leur verse au titre des interêts indus la somme de 23.380,66 euros n'a jamais été formulée en première instance, et est donc irrecevable en cause d'appel en vertu de l'article 564 du code de procédure civile; que, subsidiairement, cette demande est infondée;
-que la banque n'a pas manqué à son devoir d'information; que les époux [V] n'ont jamais cru bon d'informer la banque de la vente de leur bien et ne versent aucun justificatif permettant de démontrer que la banque aurait eu connaissance de la vente, ni du lien de causalité pouvant éxister entre le dépôt des fonds sur le compte joint et la vente effective du bien objet du prêt.
*****
La clôture de l'instruction a été prononcée le 10 octobre 2017.
L'audience de plaidoirie a été fixée au 11 octobre 2017 et le délibéré au 16 novembre suivant.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le recours subrogatoire de la SA Crédit Logement
C'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que la SA Crédit Logement exerçait le recours personnel prévu par l'article 2305 du code civil aux termes duquel « La caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l'insu du débiteur. Ce recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et les frais ; néanmoins la caution n'a de recours que pour les frais par elle faits depuis qu'elle a dénoncé au débiteur principal les poursuites dirigées contre elle. Elle a aussi recours pour les dommages et intérêts, s'il y a lieu. », ce recours personnel caractérisant un droit propre de la caution procédant du paiement pour le compte d'autrui et n'étant pas fondé sur les droits du créancier et qu'en conséquence, la caution ne pouvait se voir opposer par le débiteur principal les fautes, notamment contractuelles, que celui-ci pourrait formuler à l'encontre du créancier, en l'espèce, la Caisse d'épargne.
M. et Mme [V], qui ne contestent pas la dette de la SA Crédit Logement ni en son principe ni en son montant, font valoir pour s'opposer à la demande subrogatoire, que la caution a payé leur créancier sans avoir été poursuivie et alors qu'ils avaient d'importants moyens à faire valoir contre la Caisse d'épargne, invoquant à cet égard les dispositions de l'article 2308 alinéa 2 selon lequel : «Lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte, sauf son action en répétition contre le créancier».
C'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la SA Crédit Logement avait bien était poursuivie par la Caisse d'éparge au sens de l'article 2308 alinéa 2 par la réception d'une lettre recommandée avec avis de réception en date du 15 novembre 2012, qui avisait la caution de ce que le créancier avait prononcé la déchéance du terme et suite à la vente du bien en janvier 2012, sa créance était immédiatement exigible.
En outre, par lettre recommandée avec avis de réception des 19 octobre 2012 la Caisse d'épargne a mis en demeure M. et Mme [V] de procéder au remboursement de l'intégralité des sommes prêtées, puis par une nouvelle lettre recommandée du 20 décembre 2012, réceptionnée par M. [V], elle a mis une nouvelle fois en demeure ce dernier de payer les sommes dont il était redevable, soit 385.227,79 €.
Ces courriers précisaient qu'à défaut de paiement sous les 15 jours à réception, les poursuites judiciaires seraient exercées sans nouvel avis par le Crédit Logement, mais M. et Mme [V] n'y ont apporté aucune réponse ni ne se sont rapprochés de la caution.
Par suite, la SA Crédit Logement établissant par une quittance subrogative du 27 février 2013 qu'elle a versé à la caisse d'épargne la somme de 44.914,04 €, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement les époux [V] à payer à la société Crédit Logement les sommes de 44.928,89 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2013, et de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SA Crédit Logement t ne justifie pas d'un préjudice distinct du retard de paiement réparé par les intérêts moratoires et sa demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.
Sur les relations entre la Caisse d'épargne et les emprunteurs
* la prescription
L'absence de prescription de l'action de M. et Mme [V] concernant la restitution d 'un éventuel trop perçu et la demande d'indemnisation de leur préjudice moral telle que retenue par le premier juge n'est pas discutée.
* les intérêts intercalaires
M. et Mme [V] demandent à la cour de confirmer le jugement sur le principe de remboursement des intérêts intercalaires indus sur la période de prolongation du préfinancement du prêt (21 mois), mais d'infirmer sur le quantum, et de condamner la Caisse d'épargne à leur payer non pas 12.214,45 €, mais la somme de 28.380,66 €, correspondant aux intérêts indus sur la période de prolongation du préfinancement et celle de 15.000 € au titre des intérêts produits par les intérêts capitalisés.
L'article 564 du code de procédure civile dispose que : «A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
L'article 565 du même code précise que « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu 'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ".
