COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 20J
2e chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 20 JUILLET 2017
R.G. N° 16/00477
AFFAIRE :
[J] [U] [I] [K]
C/
[K] [S] épouse [K]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Décembre 2015 par le Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de VERSAILLES
N° Cabinet : 07
N° RG : 09/00302
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
Me Mélina PEDROLETTI
Me Dominique MERMILLOD
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT JUILLET DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [J] [U] [I] [K]
né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 23297
Représentant : Me Nathalie MARCHESSEAU, Plaidant, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE
APPELANT A TITRE PRINCIPAL
INTIMÉ INCIDEMMENT
****************
Madame [K] [S] épouse [K]
née le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 3] (IRLANDE)
de nationalité Irlandaise
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représentant : Me Dominique MERMILLOD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 141 - N° du dossier 2016006
INTIMÉE À TITRE PRINCIPAL
APPELANTE INCIDEMMENT
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mai 2017 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Agnès TAPIN, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Odile BOUVENOT-JACQUOT, Président,
Madame Agnès TAPIN, Conseiller,
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Anna PANDIKIAN,
Greffier, lors du prononcé : Madame Claudette DAULTIER,
Le délibéré prévu pour le 6 juillet 2017 a été prorogé au 20 juillet 2017.
FAITS ET PROCEDURE,
Monsieur [J] [K] et Madame [K] [S] se sont mariés le [Date mariage 1] 1994 à [Localité 4] ayant fait précéder leur union d'un contrat de mariage de séparation de biens, reçu le 20 juin 1994, par Maître [U], notaire à ELANCOURT,
De leur union sont nés deux enfants :
[M] le [Date naissance 3] 1999, actuellement âgé de 17 ans et demi,
[R] le [Date naissance 4] 2003, actuellement âgée de 14 ans.
Suite de la requête en divorce déposée le 9 janvier 2009 par Madame [S], le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de VERSAILLES a, par ordonnance de non-conciliation du 25 juin 2009 :
-constaté l'acceptation des époux sur le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci,
-autorisé les époux à introduire l'instance,
-autorisé la résidence séparée des époux,
-attribué la jouissance du domicile conjugal, bien indivis, et du mobilier du ménage à Madame [S], et ce à titre gratuit, au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants, le mari disposant d'un délai de quatre mois pour quitter les lieux,
donné acte de ce que Madame [S] prend en charge le remboursement du prêt immobilier afférent au bien indivis, sous réserve des droits de chacun dans la liquidation du régime matrimonial,
-dit que l'impôt sur le revenu sera réglé par les époux au prorata de leurs revenus,
-débouté l'époux de sa demande de pension alimentaire au titre du devoir de secours,
-désigné la SCP [F], notaire à [Localité 2], en vue d'élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation de lots à partager,
-constaté l'exercice commun de l'autorité parentale,
-fixé la résidence habituelle des enfants au domicile la mère,
-décidé d'un droit de visite et d'hébergement au profit du père, les frais de trajet à sa charge,
-dit n'y avoir lieu à fixation de contribution du père à l'entretien et à l'éducation des enfants.
Sur appel de Monsieur [K], la cour d'appel de VERSAILLES a, par arrêt du 16 septembre 2010, débouté de ses demandes, confirmant l'ordonnance déférée, et le condamnant aux dépens.
La SCP [F] a fait parvenir au tribunal le 6 juillet 2011, un procès-verbal de difficultés, annexé d'un « état liquidatif de l'indivision des époux ».
Le 25 novembre 2011, Monsieur [K] a assigné son épouse en divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du code civil.
Sur saisine de Monsieur [K], le juge de la mise en état, a par ordonnance du 21 mars 2014, transféré la résidence de [M] chez son père, organisé le droit de visite et d'hébergement des parents, et supprimé toute contribution à l'entretien et l'éducation des enfants.
Par jugement du 15 décembre 2015, le juge aux affaires familiales a :
-constaté la compétence du juge français,
-dit que la loi française s'applique au litige,
-rejeté des débats les conclusions de Monsieur [K] du 5 octobre 2015 et les pièces n° 109 et 110 jointes,
-prononcé l'ordonnance de clôture au 13 octobre 2015,
-constaté l'acceptation par les deux époux du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci,
-prononcé, sur le fondement des articles 233 et 234 du code civil, le divorce,
-ordonné la publicité de la décision en marge des actes de l'état civil des époux,
-dit que le jugement prend effet dans les rapports entre les époux en ce qui concerne leurs biens à la date du 25 juin 2009,
-autorisé Madame [S] à faire usage du nom de son époux postérieurement au prononcé du divorce,
-donné acte aux parties de leurs propositions de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux,
-ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux,
-renvoyé Monsieur [K] et Madame [S] à procéder amiablement aux opérations de compte, liquidation et partage devant le notaire de leur choix, et en cas de litige, à saisir le juge aux affaires familiales par assignation en partage,
-dit n'y avoir lieu à créance de Monsieur [K] à l'égard de Madame [S] relativement au financement de la construction de la maison indivise,
-dit que les droits des époux sur ce bien, et ce compris terrain et maison construite, sont en proportion de 50 % pour Monsieur [K] et 50 % pour Madame [S],
-attribué préférentiellemcnt à Madame [S] la propriété de l'immeuble commun ayant constitué le domicile conjugal situé à [Localité 2], [Adresse 2], à charge pour elle de régler à Monsieur [K] la soulte due en fonction de la valeur du bien retenue,
-dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande à titre infiniment subsidiaire de prestation compensatoire faite par Madame [S],
-dit que Madame [S] est redevable d'une indemnité d'occupation au titre de la jouissance du domicile conjugal, et ce depuis le 21 mars 2014, équivalente à la valeur locative du bien sur laquelle sera opérée un abattement de 20 %,
-constaté que l'autorité parentale sur [M] et [R] est exercée en commun par les deux parents,
-maintenu la résidence habituelle d'[R] chez la mère et de [M] chez le père,
-dit que les enfants [R] et [M] seront :
*en dehors des vacance scolaires,
° chez leur père, les fins de semaines paires de la sortie des classes à la veille de la reprise 19 h 30,
° chez leur mère, les fins de semaines impaires de la sortie des classes à la veille de reprise 19 h 30,
*pendant les vacances scolaires :
° chez leur père, la première moitié les années paires et la seconde les années impaires,
° chez leur mère, la première moitié les années impaires et la seconde les années paires.
