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05/07/2017 | FRANCE | N°15/01095

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 05 juillet 2017, 15/01095


COUR D'APPEL DE VERSAILLES

Code nac : 80A 17e chambre

ARRÊT No

CONTRADICTOIRE

DU 14 JUIN 2017
R. G. No 15/ 01095
AFFAIRE :
Patricia X...épouse Y...
C/
SCA VEOLIA EAU-COMPAGNIE GENERALE DES EAUX
UNION GENERALE DES SYNDICATS FORCE OUVRIERE VE OLIA SECTEUR EAU
SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE SNC

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 janvier 2015 par le conseil de prud'hommes-formation de départage de NANTERRE Section : industrie No RG : 13/ 02713

Copies exécutoires délivrées à :

Patricia X...

épouse Y...
SCP PEROL RAYMOND KHANNA ET ASSOCIES
UNION GENERALE DES SYNDICATS FORCE OUVRIERE VEOLIA SECTEUR EAU

Copies ...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

Code nac : 80A 17e chambre

ARRÊT No

CONTRADICTOIRE

DU 14 JUIN 2017
R. G. No 15/ 01095
AFFAIRE :
Patricia X...épouse Y...
C/
SCA VEOLIA EAU-COMPAGNIE GENERALE DES EAUX
UNION GENERALE DES SYNDICATS FORCE OUVRIERE VE OLIA SECTEUR EAU
SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE SNC

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 janvier 2015 par le conseil de prud'hommes-formation de départage de NANTERRE Section : industrie No RG : 13/ 02713

Copies exécutoires délivrées à :

Patricia X...épouse Y...
SCP PEROL RAYMOND KHANNA ET ASSOCIES
UNION GENERALE DES SYNDICATS FORCE OUVRIERE VEOLIA SECTEUR EAU

Copies certifiées conformes délivrées à :

SCA VEOLIA EAU-COMPAGNIE GENERALE DES EAUX
SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE SNC
Christophe Z...

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ JUILLET DEUX MILLE DIX SEPT, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 14 juin 2017 puis prorogé au 05 juillet 2017 les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame Patricia X...épouse Y......

représentée par M. Christophe Z..., délégué syndical ouvrier, intervenant en vertu d'un pouvoir de mandat (article 18 des statuts du 22 juin 2005) et d'un pouvoir de représentation du 13 avril 2017
APPELANTE
****************

SCA VEOLIA EAU-COMPAGNIE GENERALE DES EAUX 21 rue de la Boétie 75008 PARIS

représentée par Me Philippe RAYMOND de la SCP PEROL RAYMOND KHANNA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Pauline LOISEAU, avocate au barreau de Paris, vestiaire : P0312
INTIMÉE
****************

UNION GENERALE DES SYNDICATS FORCE OUVRIERE VEOLIA SECTEUR EAU 30 rue Madeleine Vionnet 93300 AUBERVILLIERS

représentée par M. Christophe Z..., délégué syndical ouvrier, intervenant régulièrement

SNC VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE SNC 28 boulevard de Pesaro Immeuble le Vermont 92000 NANTERRE

comparante en la personne de Emanuela A..., chargée des relations sociales, intervenant en vertu d'un pouvoir de représentation du 18 avril 2017, assistée par Me Philippe RAYMOND de la SCP PEROL RAYMOND KHANNA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Pauline LOISEAU, avocate au barreau de Paris, vestiaire : P0312

