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11/10/2017 | FRANCE | N°14/02687

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 11 octobre 2017, 14/02687


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



17e chambre





ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE



DU 11 OCTOBRE 2017



R.G. N° 14/02687



AFFAIRE :



[Y] [O] épouse [H]



C/



Association ARDEUR









Décision déférée à la cour : jugement rendu le 30 avril 2014 par le conseil de prud'hommes-formation de départage de NANTERRE

Section : activités diverses

N° RG :

13/01061









Copies exécutoires délivrées à :



Me Parissa AMIRPOUR



Me Florence CHANDIVERT







Copies certifiées conformes délivrées à :



[Y] [O] épouse [H]



Association ARDEUR









le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 11 OCTOBRE 2017

R.G. N° 14/02687

AFFAIRE :

[Y] [O] épouse [H]

C/

Association ARDEUR

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 30 avril 2014 par le conseil de prud'hommes-formation de départage de NANTERRE

Section : activités diverses

N° RG : 13/01061

Copies exécutoires délivrées à :

Me Parissa AMIRPOUR

Me Florence CHANDIVERT

Copies certifiées conformes délivrées à :

[Y] [O] épouse [H]

Association ARDEUR

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE ONZE OCTOBRE DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 14 juin 2017 prorogé au 05 juillet 2017 prorogé au 27 septembre 2017 puis prorogé au 11 octobre 2017, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame [Y] [O] épouse [H]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne,

assistée de Me Parissa AMIRPOUR, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : P0076

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 78646/2/2015/8419 du 18/12/2015 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Versailles)

APPELANTE

****************

Association ARDEUR

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Florence CHANDIVERT, avocate au barreau de PARIS, substituée par Me Amandine GARCIA, avocate au barreau de Paris, vestiaire : A0236

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 mars 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monique CHAULET, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,

Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,

Madame Monique CHAULET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU,

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre (section activités diverses), statuant en sa formation de départage, du 30 avril 2014 qui a :

- dit qu'il n'y a pas lieu à requalification de la succession des contrats à durée déterminée signés avec l'association ARDEUR en sa qualité d'association intermédiaire et [Y] [H], salariée mise à disposition,

- débouté en conséquence [Y] [H] de toutes ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- laissé les dépens à la charge de l'association ARDEUR qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle,

Vu la déclaration d'appel adressée au greffe le 2 juin 2014 et les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil pour Mme [Y] [H] qui demande à la cour de :

- la dire bien fondée en son appel,

- infirmer le jugement entrepris,

et statuant à nouveau,

- dire que les contrats de travail à durée déterminée doivent être requalifiés en contrat de travail à durée indéterminée,

- dire que la rupture du contrat de travail le 31 juillet 2011 doit s'analyser en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

- par conséquent condamner l'association ARDEUR à lui payer les sommes suivantes :

. 384,63 euros à titre d'indemnité de requalification,

. 6 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 769,26 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 76,92 euros à titre de congés payés sur préavis,

. 269,24 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- remise de l'attestation Pôle emploi, des bulletins de salaire et du certificat de travail rectifiés,

- intérêts légaux et éventuels dépens,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour l'association ARDEUR qui demande à la cour de :

- la recevoir en ses écritures,

y faisant droit,

- confirmer le jugement entrepris,

- débouter Mme [H] de ses demandes,

- condamner à titre reconventionnel Mme [H] à lui payer une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

SUR CE LA COUR,

Considérant que l'association Ardeur est une association d'insertion par l'activité économique ayant conclu avec l'Etat une convention et dont l'objet est de mettre à la disposition de personnes physiques ou morales des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales ou professionnelles particulières en leur assurant un suivi et un accompagnement pour favoriser leur insertion professionnelle ;

Que Mme [H] a été engagée par l'association Ardeur par au moins 111 contrats à durée déterminée successifs, à temps partiel, exécutés sous forme de contrats de mise à disposition pour réaliser des travaux de ménage et de repassage chez des particuliers en tant qu'employée non qualifiée sur la période du 1er avril 2008 au 30 juillet 2011 ;

Que le 17 septembre 2012, l'association Ardeur a délivré une attestation ASSEDIC à Mme [H] pour la période travaillée, mettant fin à la relation contractuelle ;

Que, dans un courrier adressé à l'association Ardeur par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 janvier 2013, Mme [H] a dénoncé le non-respect par l'employeur des articles L.1232-1 et L.1232-2 du code du travail ;  

Considérant, sur la requalification, que Mme [H] soutient à titre principal que les contrats de travail conclus avec l'association Ardeur sont des contrats d'insertion conclus sous l'empire des dispositions des articles L. 5132-1 et suivants du code du travail et que les dispositions spécifiques exigées pour la validité de ces contrats prévues par l'article L. 5132-11-1 du code du travail n'ont pas été respectées au regard de la durée minimale, des conditions de renouvellement, de la durée hebdomadaire de travail ainsi que du suivi à l'accompagnement du salarié en vue de faciliter son insertion sociale ; qu'elle fait valoir à titre subsidiaire, au cas où la cour devrait retenir un contrat à durée déterminée d'usage comme le sollicite l'employeur, que l'association doit justifier d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi, ce qu'elle ne fait pas en l'espèce, ce qui justifie la requalification ;