-dit n'y avoir lieu à contribution de l'un ou de l'autre parent à l'entretien et à l'éducation des enfants,
-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
-fait masse des dépens, et condamné chacune des parties à en supporter la moitié.
Le 20 janvier 2016 Monsieur [K] a interjeté un appel total de cette décision.
Dans ses dernières conclusions du 27 avril 2017 de 39 pages avec 36 pièces comprenant de nombreuses pages pour plusieurs pièces, Monsieur [K] demande de :
-constater l'accord des époux sur le principe de la rupture du mariage,
En conséquence,
-prononcer le divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du code civil,
-dire qu'il convient fixer la résidence habituelle de [M] au domicile du père,
-dire que les enfants seront chez leur père les fins de semaines paires sortie des classes à la veille de la reprise 19 h 30, et chez leur mère les fins de semaine impaires sortie des classes à la veille de la reprise 19 h 30, la première moitié des vacances scolaires les années paires est dévolue au père et la deuxième moitié les années impaires,
-dire qu'il n'y a pas lieu de fixer une contribution à la charge de l'une ou l'autre des parties et constater que Madame [S] n'a plus la jouissance gratuite du domicile conjugal depuis le prononcé de l'ordonnance d'incident,
-rejeter la demande de Madame [S] sur l'usage du nom marital après le prononcé du divorce,
-constater que Monsieur [K] a réglé l'intégralité du financement de la maison indivise par un apport en capital,
-dire que Monsieur [K] détient une créance à l'égard de son épouse ainsi que l'a noté le notaire dans son projet d'acte, dont le montant sera ensuite à déterminer selon l'évaluation qui sera retenue de la maison,
-statuer ce que de droit sur la demande d'attribution préférentielle de Madame [S] étant précisé que celle-ci sera alors redevable d'une soulte qu'il conviendra de calculer,
-débouter Madame [S] de sa demande de prestation compensatoire,
-infirmer le jugement concernant l'abattement de 20 % dans le calcul de l'indemnité d'occupation due par Madame [S],
-dire qu'il convient de faire remonter les effets du divorce au 25 juin 2009,
-ordonner la mention du jugement de divorce en marge de l'acte de mariage et de naissance des parties,
-condamner Madame [S] à payer à Monsieur [K] 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses dernières conclusions du 25 avril 2017 de 38 pages avec 149 pièces comprenant de nombreuses pages pour plusieurs pièces, Madame [S] demande de :
-infirmer partiellement le jugement et,
-dire que les époux sont propriétaires à hauteur de 50 % chacun du terrain et de la construction, du bien immobilier indivis, [Adresse 2], à [Localité 2]
-dire qu'il n'y a aucun compte à faire entre les époux par application du contrat de mariage et de l'article 1537 du code civil,
-fixer la part de chacun des époux à hauteur de la moitié de la valeur du bien immobilier (terrain et construction) indivis,
-accorder à Madame [S] l'attribution préférentielle du domicile conjugal par application de l'article 267 du code civil si la cour confirme qu'elle est bien propriétaire de 50 % du bien indivis dont s'agit,
-fixer l'indemnité d'occupation due par Madame [S] au montant d'un loyer avec abattement de 20 % et ce, à compter de l'ordonnance d'incident du 21 mars 2014,
Si la cour rentre dans les comptes :
-dire que les versements effectués par Monsieur [K] l'ont été au titre de sa participation aux charges du mariage par application des articles 1448 et 1537 du code civil et du contrat de mariage,
-constater que les versements de Monsieur [K] ont été moindres que ceux de son épouse et inférieurs à ses facultés contributives,
En conséquence,
-débouter Monsieur [K] de sa demande de fixation d'une créance contre son épouse,
A titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où par extraordinaire la cour ferait droit à la demande de créance de Monsieur [K] :
-condamner Monsieur [K] à payer à Madame [S] 250 000 € à titre de prestation compensatoire, et ce, nets de frais et de droits,
-débouter Monsieur [K] de sa demande de 3.000 € fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner Monsieur [K] aux dépens.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 2 mai 2017.
Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétention des parties, la cour renvoie à leurs écritures, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE LA COUR
Sur le juge compétent et la loi applicable
Madame [S] est de nationalité irlandaise. Cet élément d'extranéité nécessite qu'il soit statué sur le juge compétent et la loi applicable, étant précisé que les parties n'ont contesté ni la compétence du juge français, ni l'application de la loi française.
Les juridictions françaises sont compétentes pour connaitre du divorce des époux par application de l'article 3.1 (a), du Règlement CE n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions, en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale (Règlement BRUXELLES II Bis), en tant que juridiction de l'Etat membre de la résidence habituelle des époux en FRANCE à [Localité 2].
En application de l'article 8, a) du Règlement CE n° 1259/2010 du 20 décembre 2010, mettant en oeuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps, dit ROME III, le juge français appliquera la loi française au divorce des époux, en tant que loi de l'Etat de la résidence habituelle des époux au moment de la saisine de la juridiction.
Enfin pour les mêmes motifs, les juridictions françaises sont compétentes pour statuer sur les conséquences financières du divorce en application de l'article 3 (c), du Règlement CE n° 4/2009 du 18 décembre 2008 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions et la coopération en matière d'obligations alimentaires.
Le jugement déféré est donc confirmé de ces chefs.
Sur l'usage du nom
Monsieur [K] soutient que du fait que Madame [S] est salariée, l'usage du nom marital n'est pas justifié, sa perte n'ayant aucune incidence sur son activité professionnelle, et que l'intérêt de l'enfant n'est plus pertinent compte tenu de la propension d'enfants issus de couples séparés.
Madame [S] réplique qu'elle maintient cette demande dans l'intérêt d'[R], jeune et encore scolarisée, et parce qu'elle est connue dans son travail sous le nom de son mari qu'elle porte depuis plus de 20 ans.
Selon l'article 264 du code civil, à la suite du divorce, chacun des époux perd l'usage du nom de son conjoint. L'un des époux peut néanmoins conserver l'usage du nom de l'autre, soit avec l'accord de celui-ci, soit avec l'autorisation du juge, s'il justifie d'un intérêt particulier pour lui ou pour les enfants.