PARTIES INTERVENANTES
****************
Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 avril 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monique CHAULET, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Clotilde MAUGENDRE, Président, Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller, Madame Monique CHAULET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU,
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre (section industrie), statuant en sa formation de départage, du 23 janvier 2015 qui a :- dit que Mme Patricia X...épouse Y...ne peut plus demander l'annulation de son licenciement, puisque cette procédure est devenue nulle et non avenue, ni solliciter des réparations en conséquence de cette rupture dont les effets ont été annulés,- dit qu'en revanche, le licenciement de Mme Y...présente un caractère discriminatoire,- condamné en conséquence la société Veolia Eau CGE à payer à Mme Y...les sommes suivantes :. 37 499, 79 euros au titre de l'indemnité compensatrice sur rappel de rémunérations du fait du caractère discriminatoire du licenciement,. 30 000 euros au titre du préjudice subi du fait de la discrimination,- dit que ces sommes porteraient intérêts au taux légal à compter du jugement,- débouté les parties du surplus de leurs demandes,- ordonné l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2 430, 90 euros,- condamné la SCA Veolia Eau-CGE aux dépens et à verser à Mme Y...et au syndicat UGS FO la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu la déclaration d'appel adressée au greffe le 24 février 2015 et les conclusions soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour Mme Patricia Y..., qui demande à la cour de :- débouter la SCA Veolia Eaux-CGE, de toutes ses demandes, fins et conclusions,- confirmer le jugement entrepris sur le caractère discriminatoire du licenciement,

à titre principal,- dire que son licenciement est nul et de nul effet et condamner la SCA Veolia Eaux-CGE à lui verser les sommes suivantes :. 14 064, 58 euros à titre d'indemnité compensatrice au titre des rappels des rémunérations dues pour la période comprise entre le 1er juin 2005 er le 13 avril 2010, outre les intérêts moratoires au taux légal à compter du 1er novembre 2007,. 176 240, 25 euros à titre d'indemnité compensatrice au titre des rappels des rémunérations dues de la date de l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat jusqu'à la prise d'acte judiciaire de son contrat de travail, du 15 décembre 2010 au 31 décembre 2016,. 17 624, 02 euros a titre d'indemnité compensatrice des congés payés,. 13 369, 95 euros au titre de l'indemnité de licenciement,. 87 512, 40 euros au titre de l'indemnité pour licenciement illicite,. 4 861, 80 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,. 486, 18 euros au titre des congés payés sur préavis,. 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral résultant du harcèlement moral et du comportement discriminatoire,. 29 170, 80 euros à titre d'indemnité liée au mandat en cours,. 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et frais éventuels d'exécution,- condamner la SCA Veolia Eaux-CGE à rembourser aux Assedic de six mois d'indemnisation,- condamner la SCA Veolia Eaux-CGE à verser à Mme X...les intérêts moratoires dus à compter de la date du dépôt de la requête auprès du conseil des prud'hommes de Nanterre, soit à compter du 1er février 2006, date de saisine de la juridiction,

Vu les conclusions soutenues oralement à l'audience par leur conseil, pour la SCA Veolia Eau-Compagnie Générale des Eaux (ci-après dénommée SCA Veolia Eau-CGE) et la SNC Veolia Eau d'Ile de France, qui demandent à la cour de :- dire que Mme Y...est mal fondée en son appel et la débouter de ses demandes,- dire que Mme Y...n'a fait l'objet d'aucune discrimination syndicale puisqu'au moment de la désignation litigieuse du 16 juillet 2003 elle refusait, tout comme son organisation syndicale, l'application des accords du 3 juin 2002,

en conséquence,- ordonner la restitution de la somme de 67 777, 59 euros qui lui a été réglée en exécution du jugement du 23 janvier 2015,- constater aussi que Mme Y...a été indemnisée, après l'annulation de la décision autorisant son licenciement jusqu'au 13 avril 2010, alors que cette indemnisation devait prendre fin au plus tard le 15 décembre 2009,- dire que Mme Y...a donc perçu pendant cette période de 4 mois, une somme de 9 723, 60 euros, à titre subsidiaire,- dire qu'il y a donc lieu de compenser cette somme de 9 723, 60 euros avec les sommes qui pourraient éventuellement lui être dues,- condamner Mme Y...et l'Union Générale des Syndicats Force Ouvrière à verser solidairement la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