Que l'association Ardeur soutient que les contrats conclus avec Mme [H] ne sont pas des contrats à durée déterminée d'insertion mais des contrats à durée déterminée d'usage prévu par l'article D. 1240-1 12° du code du travail comme en témoigne leur formalisme et le fait que le contrat unique d'insertion est entré en vigueur par la loi du 1er décembre 2008 applicable à partir du 1er janvier 2010 soit postérieurement à l'embauche de Mme [H] ; qu'elle fait valoir qu'en l'espèce il s'agissait de mission de ménage chez des particuliers et qu'en conséquence le recours à ce type de contrat est justifié du fait de la nature temporaire des missions et qu'il a été jugé que le droit applicable aux contrats à durée déterminée n'est pas applicable aux contrats à durée déterminée d'usage ;

Considérant que la loi du 29 juillet 1998, modifiée par la loi du 17 janvier 2002 puis par les lois des 13 février et 1er décembre 2008, a organisé un régime spécifique de contrats de travail temporaire conclus par les associations intermédiaires ; que l'association est donc mal fondée à soutenir que de tels contrats ne pouvaient pas être passés avant le 1er décembre 2008 ;

Que l'article L. 5132-7 du code du travail définit les associations intermédiaires conventionnées par l'État qui ont pour objet l'embauche des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, en vue de faciliter leur insertion professionnelle en les mettant à titre onéreux à disposition de personnes physiques ou de personnes morales ;

Que l'association Ardeur produit au débat les contrats de travail qu'elle a passés avec Mme [H], contrats qui présentent la particularité de comporter sur le même formulaire une autre partie intitulée « contrat de mise à disposition », celui-ci étant passé entre l'association et l'utilisateur ; que ces documents consacrent la relation triangulaire résultant des dispositions qui s'appliquent aux associations d'insertion ;

Qu'en l'espèce les contrats signés l'ont été, en application des dispositions législatives alors en vigueur, au visa des dispositions de l'article L.322-4-16 devenu L.5132-1 et suivants ;

Qu'aux termes de l'article L. 5132-11-1 du code du travail, les associations intermédiaires peuvent conclure avec des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières des contrats à durée déterminée en application de l'article L. 1242-3 ; que la durée de ces contrats ne peut être inférieure à 4 mois et peuvent être renouvelés dans la limite d'une durée totale de 24 mois et à titre dérogatoire, au-delà des durées maximales prévues en vue de permettre d'achever une action de formation professionnelle en cours de réalisation à l'échéance du contrat, la durée de ce renouvellement ne pouvant excéder le terme de l'action concernée ; qu'enfin la durée hebdomadaire de travail du salarié embauché dans ce cadre ne peut être inférieur à 20 heures ;

Qu'il résulte des articles L. 5132-7 et L. 5132-14 que l'obligation pour l'association intermédiaire d'assurer l'accueil ainsi que le suivi et l'accompagnement de ses salariés en vue de faciliter leur insertion sociale et de rechercher les conditions d'une insertion professionnelle durable constitue une des conditions d'existence de ce dispositif d'insertion par l'activité professionnelle à défaut de laquelle la relation de travail doit être requalifiée en contrat de travail de droit commun à durée indéterminée ;

Qu'en l'espèce l'association Ardeur justifie, au titre de l'accompagnement de la salariée, lui avoir fait suivre quatre journées de formation dans le cadre d'un module « repassage » en avril et mai 2008 ; qu'elle produit également trois fiches portant la mention d'un suivi spécifique le 21 juillet 2008 et deux le 23 février 2009 avec mention du nom de l'accompagnateur ;

Que si l'association produit la certification CEDRE qu'elle a obtenue en 2010 au regard notamment du plan de formation de l'association et se prévaut de la reconnaissance de la qualité de son intervention en faveur du public par l'organisme DIRECTE en 2016, elle ne justifie pas d'actions de formations régulières à l'exception du module indiqué ni d'aucun suivi individualisé de la salariée durant les trois années qu'a duré la relation de travail ; qu'elle ne démontre donc pas avoir réalisé un véritable travail d'accompagnement social au profit de Mme [H] ;

Qu'il convient en conséquence, infirmant le jugement, de faire droit à la demande de requalification du contrat de travail de Mme [H] en contrat à durée indéterminée et à sa demande au titre de l'indemnité de requalification dont le principe et le montant ne sont pas critiqués ;

Considérant, sur la rupture, que la requalification de la relation contractuelle, entraîne, en cas de rupture, le respect de la procédure de licenciement ;

Qu'en l'espèce dès lors que l'association Ardeur a mis fin à la relation de travail sans notifier au salarié les motifs de la rupture, mais en cessant de lui fournir du travail, la rupture doit être qualifiée de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Que Mme [H] qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ;

Qu'au regard de son âge au moment du licenciement, 56 ans, de son ancienneté d'environ 3 ans et 3 mois dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée et de ce qu'elle ne produit aucun élément sur ses recherches d'emploi, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi la somme de 2 400 euros ;

Que l'association Ardeur sera également condamnée à verser à Mme [H] une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents dont elle a été indûment privée et dont les montants ne sont pas critiqués ;

Considérant qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 3 mois d'indemnités ;

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Requalifie la relation contractuelle liant Mme [H] et l'association Ardeur en contrat à durée indéterminée,

Dit que la rupture du contrat de travail doit s'analyser en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne l'association Ardeur à payer à Mme [Y] [H] les sommes suivantes :

. 384,63 euros à titre d'indemnité de requalification ,

. 2 400 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

. 769,26 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 76,92 euros à titre de congés payés sur préavis,

. 269,24 euros à titre d'indemnité de licenciement,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation,

Ordonne à l'association Ardeur de remettre à Mme [H] une attestation Pôle emploi, des bulletins de salaire et un certificat de travail rectifiés,

Déboute l'association Ardeur de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'association Ardeur aux dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/02687
Date de la décision : 11/10/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°14/02687 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-11;14.02687 ?
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