Enfin l'article 566 du même code dispose que "les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. »
Cette demande en remboursement de tous les intérêts prétendument perçus à tort et en indemnisation du préjudice consécutif est liée à la demande formée en première instance par les époux [V] en remboursement des intérêts intercalaires indûment perçus par la banque et est donc recevable.
La période de préfinancement ou de différé d'amortissement est la période définie comme celle comprise entre la date d'acceptation de l'offre et celle fixée comme point de départ de l'amortissement du capital emprunté, pendant laquelle sont perçus des intérêts intercalaires sur les fonds débloqués pendant cette période, calculés au prorata temporis au taux stipulé dans l'offre de contrat de crédit.
Il résulte des pièces produites que le déblocage des fonds a été effectué en 9 fois à la demande de M. et Mme [V] et que ces fonds n'ayant pas été intégralement débloqués dans les délais impartis, la période de préfinancement a nécessairement été allongée au-delà d'octobre 2010 jusqu'au complet déblocage des fonds, ce que M. et Mme [V] qui finançaient un bien acquis en VEFA ne pouvaient ignorer et n'ont pas contesté.
Rien n'interdisant aux parties de déroger aux stipulations contractuelles, aucune faute ne peut être retenue contre la banque pour la prolongation des intérêts intercalaires sur 45 mois au lieu des 24 contractuellement prévus et le défaut de signature d'un avenant sur ce point ne saurait priver la banque des intérêts dus, indépendamment d'une éventuelle demande d'indemnisation au titre d'un manquement à son obligation de conseil.
Mr et Mme [V] considèrent que la Caisse d'Epargne aurait unilatéralement décidé d'augmenter leurs mensualités de remboursement à hauteur de 2.205,27 € au lieu de 1.970,18 € prévu dans le tableau d'amortissement prévisionnel et prétendent ainsi avoir versé indûment la somme de 12.214,45 € entre le 9 janvier 2012 et le mois d'octobre 2012.
Cependant, le montant des intérêts intercalaires dus dépend du moment où les fonds sont débloqués et ne peut être déterminé à l'avance.
Au moment où le prêt est entré en période d'amortissement et que le calcul des intérêts intercalaires a pu être effectué, un plan de remboursement définitif a été envoyé aux époux [V] fixant les mensualités de remboursement à 2.205,27 € incluant les intérêts intercalaires capitalisés
entre 2008 et 2011.
C'est pourquoi il a été remis aux emprunteurs au moment de la conclusion du prêt, un tableau d'amortissement prévisionnel indiquant des mensualités à hauteur de 1.970,18 €, constituante qu'une simulation sur la base du montant emprunté, tableau ne constituant qu'une simulation des sommes à régler mensuellement sur la base du montant total emprunté.
Au moment où le prêt est entré en période d'amortissement et que le calcul des intérêts intercalaires a pu être effectué, un plan de remboursement définitif a été envoyé à M. et Mme [V] fixant les mensualités de remboursement à 2.205,27 € incluant les intérêts intercalaires capitalisés entre 2008 et 2011 conformément à l'article 8 des conditions générales qui stipule : "«Des intérêts intercalaires ou de préfinancement seront dus au taux du prêt sur toutes sommes
mises à la disposition de l'emprunteur, à compter de la date effective de leur versement et jusqu'au passage en amortissement du prêt. Ces intérêts seront ajoutés au capital initial indiqué aux conditions particulières de l'offre. Dans ce cas, le total de ces intérêts dus et du capital initial constituent le montant du prêt amortissable. »
En outre, si la période de préfinancement avait duré 24 mois, les sommes débloquées se seraient élevées à la somme globale de 250.751,51 €, M. et Mme [V] n'auraient pas pu bénéficier des autres versements de 57.998,49 € et 16.250 € pour achever leur projet immobilier et les intérêts intercalaires qu'ils auraient alors payés se seraient élevés à la somme de 11.862,90 € (262.614,41 - 250.751,51).
M. et Mme [V] ne justifient donc d'aucun préjudice.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la condamnation à paiement de la Caisse d'épargne pour une somme de 12.214 euros au titre des intérêts trop perçus entre le 9 janvier 2012 et le mois d'octobre 2012 et de rejeter la demande des époux [V] tendant à la condamnation de la Banque à leur payer la somme de 28.380,66 € et celle de 15 000 €.
* la déchéance du terme
C'est à juste titre que les premiers juges ont relevé que Mr et Mme [V] ne justifiaient pas avoir informé la caisse d'épargne de la vente de leur bien intervenue le 9 janvier 2012.
