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10/05/2017 | FRANCE | N°14/02219

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 10 mai 2017, 14/02219


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80B



17e chambre





ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE



DU 10 MAI 2017



R.G. N° 14/02219



AFFAIRE :



[L] [X]



C/



SARLAU FORDEF









Décision déférée à la cour : jugement rendu le 09 avril 2014 par le conseil de prud'hommes - formation paritaire de CHARTRES

Section : Activités diverses

N° RG : 13/00865


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Copies exécutoires délivrées à :



SCP SOUCHON CATTE LOUIS ET ASSOCIÉS



Me Laurent RIQUELME







Copies certifiées conformes délivrées à :



[L] [X]



SARLAU FORDEF









le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







LE DIX MAI DEUX MILLE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80B

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 MAI 2017

R.G. N° 14/02219

AFFAIRE :

[L] [X]

C/

SARLAU FORDEF

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 09 avril 2014 par le conseil de prud'hommes - formation paritaire de CHARTRES

Section : Activités diverses

N° RG : 13/00865

Copies exécutoires délivrées à :

SCP SOUCHON CATTE LOUIS ET ASSOCIÉS

Me Laurent RIQUELME

Copies certifiées conformes délivrées à :

[L] [X]

SARLAU FORDEF

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX MAI DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [L] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Philippe SOUCHON de la SCP SOUCHON CATTE LOUIS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000061

APPELANTE

****************

SARLAU FORDEF

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Laurent RIQUELME, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Emilie Bouquet, avocate au barreau de Paris, vestiaire : D0295

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 février 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monique CHAULET, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,

Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,

Madame Monique CHAULET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU,

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Chartres (section activités diverses) du 9 avril 2014 qui a :

- dit que le licenciement de Mme [X] par la société Fordef n'est pas abusif,

- débouté Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et de remise de documents sociaux,

- débouté Mme [X] de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

- débouté Mme [X] de sa demande d'indemnité de préavis et congés payés sur préavis,

- débouté Mme [X] de sa demande de remboursement de frais,

- débouté Mme [X] et la société Fordef de leur demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [X] aux entiers dépens,

Vu la déclaration d'appel adressée au greffe le 30 avril 2014, et les conclusions soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour Mme [X], qui demande à la cour de :

- la recevoir en son appel,

- la dire recevable et bien fondée,

- infirmer la décision entreprise,

- condamner la SARLAU Fordef à lui payer les sommes suivantes :

. 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

. 991,69 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

. 1 983,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 198,33 euros au titre des congés payés sur préavis,

. 15,90 euros au titre des frais non-payés,

- dire que les sommes relatives aux salaires et accessoires de salaires porteront intérêts de droit à compter de l'introduction de la demande,

- ordonner la remise de documents sociaux conformes à la décision à rendre, tant en ce qui concerne l'attestation Pôle emploi que le préavis impayé, la rectification du certificat de travail avec préavis et la remise des bulletins de salaire afférents, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

- condamner la SARLAU Fordef à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SARLAU Fordef en tous les dépens, en ceux compris les 35 euros correspondant au droit de procédure dû à l'Etat,

Vu les conclusions déposées au greffe et soutenues oralement à l'audience par son conseil, pour la SARLAU Fordef, qui demande de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- débouter Mme [X] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [X] à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [X] aux éventuels dépens,

SUR CE LA COUR,

Considérant que Mme [L] [X] a été engagée par la Croix Rouge Française en vertu d'un contrat à durée déterminée du 1er juin 2004 en qualité d'initiateur aux premiers secours, puis en vertu d'un contrat à durée indéterminée intermittent à compter du 1er décembre 2005 en qualité d'employée à la vie associative dans le centre départemental de formation professionnelle d'Indre et Loire ;

Que son contrat de travail a été transféré à la SARLAU Fordef à compter du 1er janvier 2013 par suite de l'attribution à cette société de deux lots d'un marché public précédemment attribués à la Croix Rouge Française relatifs à la réalisation d'action d'initiation aux alertes, aux premiers secours et au défibrillateur externe automatisé (DEA) destinés aux jeunes administrés de France métropolitaine convoqués lors de la journée défense et citoyenneté ;