La cour relève que les moyens invoqués par Monsieur [K] au soutien de son appel ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connus et auxquels il a répondu par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre Monsieur [K] dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.
Ainsi le premier juge a fait une juste application des règles de droit, comme une exacte appréciation des faits et documents de l'espèce, en retenant que Madame [S] justifie être employée, sous contrat à durée indéterminée, en qualité de directrice juridique Nouveaux Médias au sein de la société HACHETTE FILIPACCHI associés puis de la société LAGARDERE depuis 1996, qu'elle est connue sous son nom d'épouse depuis cette date, c'est à dire plus de 21 ans, (cf les bulletins de paie et les courriers de l'employeur ) que le dernier enfant est encore jeune, et qu'ainsi, « eu égard aux fonctions à responsabilités de Madame [S] au sein de la société qui l'emploie, et à l'usage manifestement prolongé du nom marital, il y a lieu de considérer que Madame [S] fait état d'un intérêt particulier ».
Le jugement est donc confirmé de ce chef.
Sur la liquidation du régime matrimonial et des désaccords persistants
Suivant l'article 267 du code civil, applicable en l'espèce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2015-1288 du 15 octobre 2015, applicable elle-même à compter du 1er janvier 2016, « si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement de l'article 255-10 ° du code civil contient des informations suffisantes, le juge, à la demande de l'un ou l'autre des époux, statue sur les désaccords persistants entre eux. »
En l'espèce, Maître [F], notaire à [Localité 2], a été désigné sur le fondement de l'article 255-10° du code civil. Il a dressé un procès verbal de difficultés le 17 juin 2011 dans lequel il indique : « le présent rapport constatant l'absence d'accord des époux et reprenant leurs dires ne saurait valablement saisir le juge aux affaires familiales, il appartiendra à l'un des époux de saisir le juge aux fins de partage judiciaire par une assignation. »
A été annexée à la minute du procès verbal un « état liquidatif de l'indivision des époux » signé par eux en indiquant qu'ils en ont pris connaissance.
Monsieur [K] soutient que la construction de la maison, le domicile conjugal, à [Localité 2], sur un terrain acheté indivisément par les époux, a été financée quasi-exclusivement par des fonds propres provenant de la vente d'un bien indivis entre lui et ses parents situé à [Adresse 3], d'un montant total d'environ 378.000 €, et qu'il détient en conséquence une créance certaine à l'encontre de Madame [S] du montant de cet apport en capital, à déterminer en fonction de la valeur totale du bien immobilier, à définir en fonction de la valeur retenue de l'ensemble du domicile conjugal.
Il soutient qu'il n'existe aucune intention libérale de sa part à l'égard de son épouse sur cette créance, qu'il n'existe pas plus de donation, ou d'avantage matrimonial, que la clause figurant dans le contrat de mariage n'est pas une présomption irréfragable « de jure », et que son apport en capital ne peut être analysé comme une contribution aux charges du mariage telle que libellée dans le contrat de mariage.
Monsieur [K] invoque également les clauses, figurant dans les actes notariés passés avec ses parents en 2001 et 2004 opposables à Madame [S] qui ne les ignorait pas, « de retour » et « d'exclusion de la communauté existant entre le donataire et son conjoint », qui pour cette dernière fait en sorte que le bien donné reste obligatoirement un bien propre du donataire.
Subsidiairement Monsieur [K] déclare démontrer avoir pleinement rempli ses obligations au quotidien de contribution aux charges du mariage, son apport en capital excédant ce qu'il devait au titre de ces obligations. Il dit avoir injecté tous ses salaires dans les grosses dépenses du ménage depuis le début du mariage.
Madame [S] répond qu'avec Monsieur [K], ils ne sont en effet pas tomber d'accord devant le notaire désigné par le juge conciliateur, ni sur la propriété indivise de la construction du domicile conjugal à [Localité 2], ni sur son évaluation, ni sur son financement.
Madame [S] indique que c'est le titre et non le financement qui détermine la propriété, et qu'appliquant ce principe, elle est propriétaire de 50 % de la totalité du domicile conjugal, immeuble compris, dès lors que les apports de Monsieur [K] à la construction du bien immobilier l'ont été au titre de sa contribution aux charges du mariage conformément à la clause figurant sur ce point dans leur contrat de mariage.
Elle dit que la prétention de Monsieur [K] à une créance est neutralisée par l'obligation qui lui est faite à l'article 214 du code civil de contribuer aux charges du mariage, dans cette hypothèse, la dépense réalisée ou la somme remise à son conjoint par l'époux est considérée comme constitutive de sa contribution, qu'elle n'a pas, en droit, la charge de prouver que son mari n'a pas suffisamment contribué aux charges du mariage, et qu'il incombe à Monsieur [K] d'apporter la preuve qu'il aurait excessivement contribué aux charges du mariage, ce qu'il ne fait pas.
Elle déclare enfin très subsidiairement que si la cour souhaite rentrer dans les comptes et le calcul de la contribution aux charges par chacun des époux, alors que ni le notaire, ni le juge de première instance ne l'ont fait, il conviendra d'appliquer l'article 1448 du code civil et la jurisprudence en la matière. Elle soutient que pendant toute la durée du mariage, seul le salaire de Madame [S] était versé sur le compte joint sur lequel toutes les dépenses du ménage étaient prélevées, à l'exception de la période des séjours du couple en ANGLETERRE, et que Monsieur [K] a payé les travaux du bien immobilier de [Adresse 3] à partir de son compte pesonnel sur lequel était versé son salaire pendant toute la période de vie commune. Elle ajoute enfin qu'elle a établi avoir contribué plus largement que son mari aux charges du mariage, précisant que l'impôt sur les revenus ne constitue pas une charge du mariage sous le régime séparatiste, que Monsieur [K] n'a pas participé aux charges du mariage à hauteur de ses revenus, et qu'ainsi le financement de la construction par Monsieur [K] doit être considéré comme sa contribution aux charges en proportion de ses facultés financières.
1 - Cela étant posé, l'article 4 du contrat de mariage des époux, intitulé « contribution aux charges du mariage », contient la clause suivante :
« Les futurs époux contribueront aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives, conformément aux dispositions des articles 214 et 1537 du code civil.