SUR CE LA COUR,

Considérant que Mme Patricia Y...a été engagée, en qualité de secrétaire, par la société Compagnie Générale des Eaux, par contrat à durée indéterminée du 1er août 1992 ;
Qu'en dernier lieu, elle était secrétaire au Centre Opérationnel Banlieue Sud à Clamart et percevait une rémunération moyenne mensuelle brute de 2 430, 90 euros ;
Considérant que, le 3 juin 2002, les syndicats UNSA, CFDT, CFTC, CFE/ CGC et CGT ont signé deux accords collectifs l'un définissant le périmètre de l'UES Veolia Eau-Générale des Eaux et l'autre régissant le fonctionnement des institutions représentatives du personnel au sein de cette UES et notamment l'exercice du droit syndical ;
Que l'Union Générale des Syndicats FO (UGS FO), non signataire, a formé de nombreux recours contre ces accords ;
Que, par courrier du 16 juillet 2003, l'UGS FO a informé la société que prenant en considération qu'elle lui opposait l'accord du 3 juin 2002, elle désignait Mme Y...comme bénéficiaire d'un détachement permanent (1 520 heures annuelles) ;
Que, par arrêt du 26 mai 2004, la cour de cassation a confirmé l'existence de l'UES Veolia-Générale des Eaux et rejeté le recours formé par FO contre l'accord prévoyant les modalités d'exercice du droits syndical au sein de l'UES ;
Que, munie d'une autorisation du ministre de l'emploi du 24 mai 2005, la société a licencié Mme Y...pour faute grave par lettre recommandée du 1er juin 2005 ainsi libellée :
« (...) Depuis le 22 mars 2004, vous vous obstinez à vous absenter de votre poste de travail et à refuser d'exercer votre activité professionnelle pour laquelle vous êtes rémunérée et ce malgré les différentes décisions de justice intervenues depuis cette date.
Il vous est ainsi reproché vos nombreuses absences irrégulières et injustifiées dont la répétition caractérise une insubordination manifeste de votre part et un refus délibéré de remplir vos obligations contractuelles.
En effet, nous n'avons pu que constater que vous étiez systématiquement et régulièrement absente de votre poste de travail, absences que vous justifiez en invoquant un prétendu poste de détaché permanent au sein de votre organisation syndicale qui vous aurait permis de bénéficier d'un crédit annuel de 1 520 heures. (...) » ;
Que l'autorisation de licenciement a été confirmée par le tribunal administratif de Versailles le 20 décembre 2007, puis annulée par la cour administrative d'appel de Versailles par décision du 12 octobre 2009 confirmée par le Conseil d'Etat le 15 décembre 2010 ;
Que, par courrier du 13 novembre 2009, Mme Y...a sollicité sa réintégration ; qu'elle a ensuite, par courrier du 13 avril 2010, dans lequel elle fait longuement état de nombreux griefs, pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société ;
Considérant, sur la discrimination syndicale et le harcèlement moral, que Mme Y...fait valoir qu'en application de l'accord collectif du 3 juin 2002 elle a été régulièrement désignée par courrier du 16 juillet 2003 par le syndicat FO comme délégué syndical national permanent ;
Qu'elle affirme qu'elle a été victime de la répression syndicale que la société a menée contre le syndicat FO qui contestait la mise en place de l'UES ; qu'elle précise que, notamment, la société ne lui a pas payé toutes ses heures de délégation, a refusé que les représentants FO participent aux réunions de négociation de 2002, a privé le syndicat FO jusqu'au mois de juillet 2005 des moyens matériels de fonctionnement, a multiplié les procédures contre le syndicat FO, a fait bénéficier des délégués syndicaux d'autres organisations syndicales de compléments de rémunération et d'heures supplémentaires fictives, a de mauvaise foi tenté d'obtenir l'annulation de sa désignation, l'a menacée verbalement et par écrit en lui demandant d'abandonner immédiatement ses mandats syndicaux ;
Qu'elle se prévaut également des motifs et des conditions vexatoires de son licenciement et de la dégradation de son état de santé ;
Qu'elle précise avoir renoncé à sa demande de réintégration après avoir constaté les difficultés auxquelles Mme B..., également délégué syndical dont le licenciement avait été annulé, étaient confrontées ;
Que la société réplique que le syndicat FO s'est opposé avec virulence aux accords du 3 juin 2002 et que, compte tenu du contexte judiciaire la remise en cause qu'elle a faite de la validité de la désignation de Mme Y...comme « permanent syndical » n'était pas abusive ;
Qu'elle soutient que les accusations portées par Mme Y...contre les organisations syndicales, qui relaient des propos tenus dans les médias, sont infondées et ont fait l'objet de condamnation pour diffamation ;
Qu'elle affirme qu'elle a tenté par tous les moyens de maintenir le dialogue avec l'UGS FO, a payé intégralement le salaire de Mme Y...malgré ses absences injustifiées et a procédé à son licenciement dans des conditions normales après avoir consulté le conseil de discipline et obtenu l'autorisation de licenciement ;
Considérant, sur la discrimination syndicale, qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur à la date de la saisine du conseil de prud'hommes, « aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap. » ;