Que le 11 janvier 2013, la SARLAU Fordef a informé Mme [X] de ce qu'elle entendait dénoncer les usages qui existaient au sein de la Croix Rouge Française et ce aux termes d'un délai de prévenance de deux mois et que le 17 janvier elle a notifié à la salariée une proposition de modification de son contrat de travail pour motif économique relative à la durée du travail, sa rémunération et ses lieux d'intervention ;

Que le 24 janvier 2013 Mme [X] a exprimé son refus d'accepter la modification proposée ;

Que la salariée a été convoquée le 13 mars 2013 à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 5 avril 2013 auquel elle ne s'est pas présentée et qu'elle a été licenciée pour motif économique par courrier du 17 avril 2013 libellé comme suit :

« (') nous vous informons que nous sommes contraints de vous notifier une mesure de licenciement pour motif économique en raison du refus de de la modification de votre contrat de travail qui vous a été précédemment proposée, et ce, au motif que nous sommes placés dans l'obligation de procéder à une réorganisation destinée à sauvegarder la compétitivité.

(')

En effet, notre activité est exclusivement dédiée à l'exécution d'action d'initiation aux alertes, aux premiers secours et au défibrillateur externe automatisé (DEA) destinés aux jeunes administrés de France métropolitaine convoqués lors de la journée défense et citoyenneté (JDC).

Cette activité découle de l'exécution de marchés publics qui supposent une mise en concurrence des différents acteurs économiques nationale et nous avons été sélectionnés pour satisfaire les exigences de l'acheteur public. Ces exigences sont telles que les différentes entreprises privées proposant des formations non qualifiantes d'initiation aux alertes, aux premiers secours et au défibrillateur externe automatisé (DEA) rivalisent d'arguments pour garantir la meilleure prestation au moindre prix, et ce, au bénéfice de l'économie dans l'utilisation des deniers publics.

C'est dans ce contexte que nous avons été contraints d'adapter notre modèle économique à un prix de 60 Euros par action en tenant compte des paramètres relatifs à la pression concurrentielle, à laquelle nous sommes nécessairement subordonnés, et entraînant un financement public guidé par le souci de sélectionner les acteurs économiques les plus compétitifs. Il est donc devenu impératif de mettre en 'uvre une réorganisation qui nous permet de faire face aux menaces qui pèsent sur notre capacité à exister en qualité d'acteur économique dans ce secteur d'activité et ce sont les raisons pour lesquelles nous avons précédemment proposé, en application de l'article L.1222'6 du code du travail, une modification du contrat de travail portant sur votre nombre d'heures mensuelles, votre rémunération brute, vos jours et sites d'intervention. Dans le cadre du délai légal d'un mois qui vous a été notifié pour faire connaître votre position, vous avez manifesté votre refus d'adhérer à cette modification de votre contrat de travail, et ce, par lettre recommandée AR en date du 24 janvier 2013.

Compte-tenu de ce refus de votre part et de notre incapacité économique à demeurer compétitifs dans ce secteur d'activité à défaut de mise en 'uvre des modifications susvisés, nous sommes malheureusement contraints d'envisager de prononcer la rupture de votre contrat de travail.(...) » ;

Considérant, sur la rupture, que la salariée soutient d'abord que le contrat de travail a été rompu par le mail du 11 mars 2013 ;

Que dès lors que, si ce mail lui demande de ne plus intervenir dans le cadre de formation, il précise que sa rémunération sera maintenue, il ne constitue pas un acte exprimant la volonté de rompre le contrat de travail ; qu'elle ne peut se prévaloir de ce chef ni d'une rupture abusive ni d'une irrégularité de procédure ;

Considérant qu'en application de l'article L. 1233-3 du code du travail, « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques », à une réorganisation de l'entreprise ou, dans certaines conditions, à une cessation d'activité ;

Qu'aux termes de l'article L. 1232-6 du même code, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement ; que s'agissant d'un licenciement pour motif économique, il doit en conséquence énoncer la cause économique du licenciement et ses conséquences sur l'emploi du salarié concerné ;

Que Mme [X] soutient que les difficultés doivent être appréciées au niveau du groupe Sofis et non pas de la société et que la SARLAU Fordef a fait du « dumping » social pour prendre le marché Croix-Rouge, ce qui ne justifie pas le licenciement économique des salariés repris, la Croix-Rouge étant payée sur la base de 120,00 euros et la SARLAU Fordef ayant soumissionné sur appel d'offre à 60 euros pour être certaine de prendre le marché ;