Chacun d'eux sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu'aucun compte ne sera fait entre eux à ce sujet et qu'ils n'auront pas de recours l'un contre l'autre pour les dépenses de cette nature ... »
Il s'agit d'une présomption que chaque époux a contribué au jour le jour aux charges du mariage durant celui-ci.
Il ressort de cette clause la volonté de Madame [S] et de Monsieur [K] que cette présomption interdit de prouver que l'un ou l'autre des conjoints ne s'était pas acquitté de cette obligation.
Cela signifie que chacun des époux est présumé avoir contribué aux charges du mariage depuis celui-ci, a proportion de leurs ressources. Aucun compte ne sera donc fait entre eux à ce sujet.
Toutefois, une limite peut être apportée à cette présomption dès lors que le solvens, ici Monsieur [K], parvient à démontrer qu'il a par ailleurs suffisamment contribué aux charges du mariage, ou plus communément que le paiement par le solvens a excédé sa part de contribution aux charges du mariage.
2 - En l'espèce, il résulte du procès verbal de difficultés dressé par le notaire que « les parties reconnaissent ne pas avoir de contestation sur leur contribution respective au financement du prêt ayant permis l'acquisition du terrain de [Localité 2], considérant qu'elles y ont contribué à hauteur de la moitié chacune. »
Le terrain précité, à bâtir de 5.000 m² comprenant deux petits étangs, et situé [Adresse 2] à [Localité 2], a été acquis le 2 août 2002 par les époux dans les proportions indiquées dans l'acte notarié de 50 % pour Monsieur [K], et de 50 % pour Madame [S], au prix de 514.515,43 €.
Lors de l'achat du terrain, les époux ont souscrit le même jour un prêt auprès de la Banque Populaire pour un montant en capital de 457.400 €, fait au nom des deux époux. Ils ne contestent pas devant le notaire ni devant la présente juridiction, rembourser ce prêt à hauteur de la moitié chacun, depuis le début du prêt jusqu'au 7 mars 2009, date à laquelle Monsieur [K] a remboursé par anticipation la moitié du solde du prêt restant à courir à cette date, soit la somme de 172.438,39 € avec ses indemnités transactionnelles de départ de chez Ernst and Young. Le montant des échéances suivantes a été divisé par moitié.
Les époux ne contestent pas non plus qu'à compter du 5 avril 2009, soit postérieurement au remboursement anticipé du prêt par Monsieur [K], Madame [S] a remboursé seule les échéances suivantes dudit prêt immobilier, et qu'elle était seule redevable en juin 2011 (date du procès verbal de difficultés du notaire) du solde du prêt restant à courir ce jour, soit un montant en capital restant dû de 152.468 €.
Le terrain est devenu, selon les constatations du notaire missionné, inconstructible à ce jour, le PLU ayant été modifié.
3 - Courant 2003-2004, les époux ont fait construire une maison d'habitation sur ce terrain.
Les évaluations d'agences immobilières produites par les parties sont d'accord sur la description suivante de l'immeuble d'environ 280 m² de surfaces habitables :
-sous sol avec chaufferie et grand garage,
-rez de chaussée : hall d'entrée, chambre parentale avec dressing et salle de bains privative, triple séjour sur terrasse, buanderie, cellier, cuisine, dégagement,
-premier étage : mezzanine, combles aménageables, dressing, salle de bains et wc, dégagement desservant trois chambres.
En application de la théorie de l'accession, la propriété de la construction suit celle du terrain, de sorte que la propriété de l'ensemble du bien immobilier se répartit dans les mêmes proportions que celles de l'acquisition du terrain, c'est à dire 50 % à Monsieur [K], et 50 % à Madame [S].
Mais Monsieur [K] ayant fait valoir au notaire son désaccord quant aux modalités de financement du règlement de la construction, en déclarant que Madame [S] n'a pas participé au financement de sa quote-part de 50 %, et qu'il a lui même financé l'intégralité de la construction, le notaire a reconstitué le financement réel de l'ensemble de la construction au vu des documents fournis par les parties.
La cour, se référant au bilan du financement de la construction sur le terrain des époux, décrit précisément par le notaire à qui Monsieur [K] a produit tous les éléments justificatifs nécessaires, non sérieusement contestés par les parties, estime établi que celui-ci a financé seul la construction de la maison au moyen de fonds provenant de la vente d'un bien propre.
En effet, Monsieur [K] justifie par la production de :
-de la copie d'acquisition d'un bien immobilier situé [Adresse 3], du 18 juillet 1990, soit avant le mariage, par lui-même et par ses propres parents, à hauteur de la moitié indivise chacun,
-la copie de l'acte de donation notarié du 15 janvier 2001, de ses parents à son profit de la moitié indivise en toute propriété, qu'ils avaient acquise avec lui,
-la copie du relevé de compte personnel de Monsieur [K] ouvert au Crédit Agricole attestant de la remise du prix de vente le 27 août 2004 d'un montant de 375.989,75 €,
-la facture de la société de construction SINA de [Adresse 3] d'un montant total de 353.371 €,
-plusieurs relevés des comptes bancaires personnels de Monsieur [K] attestant des douze versements en provenance des dits comptes au profit de la société SINA entre le 16 février 2003 et le 30 août 2004 pour un montant total de 353.371 €,
-une reconnaissance de dette de 300.000 € signée par Monsieur [K] au profit de Monsieur [Q] [T] enregistrée le 3 janvier 2003 à la recette des impôts de HOUILLES,
-le relevé de compte attestant du virement de cette somme sur le compte de Monsieur [K] par Monsieur [Q] [T] le 4 novembre 2003,
-le relevé de compte attestant d'un virement du compte de Monsieur [K] vers un autre compte du même montant du 15 septembre 2004, tous deux comptes bancaires personnels de Monsieur [K],
-enfin onze factures de travaux et de cotisations d'assurance de différentes sociétés de construction et artisanales entre février 2003 et juillet 2007 d'un montant total de 50.060,41 €,
-les relevés du comptes de Monsieur [K] attestant de tous les versements en provenance de ses comptes personnels pour payer la totalité de ces onze factures,
qu'il a financé seul la construction de la maison sur le terrain de [Localité 2], au moyen de fonds provenant de la vente d'un bien immobilier situé à [Adresse 3], lui appartenant en propre, selon l'acte notarité du 27 août 2004, au prix de 378.050 €.