Qu'en application de l'article L. 1134-1, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels'il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Que Mme Y...n'établit pas que les représentants d'autres organisations syndicales aient bénéficié de rémunération et de paiement d'heures supplémentaires non fondées, qu'elle a été privée de salaire et, comme membre du syndicat FO, privée des moyens matériels d'assumer son mandat ;
Qu'en revanche, elle établit que :
- par requête du 2 décembre 2003 la SCA Veolia Eaux-CGE et les 45 sociétés du groupe, composant l'UES Générale des Eaux, ont saisi le tribunal d'instance de Puteaux aux fins d'obtenir la caducité des mandats syndicaux des délégués syndicaux détenus antérieurement à la reconnaissance de l'UES et l'annulation de la désignation de Mme B..., Mme Y...et M. C...comme délégués syndicaux FO de l'établissement Banlieue de Paris,
- le tribunal d'instance de Puteaux par jugement du 6 février 2004 s'est déclaré incompétent sur la première demande et a constaté l'irrecevabilité de la seconde, comme étant forclose,- par requête du 24 mai 2005, la SCA Veolia Eaux-CGE et les 45 sociétés du groupe, composant l'UES Générale des Eaux a saisi le tribunal d'instance de Paris 8ème, d'une contestation de la même désignation,

- par jugement du 18 mai 2006 le tribunal d'instance de Paris 8ème a constaté que la désignation faite par le syndicat Force Ouvrière le 16 juillet 2003 ne peut plus être remise en question,
- sa situation a été examinée au cours du conseil de discipline du 6 août 2004 et qu'à cette occasion l'employeur a maintenu qu'il lui reconnaissait un mandat de déléguée syndicale lui permettant de bénéficier de 20 heures de délégation par mois en précisant qu'il n'a pas été procédé à des retenues salariales malgré ses absences irrégulières répétées en dépit du rappel qui lui a été fait à plusieurs reprises de respecter son crédit d'heures de délégation,
- par courrier du 13 novembre 2003 l'inspecteur du travail a demandé à la société de rémunérer l'ensemble des heures de délégation prises par les délégués FO depuis la reconnaissance de l'UES,
- par décision du 21 décembre 2004 l'inspecteur du travail a refusé l'autorisation de licenciement sollicitée,
- par lettre du 1er juin 2005 elle a été licenciée pour faute grave pour absences injustifiées résultant de son refus de limiter son activité syndicale à 20 heures de délégation par mois ;
Que la persistance de la société à contester la qualité de délégué syndical permanent de Mme Y...malgré les décisions judiciaires qui ont toutes rejeté les recours formés contre sa désignation et à vouloir lui imposer la diminution de son activité syndicale à 20 heures de délégation laisse présumer l'existence d'une discrimination syndicale ;
Qu'il revient à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;
Que les termes du courrier de l'UGS FO du 16 juillet 2013 étaient clairs « nous vous informons des détachements permanents (1 520 heures annuelles par personne) des salariés suivants : Madame Sylvie B...(salariée CGE Banlieue de Paris), Madame Patricia Y...» ;
Que cette désignation du 16 juillet 2013 est concomitante au jugement du tribunal de grande instance de Paris du 16 juillet 2003 qui a validé les accords du 3 juin 2002 et dit que le syndicat FO devait désigner ses représentants dans le cadre de l'UES ;
Que si l'UGS FO, dans son courrier du 30 juillet 2003, a confirmé à l'employeur qu'elle contestait le niveau de désignation des délégués syndicaux et a, notamment, indiqué que le courrier du 16 juillet 2003 lié au détachement des salariés découlait de l'article 16 des statuts des fonctionnaires de la Ville de Paris, pour autant l'organisation syndicale n'a pas remis en cause la désignation de Mme Y...comme délégué permanent, donc à temps plein ;
Que la société ne peut se prévaloir des décisions judiciaires qui ont décidé que les mandats antérieurs aux accords du 3 juin 2002 étaient caducs, Mme Y...ayant été désignée postérieurement à ceux-ci ;
Que, finalement, elle ne justifie pas par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination sa persistance à contester le statut de délégué syndical permanent de Mme Y...qui l'a conduite à la licencier pour absences injustifiées ;

Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la discrimination syndicale est établie ;
Considérant, sur le harcèlement moral, qu'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. » ;
Qu'en application de l'article L. 1154-1, dans sa version applicable à l'espèce, interprété à la lumière de la directive no 2000/ 78/ CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Qu'à ce titre, Mme Y...se prévaut des mêmes faits que ceux examinés dans le cadre de la discrimination syndicale et de ce qu'elle a été placée en arrêt de maladie pendant plusieurs mois en 2006 et de mars 2008 au 23 septembre 2009 ;
Que Mme Y...n'établit pas avoir fait l'objet de pressions personnalisées, que le refus de la société de lui reconnaître le statut de délégué syndical permanent constitue un agissement unique et qu'il ne peut qu'être constaté qu'elle se prévaut d'arrêts de travail pour maladie postérieurs à son licenciement ;
Que Mme Y...n'établit donc pas l'existence de agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que le harcèlement moral n'est pas établi ;
Que le préjudice résultant de la discrimination syndicale subie par Mme Y...sera réparé par l'allocation d'une somme de 6 000 euros ;
Considérant, sur l'indemnité compensatrice au titre des rappels de rémunération de la date de l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat jusqu'à la prise d'acte de la rupture soit du 15 décembre 2010 au 31 décembre 2016, que Mme Y...sollicite le paiement des rémunérations de la date d'annulation de son licenciement jusqu'à sa prise d'acte de rupture, qu'elle fixe du 15 décembre 2010 au 31 décembre 2016 ;
Qu'elle ne communique pas de courrier de prise d'acte de rupture daté du 31 décembre 2016, mais un courrier du 13 avril 2010 par lequel elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail ; qu'elle est mal fondée à solliciter le paiement de ses salaires jusqu'au 31 décembre 2016 ; qu'elle sera déboutée de sa demande de ce chef ;
Considérant, sur les conséquences de la nullité du licenciement, qu'il résulte de l'article L. 2422-4 du code du travail, que, lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un mandat électif ou syndical a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision et à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration ; que ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire ;
Que tout d'abord, il convient de constater que Mme Y...en formant cette demande s'est placée au titre des conséquences de la nullité du licenciement sur le terrain de l'article L. 2422-4 et non sur celui de l'article L. 1132-1 qui prévoit comme sanction de la nullité du licenciement pour discrimination seulement le paiement d'une indemnité pour licenciement illicite au moins égale à celle prévue par l'article L. 1235-3 et des indemnités de rupture ;
Qu'il n'est pas discuté que Mme Y...a déjà perçu, pour la période du 1er juin 2005 au 13 avril 2010 la somme de 92 740, 38 euros ;
Que Mme Y...explique que la société lui doit 59 mois et 13 jours à 2 430, 90 euros soit une somme de 144 473, 10 euros, que la société lui a versé 92 908, 73 euros et que le jugement a mis à la charge de la société une indemnité complémentaire de 37 499, 79 euros, soit un total de 130 408, 52 euros ; qu'elle estime donc que la société reste redevable de la somme de 14 064, 85 euros ;
Que la société demande l'infirmation du jugement en ce qu'elle a été condamnée à payer à Mme Y...la somme de 37 499, 79 euros, en deniers pour quittance, pour ne pas avoir payé les cotisations patronales et salariales ;
Qu'à juste titre, la société a déduit du montant de l'indemnité de l'article L. 2422-4 les revenus professionnels perçus par Mme Y...durant cette période, dont les montants ne sont pas discutés ;
Qu'il résulte du bulletin de paie du 13 avril 2010 que les charges sociales ont été payées par l'employeur ;
Que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a alloué à Mme Y...la somme de 37 499, 79 euros à titre de « l'indemnité compensatrice sur rappel de rémunérations du fait du caractère discriminatoire du licenciement » ;
Que Mme Y...sera donc déboutée de sa demande d'indemnité compensatrice de rappel des rémunérations de 14 064, 58 euros ;
Que le salarié qui ne demande pas sa réintégration a également droit à une indemnité réparant l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement et au paiement des indemnités de rupture ;
Que la société soutient que la prise d'acte de la rupture du 13 avril 2010 devant s'analyser en une démission la salariée ne peut prétendre au paiement des indemnités de rupture ;
Qu'à la suite de la demande de réintégration de Mme Y..., la société l'a convoquée par lettre recommandée avec avis de réception du 11 décembre à un entretien prévu le 17 décembre 2009 ; que Mme Y...ne s'est pas présentée à cet entretien et a ensuite, par courrier du 17 décembre 2009, indiqué avoir reçu la convocation trop tard ; Qu'elle a été à nouveau convoquée par lettre recommandée avec avis de réception du 6 janvier 2010 à un entretien fixé au 15 janvier 2010 au cours duquel il lui a été proposé de reprendre son poste de travail au Centre Opérationnel Banlieue Sud à Clamart ;