Qu'en l'espèce, la SARLAU Fordef soutient que le motif du licenciement économique de Mme [X] est la nécessité d'apporter des modifications au contrat de travail de Mme [X] dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise afin de faire face aux menaces qui pèsent sur sa capacité à exister en qualité d'acteur économique dans ce secteur d'activité, modifications refusées par la salariée ;

Qu'il appartient à l'entreprise Fordef d'apporter la preuve d'une menace sur sa compétitivité de nature à justifier les mesures de réorganisation alléguées ;

Que la SARLAU Fordef s'est vue transférer à compter du 1er janvier 2013 le contrat de travail d'un certain nombre de salariés, dont celui de Mme [X], dans le cadre de l'attribution d'un marché public pour lequel elle s'était portée candidate au prix de 60 euros par action, au lieu de 120 euros qui était le prix auquel a soumissionné la Croix Rouge Française qui a ainsi perdu ce marché, tenant compte de la pression concurrentielle ainsi qu'elle le précise dans la lettre de licenciement ;

Que le budget prévisionnel établi par la SARLAU Fordef pour 2013, intégrant la totalité des coûts salariaux, fait apparaître un bénéfice de 79 238 euros ;

Qu'en conséquence elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne peut maintenir les emplois aux mêmes conditions alors qu'elle ne produit aucun élément chiffré de nature à établir que cette poursuite des contrats de travail, qui lui incombe dans le cadre de ce transfert d'activité, ce qui n'est pas contesté, fait peser une menace sur sa compétitivité, peu important en l'espèce qu'elle soutienne ne pas avoir eu une connaissance précise des contrats qu'elle allait devoir reprendre dans le cadre du transfert d'activité ;

Qu'il appartient à la SARLAU Fordef de justifier de conditions de nature à caractériser une menace sur sa compétitivité, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'en conséquence il convient de dire, infirmant le jugement, que le licenciement de Mme [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'infirmer le jugement de ce chef ;

Considérant, sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que la SARLAU Fordef précise qu'elle disposait d'un effectif inférieur à onze salariés en équivalent temps plein au moment du licenciement, ce qui n'est pas contesté par Mme [X] ;

Que la salariée qui, à la date du licenciement, était employée dans une entreprise occupant moins de onze salariés, a droit, en application de l'article L.1235-5 du code du travail, à une indemnité réparant son préjudice ;

Qu'au regard de son âge au moment du licenciement, 40 ans, de son ancienneté d'environ 8 ans et 10 mois dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle et de ce qu'elle ne communique aucun élément sur sa situation professionnelle depuis la rupture mais ne conteste pas avoir bénéficié d'un contrat de sécurisation professionnelle dans le cadre du licenciement et avoir été indemnisée par Pôle emploi jusqu'en juillet 2016, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi, la somme de 8 000 euros ;

Que la SARLAU Fordef sera également condamnée à verser à la salariée une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents dont elle a été indûment privée et dont les montants ne sont pas critiqués ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;

Considérant, sur la demande de frais non-payés, que Mme [X] ne justifie pas des frais engagés ; que sa demande sera donc rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;

Considérant que sans qu'il soit besoin d'assortir cette mesure d'une astreinte il convient d'ordonner à la SARLAU Fordef de remettre à Mme [X] une attestation Pôle emploi, un bulletin de salaire récapitulatif et un certificat de travail rectifiés,

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Mme [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SARLAU Fordef à payer à Mme [X] les sommes suivantes :

. 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

. 1 983,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 198,33 euros au titre des congés payés sur préavis,

Ordonne à la SARLAU Fordef de remettre à Mme [X] une attestation Pôle emploi, un bulletin de salaire récapitulatif et un certificat de travail rectifiés,

Confirme pour le surplus le jugement,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Condamne la SARLAU Fordef à payer à Mme [X] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARLAU Fordef aux dépens incluant les 35 euros correspondant au droit de procédure dû à l'Etat,

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l'avis donné aux parties à l'issue des débats en application de l'article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/02219
Date de la décision : 10/05/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°14/02219 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-10;14.02219 ?
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