Les pièces sus énumérées établissent en effet que Monsieur [K] a payé seul au moyen de ces fonds la totalité de la facture de la société SINA CONSTRUCTION d'un montant total de 353.371 €, que le décalage entre les dates de paiement de la construction et le moment où il a reçu le prix de vente de la maison de [Adresse 3], s'explique par le fait qu'un ami Monsieur [Q] [T], lui a accordé un prêt relais de 300.000 € en novembre 2002, prêt qu'il a remboursé le 15 septembre 2004.
Enfin, Monsieur [K] justifie au vu des pièces précitées avoir payé seul les onze factures de différentes sociétés pour terminer la construction du domicile conjugal, le notaire relevant qu'un seul versement de 3.324,88 € du 31 juillet 2004 pour payer le solde de la facture des peintures intérieures, émane du compte joint des époux [K]-[S].
La preuve de tous ces paiements en capital sur une courte période de février 2003 à juillet 2007 de factures de plus de 403.431,41 € ( 353.371 € plus 50.060,41 € ) par Monsieur [K] limite la présomption figurant dans la clause du contrat de mariage. Il ne s'agit pas en effet de paiement au jour le jour de contribution aux charges du mariage, ou de remboursement d'un emprunt indivis par versements mensuels, mais il est justifié d'un apport en capital par Monsieur [K], sur un cour espace temps pendant la construction du domicile conjugal, provenant de la vente d'un bien propre appartenant à Monsieur [K] et ses parents. Cet apport qui a permis de payer tous les travaux de construction dudit domicile, et a excédé la part de contribution de Monsieur [K] aux charges du mariage puisqu'il est justifié qu'il a perçu 98.261 € de salaires en 2003, et 94.336 € en 2004 (cf les bulletins de paie et les avis d'impôt sur les revenus ).
Il n'est pas démontré que les sommes provenant de la vente de l'immeuble de [Adresse 3], revenant à Monsieur [K], ont été employées à d'autres fins que le financement de la construction du domicile conjugal en 2004, comme il n'est pas démontré l'intention libérale de Monsieur [K] à l'égard de Madame [S], concernant le prix de vente de l'immeble de [Adresse 3].
Ainsi, il convient de dire en conclusion que cet apport personnel en capital de Monsieur [K] est une créance à l'encontre de Madame [S] à prendre en compte lors de la liquidation et du partage de leur régime matrimonial.
4 - Cela étant posé, il appartiendra aux parties de saisir le notaire de leur choix pour calculer le montant de la créance entre époux résultant du financement de la construction précitée par Monsieur [K], selon la règle du profit subsistant applicable quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien existant au jour de la liquidation du régime matrimonial en application des articles 1479 et 1543 du code civil. Madame [S] doit à Monsieur [K] une somme représentant la moitié de la différence entre la valeur totale du bien immobilier situé à [Localité 2] et la valeur dudit terrain nu.
Pour ce faire, il convient de fixer la valeur de l'immeuble et du terrain au jour du partage.
5 ' Il résulte du rapport du notaire désigné par le juge conciliateur, joint à son procès verbal de difficultés, que Monsieur [K] a produit une évaluation de l'immeuble à 2.676.800 € alors que Madame [S] en a produit quatre dont l'évaluation moyenne s'est élevée à 1.462.725 €, comprenant 948.150 € pour le terrain nu.
Le notaire ne fait aucune proposition sur l'évaluation de l'immeuble. Il a noté dans son procès verbal de difficultés que « les parties ont déclaré d'emblée » et maintenu « ne pas être d'accord sur la valeur de la maison. »
Il est constant que le juge aux affaires familiales ne statue sur les désaccords persistant entre les époux à la demande de l'un ou l'autre, que si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement de l'article 267 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2015-1288 du 15 octobre 2015 précité, contient des informations suffisantes.
En effet, il n'appartient pas au juge du divorce qui constate l'insuffisance des informations produites, d'ordonner des mesures d'instruction dont il incombe au seul juge de la liquidation d'apprécier la nécessité (réf : Cour de cassation 1ère civile n° 15.23357 du 15 juin 2017).
En l'espèce, les informations communiquées ci dessus par le notaire sont insuffisantes parce qu'énonçant des valeurs très éloignées l'une de l'autre du domicile conjugal, données par les époux, avec un écart de plus de 1.200.000 €, pour que la cour d'appel puisse fixer la valeur du dit domicile au jour du partage comme le rappelle justement le notaire.
Il y a lieu dans ces conditions de rejeter la demande des époux de fixer la valeur de l'immeuble, et de les inviter à saisir le notaire pour liquider leur régime matrimonial, et le juge de la liquidation si nécessaire.
6 - Il en va de même pour l'indemnité d'occupation de Madame [S] du domicile conjugal.
Monsieur [K] conteste l'abattement appliqué à l'indemnité d'occupation, et fixé par le premier juge, à compter du 21 mars 2014, date de l'ordonnance de mise en état décidant que [M] habiterait chez son père.
Madame [S] demande la confirmation du jugement déféré, contestant la valeur locative proposée par Monsieur [K] de 5000 €, sans produire la moindre évaluation, alors que des agences immobilières consultées par elle ont fixées le montant des loyers du domicile conjugal entre 3000 € et 4000 €.
En effet, force est de constater que le rapport du notaire joint au procès verbal de difficultés ne contient aucune information sur le montant de l'indemnité d'occupation, ni sur un possible abattement de celle-ci au profit de Madame [S].
Il y a lieu en conséquence de rejeter cette demande de Madame [S], en infirmant le jugement sur l'indemnité d'occupation, et d'inviter encore les parties à saisir le notaire pour liquider leur régime matrimonial, et le juge de la liquidation.
Sur l'attribution préférentielle du domicile conjugal
Certes l'article 267 du code civil dit qu'à défaut d'un règlement conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux et statue sur les demandes de maintien dans l'indivision ou d'attribution préférentielle...
Mais l'article 1542 du même code prévoit en cas de partage des biens indivis entre époux séparés de biens, que « ...l'attribution préférentielle n'est jamais de droit. Il peut toujours être décidé que la totalité de la soulte éventuellement due sera payable comptant. »
Madame [S] ne demande l'attribution préférentielle du domicile conjugal, que dans le cas où la cour d'appel retiendrait qu'elle en est bien propriétaire à 50 %, expliquant qu'à défaut elle n'aura pas la capacité financière pour payer la soulte.