Qu'aucune partie ne communique d'éléments sur la poursuite d'échanges relatifs à la réintégration entre le 15 janvier et le 13 avril 2010 ;
Que Mme Y...soutient qu'après la réintégration de sa collègue, Mme B..., elle a constaté que le comportement discriminatoire de l'employeur persistait, ce qu'elle ne pouvait ni ne voulait plus supporter et que de ce fait elle a renoncé à demander sa réintégration ;
Que de ces éléments il résulte que la réintégration de Mme Y...n'est pas intervenue, ce que d'ailleurs Mme Y...admet dans ses écritures en indiquant qu'elle a renoncé à sa demande de réintégration et en demandant la réparation de son préjudice sur le fondement des textes relatifs aux conséquences de la nullité lorsque le salarié ne demande pas sa réintégration ;
Qu'en conséquence, sa prise d'acte du 13 avril 2010 était sans objet et ne peut s'analyser que comme un abandon de sa demande de réintégration ;
Que la salariée sera donc déboutée de sa demande d'indemnité de 12 mois de salaire liée au mandat en cours à compter de son éviction de l'entreprise ;
Considérant que pour le salarié qui n'a pas demandé sa réintégration l'indemnisation du préjudice subi du fait de l'annulation du licenciement n'est pas exclusive du droit aux indemnités de rupture et, le cas échéant, à une indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Que si l'absence de cause réelle et sérieuse ne résulte pas, en soi, de l'annulation de l'autorisation de licenciement, la décision du juge administratif se prononçant sur les faits fautifs invoqués par l'employeur, qui a retenu que ces faits, soit n'étaient pas établis, soit ne justifiaient pas la mesure de licenciement, s'oppose à ce que le juge judiciaire, appréciant les mêmes faits, décide qu'ils constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement ;
Qu'en l'espèce, le Conseil d'Etat dans son arrêt du 15 décembre 2010 a confirmé l'arrêt de la cour d'appel administrative qui a estimé qu'aucune faute d'une gravité suffisante pour fonder un licenciement ne pouvait être retenue à l'encontre de Mme Y...en raison d'absences injustifiées à son poste de travail ;
Qu'il convient donc d'allouer à Mme Y...une indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Que Mme Y...qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ;
Qu'au regard de son âge au moment du licenciement, 42 ans, de son ancienneté de 13 ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle et de ce qu'il n'est pas discuté qu'elle a retrouvé un emploi sur lequel elle ne communique aucune information, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi la somme de 25 000 euros ;
Qu'il lui sera également alloué l'indemnité compensatrice de préavis d'un montant non discuté de 4 861, 80 euros et les congés payés afférents ;
Qu'au titre de l'indemnité légale de licenciement, il lui sera alloué la somme justement calculée par l'employeur de 8 866, 87 euros ; Considérant que la restitution des sommes versées en exécution de la décision infirmée est, sans qu'il y ait lieu de l'ordonner, la conséquence de l'arrêt infirmatif rendu ; que la société sera déboutée de cette demande ;