Les échanges dont ils se prévalent sont équivoques, dans la mesure où ils pouvaient porter aussi bien sur la vente de leur bien initial que sur leur projet d'achat d'un nouveau bien.
Le fait que le prix de vente du bien ait été déposé sur un compte Caisse d'épargne ne pouvait suffire à la banque, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client, pour connaître l'origine des fonds, et l'existence d'un nouveau projet immobilier ayant donné lieu à simulation en date du 20 octobre 2011 ne pouvait non plus lui permettre de savoir que le bien initial était vendu.
De même, le projet de remboursement anticipé partiel du prêt par lequel la Banque a adressé aux époux [V] un décompte en date du 10 juillet 2012 ne fait mention à aucun moment de l'information par les emprunteurs de la vente de leur bien immobilier cinq mois auparavant, ni même de la connaissance, par la Banque, de ladite vente.
La cour reprend donc à son titre les motifs par lesquels le premier juge a retenu que la Caisse d'épargne était donc bien fondée à prononcer la déchéance du terme, en application de l'article 13 du contrat de prêt et l'exigibilité des sommes dues et par la suite, de demander au Crédit logement de régler, à la place des débiteurs les sommes dues, en sa qualité de caution, étant observé que cet article 13 des conditions générales du contrat de prêt prévoit la résiliation du prêt et l'exigibilité immédiate des sommes en cas de vente même amiable.
La déchéance du terme n'étant donc pas intervenue abusivement, il incombe de rejeter les demandes de M. et Mme [V] concernant les sommes suivantes :
* 25.152 euros correspondant à l'indemnité de déchéance du terme;
* 757,81 euros correspondant aux intérêts courus et accessoires de la dette;
* 757,81 euros correspondant aux pénalités de retard DECH DEC.
* le manquement au devoir d'information et de conseil
La demande de dommages et intérêts pour préjudice financier est recevable en appel en application des articles 564 et 565 du code de procédure civile précédemment visés en ce qu'elle tend aux mêmes fins d'indemnisation que celle présentée au premier juge.
La Caisse d'épargne a manqué à son obligation en n'informant pas M. et Mme [V] de la prolongation de la durée de la période de préfinancement et de ses conséquences, leur causant un préjudice résultant de la perte de chance d'avoir pu procéder autrement dans le financement de leur bien acquis en VEFA et notamment dans la programmation des travaux.
Il leur sera alloué pour ce préjudice des dommages et intérêtsà hauteur de 4.000 € pour le préjudice financier et de 1.000 € pour le préjudice moral.
S'agissant du manquement de la banque à son devoir de conseil pour n'avoir pas proposé à ses clients un remboursement anticipé de leur prêt, elle ne peut qu'être rejetée dés lors qu'il n'a pas été démontré que M. et Mme [V] ont informé la Caisse d'épargne de la vente de leur bien.
Sur les demandes accessoires
Il n'y a pas lieu de statuer sur l'exécution provisoire, la décision de la cour n'étant susceptible que d'un pourvoi en cassation non suspensif.
L'équité commande de laisser à M. et Mme [V] d'une part et à la SA Caisse d'épargne d'autre part la charge de ses frais irrépétibles mais de faire droit à la demande de la société Crédit Logement présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 1.500 € ; les appelants sont condamnés à lui verser à ce titre la somme visée au dispositif de la présente décision.
Partie perdante, l'appelant ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et doit supporter les dépens,
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement en ce qu'il a déclaré l'action de M. et Mme [V] non prescrite et en ce qu'il a condamné solidairement M. et Mme [V] à payer à la société Crédit Logement les sommes de 44.928,89 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2013, et de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Infirme le jugement pour le surplus ;
Y substituant,
Déboute la SA Crédit Logement de sa demande de dommages et intérêts ;
Déclare M. et Mme [V] recevables à demander en cause d'appel les sommes de 23.380,66 euros, 15.000 euros et 25.000 euros;
Condamne la SA Caisse d'épargne à payer à M. et Mme [V] la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour leur préjudice moral ;
Y ajoutant
Condamne la SA Caisse d'épargne à payer à M. et Mme [V] la somme de 4.000 € à titre de dommages et intérêts pour leur préjudice financier ;
Déboute M. et Mme [V] de leurs autres demandes ;
Condamne solidairement M. et Mme [V] à payer à la SA Crédit Logement une indemnité de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que M. et Mme [V] et la SA Caisse d'épargne conserveront la charge de leurs frais irrépétibles ;
Condamne solidairement M. et Mme [V] aux dépens de l'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Patricia GRASSO, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,