Dès lors que la cour vient de retenir une créance précitée de Monsieur [K] à l'encontre de Madame [S], il a lieu de constater l'absence de demande d'attribution préférentielle du domicile conjugal par Madame [S], et d'infirmer en conséquence le jugement de ce chef.
Sur la prestation compensatoire
La demande principale de Madame [S] ayant été rejetée, il convient d'examiner sa demande subsidiaire de prestation compensatoire.
Madame [S] fait valoir que dans l'hypothèse de retenue d'une créance de Monsieur [K], il est évident que n'ayant strictement aucune économie, elle « se retrouvera dans une situation où elle ne pourra pas à la fois payer une soulte de l'attribution préférentielle et le montant de la prétendue créance de son mari qu'il évalue selon ses explications peu claires et non justifiées à 70 % de la propriété de [Adresse 2]. » Elle dit que le bien indivis sera vendu et qu'elle se retrouvera alors avec une grande disparité de patrimoine dans la mesure où elle devra payer la prétendue créance à son mari, ne sera plus propriétaire d'un bien immobilier, et ne disposera que du prix de la vente de l'immeuble déduction faite du paiement de la créance retenue, et dont la part sera diminuée de l'indemnité de jouissance. Pour Madame [S], il existe manifestement une disparité concernant non seulement les revenus entre époux, mais également le patrimoine et la retraite.
Madame [S] ajoute qu'elle n'a reçu aucune action gratuite, que Monsieur [K] qui a des avantages en nature comme une voiture de fonction avec carte essence, a des revenus supérieurs aux siens, qu'il partage ses charges avec sa concubine dont il ne justifie pas des revenus, alors qu'elle vit seule, qu'il ne justifie pas de la totalité de sa retraite, ni de ses placements, qu'il bénéficie d'une donation partage en nue-propriété du 13 mai 2005 de ses parents sur trois biens immobiliers situés en NORMANDIE, à MAISONS LAFITTE et à PARIS, le dernier bien ayant été vendu.
Elle conteste toute vocation successorale, faisant valoir que celle-ci ne constitue pas un droit prévisible au sens des articles 270 et suivants du code civil.
Monsieur [K] répond que Madame [S] a toujours exercé une activité professionnelle, percevant un salaire fixe et une participation, que ses revenus se révèlent ainsi plus importants que ce qu'elle dit, que de son côté, il a été au chômage de janvier 2007 au 31 août 2010 après avoir travaillé au sein de la société ERNST and YOUNG de septembre 1990 au 31 décembre 2007, que ce sont ses parents qui l'ont aidé pendant cette période de chomage d'autant plus difficile qu'il n'avait plus de logement fixe, et qu'il est actuellement directeur financier chez ALTIS qui présente des difficultés financières depuis 2015.
Il explique que son salaire permet à sa nouvelle famille de vivre, sa compagne travaillant depuis début 2015 et ayant eu un enfant la même année, qu'il va rembourser ses parents avec la créance qu'il détient à l'encontre de son épouse, selon l'acte de donation partage du 13 mai 2005 où il est visé que le droit au retour s'exercera sur le prix de vente du bien.
Monsieur [K] reconnaît bénéficier de la nue-propriété de deux biens, mais soutient qu'il ne peut pas en disposer puisque ses parents en ont conservé l'usufruit. Il ajoute que Madame [S] bénéficiera de biens immobiliers en IRLANDE dans l'avenir puisque sa mère est propriétaire de plusieurs milliers de m² de terres en banlieue de [Localité 3], exploitées par un de ses frères, et que leurs retraites seront quasiment équivalentes.
Il déclare enfin que Madame [S] n'établit pas qu'il y ait disparité dans les conditions respectives des époux au moment du divorce, son niveau de vie n'ayant pas diminué et ne diminuant pas une fois le divorce prononcé.
Suivant l'article 270 du code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives, en fonction de la situation au moment du prononcé du divorce et de l'évolution dans un avenir prévisible.
La prestation compensatoire n'est pas destinée à égaliser les fortunes ni à corriger les conséquences du régime matrimonial adopté par les époux et qu'elle doit permettre d'éviter que l'un des époux ne soit plus atteint que l'autre par le divorce.
Il y a lieu de tenir compte, notamment, de la durée du mariage, de l'âge et de l'état de santé des époux, de la qualification et de la situation professionnelles des époux, des conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, du patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, de leurs droits existants et prévisibles, et de leur situation respective en matière de pension de retraite.
Selon l'article 274 du code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital. Celles-ci sont limitativement prévues par la loi.
Les nombreuses pièces produites permettent de déterminer les patrimoines, les ressources et les charges suivants des parties.
Madame [S], âgée actuellement de 50 ans et demi, s'est mariée avec Monsieur [K] âgé de 53 ans, le 2 juillet 1994, soit depuis environ 21 ans au moment du jugement de divorce, et pratiquement 15 ans jusqu'à l'ordonnance de non-conciliation.
Ni l'un ni l'autre ne font état de problème de santé.
Les revenus actuels de Madame [S] sont constitués par ses salaires de directrice juridique Nouveaux Médias au sein de la société HACHETTE FILIPACCHI Associés qui l'a embauchée le 1er juillet 1996 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.
Son relevé de carrière établit qu'elle a travaillé auparavant de 1991 et jusqu'en 1993 pour la société britannique SLAUGHTER and MAY avocats, en qualité de solicitor. Ensuite, elle a émargé à la caisse nationale des barreaux de 1993 à 1994. 1995 n'est pas renseigné. Elle a travaillé à l'étranger en 1999. En 2003, elle a été en congé de maternité.
Enfin, il ressort de l'ordonnance de non-conciliation qu'elle a travaillé à temps partiel, c'est à dire à 80 %, depuis mars 2009, sans que ne soit indiquée la poursuite de ce temps partiel.
Les revenus actuels de Monsieur [K] sont constitués par son salaire de directeur financier, membre du comité exécutif, de la société ALTIS qui l'a embauché à compter du 1er janvier 2010. Il perçoit un forfait annuel de 120.000 € bruts, avec une rémunération variable de 50 % du salaire annuel, fondée à 50 % sur les résultats financiers de l'entreprise, et 50 % sur la construction de l'organisation financière de l'entreprise. Il bénéficie d'une voiture de fonction dont l'assurance et le carburant sont payés par l'entreprise dans une limite mensuelle.