Considérant, sur la demande de compensation avec la somme de 9 723, 60 euros versée par la société au titre des salaires du 15 décembre 2009 au 13 avril 2010, que dès lors qu'au cours de cette période Mme Y...avait formé une demande de réintégration et que l'employeur ne justifie pas lui avoir enjoint de rejoindre un poste correspondant à celui antérieurement occupé, en application de l'article L. 2244-1 le salaire était dû ; que la société sera donc déboutée de sa demande de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme partiellement le jugement,
Statuant à nouveau,
Condamne la SCA Veolia Eaux-CGE à payer à Mme Patricia Y...les sommes suivantes :. 25 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,. 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,. 4 861, 80 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,. 486, 18 euros à titre de congés payés sur préavis,. 8 866, 87 euros à titre d'indemnité de licenciement, ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour de la réception par l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation,

Déboute Mme Y...de sa demande d'indemnité compensatrice au titre des rappels de rémunérations,
Déboute Mme Y...de sa demande « d'indemnité compensatrice sur rappel de rémunération du fait du caractère discriminatoire du licenciement »,
Confirme pour le surplus le jugement,
Y ajoutant,
Déboute Mme Y...de sa demande d'indemnité compensatrice due pour la période du 15 décembre 2010 au 31 décembre 2016,
Déboute les sociétés Veolia Eau-Compagnie Générale des Eaux et Véolia Eau d'Ile de France de leur demande de compensation,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société aux dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier.
Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 15/01095
Date de la décision : 05/07/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

Arrêt rendu le 5 juillet 2017 par la 17ème chambre de la cour d’appel de Versailles RG 15/01095 CONTRAT de travail – rupture – licenciement - salarié protégé – autorisation administrative- annulation par la juridiction administrative - salarié ne formulant pas sa réintégration – préjudice – réparation – étendue – indemnisation du préjudice du fait de l’annulation du licenciement – NON- droit aux indemnités de rupture – OUI – indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. OUI. La cour rappelle que pour le salarié protégé qui n’a pas demandé sa réintégration, l’indemnisation du préjudice subi du fait de l’annulation du licenciement n’est pas exclusive du droit aux indemnités de rupture et, le cas échéant, à une indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. La cour considère que l'absence de cause réelle et sérieuse ne résulte pas, en soi, de l'annulation de l'autorisation de licenciement, la décision du juge administratif se prononçant sur les faits fautifs invoqués par l'employeur ayant retenu que ces faits, soit n'étaient pas établis, soit ne justifiaient pas la mesure de licenciement, s'oppose à ce que le juge judiciaire, appréciant les mêmes faits, décide qu'ils constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement. En l’espèce, le juge administratif a dit et jugé qu’aucune faute d’une gravité suffisante pour fonder un licenciement ne pouvait être retenue à l’encontre de l’appelante en raison d’absences injustifiées à son poste de travail. La cour alloue ainsi à l’appelante une indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2017-07-05;15.01095 ?
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