Son relevé de carrière n'est pas produit. Cependant les parties sont d'accord pour indiquer que Monsieur [K] a travaillé pour la société ERNST and YOUNG depuis 1990 jusqu'à la fin de l'année 2007, époque au cours de laquelle il a quitté l'entreprise au terme d'une transaction. Il a perçu une indemnité transactionnelle de départ de cette société de 185.979 € au cours de l'année 2007 qu'il a employée en grande partie pour payer la moitié du solde du prêt immobilier contracté pour l'acquisition du terrain situé à [Localité 2], comme décrit précédemment.
Monsieur [K], inscrit à Pôle Emploi, a perçu des allocations d'aide au retour à l'emploi. Selon l'ordonnance de non-conciliation, il n'en a plus perçu depuis le 22 mai 2009. Il a créé une entreprise avec son père, mais qui n'a pas fonctionné.
Selon les avis d'impôt et bulletins de paie, les parties ont perçu les salaires suivants pendant leur mariage :
-en 1994, Monsieur [K] des salaires de 56.270 francs, et Madame [S] des salaires de 79.554 francs,
-en 1995, Monsieur [K] des salaires de 114.611 francs, et Madame [S] des salaires de 43.563 francs,
-en 1996, Monsieur [K] des salaires de 274.778 francs, et Madame [S] des salaires de 253.756 francs,
-en 1997, Monsieur [K] des salaires de 313.660 francs, et Madame [S] des salaires de 310.115 francs,
-en 1998, Monsieur [K] des salaires de 281.162 francs, et Madame [S] des salaires de 246.884 francs,
-les années 1999 à 2002 ne sont pas renseignées,
-en 2003, Monsieur [K] des salaires de 98.261 €, et Madame [S] des salaires de 81.194 €,
-en 2004, Monsieur [K] des salaires de 94.336 €, et Madame [S] des salaires de 84.726 €,
-en 2005, Monsieur [K] des salaires de 98.162 €, et Madame [S] des salaires de 87.048 €,
-en 2006, Monsieur [K] des salaires de 97.932 €, et Madame [S] des salaires de 90.475 €,
-en 2007, Monsieur [K] des salaires de 36.871 € constitués de 9.670 € de salaires et de 27.201 € d'autres revenus salariaux, et Madame [S] des salaires de 90.422 €,
-en 2008, Monsieur [K] d'autres revenus salariaux de 62.480 €, et Madame [S] des salaires de 90.763 €,
-les années 2009 à 2012 ne sont pas renseignées,
-en 2013, Monsieur [K] des salaires de 123.515 €, et les salaires de Madame [S] ne sont pas communiqués,
-en 2014, Monsieur [K] des salaires de 114.380 € qui représentent 9.525 € par mois, et Madame [S] des salaires de 95.067 €,
-en 2015, Monsieur [K] des salaires de 59.342 € jusqu'en juillet 2015, et Madame [S] des salaires de 100.712 € qui représentent 8.393 € par mois,
-en 2016, Monsieur [K] des salaires de 123.348 € qui représentent 10.279 € par mois, et Madame [S] des salaires de 91.867 € qui représentent 7.656 € par mois.
Il est ainsi établi que le montant des salaires de Monsieur [K] a toujours été supérieur à celui de Madame [S], sauf lorsqu'il a été au chômage.
Aucune des parties n'a produit de document permettant de connaître le montant des pensions de retraite qu'ils percevraient. Il est vrai que vu leurs âges et les possibilités d'évolution de leurs carrières professionnelles, les informations qui seraient communiquées ne seraient pas significatives.
Il résulte des relevés de leurs situations individuelles au 19 août 2014 pour Monsieur [K], et au 11 août 2011 pour Madame [S], que :
-Madame [S] détenait 82 trimestres CNAV, 2.479,23 points ARRCO, et 32.079 points AGIRC,
-Monsieur [K] détenait 96 trimestres CNAV, 2.769,46 points ARRCO, et 46.082 points AGIRC.
Le patrimoine indivis des époux mariés sous le régime de la séparation de biens est constitué à titre principal du domicile conjugal situé à [Localité 2], et décrit précédemment.
Les époux ne sont pas d'accord sur la valeur de l'immeuble, Monsieur [K] la fixant à 2.676.800 € et Madame [S] en moyenne, retenue par le notaire désigné par le juge conciliateur, à 1.462.725 €. Les parties ont été renvoyées devant le notaire pour fixer la réelle valeur de l'immeuble.
Il est incontestable au vu des développement précédents que Madame [S] percevra une part de la vente de l'immeuble, s'il est vendu, nettement inférieure à celle de Monsieur [K] qui détient à son encontre une créance de plus de 370.000 €.
Mais il est fait état d'un droit au retour de ses parents sur la vente de l'immeuble de [Adresse 3] dans un acte de donation partage du 13 mai 2005, examiné ci dessous.
Il n'est pas fait état d'épargne et/ou de valeurs mobilières indivises.
Le patrimoine propre de Madame [S] ne contient pas de biens immobiliers, les simples espérances successorales en IRLANDE invoquées par Monsieur [K], par définition incertaines, n'ont pas à être prises en compte pour l'appréciation de la prestation compensatoire.
Madame [S] a déclaré sur l'honneur le 7 avril 2017 et justifié par la production de relevés de ses comptes posséder le patrimoine mobilier suivant au 31 décembre 2016 :
-un PEA de 152,45 €,
-un livret A de 251,22 €,
-un PEL de 12.599,50 €,
-une participation dans son entreprise HFA de 12.897,90 € bruts,
-une épargne salariale de 2.732,72 € nets.
Elle détient enfin un avoir de titres dans son entreprise de 13.755 € à la BNP PARIBAS, au 3 décembre 2015.
Le patrimoine propre de Monsieur [K] est constitué de la nue-propriété de trois biens immobiliers donnée par ses parents par acte de « donation partage » entre leurs deux enfants du 13 mai 2005, Monsieur [K] ayant déjà bénéficié d'une donation le 13 mars 2001.
Il a ainsi reçu la nue propriété :
-de la totalité d'un immeuble situé à [Adresse 4], où vivent les parents de Monsieur [K], en deux fois : 36,05 % de la nue propriété suivant l'acte précité de 2001, et 63,95 % suivant l'acte de 2005. Il s'agit d'un appartement de quatre pièces principales avec une cave et deux emplacements de parking, évalué en pleine propriété en 2005 à 362.830 €, et pour la nue-propriété à 150.819 € ;
-la nue propriété d'une maison d'habitation située à [Localité 4] de deux grandes pièces principales, avec garage et grenier, évaluée en pleine propriété à 152.450 €, et pour la nue propriété à 99.092 € ;
-la nue propriété d'un studio situé [Adresse 5], évalué en pleine propriété le 11 octobre 1994 à 36.587 €, et pour la nue propriété à 27.440 €. Monsieur [K] a vendu cet appartement. Aucun document ne justifie de cette vente, donc du prix perçu par lui.
Il ne justifie pas de détention de comptes épargne ou de biens mobiliers, ni de participation dans son entreprise, ou d'épargne salariale, ou d'avoir de titres de son entreprise.
Les charges fixes justifiées de Madame [S] comprennent outre les charges habituelles d'assurances emprunt immobilier, automobile, maladie accident, santé et habitation, de téléphones fixe et mobile, de connexion internet, d'électricité, de gaz, d'eau, d'entretien de la chaudière, et des salaires d'une employée de maison, ainsi que ses dépenses courantes d'entretien, de nourriture et d'habillement :
-l'impôt 2016 sur les revenus 2015 de 16.046 €,
-la taxe d'habitation 2016 et la contribution à l'audiovisuel public de 5.052 €,
-la moitié des taxes foncières du domicile conjugal de 4.377 € en 2016, soit 2.189 €,
-le remboursement du prêt immobilier du terrain supportant le domicile conjugal,
-le remboursement d'un prêt de 15.000 € souscrit auprès de la Banque Populaire le 3 mars 2014 par 42 échéances mensuelles de 398 € chacune jusqu'en septembre 2017,
-le remboursement d'un autre prêt de 20.000 € souscrit auprès de la Banque Populaire en mars 2015 par 48 échéances mensuelles de 476 € chacune jusqu'en février 2019.
Madame [S] vit avec sa fille [R] qui est en classe de 4ème. Elle pourvoit à ses dépenses courantes ainsi que scolaires, extra-scolaires et de loisirs. Madame [S] produit plusieurs factures datant de 2016/2017 les justifiant.
Les charges fixes justifiées de Monsieur [K] comprennent outre ses dépenses courantes d'entretien, de nourriture et d'habillement :
-son impôt sur ses revenus qui n'est pas renseigné depuis 2009,
-la moitié des taxes foncières du domicile conjugal en 2016, soit 2.189€,
-le loyer d'une maison d'habitation qu'il a louée à [Localité 2], [Adresse 1], maison de six pièces principales sur 187 m² habitables, et un jardin de 650 m² ; le montant du loyer n'est pas communiqué comme n'est justifiée aucune des charges de son ménage.
Monsieur [K] indique lui même partager ses charges de leur ménage avec sa compagne qui travaille, mais sans communiquer le montant de ses revenus. Ils ont eu un fils né fin [Date naissance 5] qui a eu des problèmes de santé à sa naissance. Enfin [M], son fils aîné, vit avec eux. Il pourvoit à ses dépenses courantes ainsi que scolaires, extra-scolaires et de loisirs.
Il résulte des éléments sus décrits, qu'eu égard à la durée du mariage des époux, de leurs âges, du patrimoine prévisible des époux en capital après la liquidation du régime matrimonial, en défaveur de Madame [S], et de leurs droits prévisibles et de leur situation respective en matière de pension de retraite qui sont équivalentes, et non significatives pour l'instant, Madame [S] ayant travaillé pendant plusieurs années pour des salaires inférieurs à ceux de Monsieur [K] même si celui-ci a été pendant trois ans sans emploi, est établie la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux, disparité qui s'effectue au détriment de Madame [S].
Le paiement d'une prestation compensatoire en capital à son bénéfice lui permettra de compenser sa situation financière avec celle de Monsieur [K]. Il convient dans ces conditions de la fixer à 60.000 €, en ajoutant cette décision au jugement déféré.
Monsieur [K] est condamné à la payer à Madame [S].
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [K] les frais irrépétibles exposés dans la présente instance. Monsieur [K] est débouté de sa demande formée de ce chef.
Enfin, chaque partie conserve à sa charge ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après débats non publics, et en dernier ressort,
INFIRMANT partiellement le jugement du 15 décembre 2015,
DEBOUTE Madame [K] [S] de ses demandes relatives à l'attribution préférentielle du domicile conjugal situé [Adresse 2] à [Localité 2], et à l'indemnité d'occupation du domicile conjugal qu'elle doit depuis le 21 mars 2014,
DIT que Monsieur [J] [K] a payé la totalité de la construction du domicile conjugal par un apport en capital,
DIT que Monsieur [J] [K] détient une créance à l'encontre de Madame [K] [S] fixée par le notaire à 353.371 € pour une première tranche de travaux entre 2003 et 2004, et de 50.060,41 € pour une seconde tranche entre 2003 et 2007, et dont le montant sera déterminé selon l'évaluation retenue du domicile conjugal (terrain et maison), au jour le plus proche du partage et selon la règle du profit subsistant,
RENVOIE les parties à procéder amiablement aux opérations de compte, liquidation et partage de leur régime matrimonial devant le notaire de leur choix, notamment pour déterminer la valeur du domicile conjugal, le montant de la créance de Monsieur [J] [K] à l'encontre de Madame [K] [S], l'indemnité d'occupation due par Madame [K] [S] et son éventuel abattement,
Y AJOUTANT,
FIXE à la somme de 60.000 € la prestation compensatoire en capital due par Monsieur [J] [K] à Madame [K] [S] et au besoin l'y condamne,
CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions non contraires au présent arrêt.
DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,
DIT que chaque partie conserve à sa charge ses propres dépens.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Agnès TAPIN, Conseiller, en l'empêchement du Président - art. 456 du code de procédure civile - et par Madame Claudette DAULTIER, Greffier auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
LE GREFFIER LE CONSEILLER